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10/02/2023 | FRANCE | N°22MA01390

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 10 février 2023, 22MA01390


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 3 février 2021 par lequel la préfète des Alpes-de-Haute-Provence a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée d'un an, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux du 2 avril 2021.

Par un jugement n° 210833

7 du 3 février 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

P...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 3 février 2021 par lequel la préfète des Alpes-de-Haute-Provence a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée d'un an, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux du 2 avril 2021.

Par un jugement n° 2108337 du 3 février 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 mai 2022, M. A..., représenté par Me Chartier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 février 2022 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler cet arrêté du 3 février 2021 de la préfète des Alpes-de-Haute-Provence ainsi que la décision portant rejet de son recours gracieux prise le 2 avril 2021 ;

3°) d'enjoindre à la préfète des Alpes-de-Haute-Provence de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros, à verser à son conseil, sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ou, à défaut, sur le seul fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne le moyen commun aux décisions attaquées :

- les décisions sont entachées d'un défaut d'examen particulier des circonstances.

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle méconnait les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entre´e et du se´jour des e´trangers et du droit d'asile ; le tribunal a commis une erreur d'appréciation des faits en ne tenant pas compte des pièces médicales communiquées ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entre´e et du se´jour des e´trangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- elle me´connai^t les stipulations de l'article 8 de la convention europe´enne de sauvegarde des droits de l'homme et des liberte´s fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entre´e et du se´jour des e´trangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entre´e et du se´jour des e´trangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale ; le tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle me´connai^t les stipulations de l'article 3 de la convention europe´enne de sauvegarde des droits de l'homme et des liberte´s fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entre´e et du se´jour des e´trangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour :

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-1 III du code de l'entre´e et du se´jour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne la décision portant rejet de son recours gracieux :

- la décision méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° et du 11° de l'article L. 313-11, du 10° de l'article L. 511-4, du III de l'article L. 511-1 et des articles L. 313-14 et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 août 2022, la préfète des Alpes-de-Haute-Provence conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

M. A... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mars 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.

Par une ordonnance du 17 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les observations de Me Teysseyre, substituant Me Chartier pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., ressortissant guinéen né le 17 juillet 1984, est entré en France le 30 avril 2017 et s'y est maintenu depuis. Après avoir fait l'objet, le 5 février 2018, d'un arrêté de transfert aux autorités italiennes, il a déposé une demande d'asile enregistrée le 13 juin 2018, qui a été rejetée par l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Il a bénéficié ultérieurement d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade valable du 4 septembre 2019 au 3 mars 2020, renouvelé en dernier lieu jusqu'au 26 octobre 2020. Le 1er septembre 2020, il a sollicité le renouvellement de ce titre de séjour. Par un arrêté du 3 février 2021, pris après avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 28 janvier 2021, la préfète des Alpes-de-Haute-Provence a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. A... relève appel du jugement du 17 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et de la décision de rejet de son recours gracieux prise le 2 avril 2021.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le moyen commun aux décisions attaquées :

2. L'arrêté contesté mentionne que M. A..., né le 17 juillet 1984 en Guinée, a effectué une demande de renouvellement de titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il est mentionné que suite à l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII du 28 janvier 2021, l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'un exceptionnelle gravité, qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine. L'arrêté ajoute notamment que sa présence en France depuis le 30 mai 2017 présente un caractère récent, qu'il ne présente aucun lien personnel ou familial en France et qu'il n'établit pas être exposé à des peines ou à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Il ressort ainsi de la motivation de l'arrêté litigieux, qui se prononce sur l'état de santé, la situation personnelle et familiale de M. A... et l'absence de risque avéré en cas de retour dans son pays d'origine, que la préfète des Alpes-de-Haute-Provence, qui n'était pas tenue de faire état de l'ensemble des éléments caractérisant sa situation, a procédé à un examen particulier des informations effectivement portées à sa connaissance. La circonstance que l'arrêté mentionne à tort la nationalité pakistanaise de M. A... constitue une simple erreur matérielle qui est sans incidence sur la légalité de l'arrêté, lequel précise en tout état de cause qu'il est né le 17 juillet 1984 à Boké en Guinée. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté serait entaché d'un défaut d'examen de la situation de M. A... doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".

