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10/03/2023 | FRANCE | N°21MA04743

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 10 mars 2023, 21MA04743


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler son évaluation annuelle du 14 octobre 2020 au titre de l'année 2019 en qualité d'agent de maitrise principal au sein du département du Var.

Par un jugement n°2003548 du 20 octobre 2021, le tribunal a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 décembre 2021, M. A... C..., représenté par Me Varron Charrier, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'a

nnuler son évaluation annuelle du 14 octobre 2020 au titre de l'année 2019 ;

3°) d'enjoindre au département ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler son évaluation annuelle du 14 octobre 2020 au titre de l'année 2019 en qualité d'agent de maitrise principal au sein du département du Var.

Par un jugement n°2003548 du 20 octobre 2021, le tribunal a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 décembre 2021, M. A... C..., représenté par Me Varron Charrier, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler son évaluation annuelle du 14 octobre 2020 au titre de l'année 2019 ;

3°) d'enjoindre au département du Var de procéder à la révision du compte-rendu d'entretien professionnel annuel dans le délai de 15 jours courant à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 par jour de retard ;

4°) de condamner le département du Var à lui payer la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le compte rendu n'est pas visé par l'autorité territoriale, en méconnaissance de l'article 6.5° du décret du 16 décembre 2014 ;

- les thèmes devant être abordés tels que prévus par l'article 3 du décret du 16 décembre 2014 ne l'ont pas été, en particulier s'agissant des résultats professionnels de l'agent, des objectifs et des perspectives d'évolution ;

- l'évaluation est entachée d'erreur de faits quant à l'insuffisante rapidité d'exécution qui lui est reprochée, dès lors que ses travaux ont été partiellement effacés, l'obligeant

à les reprendre ;

- l'évaluation est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'au cours de l'année 2019, le requérant a vu, à plusieurs reprises, son travail disparaitre de son ordinateur professionnel et que malgré l'aide du service informatique, il a été dans l'impossibilité de récupérer ses travaux ; il ne peut lui être reproché la qualité d'un travail sur les autorisations d'urbanisme que sa fiche de poste ne lui confie pas ; le grief tiré de la rapidité insuffisante de son travail n'est pas fondé ; s'il lui est reproché un " taux de réalisation inférieur par rapport à celui du service ", jamais aucun calendrier n'a été porté à sa connaissance, de sorte qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir été rapide et de ne pas avoir respecté des délais ; si le département précisait en outre que " des réunions régulières permettent de faire un point sur l'avancée des dossiers et les difficultés rencontrées dans l'exécution des tâches à mener ", le requérant n'a jamais été convoqué à ce type de réunion et en toute hypothèse, aucun délai ou calendrier n'a jamais été porté à sa connaissance ;

- la décision attaquée constitue une sanction déguisée, sans que la procédure disciplinaire ne soit respectée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mai 2022, le département du Var, représenté par Me Barbeau-Bournoville, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. C... à lui payer la somme de 2 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens invoqués par M. C... ne sont pas fondés.

Le 24 février 2023, un mémoire non communiqué a été enregistré pour M. C....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°2014-1526 du 16 décembre 2014 relatif à l'appréciation de la valeur

professionnelle des fonctionnaires territoriaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la cour a désigné M. Taormina, président-assesseur de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R.222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... D...,

- les conclusions de M. Allan Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Germe, représentant le département du Var.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., agent de maitrise principal au sein des services du département du Var, affecté sur l'emploi de dessinateur CAO/DAO à la direction des bâtiments et équipements durables, a demandé à l'autorité territoriale de réviser son évaluation annuelle du 14 octobre 2020 au titre de l'année 2019, qu'il estime erronée. Par un courrier du 17 novembre 2020, le président du conseil départemental du Var a rejeté cette demande. Ayant demandé l'annulation de son évaluation et ayant été regardé comme ayant demandé également celle de la décision prise le 17 novembre 2020, M. C... relève appel du jugement n°2003548 du 20 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa requête.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 17 de la loi du 13 juillet 1983 : " Les notes et appréciations générales attribuées aux fonctionnaires et exprimant leur valeur professionnelle leur sont communiquées. / Les statuts particuliers peuvent ne pas prévoir de système de notation. ". Aux termes de l'article 76 de la loi du 26 janvier 1984 : " L'appréciation, par l'autorité territoriale, de la valeur professionnelle des fonctionnaires se fonde sur un entretien professionnel annuel conduit par le supérieur hiérarchique direct qui donne lieu à l'établissement d'un compte rendu. (...) Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. ". Aux termes de l'article 3 du décret du 16 décembre 2014 :

