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28/02/2023 | FRANCE | N°21MA00104

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 28 février 2023, 21MA00104


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première requête, enregistrée sous le n°1809846, M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'annuler la décision du 5 juillet 2018 par laquelle le maire de Marseille l'a licencié, d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Marseille a rejeté sa demande du 5 septembre 2018 tendant au versement de vacations non rémunérées au titre du mois de janvier 2018, et d'enjoindre à la commune de Marseille, sous astreinte, de lui verser les salaires dont il a été privé

au titre du mois de janvier 2018 et pour la période comprise entre le 27 juin ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première requête, enregistrée sous le n°1809846, M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'annuler la décision du 5 juillet 2018 par laquelle le maire de Marseille l'a licencié, d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Marseille a rejeté sa demande du 5 septembre 2018 tendant au versement de vacations non rémunérées au titre du mois de janvier 2018, et d'enjoindre à la commune de Marseille, sous astreinte, de lui verser les salaires dont il a été privé au titre du mois de janvier 2018 et pour la période comprise entre le 27 juin 2018 et le 29 juin 2018, respectivement pour un montant brut de 988 euros et 70,29 euros, de rectifier les bulletins de salaires afférents, de lui communiquer le bulletin de paie au titre du mois de juin 2020 et de rectifier son attestation Pôle emploi. Par une seconde requête, enregistrée sous le n°1902453, M. A... a demandé au même tribunal de condamner la commune de Marseille à lui verser la somme de 1 000 euros au titre du préjudice moral qu'il estime avoir subi, la somme de 1 000 euros en réparation des troubles dans ses conditions d'existence résultant de l'illégalité fautive de son licenciement, la somme de

2 667 euros correspondant à trois mois de préavis, et la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice financier et des troubles dans ses conditions d'existence résultant du non-paiement de ses vacations au titre du mois de janvier 2018.

Par un jugement n° 1809846, 1902453 du 23 novembre 2020, le tribunal administratif de Marseille, après avoir joint ces deux requêtes, a annulé la décision du 5 juillet 2018 par laquelle M. A... a été licencié et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 janvier 2021 et le 29 juin 2022, M. C... A..., représenté par Me Stioui, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de confirmer le jugement du tribunal administratif de Marseille du 23 novembre 2020 en ce qu'il a annulé la décision du 5 juillet 2018 et lui a reconnu le statut d'agent contractuel ;

2°) de réformer ce jugement en ce qu'il a rejeté le surplus de ses demandes ;

3°) d'enjoindre à la commune de Marseille de lui verser son traitement du 27 au 29 juin 2018 soit la somme brute de 70,29 euros ;

4°) d'annuler la décision implicite de rejet du 21 novembre 2018 ;

5°) en conséquence de cette annulation, d'enjoindre à la commune de Marseille de lui verser la somme brute de 508,67 euros, outre 50,87 euros à titre de congés payés afférents ;

6°) d'annuler la décision implicite du 5 février 2019 par laquelle la commune de Marseille a rejeté sa demande indemnitaire et de la condamner à lui verser la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice issu du licenciement abusif, la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice issu du licenciement vexatoire, la somme de 2 667 euros en réparation du préjudice issu du non-respect du délai de prévenance pour le non-renouvellement du contrat, et la somme de 1 000 euros à titre de réparation du préjudice issu du non-paiement du salaire du mois de janvier 2018 ;

7°) d'enjoindre à la commune de Marseille de rectifier les bulletins de salaire afférents ainsi que l'attestation Pôle emploi, sous une astreinte dont il plaira à la juridiction de céans de fixer le montant ainsi que la date d'effet ;

8°) de mettre à la charge de la commune de Marseille la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi de 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

- le jugement du tribunal administratif doit être confirmé en tant qu'il lui a reconnu le statut d'agent contractuel et a annulé, pour vice de procédure, la décision de licenciement du 5 juillet 2018 ;

- cette décision est entachée d'autres illégalités externes, tirées de l'incompétence de son auteur, de l'absence de convocation à un entretien préalable, de l'absence d'enquête disciplinaire, et de l'absence de saisine de la commission consultative paritaire ;

- la décision du 5 juillet 2018 doit également être annulée sur le fond dès lors qu'en l'absence de toute faute, elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et est disproportionnée ;

- l'annulation de la décision de licenciement doit avoir pour conséquence le paiement du salaire des journées du 27 au 29 juin 2018, soit la somme de 70,29 euros bruts dès lors que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'indemnisation versée par la sécurité sociale a déjà été déduite du montant à payer ;