4. Pour l'application des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313.11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

5. Il ressort des pièces du dossier que le requérant présente une insuffisance cardiaque sévère et a été hospitalisé le 12 avril 2018 pour la fermeture d'un canal atrio-ventriculaire, la mise en place d'un anneau d'annuloplastie et la fermeture de l'ostium primuM. Il a de nouveau été hospitalisé entre le 26 novembre 2020 et le 28 novembre 2020 suite à une syncope, et s'est vu implanté un enregistreur sous-cutané du rythme cardiaque. Par un avis du 28 janvier 2021, le collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé que l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'un exceptionnelle gravité, qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine.

6. Si M. A... produit notamment plusieurs certificats médicaux établis entre juin 2019 et avril 2021 indiquant que son état de santé nécessite un traitement régulier et une surveillance cardiologique au long cours, les termes de ces documents, dont certains précisent par ailleurs que son état est consolidé, ne permettent pas d'infirmer l'avis du collège des médecins de l'OFII sur l'existence d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il en va de même du certificat, insuffisamment circonstancié, établi le 15 mars 2021 par un médecin du centre hospitalier universitaire de Conakry, indiquant que la Guinée ne dispose " d'aucun plateau technique nécessaire (chirurgie cardiaque et certains examens complémentaires) (...) ". Enfin, il ressort des termes mêmes du certificat médical du 15 avril 2021 que le risque d'une nouvelle intervention ayant pour objet l'implantation d'un stimulateur cardiaque ne présente qu'un caractère hypothétique. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que sa pathologie nécessite des soins ou une intervention chirurgicale qui ne pourraient lui être dispensés qu'en France.

7. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévues à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., entré en France le 30 avril 2017, n'établit pas disposer d'attaches familiales en France et que la préfète indique, sans être contredite sur ce point, que son épouse et ses deux enfants résident en Guinée. Dans ces conditions, la circonstance qu'il ait travaillé entre juillet 2020 et juillet 2021 sur un poste d'agent polyvalent au sein de l'association Ressourcerie de Provence, qu'il ait été admis, postérieurement à l'arrêté en litige, à une formation de technicien d'étude du bâtiment et qu'il justifie notamment du soutien de ses encadrants n'est pas de nature à établir que la décision de refus de séjour aurait porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé. Dans ces conditions, et dès lors que le requérant n'établit pas avoir fixé le centre de ses intérêts privés en France, les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. La préfète n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de l'intéressé.

9. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa numérotation alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".

10. Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé.

11. Il ressort des pièces du dossier que M. A... n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour autre que celui relatif à son état de santé sur lequel s'est prononcé la préfète des Alpes-de-Haute-Provence dans l'arrêté contesté au regard de la demande de renouvellement présentée par l'intéressé. Si M. A... a formé le 22 mars 2021 un recours gracieux à l'encontre de l'arrêté du 3 février 2021 en sollicitant la délivrance d'une carte de séjour " à titre exceptionnel ", une telle circonstance est sans incidence sur la légalité de l'arrêté litigieux, la préfète n'ayant été initialement saisie que sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'ayant en tout état de cause pas examiné son droit au séjour sur un autre fondement que celui-ci. Il en résulte que M. A... ne peut utilement soutenir que la préfète des Alpes-de-Haute-Provence a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et commis une erreur manifeste d'appréciation. En tout état de cause, et au regard de ce qui a été dit aux points précédents, il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande de titre de séjour de M. A... répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels. Il s'ensuit que le moyen tiré de la violation de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

12. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entre´e et du se´jour des e´trangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire franc¸ais : (...) / 10° L'e´tranger re´sidant habituellement en France si son e´tat de sante´ ne´cessite une prise en charge me´dicale dont le de´faut pourrait avoir pour lui des conse´quences d'une exceptionnelle gravite´ et si, eu e´gard a` l'offre de soins et aux caracte´ristiques du syste`me de sante´ du pays de renvoi, il ne pourrait pas y be´ne´ficier effectivement d'un traitement approprie´ (...) ".