" L'entretien professionnel porte principalement sur : 1° Les résultats professionnels obtenus par le fonctionnaire eu égard aux objectifs qui lui ont été assignés et aux conditions d'organisation et de fonctionnement du service dont il relève ; 2° Les objectifs assignés au fonctionnaire pour l'année à venir et les perspectives d'amélioration de ses résultats professionnels, compte tenu, le cas échéant, des évolutions prévisibles en matière d'organisation et de fonctionnement du service ; 3° La manière de servir du fonctionnaire ; 4° Les acquis de son expérience professionnelle ; 5° Le cas échéant, ses capacités d'encadrement ; 6° Les besoins de formation du fonctionnaire eu égard, notamment, aux missions qui lui sont imparties, aux compétences qu'il doit acquérir et à son projet professionnel ainsi que l'accomplissement de ses formations obligatoires ; 7° Les perspectives d'évolution professionnelle du fonctionnaire en termes de carrière et de mobilité. (...) ; L'agent est invité à formuler, au cours de cet entretien, ses observations et propositions sur l'évolution du poste et le fonctionnement du service. ". Aux termes de son article 6 : " Les modalités d'organisation de l'entretien professionnel sont les suivantes :1° Le fonctionnaire est convoqué huit jours au moins avant la date de l'entretien par le supérieur hiérarchique direct;2° La convocation est accompagnée de la fiche de poste de l'intéressé et d'un exemplaire de la fiche d'entretien professionnel servant de base au compte rendu ;3° Le compte rendu porte sur les thèmes prévus à l'article 3 ainsi que sur l'ensemble des autres thèmes qui, le cas échéant, ont été abordés au cours de l'entretien ;4° Dans un délai maximum de quinze jours, le compte rendu est notifié au fonctionnaire qui, le cas échéant, le complète par ses observations sur la conduite de l'entretien ou les différents sujets sur lesquels il a porté, le signe pour attester qu'il en a pris connaissance et le renvoie à son supérieur hiérarchique direct ;5° Le compte rendu, complété, le cas échéant, des observations de l'agent, est visé par l'autorité territoriale ;6° Le compte rendu est versé au dossier du fonctionnaire par l'autorité territoriale et communiqué à l'agent ;7° Lorsque la collectivité territoriale ou l'établissement public local est affilié à un centre de gestion, une copie en est communiquée à celui-ci, dans les délais compatibles avec l'organisation des commissions administratives paritaires. ". Aux termes de son article 7 : " I. - L'autorité territoriale peut être saisie par le fonctionnaire d'une demande de révision du compte rendu de l'entretien professionnel. Cette demande de révision est exercée dans un délai de quinze jours francs suivant la notification au fonctionnaire du compte rendu de l'entretien. L'autorité territoriale notifie sa réponse dans un délai de quinze jours à compter de la date de réception de la demande de révision du compte rendu de l'entretien professionnel. (...) ".

3. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.

4. Il ressort des pièces du dossier que, si l'autorité territoriale doit viser le compte rendu annuel d'évaluation professionnelle des agents de la collectivité et que ce visa manque sur le compte rendu d'évaluation professionnelle de M. C... consécutif à l'entretien professionnel du 14 octobre 2020, l'autorité territoriale a manifesté sa connaissance dudit compte rendu en refusant par courrier du 17 novembre 2020, de faire droit à la demande de révision présentée par l'intéressé. Dès lors, le défaut de visa par l'autorité territoriale n'ayant pas été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise, ni privé l'intéressé d'une garantie, il n'est, par suite, pas de nature à rendre irrégulière la procédure d'évaluation de M. C... au titre de l'année en cause.

5. S'agissant des thèmes de l'évaluation annuelle prévus par l'article 3 du décret du 16 décembre 2014, et d'abord, concernant les résultats professionnels obtenus par le fonctionnaire eu égard aux objectifs qui lui ont été assignés, le compte rendu d'entretien annuel en litige fait bien apparaitre les objectifs de l'année " N-1 " ainsi qu'une appréciation selon laquelle ils ont été " atteint " ou " partiellement atteint ". Il résulte de ces éléments que M. C... s'est vu assigner trois principaux objectifs et que son entretien a bien porté sur les résultats obtenus dans leur poursuite, au regard des indicateurs associés. Dans la mesure où l'entretien s'est tenu en 2020, ce sont bien les objectifs de l'année 2019 qui font l'objet de cette appréciation. Si M. C... estime que la mention " tableau des demandes " figurant au document précité ne permettrait pas de donner d'indication sur les résultats obtenus, cette mention correspond aux indicateurs ayant servi à l'examen des résultats obtenus pour les trois objectifs. Les résultats obtenus apparaissent quant à eux dans les colonnes " réalisation " et " analyse des résultats ". En outre, concernant les objectifs assignés au fonctionnaire pour l'année à venir, les perspectives d'amélioration et les évolutions prévisibles en matière d'organisation et de fonctionnement du service, c'est à tort que M. C... soutient qu'aucun objectif ne lui aurait été assigné pour l'année 2020, ces objectifs ayant été évoqués et figurant au compte rendu d'entretien produit par lui, sous l'intitulé " Objectifs année N " c'est-à-dire 2020. Ces objectifs sont sensiblement les mêmes que ceux de l'année précédente, puisqu'il s'agit des principales missions qui lui ont été assignées. L'encart " acquis professionnels " fait mention de ce que les capacités techniques de l'appelant peuvent être améliorées et du besoin correspondant en formation, et l'appréciation portée sur les résultats de l'année 2019 font expressément référence au fait que pour s'améliorer, il devra être plus assidu et avoir un taux de réalisation plus élevé. Le compte rendu fait mention des besoins en formation de l'agent, en comportant la mention de trois formations avec avis favorable du responsable. Enfin, concernant les perspectives d'avenir de M. C..., celui-ci n'est pas fondé à se prévaloir de l'absence de leur évocation lors de son entretien du 14 octobre 2020, le compte rendu fait clairement apparaitre que ce dernier a pu faire valoir son souhait de passer un concours ainsi qu'une demande de mobilité afin de devenir responsable d'une cellule dans le domaine technique. Dès lors, M. C... n'est pas fondé à soutenir en appel comme devant les premiers juges, que les trois thèmes de l'évaluation annuelle prévus par l'article 3 du décret du 16 décembre 2014 qu'il estime non évoqués ne l'auraient pas été. Par suite, le moyen formulé à ce titre qui manque en fait doit être écarté.

