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02/02/2023 | FRANCE | N°21MA00467

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 02 février 2023, 21MA00467


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite de rejet du maire de la commune de Bandol opposée au recours préalable formulé le 7 décembre 2017 portant sur la demande de raccordement au réseau d'eau potable.

Par un jugement n° 1801129 du 1er décembre 2020 le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er février 2021, M. B..., représenté par Me Reghin, demande à l

a Cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er décembre 2020 du tribunal administratif de Toulon ;

2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite de rejet du maire de la commune de Bandol opposée au recours préalable formulé le 7 décembre 2017 portant sur la demande de raccordement au réseau d'eau potable.

Par un jugement n° 1801129 du 1er décembre 2020 le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er février 2021, M. B..., représenté par Me Reghin, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er décembre 2020 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet opposée au recours préalable formulé le 7 décembre 2017 portant sur la demande de raccordement au réseau d'eau potable ;

3°) d'enjoindre le maire de la commune de Bandol à procéder à une nouvelle instruction de la demande de raccordement au réseau d'eau potable et de lui notifier la décision dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Bandol la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que le terrain en litige est dans un secteur entièrement et particulièrement bien desservi par le réseau d'eau potable et se trouve à moins d'une dizaine de mètres des canalisations FTG 225 et FTG 250, et 80 mètres de la canalisation FTG 80.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 novembre 2021, la commune de Bandol conclut au rejet de la requête et demande à ce qu'il soit mis à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens de la requête de M. B... sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- les observations de Me Parisi représentant la commune de Bandol.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal de Toulon a refusé d'annuler la décision implicite de rejet du maire de la commune de Bandol opposée au recours préalable qu'il a formulé le 7 décembre 2017 portant sur la demande de raccordement au réseau d'eau potable.

Sur la fin de non-revoir opposée par la commune :

2. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de l'acte attaqué ou, dans le cas mentionné à l'article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation ". Aux termes de l'article R. 421-2 du même code : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. Toutefois, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient avant l'expiration de cette période, elle fait à nouveau courir le délai de recours. / La date du dépôt de la demande à l'administration, constatée par tous moyens, doit être établie à l'appui de la requête ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a saisi le maire de la commune de Bandol d'une demande de raccordement de sa propriété au réseau d'eau potable le 7 décembre 2017, par une lettre recommandée avec accusé réception reçue par la commune le 9 décembre 2017. La commune a du reste accusé réception de cette lettre par un courrier du 4 janvier 20218. Le silence gardé par la commune sur cette demande a fait naître une décision implicite de rejet au terme d'un délai de deux mois. Par suite, M. B... apporte la preuve du dépôt d'une demande à l'administration. Le maire de Bandol n'était, dès lors, pas fondé à soutenir dans son mémoire en défense de première instance que la requête de M. B... ne satisfait pas aux exigences résultant des dispositions de l'article R. 412-1 du code de justice administrative. Les conclusions de M. B... à fin d'annulation de la décision attaquée sont, dès lors, recevables.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'environnement : " L'eau fait partie du patrimoine commun de la nation. Sa protection, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans le respect des équilibres naturels, sont d'intérêt général. / Dans le cadre des lois et règlements ainsi que des droits antérieurement établis, l'usage de l'eau appartient à tous et chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d'accéder à l'eau potable dans des conditions économiquement acceptables par tous. / Les coûts liés à l'utilisation de l'eau, y compris les coûts pour l'environnement et les ressources elles-mêmes, sont supportés par les utilisateurs en tenant compte des conséquences sociales, environnementales et économiques ainsi que des conditions géographiques et climatiques ". En outre, l'article L. 2224-7-1 du code général des collectivités territoriales dispose : " Les communes sont compétentes en matière de distribution d'eau potable. Dans ce cadre, elles arrêtent un schéma de distribution d'eau potable déterminant les zones desservies par le réseau de distribution (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 30 décembre 2006 sur l'eau de laquelle elles sont issues, qu'il appartient aux communes ou aux établissements publics de coopération intercommunale compétents de délimiter, dans le respect du principe d'égalité devant le service public, les zones de desserte dans lesquelles ils sont tenus, tant qu'ils n'en ont pas modifié les délimitations, de faire droit aux demandes de réalisation de travaux de raccordement, dans un délai raisonnable, pour toutes les propriétés qui ont fait l'objet des autorisations et agréments visés à l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme. Ce délai doit s'apprécier au regard, notamment, du coût et de la difficulté technique des travaux d'extension du réseau de distribution d'eau potable et des modalités envisageables de financement des travaux. En dehors des zones de desserte ou en l'absence de délimitation par le schéma de telles zones, la collectivité apprécie la suite à donner aux demandes d'exécution de travaux de raccordement, dans le respect du principe d'égalité devant le service public, en fonction, notamment, de leur coût, de l'intérêt public et des conditions d'accès à d'autres sources d'alimentation en eau potable. Le juge de l'excès de pouvoir exerce alors, en cas de refus, un contrôle restreint à l'erreur manifeste d'appréciation.