13. Ainsi qu'il a été dit au point 6, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié à sa pathologie dans son pays d'origine. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

14. Pour les mêmes motifs qu'exposés au point 8, le moyen tiré de l'atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale en France de l'appelant doit être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

15. Il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-1 du code de l'entre´e et du se´jour des e´trangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention europe´enne de sauvegarde des droits de l'homme et des liberte´s fondamentales, qui a été précédemment invoqué dans les mêmes termes devant les juges de première instance, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal au point 18 de son jugement, le requérant, dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 30 septembre 2019, ne faisant état devant la cour d'aucun élément distinct de ceux soumis à son appréciation.

En ce qui concerne l'interdiction de retour :

16. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. ".

17. Il est constant que M. A... a bénéficié d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade valable du 4 septembre 2019 au 3 mars 2020, renouvelé en dernier lieu jusqu'au 26 octobre 2020, avant de présenter une nouvelle demande de renouvellement de son titre de séjour qui a été rejetée par l'arrêté attaqué. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il représenterait une menace pour l'ordre public. Dans ces conditions, alors même que le requérant ne réside en France que depuis avril 2017 et qu'il ne se prévaut d'aucun lien familial, le préfet a, dans les circonstances particulières de l'espèce, en lui interdisant tout retour même ponctuel en France pendant une durée d'un an, entaché sa décision d'une erreur d'appréciation, de sorte que M. A... est fondé à en demander l'annulation.

En ce qui concerne la décision de rejet du recours gracieux :

18. L'exercice d'un recours gracieux n'ayant d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position, un recours contentieux consécutif au rejet d'un recours gracieux doit nécessairement être regardé comme étant dirigé, non pas tant contre le rejet du recours gracieux dont les vices propres ne peuvent être utilement contestés, que contre la décision initialement prise par l'autorité administrative. En conséquence, le requérant ne peut utilement se prévaloir de ce que la décision du 2 avril 2021 rejetant son recours gracieux serait entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation, d'une erreur manifeste d'appréciation, et méconnaîtrait les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° et du 11° de l'article L. 313-11, du 10° de l'article L. 511-4, et des articles L. 313-14 et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par contre, par voie de conséquence de ce qui a été dit au point 17, il y a lieu d'annuler la décision rejetant le recours gracieux de M. A... en tant qu'elle lui interdit de revenir en France pendant un an.

19. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'interdiction de retour édictée à son encontre et de la décision de rejet de son recours gracieux dans la même mesure.

Sur les conclusions accessoires :

20. L'annulation par le présent arrêt de la seule interdiction de retour sur le territoire français n'implique pas, compte tenu du rejet des conclusions dirigées contre le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire, la délivrance à M. A... d'un titre de séjour ni même le réexamen de sa situation au regard du droit au séjour. Les conclusions présentées à cette fin par M. A... doivent donc être rejetées.

21. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D É C I D E :

Article 1er : L'arrêté du 3 février 2021 de la préfète des Alpes-de-Haute-Provence et la décision de rejet du recours gracieux de M. A... sont annulés en tant qu'ils portent interdiction de territoire français à M. A... pendant une durée d'un an.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 3 février 2022 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à Me Chartier et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète des Alpes-de-Haute-Provence.

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2023, où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente,

- M. Taormina, président assesseur,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 février 2023.

N° 22MA01390

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01390
Date de la décision : 10/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Nicolas DANVEAU
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : CHARTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-02-10;22ma01390 ?
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