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10/03/2023 | FRANCE | N°21MA02038

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 10 mars 2023, 21MA02038


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 6 décembre 2018 par laquelle l'assistance publique - hôpitaux de Marseille (AP-HM) a retiré la décision du 3 septembre 2018 reconnaissant l'imputabilité au service de l'accident survenu le 5 mai 2018, confirmée par la décision portant rejet de son recours gracieux du 4 janvier 2019, d'annuler la décision du 5 mars 2019 par laquelle l'AP-HM n'a pas reconnu imputable au service ledit accident et, enfin, d'en

joindre au directeur général de l'AP-HM de prendre une nouvelle décision ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 6 décembre 2018 par laquelle l'assistance publique - hôpitaux de Marseille (AP-HM) a retiré la décision du 3 septembre 2018 reconnaissant l'imputabilité au service de l'accident survenu le 5 mai 2018, confirmée par la décision portant rejet de son recours gracieux du 4 janvier 2019, d'annuler la décision du 5 mars 2019 par laquelle l'AP-HM n'a pas reconnu imputable au service ledit accident et, enfin, d'enjoindre au directeur général de l'AP-HM de prendre une nouvelle décision portant reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident survenu le 5 mai 2018, et transformant les congés de maladie ordinaire en congés résultant d'un accident de service à compter de cette date, et ce, dans un délai de deux mois à compter du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1904000 du 29 mars 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 mai 2021 et le 16 février 2022, Mme B... épouse D..., représentée par Me Leturcq de la SELARL Noûs Avocats, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du 29 mars 2021 ;

2°) d'annuler les décisions du 6 décembre 2018, du 5 mars 2019 et, par voie de conséquence, celle du 9 avril 2019 ;

3°) d'enjoindre à l'AP-HM de lui rembourser les sommes retenues au titre des décisions dont elle demande l'annulation, de la replacer dans une situation administrative conforme à l'accident du travail subi et de reconstituer sa carrière conformément à cette situation ;

4°) de mettre à la charge de l'AP-HM le versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- ses conclusions dirigées contre la décision du 9 avril 2019 sont recevables dès lors, d'une part, qu'elles ne constituent pas une conclusion nouvelle et, d'autre part, qu'elle n'avait pas pu efficacement contester cette décision en première instance du fait du décès de son avocate survenu en cours d'instance ;

- il appartient à l'AP-HM de justifier que l'auteur des décisions du 6 décembre 2018 et du 5 mars 2019 est compétent ;

- les décisions du 6 décembre 2018 et du 5 mars 2019 sont insuffisamment motivées ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'accident qu'elle a subi le 5 mai 2018 n'est pas imputable au service ;

- la décision du 9 avril 2019 doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation des décisions du 6 décembre 2018 et du 5 mars 2019.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 29 octobre 2021 et le 28 mars 2022, l'AP-HM, représentée par Me Pichon, de la Selarl Cornet-Vincent-Segurel, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la requérante de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions présentées contre la décision du 9 avril 2019, nouvelles en appel, sont irrecevables ;

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction a été fixée au 13 mai 2022, par application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du même jour.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la cour a désigné M. Taormina, président-assesseur de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Ravestein, représentant Mme B... épouse D..., et de Me Migault, représentant l'AP-HM.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... épouse D..., qui exerce les fonctions d'aide-soignante au sein de la maternité de l'hôpital Nord de Marseille, lequel relève de l'AP-HM, a été victime d'une chute survenue le 5 mai 2018, pendant ses horaires de travail, dans le parking en sous-sol du pavillon Méditerranée de l'établissement. Si, par une décision du 3 septembre 2018, l'AP-HM a reconnu cet accident imputable au service, elle a toutefois procédé au retrait de cet acte par une décision du 6 décembre 2018 et saisi pour avis la commission de réforme départementale hospitalière. Puis, tandis que Mme B... épouse D... a formé un recours gracieux à l'encontre de la décision de retrait précitée dès le 4 janvier 2019, l'AP-HM l'a informée, par une décision du 5 mars 2019, notifiée le 13 mars suivant, que l'accident du 5 mai 2018 n'était pas reconnu imputable au service. Par un jugement du 29 mars 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté les conclusions de Mme B... épouse D... tendant à l'annulation des décisions des 6 décembre 2018, confirmée par la décision de rejet de son recours gracieux du 4 janvier 2019, et du 5 mars 2019. Mme B... relève appel de ce jugement et demande en outre l'annulation de la décision du 9 avril 2019 par laquelle le directeur de l'AP-HM a procédé à une retenue sur son salaire en conséquence de la requalification de son accident du travail en congé de maladie ordinaire.