6. Aux termes de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies ou des plantations d'alignements. " Aux termes de l'article L. 113-2 de ce code : " Le classement interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements. / Nonobstant toutes dispositions contraires, il entraîne le rejet de plein droit de la demande d'autorisation de défrichement prévue au chapitre Ier du titre IV du livre III du code forestier (...). ".

7. S'Il n'est pas établi que le terrain du requérant serait situé dans une zone de desserte en eau potable délimitée par la commune de Bandol, il ressort en revanche des pièces du dossier que le terrain d'assiette du bâtiment à raccorder se trouve à une dizaine de mètres de la conduite d'eau potable FTG 225. Si la commune fait valoir que le raccordement empièterait sur un emplacement réservé pour élargir la route, le passage d'un réseau doit être regardé comme conforme à la destination de cet emplacement réservé dès lors qu'il est d'usage de faire passer les canalisations sous les voiries. Si la commune soutient que le raccordement nécessitera de traverser l'espace boisé classé qui couvre la parcelle du requérant pour permettre le raccordement au bâtiment, une simple canalisation ne peut être regardée, au regard de la faiblesse actuelle du boisement du terrain d'assiette, comme susceptible de compromettre le boisement existant ou à venir. La circonstance que la conduite d'eau potable FTG 225 ne longerait pas la voie publique bordant le terrain de M. B... ne fait pas en elle-même obstacle au raccordement eu égard à la faible distance entre le terrain et cette conduite. Si la commune soutient enfin que le terrain du requérant que doit traverser la nouvelle canalisation est en pente, elle ne justifie pas en quoi cette circonstance s'opposerait au raccordement. Dans ces circonstances, eu égard à la très faible distance de raccordement, c'est par une erreur manifeste d'appréciation que la commune de Bandol s'est opposée à la demande de raccordement.

8. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué n° 1801129, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet opposée au recours préalable formulé le 7 décembre 2017 portant sur la demande de raccordement au réseau d'eau potable et à demander l'annulation du jugement et de la décision en litige.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " Et selon l'article L. 911-3 du même code : " La juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. "

10. Le présent arrêt implique d'enjoindre au maire de la commune de Bandol à procéder à une nouvelle instruction de la demande de raccordement au réseau d'eau potable dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il sera mis à la charge de la mairie de Bandol la somme de 2 000 euros au titre des mêmes dispositions au profit du requérant.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1801129 du 1er décembre 2020 du tribunal administratif de Toulon et la décision implicite par laquelle le maire de Bandol a refusé le raccordement au réseau de distribution d'eau potable de la propriété de M. B... sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au maire de la commune de Bandol de procéder à une nouvelle instruction de la demande de raccordement au réseau d'eau potable dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : La commune de Bandol versera une somme de 2 000 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Bandol tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. A... B... et à la commune de Bandol.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2023, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Quenette, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 février 2023.

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N° 21MA00467

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21MA00467
Date de la décision : 02/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Marc-Antoine QUENETTE
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : LLC et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-02-02;21ma00467 ?
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