- la décision implicite ayant rejeté la demande de versement du salaire du mois de janvier 2018 est illégale dès lors que ce salaire ne lui a jamais été versé ; il est fondé à solliciter le versement, à ce titre, de la somme de 508,67 euros ;

- il sollicite la communication de bulletins de salaire et d'une attestation Pôle emploi rectifiés ;

Sur les conclusions aux fins d'indemnisation :

- la Cour est compétente pour statuer sur sa requête d'appel en application de l'article

R. 811-1 du code de justice administrative ;

- la commune de Marseille a commis une faute en procédant à son licenciement dès lors que la matérialité des faits qui lui sont reprochés n'est pas établie et que c'est sur la commune que pèse la charge de la preuve ;

- le lien de causalité entre la faute et les préjudices subis est évident ;

- il est fondé à demander la condamnation de la commune de Marseille à lui verser la somme de 1 000 euros au titre du caractère abusif et injustifié du licenciement, la somme de 1 000 euros au titre du caractère vexatoire de cette mesure, la somme de 2 667 euros en réparation du non-respect du délai de prévenance pour le non-renouvellement du contrat, et la somme de 1 000 euros en réparation des préjudices financier et moral causés par l'absence de paiement du salaire du mois de janvier 2018.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 26 avril et 26 août 2022, la commune de Marseille, représentée par Me Laridan, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge du requérant la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les conclusions en confirmation du jugement ou plus généralement les conclusions en annulation de la décision du 5 juillet 2018 sont irrecevables dès lors qu'elles sont dirigées non pas contre le dispositif du jugement mais contre ses motifs ;

- le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas été payé au titre du mois de janvier 2018, le salaire afférant lui ayant été versé sur le bulletin de paie du mois de février 2018 ;

- les conclusions tendant à la délivrance d'un bulletin de salaire et d'une attestation Pôle emploi rectifiés devront être rejetées dès lors que le requérant n'a jamais demandé la communication de ces documents, ni à plus forte raison, saisi la commission d'accès aux documents administratifs d'un éventuel refus de communication ; de telles conclusions sont par conséquent irrecevables ; en tout état de cause, si aucun bulletin de salaire n'a été édité en

juillet 2018 au titre du mois de juin 2018, c'est au motif que M. A... était en arrêt de travail et n'a accompli aucune vacation au mois de juin 2018 ;

- M. A... n'est pas fondé à réclamer le versement d'un salaire pour les journées du 27 au 29 juin 2018 en raison de l'annulation de la décision de licenciement dès lors qu'au cours de cette période, il était en congé maladie et qu'il ne peut cumuler les indemnités journalières de sécurité sociale et son salaire ; par ailleurs, en l'absence de service fait, un agent ne peut prétendre au versement de sa rémunération ;

- en application de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, la Cour n'est pas compétente pour statuer sur les conclusions indemnitaires de M. A... dès lors qu'elles portent sur une somme inférieure à 10 000 euros ; par suite, de telles conclusions relèvent de la compétence du Conseil d'Etat ;

- à titre subsidiaire, compte tenu de la gravité des fautes reprochées à M. A..., la mesure de licenciement aurait pu légalement intervenir en dépit de l'annulation prononcée par le tribunal administratif pour un vice de procédure ;

- le caractère vexatoire allégué du licenciement ne saurait résulter des conditions de notification de cette mesure ;

- dès lors qu'aucun préavis n'est nécessaire en cas de licenciement prononcé en matière disciplinaire, M. A... n'est pas fondé à demander la réparation des conséquences préjudiciables de l'absence de préavis ; en tout état de cause, même si la commune ne l'avait pas licencié, elle aurait valablement pu ne pas renouveler son contrat ;

- M. A... ayant été rémunéré au titre des vacations de janvier 2018, il n'est pas fondé à solliciter une indemnisation de 1 000 euros en réparation du préjudice financier et moral causé par l'absence de versement de son salaire.

Un courrier du 14 octobre 2022, adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code.

Par une ordonnance du 7 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Par lettre du 23 janvier 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions à fin d'injonction présentées à titre principal par M. A..., tendant à ce que la commune de Marseille lui communique un bulletin de paie au titre du mois de juin 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- les observations de Me Stephan, substituant Me Stioui, représentant M. A...,