Sur la fin de non-recevoir opposée en défense :

2. Les conclusions dirigées contre la décision du 9 avril 2019 ont été présentées pour la première fois en appel. Par suite, elles sont irrecevables, la circonstance invoquée par la requérante selon laquelle elle n'avait pas pu efficacement contester cette décision en première instance du fait du décès de son avocate survenu en cours d'instance étant sans influence à cet égard.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article 41 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...) ".

4. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet évènement du service, le caractère d'un accident de service.

5. Mme B... épouse D... soutient que, le samedi 5 mai 2018, alors qu'elle était en service, elle a été alertée sur la gêne occasionnée par son véhicule qui était garé dans le sous-sol de l'Hôpital Nord et qu'en se rendant sur les lieux pour déplacer sa voiture, elle a alors chuté en glissant sur une flaque d'eau stagnante. Elle produit à cet effet sa déclaration d'accident du travail datée du 10 juillet 2018 et l'attestation établie le 20 juin 2018 par une aide-soignante, témoin des faits. Il ressort des pièces du dossier que, pour remettre en cause la réalité du motif invoqué par l'intéressée, la cadre de santé, bien qu'absente le jour des faits, a rédigé, le 11 septembre 2018, un nouveau rapport hiérarchique indiquant que le taux d'occupation du parking où s'est produit l'accident est habituellement faible le samedi après-midi de sorte que le véhicule de la requérante ne pouvait présenter une gêne au stationnement. L'AP-HM, après saisi la commission de réforme départementale hospitalière et alors que celle-ci a émis un avis favorable à la prise en charge de l'accident en cause, a pris les décisions contestées au vu de ce seul rapport. Il n'est cependant pas contesté que le parking est structurellement générateur de problèmes de gênes entre véhicules et qu'il est très fréquent que les agents de l'hôpital doivent se rendre dans le parking pour déplacer leur véhicule, si bien d'ailleurs qu'un protocole a été voté à ce sujet en comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). L'AP-HM, qui fonde ainsi son appréciation sur une simple hypothèse sans l'assortir de preuves matérielles, l'attestation de l'agent chargé de la sûreté qu'elle verse aux débats se bornant à cet égard à affirmer que le parking " est peu fréquenté le week-end ", ne remet ainsi pas sérieusement les pièces concordantes et suffisamment circonstanciées dont la requérante se prévaut. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que cet accident résulterait d'une faute personnelle de la requérante. Ainsi, eu égard aux circonstances de temps et de lieu dans lesquelles celui-ci s'est produit et en l'absence d'un fait de nature à détacher cet accident du service, l'accident dont a été victime Mme B... épouse D..., dont il n'est par ailleurs nullement établi qu'elle se soit abstenue d'informer son cadre de santé présent ce jour-là, revêt le caractère d'un accident de service. Dans ces conditions, l'AP-HM a commis une erreur d'appréciation en ne reconnaissant pas l'imputabilité au service de l'accident dont la requérante a été victime le 5 mai 2018.

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens qu'elle a soulevés, que Mme B... épouse D... est fondée à soutenir que la décision de l'AP-HM des 6 décembre 2018, confirmée par la décision de rejet de son recours gracieux du 4 janvier 2019, et la décision du 5 mars 2019, doivent toutes être annulées et, par suite, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Eu égard au motif d'annulation retenu aux points précédents, l'exécution de la présente décision implique nécessairement que l'AP-HM, ainsi que le demande la requérante, rembourse à celle-ci les sommes retenues au titre des décisions dont elle a obtenu l'annulation, la replace dans une situation administrative conforme à l'accident du travail subi et reconstitue sa carrière conformément à cette situation.

Sur les frais de procédure :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'AP-HM la somme de 2 000 euros à verser à la requérante au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B..., qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que l'AP-HM demande au titre des frais non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1904000 du 29 mars 2021 rendu par le tribunal administratif de Marseille, ensemble les décisions de l'AP-HM des 6 décembre 2018, 4 janvier 2019 et 5 mars 2019, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à l'AP-HM de rembourser à Mme B... épouse D... les sommes retenues au titre des décisions mentionnées à l'article 1er dont celle-ci a obtenu l'annulation, de la replacer dans une situation administrative conforme à l'accident du travail subi et de reconstituer sa carrière conformément à cette situation.

Article 3 : L'AP-HM versera à Mme B... épouse D... la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié Mme A... B... épouse D... et à l'assistance publique - hôpitaux de Marseille.

Délibéré après l'audience du 2 mars 2023 où siégeaient :

- M. Taormina, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

M. Mahmouti, premier conseiller,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 mars 2023.

2

N° 21MA02038


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA02038
Date de la décision : 10/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés de maladie. - Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : M. TAORMINA
Rapporteur ?: M. Jérôme MAHMOUTI
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : SELARL NOUS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-03-10;21ma02038 ?
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