Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 26 février 2019 par laquelle le maire du Rouret s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux.
Par un jugement n° 1902025 du 30 décembre 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 23 février 2021, M. B..., représenté par Me Vérany, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 30 décembre 2020 ;
2°) d'annuler la décision du maire du Rouret du 26 février 2019 ;
3°) d'enjoindre au maire du Rouret de lui délivrer un certificat de non-opposition tacite à sa déclaration préalable ;
4°) de mettre à la charge de la commune du Rouret la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que la décision tacite d'opposition à déclaration est entachée d'une " erreur manifeste d'appréciation " dès lors qu'il a fourni l'ensemble des pièces manquantes sollicitées et qu'aucune autre demande de pièces complémentaires ne lui a été adressée dans le délai d'un mois mentionné à l'article R. 423-38 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 mai 2021, la commune du Rouret, représentée par Me Fiorentino, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés ;
- subsidiairement, le projet n'est pas conforme aux articles R. 111-8 et R. 111-10 du code de l'urbanisme et elle sollicite une substitution de motifs sur ce point.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la cour a désigné M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me Fiorentino, représentant la commune du Rouret.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a déposé, le 31 octobre 2018, un dossier de déclaration préalable en vue de l'édification d'une maison d'une emprise au sol de vingt mètres carrés sur un terrain situé chemin du Castellaras sur le territoire de la commune du Rouret. Par une lettre du 19 novembre 2018, reçue le 22 novembre suivant par l'intéressé, le maire du Rouret a demandé à M. B... de fournir des pièces et informations complémentaires et l'a informé qu'à défaut de production de l'ensemble des pièces manquantes dans le délai de trois mois à compter de la réception de ce courrier, sa déclaration ferait l'objet d'une décision tacite d'opposition en application de l'article R. 423-39 du code de l'urbanisme. Par une décision du 26 février 2019, le maire du Rouret a indiqué à M. B... que, l'ensemble des pièces réclamées n'ayant pas été produites avant le 22 février 2019, une décision tacite d'opposition à sa déclaration préalable était née. M. B... relève appel du jugement du 30 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 26 février 2019.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 423-19 du code de l'urbanisme : " Le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet ". L'article R. 423-23 du même code dispose que : " Le délai d'instruction de droit commun est de : / a) Un mois pour les déclarations préalables (...) ". Selon l'article R. 424-1 de ce code : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III ci-dessus, le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : / a) Décision de non-opposition à la déclaration préalable (...) ". Son article R. 423-22 prévoit que : " Pour l'application de la présente section, le dossier est réputé complet si l'autorité compétente n'a pas, dans le délai d'un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur ou au déclarant la liste des pièces manquantes dans les conditions prévues par les articles R. 423-38 et R. 423-41 ". L'article R. 423-38 du même code dispose, dans sa rédaction alors en vigueur, que : " Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur ou à l'auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou, dans le cas prévu par l'article R. 423-48, un échange électronique, indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes ". Selon son article R. 423-39 : " L'envoi prévu à l'article R. 423-38 précise : / a) Que les pièces manquantes doivent être adressées à la mairie dans le délai de trois mois à compter de sa réception ; / b) Qu'à défaut de production de l'ensemble des pièces manquantes dans ce délai, la demande fera l'objet d'une décision tacite de rejet en cas de demande de permis ou d'une décision tacite d'opposition en cas de déclaration ; / c) Que le délai d'instruction commencera à courir à compter de la réception des pièces manquantes par la mairie ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'une décision de non-opposition à déclaration préalable naît un mois après le dépôt de celle-ci, en l'absence de notification d'une décision expresse de l'administration ou d'une demande de pièces complémentaires. En cas de demande de pièces complémentaires, ce délai est interrompu, à la condition toutefois que cette demande intervienne dans le délai d'un mois et qu'elle porte sur l'une des pièces limitativement énumérées par le code de l'urbanisme. Si cette demande de pièces complémentaires tend à la production d'une pièce qui ne peut être requise, elle est de nature à entacher d'illégalité la décision tacite d'opposition prise en application de l'article R. 423-39 du code de l'urbanisme. Par ailleurs, dans l'hypothèse où le pétitionnaire produit les pièces et éléments complémentaires réclamés à bon droit par l'administration, le délai d'instruction commence à courir à compter de la réception de celles-ci dès lors que le dossier est complet.
