La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/01/2023 | FRANCE | N°20MA04379

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 10 janvier 2023, 20MA04379


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... G... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 20 juin 2018 par lequel le maire de Carqueiranne s'est opposé à sa déclaration préalable de division parcellaire.

Par un jugement n° 1802588 du 2 octobre 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 novembre 2020, Mme G..., représentée par la SELARL LLC et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement

du tribunal administratif de Toulon du 2 octobre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Carqueirann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... G... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 20 juin 2018 par lequel le maire de Carqueiranne s'est opposé à sa déclaration préalable de division parcellaire.

Par un jugement n° 1802588 du 2 octobre 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 novembre 2020, Mme G..., représentée par la SELARL LLC et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 2 octobre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Carqueiranne du 20 juin 2018 ;

3°) d'enjoindre au maire de Carqueiranne de ne pas s'opposer à sa déclaration préalable ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Carqueiranne et de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué n'a pas complètement répondu au moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'avis conforme émis par le préfet du Var ;

- cet avis conforme défavorable a été signé par une personne incompétente ;

- le projet litigieux ne méconnaît pas l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme ;

- il ne méconnaît pas l'article L. 121-8 du même code ;

- le motif fondé sur l'article L. 111-22 de ce code est entaché d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 mai 2021, la commune de Carqueiranne représentée par la SELARL Imavocats, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme G... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par Mme G... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- les observations de Me Reghin, représentant Mme G..., et celles de Me Parisi, représentant la commune de Carqueiranne.

Une note en délibéré, enregistrée le 16 décembre 2022, a été présentée par Mme G....

Une note en délibéré, enregistrée le 19 décembre 2022, a été présentée par la commune de Carqueiranne.

Considérant ce qui suit :

1. Mme G... a déposé, le 24 mai 2018, un dossier de déclaration préalable en vue de la division d'un tènement non bâti - composé des parcelles cadastrées section BO nos 235 et 236 et situé sur le territoire de la commune de Carqueiranne - afin, d'une part, de détacher de la première de ces parcelles un lot B de 234 mètres carrés à rattacher à la parcelle bâtie cadastrée section BO n° 234 et, d'autre part, de créer un lot A à bâtir sur la partie restante de ce tènement. Consulté en application du a) de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme, le préfet du Var a émis un avis conforme défavorable au projet le 14 juin 2018. Par un arrêté du 20 juin suivant, le maire de Carqueiranne s'est opposé à cette déclaration préalable de division parcellaire. Mme G... relève appel du jugement du 2 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 20 juin 2018.

Sur la régularité du jugement :

2. Les premiers juges, qui ont répondu aux branches opérantes du moyen, invoqué par la voie de l'exception, tiré de l'incompétence du signataire de l'avis conforme défavorable émis en application du a) de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme, ont suffisamment motivé leur réponse à ce moyen au point 6 du jugement attaqué.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Le plan d'occupation des sols de Carqueiranne étant devenu caduc le 27 mars 2017 en application des articles L. 174-1 et L. 174-3 du code de l'urbanisme et sa révision sous la forme d'un plan local d'urbanisme n'étant pas encore approuvée, le maire de Carqueiranne a recueilli l'avis conforme du préfet du Var conformément aux dispositions du a) de l'article L. 422-5 du même code. Cette autorité a émis un avis conforme défavorable au projet litigieux le 14 juin 2018 au motif notamment que sa réalisation aurait pour effet d'étendre une partie urbanisée de la commune au sens de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme et qu'il ne relève pas de l'une des exceptions prévues par l'article L. 111-4 du même code.

4. Si, lorsque la délivrance d'une autorisation administrative est subordonnée à l'accord préalable d'une autre autorité, le refus d'un tel accord, qui s'impose à l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, ne constitue pas une décision susceptible de recours, des moyens tirés de sa régularité et de son bien-fondé peuvent, quel que soit le sens de la décision prise par l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, être invoqués devant le juge saisi de cette décision.

5. En premier lieu, Mme G... persiste à invoquer le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'avis conforme défavorable émis par le préfet du Var en application du a) de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme.

6. D'une part, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est : / a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu (...). Lorsque le transfert de compétence à la commune est intervenu, il est définitif (...) ". Selon l'article L. 422-5 du même code : " Lorsque le maire (...) est compétent, il recueille l'avis conforme du préfet si le projet est situé : / a) Sur une partie du territoire communal non couverte par une carte communale, un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu (...) ".

7. Si la caducité déjà évoquée du plan d'occupation des sols de Carqueiranne a entraîné la remise en vigueur du règlement national d'urbanisme sur le territoire communal, elle n'a en revanche pas eu pour effet de remettre en cause la compétence du maire pour délivrer les autorisations d'urbanisme au nom de la commune dès lors que le transfert de compétence à cette collectivité était déjà intervenu à titre définitif. Dès lors, l'arrêté de non-opposition à déclaration préalable en litige a été pris, au vu de l'avis conforme émis par le préfet en application du a) de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme, par le maire de Carqueiranne agissant au nom de la commune. Par suite, la requérante invoque inutilement les dispositions des articles R. 422-1, R. 422-2 et R. 423-72 du même code qui ne sont pas applicables lorsque l'autorisation d'urbanisme a, comme en l'espèce, été délivrée par le maire au nom de la commune en application du a) de l'article L. 422-1 de ce code.