6. Si M. C... soutient qu'en tant que dessinateur, il n'a aucune compétence ni mission d'urbanisme, sa fiche de poste fait apparaitre, parmi les activités à lui confiées, celle tendant à " élaborer des dossiers de permis de construire, des déclarations de projets de travaux, des certificats d'urbanisme ". Ainsi ressort-il clairement de cette fiche de poste que la gestion, non seulement des documents d'urbanisme, mais également des autorisations d'urbanisme, lui était confiée. Si le 12 mars 2019, M. C... a pu faire observer à sa hiérarchie qu'il avait rencontré des difficultés techniques et notamment la disparition de fichier, ce courrier rédigé au début de l'année 2019 concerne des problèmes datant de l'année précédente puisque l'intéressé fait mention d'une période qu'il date des mois de juillet et de septembre 2018, et non la période d'évaluation annuelle en cause. Au demeurant, il n'est pas utilement contesté par l'appelant que les modifications et suppressions de documents dont il s'est plaint, s'inscrivent dans le cadre d'un travail collaboratif et qu'il n'est pas établi d'intrusion dans son poste de travail, alors au demeurant qu'il lui appartenait de faire des sauvegardes de son travail. Concernant le manque d'assiduité et de rendement reproché à M. C..., nonobstant l'absence de délais particuliers d'exécution impartis, le service est légitimement en droit d'attendre des agents qu'ils les exécutent dans un délai raisonnable. Cette appréciation n'est pas utilement contestée par M. C... qui n'apporte aucun élément de nature à démontrer que les tâches qui lui ont été confiées seraient plus complexes que celles assignées aux autres membres du service. Au demeurant, dans le cadre de l'entretien annuel pour l'année 2018 dont le compte rendu lui a été notifié le 8 mars 2019, il avait déjà été reproché à M. C... un " manque de rapidité d'exécution " ainsi qu'un manque " de vision globale et de rapidité d'exécution dans certaines des missions qui lui sont confiées ". Dès lors, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'exécution de sa mission par M. C... ait été significativement et anormalement entravée, ni qu'en estimant qu'il était insuffisamment assidu et trop lent, l'autorité territoriale ait entaché son évaluation d'erreur manifeste d'appréciation.

7. Une mesure revêt le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée lorsque, tout à la fois, il en résulte une dégradation de la situation professionnelle de l'agent concerné et que la nature des faits qui ont justifié la mesure et l'intention poursuivie par l'administration révèlent une volonté de sanctionner cet agent. Si M. C... a été convoqué le 21 septembre 2020, soit quelques jours avant son entretien professionnel, à une audition dans le cadre d'une procédure disciplinaire qui n'a pas été menée jusqu'à son terme, il ne ressort pas du dossier que l'évaluation annuelle du 14 octobre 2020 au titre de l'année 2019 constitue une sanction déguisée.

8. Compte tenu de tout ce qui précède, M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa requête. Par suite, ses conclusions formulées à fin d'injonction et au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées, ensemble, dans les circonstances de l'espèce, celles formulées à ce titre par le département du Var. Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions formulées à ce titre par le département du Var doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions formulées par le département du Var en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au département du Var.

Délibéré après l'audience du 2 mars 2023, où siégeaient :

- M. Taormina, président-assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R.222-26 du code de justice administrative,

- M. Mahmouti, premier conseiller,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 mars 2023.

N° 21MA04743 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA04743
Date de la décision : 10/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-06-01 Fonctionnaires et agents publics. - Notation et avancement. - Notation.


Composition du Tribunal
Président : M. TAORMINA
Rapporteur ?: M. Gilles TAORMINA
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : AARPI CLAMENCE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-03-10;21ma04743 ?
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