- et les observations de Me Ratouit, substituant Me Laridan pour la commune de Marseille.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a été nommé en qualité de vacataire pour l'exécution de missions d'agent de service qualifié au sein de la mairie des deuxième et troisième arrondissements de la commune de Marseille, par un contrat conclu pour la période du 2 janvier au 30 mars 2018, puis par un contrat pour la période du 3 avril au 29 juin 2018. Par un courrier du 5 juillet 2018, le maire de la commune de Marseille a prononcé le licenciement de M. A... à compter du 27 juin 2018 à raison de son comportement répréhensible dans l'exercice de ses fonctions. Par un premier courrier du 5 septembre 2018, M. A... a demandé le paiement de son salaire du mois de janvier 2018. Par un second courrier du 29 novembre 2018, M. A... a demandé au maire de Marseille l'indemnisation des préjudices résultant selon lui, d'une part, de l'illégalité fautive entachant son licenciement, et, d'autre part, de l'absence de versement du salaire dû au titre des travaux effectués au mois de janvier 2018. Par un jugement du 23 novembre 2020, le tribunal administratif de Marseille, saisi par M. A... de deux requêtes qu'il a jointes, a annulé la décision du 5 juillet 2018 prononçant son licenciement, mais a rejeté le surplus des conclusions de l'intéressé tendant, d'une part, à ce qu'il soit enjoint à la commune de Marseille de lui verser les salaires dont il a été privé au titre du mois de janvier 2018 et pour la période comprise entre le 27 juin 2018 et le 29 juin 2018, de rectifier les bulletins de salaires afférents, de lui communiquer le bulletin de paie au titre du mois de juin 2020 et de procéder à la rectification de son attestation Pôle Emploi, et, d'autre part, à la condamnation de la commune à réparer les préjudices qu'il estime avoir subis. Compte tenu de son argumentation devant la Cour, M. A... doit être regardé comme relevant appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions aux fins d'injonction assortissant les conclusions tendant à l'annulation de la décision du

5 juillet 2018 par laquelle le maire de la commune de Marseille a licencié M. A... :

2. En soulevant, de nouveau en appel, l'ensemble des moyens qu'il avait dirigés en première instance contre la décision du 5 juillet 2018, parmi lesquels figure le moyen tiré du caractère disproportionné de la sanction, et en concluant à la réformation du jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions, M. A... doit être regardé comme demandant à la Cour d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de Marseille, du fait de l'annulation de son licenciement, de lui verser les salaires qu'il estime lui être dus pour la période du 27 au 29 juin 2019.

3. Lorsque le juge de l'excès de pouvoir annule une décision administrative alors que plusieurs moyens sont de nature à justifier l'annulation, il lui revient, en principe, de choisir de fonder l'annulation sur le moyen qui lui paraît le mieux à même de régler le litige, au vu de l'ensemble des circonstances de l'affaire. Mais, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions à fin d'annulation, des conclusions à fin d'injonction tendant à ce que le juge enjoigne à l'autorité administrative de prendre une décision dans un sens déterminé, il incombe au juge de l'excès de pouvoir d'examiner prioritairement les moyens qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de l'injonction demandée. Il en va également ainsi lorsque des conclusions à fin d'injonction sont présentées à titre principal sur le fondement de

l'article L. 911-1 du code de justice administrative et à titre subsidiaire sur le fondement de l'article L. 911-2.

4. De même, lorsque le requérant choisit de hiérarchiser, avant l'expiration du délai de recours, les prétentions qu'il soumet au juge de l'excès de pouvoir en fonction de la cause juridique sur laquelle reposent, à titre principal, ses conclusions à fin d'annulation, il incombe au juge de l'excès de pouvoir de statuer en respectant cette hiérarchisation, c'est-à-dire en examinant prioritairement les moyens qui se rattachent à la cause juridique correspondant à la demande principale du requérant.

5. Dans le cas où il ne juge fondé aucun des moyens assortissant la demande principale du requérant mais retient un moyen assortissant sa demande subsidiaire, le juge de l'excès de pouvoir n'est tenu de se prononcer explicitement que sur le moyen qu'il retient pour annuler la décision attaquée : statuant ainsi, son jugement écarte nécessairement les moyens qui assortissaient la demande principale.

6. Si le jugement est susceptible d'appel, le requérant est recevable à relever appel en tant que le jugement n'a pas fait droit à sa demande principale. Il appartient alors au juge d'appel, statuant dans le cadre de l'effet dévolutif, de se prononcer sur les moyens, soulevés devant lui, susceptibles de conduire à faire droit à la demande principale.