8. D'autre part, aux termes de l'article 43 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements : " Le préfet de département peut donner délégation de signature, notamment en matière d'ordonnancement secondaire : (...) / 2° Pour les matières relevant de leurs attributions, aux chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat dans le département (...) ". Le I de l'article 44 du même décret dispose que : " Les chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat dans le département (...) peuvent donner délégation pour signer les actes relatifs aux affaires pour lesquelles ils ont eux-mêmes reçu délégation aux agents placés sous leur autorité ".

9. L'avis conforme défavorable émis le 14 juin 2018 a été signé, pour le préfet du Var, par M. E... F..., responsable du pôle urbanisme de la direction départementale des territoires et de la mer du Var. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 31 décembre 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 84 du 2 janvier 2017, le préfet du Var a donné délégation à M. A... B..., directeur départemental des territoires et de la mer du Var, à l'effet de signer notamment " tous actes (...) dans les limites des missions et attributions relevant de cette direction ", à l'exception de certains actes au nombre desquels ne figurent pas les avis conformes émis sur le fondement du a) de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme. Par un arrêté du 23 mai 2018, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 28 du 25 mai suivant, le directeur départemental des territoires et de la mer du Var a subdélégué sa signature " aux chefs de service et collaborateurs dont les noms sont indiqués dans les tableaux annexés ". Il ressort de la rubrique H5 du tableau H annexé à cet arrêté du 23 mai 2018 que M. F... a été habilité à signer les avis conformes émis sur le fondement du a) de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme. Il n'est ni établi ni même allégué que les chefs de service titulaires mentionnés dans cette rubrique n'étaient pas absents ou empêchés le 14 juin 2018. Il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'avis conforme défavorable émis à cette date doit être écarté.

10. En second lieu, aux termes de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme : " En l'absence de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune ". Ces dispositions interdisent en principe, en l'absence de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions implantées " en dehors des parties urbanisées de la commune ", c'est-à-dire des parties du territoire communal qui comportent déjà un nombre et une densité significatifs de constructions. Il en résulte qu'en dehors du cas où elles relèvent des exceptions expressément et limitativement prévues par l'article L. 111-4 du même code, les constructions ne peuvent être autorisées dès lors que leur réalisation a pour effet d'étendre la partie urbanisée de la commune. Pour apprécier si un projet a pour effet d'étendre une partie urbanisée de la commune, il est notamment tenu compte de la géographie des lieux, de la desserte par des voies d'accès, de la proximité avec les constructions existantes situées dans les parties urbanisées de la commune, du nombre et de la densité des constructions projetées, du sens du développement de l'urbanisation, ainsi que de l'existence de coupures d'urbanisation, qu'elles soient naturelles ou artificielles.

11. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet, d'une superficie totale d'environ 2 500 mètres carrés, est situé à proximité immédiate de l'une des parties urbanisées de la commune de Carqueiranne, dont il est cependant séparé par des voies de circulation bordant ses parties est et sud. Ce terrain non bâti présente un caractère pentu au vu des cotes altimétriques figurant sur les plans joints au dossier de déclaration préalable déposé par Mme G.... Il s'ouvre, en particulier à l'ouest et au nord-ouest, sur un secteur caractérisé par la présence de quelques constructions - dont celle édifiée sur la parcelle bâtie évoquée au point 1 - implantées de façon relativement dispersée, ainsi que de parcelles à vocation principalement agricole. Compte tenu des caractéristiques de ce secteur dans lequel s'inscrit le terrain d'assiette, de l'existence des voies de circulation évoquées ci-dessus, ainsi que de la topographie des lieux en cause, le tènement litigieux doit être regardé, quand bien même il serait desservi par l'ensemble des réseaux, comme s'inscrivant dans un compartiment de terrain nettement différent de celui auquel appartient la partie urbanisée avoisinante, située en léger contrebas. Dans ces conditions, il ressort des pièces du dossier que la réalisation du projet litigieux, qui prévoit la création d'un lot à bâtir d'une superficie d'un peu moins de 2 300 mètres carrés, aurait pour effet d'étendre cette partie urbanisée localisée au sud du territoire de la commune de Carqueiranne. Par suite, et alors qu'il n'est ni établi, ni même allégué, que le projet de Mme G... relèverait de l'une des exceptions prévues par l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme, le préfet du Var n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 111-3 de ce code en retenant le motif énoncé au point 3.

12. Il résulte de l'instruction que le préfet du Var aurait émis le même avis conforme en se fondant exclusivement sur le motif tiré de ce que le projet litigieux ne respecte pas la règle de constructibilité limitée énoncée à l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme.

13. L'avis conforme du préfet du Var étant fondé légalement pour les raisons exposées ci-dessus, le maire de Carqueiranne était tenu de s'opposer, ainsi qu'il l'a fait, à la déclaration préalable d'aménagement déposée par Mme G....

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme G... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Sur l'injonction sollicitée :

15. Les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme G... ne peuvent, compte tenu du rejet de ses conclusions à fin d'annulation, qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

16. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme G... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Carqueiranne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... G..., à la commune de Carqueiranne et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera transmise au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Mouret, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 janvier 2023.

2

N° 20MA04379


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20MA04379
Date de la décision : 10/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles générales d'utilisation du sol - Règles générales de l'urbanisme - Règlement national d'urbanisme.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Régimes de déclaration préalable.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP IMAVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-01-10;20ma04379 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award