4. Aux termes de l'article R. 431-35 du code de l'urbanisme : " La déclaration préalable précise : (...) / b) La localisation et la superficie du ou des terrains ; / c) La nature des travaux ou du changement de destination ; / d) S'il y a lieu, la surface de plancher et la destination et la sous-destination des constructions projetées définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28 ; / e) Les éléments, fixés par arrêtés, nécessaires au calcul des impositions (...). / Aucune autre information ou pièce ne peut être exigée par l'autorité compétente ". L'article R. 431-36 du même code dispose que : " Le dossier joint à la déclaration comprend : / a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; / b) Un plan de masse coté dans les trois dimensions lorsque le projet a pour effet de créer une construction ou de modifier le volume d'une construction existante ; / c) Une représentation de l'aspect extérieur de la construction faisant apparaître les modifications projetées et si le projet a pour effet de modifier celui-ci (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que M. B... s'est vu notifier, le 22 novembre 2018, soit avant l'expiration du délai d'un mois prévu par l'article R. 423-38 du code de l'urbanisme, une demande de pièces complémentaires l'invitant à produire une attestation de conformité du dispositif d'assainissement autonome mentionné dans sa déclaration préalable et à compléter sur plusieurs points le formulaire de déclaration ainsi que le plan de masse joints à cette déclaration. M. B... a produit un ensemble de pièces le 23 novembre suivant en réponse à cette demande. D'une part, ainsi que l'ont relevé les premiers juges au point 7 du jugement attaqué, les dispositions des articles R. 431-35 et R. 431-36 du code de l'urbanisme, qui n'opèrent aucun renvoi aux dispositions du d) de l'article R. 431-16 du même code régissant le contenu des dossiers de demande de permis de construire, n'exigent pas la production, lors du dépôt d'une déclaration préalable de travaux, d'un document attestant, le cas échéant, de la conformité du système d'assainissement non collectif projeté avec la réglementation applicable. M. B... n'était ainsi pas tenu de compléter son dossier de déclaration préalable en y joignant une telle attestation. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le formulaire de déclaration et le plan de masse complétés par M. B... à la suite de cette demande de pièces complémentaires comportaient l'ensemble des éléments susceptibles de lui être réclamés et ont mis l'autorité administrative à même d'apprécier la conformité du projet à la réglementation applicable. Dans ces conditions, le dossier de déclaration préalable de M. B... ayant été suffisamment complété le 23 novembre 2018, le délai d'instruction d'un mois fixé par les dispositions citées ci-dessus de l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme a commencé à courir à compter de cette date. L'intéressé est ainsi devenu titulaire d'une décision tacite de non-opposition à déclaration le 23 décembre suivant. Par suite, la décision attaquée doit être regardée comme procédant au retrait de cette décision tacite de non-opposition à déclaration préalable née antérieurement.
6. En second lieu, la commune du Rouret soutient que la décision de retrait en litige est légalement justifiée par le motif tiré de ce que le projet litigieux méconnaît les dispositions des articles R. 111-8 et R. 111-10 du code de l'urbanisme.
7. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
8. Aux termes de l'article R. 111-8 du code de l'urbanisme : " (...) l'assainissement des eaux domestiques usées " doit être assuré " dans des conditions conformes aux règlements en vigueur ". L'article R. 111-10 du même code prévoit, à son deuxième alinéa, que : " En l'absence de système de collecte des eaux usées, l'assainissement non collectif doit respecter les prescriptions techniques fixées en application de l'article R. 2224-17 du code général des collectivités territoriales ". Il résulte des dispositions de l'article R. 111-1 de ce code que les dispositions citées ci-dessus du règlement national d'urbanisme sont notamment applicables aux constructions et aménagements faisant l'objet d'une déclaration préalable, sous réserve que le territoire de la commune concernée par les travaux litigieux ne soit pas doté d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu.
9. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier du plan de masse joint à la déclaration préalable de M. B..., que la construction projetée doit être raccordée à une installation existante d'assainissement non collectif. Le rapport établi par la société Suez Eau France à la suite d'une visite de contrôle effectuée au mois de mars 2018 indique que ce dispositif d'assainissement non collectif est " à surveiller et/ou doit faire l'objet d'(un) aménagement " et que l'installation en cause " présente des défauts d'entretien ou une usure de l'un de ses éléments constitutif(s) ". Ce rapport précise en outre que la maison d'habitation existante sur le terrain d'assiette est " actuellement inoccupée et sans eau " et que le " contrôle de bon écoulement n'a pas pu être réalisé ". M. B... ne produit aucun élément de nature à remettre en cause les indications précises et circonstanciées de ce rapport. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'installation d'assainissement non collectif en cause respecterait les exigences de la réglementation en vigueur. Il résulte de l'instruction que le maire du Rouret aurait pris la même décision en retenant initialement ce motif fondé sur les dispositions citées au point précédent qui étaient applicables sur le territoire de la commune du Rouret, celle-ci n'étant alors dotée ni d'un plan local d'urbanisme, ni d'un document d'urbanisme en tenant lieu. Par suite, il y a lieu de procéder à la substitution de motifs sollicitée par la commune du Rouret, cette substitution ne privant M. B... d'aucune garantie procédurale liée au motif substitué.
10. Il résulte de tout ce qui précède que, par les moyens qu'il invoque, M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par l'intéressé doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune du Rouret qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la commune du Rouret sur le même fondement.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune du Rouret présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la commune du Rouret.
Délibéré après l'audience du 2 février 2023, à laquelle siégeaient :
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Quenette, premier conseiller,
- M. Mouret, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 février 2023.
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N° 21MA00788
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