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01/12/2022 | FRANCE | N°20MA02523

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 01 décembre 2022, 20MA02523


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... A... B... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 et 2015, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1806330 du 26 juin 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2020, et un m

moire complémentaire, enregistré le 12 février 2021, M. et Mme D... A... B..., représentés par M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... A... B... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 et 2015, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1806330 du 26 juin 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2020, et un mémoire complémentaire, enregistré le 12 février 2021, M. et Mme D... A... B..., représentés par Me Attali-Balensi, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 26 juin 2020 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu en litige et des pénalités afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la réponse du 9 octobre 2017 à leurs observations n'est pas suffisamment motivée, en méconnaissance du dernier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, et l'administration a méconnu le principe d'indépendance des procédures ;

- la reconstitution du chiffre d'affaires de la SARL Romain Plus a été faite sur des bases arbitraires ;

- l'administration n'a pas apporté la preuve que M. A... B... était maître de l'affaire sur les deux années contrôlées ;

- l'administration n'a pas davantage démontré que M. A... B... était le gérant de fait de la SARL ... et avait appréhendé les sommes qui ont été imposées entre leurs mains ;

- les achats de fruits et légumes pour un montant de 14 757 euros en 2014 sont le fait d'un employé indélicat, à l'insu de la SARL ..., qui a depuis procédé à la rupture conventionnelle de son contrat de travail ;

- l'administration ne démontre à aucun moment que les factures de gaz acquittées par la société ... sont étrangères à son activité ;

- les pénalités pour manquement délibéré appliquées sont infondées.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 27 novembre 2020 et le 4 mars 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la vérification de la comptabilité de la société ..., dont M. A... B... était le gérant jusqu'en octobre 2014 et l'associé lors des exercices 2013 et 2015, M. et Mme A... B... ont été considérés comme bénéficiaires de revenus distribués par cette société et ont été assujettis à des impositions supplémentaires sur leurs revenus des années 2014 et 2015. Ils relèvent appel du jugement du 26 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires.

Sur les conclusions à fin de décharge :

2. D'une part, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée. ". L'exigence de motivation qui s'impose à l'administration dans ses relations avec le contribuable vérifié en application du dernier alinéa de cet article s'apprécie au regard de l'argumentation de celui-ci.

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La notification de redressement prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs du redressement envisagé. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la notification ". Il résulte de ces dispositions que l'expression du désaccord du contribuable sur les redressements qui lui sont notifiés doit être formulée par écrit dans le délai précité et qu'en cas de réponse orale, le contribuable est regardé comme ayant tacitement accepté les redressements. Cependant, l'acceptation par une société des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés du fait du défaut d'observations dans ce délai à la proposition de rectification qui lui a été notifiée est, par elle-même, sans incidence sur le bien-fondé des suppléments d'imposition sur le revenu consécutif à la perception de revenus distribués.

4. Il résulte de l'instruction que, dans la proposition de rectification du 12 juillet 2017 adressée à M. et Mme A... B..., l'administration a indiqué que des rectifications ont été opérées sur les résultats de la SARL ..., en joignant la copie de la proposition de rectification du 30 juin 2017 adressée à cette société, et en en reproduisant les passages pertinents relatifs à la reconstitution de son chiffre d'affaires. Elle précise que certaines des sommes en cause ont été considérées comme des revenus distribués au profit de M. A... B..., en application du 2° de l'article 109.1 et du c de l'article 111 du code général des impôts, compte tenu de son rôle dans le fonctionnement de la SARL, et de sa position de propriétaire et bailleur de la SCI qui possède le local dans lequel la SARL ...exerce son activité, l'administration fiscale en déduisant que M. A... B... doit être considéré comme le maître de l'affaire. Dans leurs observations datées du 4 octobre 2017, M. et Mme A... B... ont contesté tant la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires de la SARL ..., dans les différents secteurs de la boulangerie snack, des fruits et légumes, aux motifs que les minorations de recettes n'étaient pas établies, et que le taux de 20 % de redevance de location-gérance de fait était irréaliste, que la taxe sur la valeur ajoutée. Ils ont également expressément contesté l'appréhension des sommes réputées distribuées au bénéfice de M. A... B... au motif, notamment, que les bénéficiaires des distributions occultes étaient identifiés, ainsi que les pénalités pour manquement délibéré. Dans sa réponse du 9 octobre 2017, l'administration s'est bornée à relever que la société ... n'avait pas répondu à la proposition de rectification qui lui avait été notifiée dans le délai imparti, en indiquant que les différents recours prévus dans le cadre de la procédure n'étaient plus ouverts et qu'en conséquence, les redressements de la société étaient maintenus, et que, de ce fait, " toutes les propositions de rectifications concernant leur imposition sur le revenu sont maintenues en l'état ". En se limitant ainsi à renvoyer à l'acceptation des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés par la société ..., sans répondre ni aux critiques de ces redressements exposés par M. et Mme A... B... dans leurs observations ni à celles du principe de leur imposition au titre des revenus distribués, l'administration a méconnu la garantie accordée aux contribuables par le dernier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, en les empêchant de contester utilement les impositions supplémentaires dont ils faisaient l'objet et, en outre, a méconnu le principe de l'indépendance des procédures alors que, ainsi qu'il a été dit au point 3 du présent jugement, l'acceptation par une société des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés du fait du défaut d'observations dans le délai d'un mois à la proposition de rectification qui lui a été notifiée est, par elle-même, sans incidence sur le bien-fondé des suppléments d'imposition sur le revenu consécutifs à la perception de revenus distribués.

5. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, M. et Mme A... B... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande, et, par suite, à demander la décharge des suppléments d'imposition en litige au titre des années 2014 et 2015 ainsi que, par voie de conséquence, celle des pénalités correspondantes.

Sur les frais liés au litige :

6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A... B... et non compris dans les dépens.

D É C I D E

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 26 juin 2020 est annulé.

Article 2 : M. et Mme A... B... sont déchargés, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 et 2015.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme A... B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2022, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- Mme Carotenuto, première conseillère,

- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er décembre 2022.

2

N° 20MA02523


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA02523
Date de la décision : 01/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES. - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. - REVENUS ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - RÈGLES PARTICULIÈRES. - REVENUS DES CAPITAUX MOBILIERS ET ASSIMILABLES. - REVENUS DISTRIBUÉS. - NOTION DE REVENUS DISTRIBUÉS. - IMPOSITION PERSONNELLE DU BÉNÉFICIAIRE. - RÉPONSE AUX OBSERVATIONS DU CONTRIBUABLE (ARTICLES L. 57 ET 57-1 DU LPF) - PRINCIPE D'INDÉPENDANCE DES PROCÉDURES.

19-04-02-03-01-01-02 Il résulte des dispositions des articles L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales que l'expression du désaccord du contribuable sur les redressements qui lui sont notifiés doit être formulée par écrit dans le délai précité et qu'en cas de réponse orale, le contribuable est regardé comme ayant tacitement accepté les redressements. Cependant, l'acceptation par une société des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés du fait du défaut d'observations dans ce délai à la proposition de rectification qui lui a été notifiée est, par elle-même, sans incidence sur le bien-fondé des suppléments d'imposition sur le revenu consécutif à la perception de revenus distribués. ......Comp. CE, 2019/12/04, 417967, M. et Mme Muller, B.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Arnaud CLAUDÉ-MOUGEL
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : SELARL FLEURENTDIDIER et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-12-01;20ma02523 ?
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