7. Il ressort du dossier de première instance qu'au soutien de sa demande d'annulation devant le tribunal administratif de Marseille, M. A... a soulevé, ainsi qu'il a été dit, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et du caractère disproportionné de la mesure de licenciement. Le tribunal administratif qui, après avoir qualifié cette décision comme une sanction disciplinaire, l'a annulée pour vice de procédure, doit être regardé comme ayant implicitement mais nécessairement écarté de tels moyens. Néanmoins, à les supposer fondés, ces moyens n'auraient pas été de nature à justifier, outre l'annulation de la décision de licenciement, le prononcé d'une injonction de verser à M. A... les salaires correspondant aux journées des 27, 28 et 29 juin 2018, en l'absence de service fait par l'intéressé au cours de cette période. Pour les mêmes motifs, il en va également ainsi de l'ensemble des moyens de légalité externe soulevés en première instance et repris en cause d'appel par M. A.... Par conséquent, aucun des moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Marseille n'étant susceptible de conduire à faire droit à sa demande d'injonction, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande. Ses conclusions tendant à l'annulation de ce jugement pris dans cette mesure doivent donc être rejetées, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Marseille.

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions aux fins d'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de la commune de Marseille pendant un délai de deux mois sur la demande du 5 septembre 2018 tendant au versement du salaire du mois de janvier 2018 :

8. Il ressort des pièces du dossier, et particulièrement des termes du mémoire de l'appelant enregistré le 29 juin 2022 au greffe de la Cour, que la commune de Marseille l'a rémunéré à hauteur d'un montant correspondant à la réalisation de 268 vacations horaires, soit l'intégralité des heures de travail effectuées par l'intéressé entre le 2 janvier 2018 et le 30 mars 2018. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que son salaire du mois de janvier 2018 ne lui aurait pas été versé ni, par suite, à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Marseille a rejeté sa demande de versement de ce salaire.

En ce qui concerne les conclusions tendant à la communication de bulletins de salaires et d'une attestation Pôle emploi rectifiés :

9. Il résulte de ce qui a été dit aux points précédents que le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution. En outre, alors qu'il n'est pas contesté que M. A... n'a adressé à la commune de Marseille aucune demande tendant à la communication de son bulletin de salaire du mois de juin 2018 et à l'établissement d'une attestation Pôle emploi rectifiée, l'intéressé n'a pas assorti ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de lui communiquer ce bulletin et d'établir cette attestation, de conclusions principales en annulation d'une décision de l'autorité administrative. Il suit de là que de telles conclusions ne peuvent qu'être rejetées.

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions indemnitaires de M. A... :

S'agissant de l'exception d'incompétence soulevée par la commune de Marseille :

10. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, dans sa version applicable au litige : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. / Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : / (...) 8° Sauf en matière de contrat de la commande publique sur toute action indemnitaire ne relevant pas des dispositions précédentes, lorsque le montant des indemnités demandées n'excède pas le montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 ; (...). / Par dérogation aux dispositions qui précèdent, en cas de connexité avec un litige susceptible d'appel, les décisions portant sur les actions mentionnées au 8° peuvent elles-mêmes faire l'objet d'un appel. (...) ". En application de l'article R. 222-14 du code de justice administrative, le montant prévu par le 8° de l'article R. 811-1 est fixé à 10 000 euros.

11. M. A... a saisi le tribunal administratif de deux demandes distinctes comportant, pour la première, des conclusions d'excès de pouvoir, tendant à l'annulation de la décision du

5 juillet 2018 ayant prononcé son licenciement et de la décision implicite ayant rejeté sa demande du 5 septembre 2018 tendant au versement de son salaire du mois de janvier 2018, et, pour la seconde, des conclusions, relevant du plein contentieux, tendant à la condamnation de la commune de Marseille à l'indemniser des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des illégalités entachant ces décisions. Compte tenu du lien de connexité entre les conclusions en excès de pouvoir de M. A..., qui sont susceptibles de faire l'objet d'un appel, et ses conclusions indemnitaires, celles-ci, malgré le montant de l'indemnité demandée inférieur à 10 000 euros, peuvent elles-mêmes faire l'objet d'un appel, en application des dispositions, citées au point précédent, de l'article R. 811-1 du code de justice administrative. Par suite, le jugement contesté, qui a joint les deux demandes de M. A..., étant donc dans son ensemble susceptible d'appel, l'exception d'incompétence opposée par la commune de Marseille doit être écartée.

S'agissant des préjudices imputés par M. A... au licenciement prononcé le 5 juillet 2018 :

12. En vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité. Pour apprécier à ce titre l'existence d'un lien de causalité entre les préjudices subis par l'agent et l'illégalité commise par l'administration, le juge peut rechercher si, compte tenu des fautes commises par l'agent et de la nature de l'illégalité entachant la sanction, la même sanction, ou une sanction emportant les mêmes effets, aurait pu être légalement prise par l'administration.

13. Il résulte de l'instruction que, pour prononcer le licenciement disciplinaire de M. A... prenant effet trois jours avant la fin de son contrat, alors que l'agent était en arrêt maladie, le maire de la commune de Marseille s'est fondé, d'une part, sur la circonstance que l'intéressé a été surpris à plusieurs reprises en train de dormir sur son lieu de travail, pendant les horaires de service, et, d'autre part, sur la circonstance que, le 24 mai 2018, il a ouvertement refusé d'obéir à sa hiérarchie et d'exécuter des tâches, et adopté une attitude menaçante envers deux agents et la directrice de cabinet du maire des deuxième et troisième arrondissements de Marseille.

La matérialité de l'ensemble de ces faits, étayée par une note circonstanciée rédigée dès le

25 mai 2018 par le service du personnel de la mairie d'arrondissements, n'est pas utilement contredite par les deux seules attestations produites par l'appelant, rédigées, pour la première, en des termes généraux par une collègue de travail qui se borne à indiquer n'avoir jamais surpris

M. A... en train de dormir sur son lieu de travail, et qu'il s'agit d'un agent respectueux de ses collègues, et pour la seconde, par le directeur et le directeur adjoint du centre d'animation et de loisirs des Carmes, dépourvue d'indication de nature à remettre en cause les circonstances imputées à M. A.... De tels faits étant par ailleurs constitutifs de fautes de nature à justifier légalement le prononcé d'une sanction disciplinaire, laquelle pouvait en l'espèce correspondre sans disproportion à une mesure de licenciement, le maire de la commune de Marseille aurait pu légalement prendre la même décision s'il n'avait pas entaché le licenciement de M. A... du vice de procédure sur le fondement duquel le tribunal administratif de Marseille a annulé sa décision du 5 juillet 2018. Dès lors, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, un tel vice n'est pas à l'origine directe des préjudices allégués par M. A..., incluant notamment le préjudice financier résultant d'une perte de rémunération pour les journées des 27, 28 et 29 juin 2018 et du

non-respect du délai de prévenance pour le non-renouvellement de son contrat de travail.

S'agissant des préjudices imputés par M. A... à la décision de rejet de la demande de versement du salaire de janvier 2018 :

14. Ainsi qu'il a été précédemment dit au point 8, la rémunération afférente au service fait au cours du mois de janvier 2018 par M. A... lui a bien été versée. Dans ces conditions, l'intéressé n'est pas fondé à demander la réparation d'un préjudice résultant du non versement de cette rémunération.

S'agissant du préjudice financier résultant de l'absence de versement de rémunération au titre de vacations effectuées entre le 3 avril et le 27 juin 2018 :

15. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. (...) ".

16. La commune de Marseille fait valoir, dans son mémoire enregistré le 26 août 2022 au greffe de la Cour et communiqué le 30 août 2022 à M. A..., qu'elle n'a jamais été saisie par celui-ci d'une demande tendant à ce que lui soit versée une somme de 508,67 euros correspondant à la rémunération de 19 heures de vacation effectuées au cours de la période couverte par son second contrat de travail, comprise entre le 3 avril et le 25 mai 2018. M. A..., qui n'a pas répliqué à ce mémoire, n'établit pas ni même n'allègue qu'il aurait effectivement saisi la commune de Marseille d'une telle demande. En outre, sa demande indemnitaire préalable du

29 novembre 2018, qui était fondée sur deux faits générateurs distincts tirés, ainsi qu'il a été dit, de l'illégalité de la décision de licenciement du 5 juillet 2018 et de celle du rejet implicite de la demande du 5 septembre 2018 tendant au versement du seul salaire de janvier 2018, n'a ainsi pu faire naître une décision de rejet de nature à lier le contentieux sur ses conclusions tendant à la réparation d'un préjudice financier résultant de l'absence de versement de la rémunération au titre de vacations effectuées entre le 3 avril et le 25 mai 2018. Dans ces conditions, de telles conclusions sont irrecevables, ainsi que le fait valoir l'intimée, et ne peuvent qu'être rejetées.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision de rejet de sa demande de versement du salaire de

janvier 2018, ses prétentions à fin d'injonction et ses conclusions indemnitaires.

Sur les frais liés au litige :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Marseille, qui n'est pas la partie perdante de la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par la commune de Marseille.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Marseille sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et à la commune de Marseille.

Délibéré après l'audience du 10 février 2023, où siégeaient :

- M. Revert, président,

- M. Martin, premier conseiller,

- M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 février 2023.

N° 21MA001042


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA00104
Date de la décision : 28/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Licenciement - Auxiliaires - agents contractuels et temporaires.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Responsabilité et illégalité - Illégalité n'engageant pas la responsabilité de la puissance publique.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Stéphen MARTIN
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : STIOUI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-02-28;21ma00104 ?
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