Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) P. Ribotta et ses Fils a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler, à titre principal, l'arrêté du 22 mai 2018, par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a approuvé le plan de prévention des risques d'incendie de forêt (PPRIF) sur le territoire de la commune de Marseille et, à titre subsidiaire, cet arrêté en tant qu'il procède au classement d'une partie des parcelles cadastrées n° 959H5 et n° 959H7 en zone rouge et d'enjoindre au préfet de procéder au classement de ses parcelles situées en zone UEA en zone bleue du plan de prévention.
Par un jugement n° 1805948 du 8 juillet 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 septembre 2020 et 13 octobre 2022, la SARL P. Ribotta et ses Fils, représentée B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 8 juillet 2020 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du 22 mai 2018 et, à titre subsidiaire, d'annuler cet arrêté en tant qu'il procède au classement des parcelles cadastrées n° 959H5 et n° 959H7 en zone rouge ;
3°) d'enjoindre au préfet de procéder au classement en zone B (bleue) du PPRIF les 42 500 m² de terrain situés en zone UEA ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté de prescription du 30 mars 2011 aurait dû être notifié aux mairies d'arrondissements de la commune de Marseille ;
- les modalités de la concertation n'ont pas été respectées ;
- la concertation était insuffisante ;
- la chambre d'agriculture des Bouches-du-Rhône n'a pas été consultée ;
- le dossier de l'enquête publique comporte des erreurs et des imprécisions ;
- les conclusions et le rapport du commissaire enquêteur sont insuffisamment motivés ;
- le maire de Marseille n'a pas été entendu au cours de l'enquête publique ;
- la méthodologie du PPRIF qui est en contradiction avec la note technique du 29 juillet 2015 est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le classement d'une grande partie de la parcelle cadastrée n° 959H5 en zone rouge est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mars 2022, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête de la SARL P. Ribotta et ses Fils.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par la SARL P. Ribotta et ses Fils ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,
- et les observations de Me Philippot représentant la SARL P. Ribotta et ses Fils.
Une note en délibéré présentée pour la SARL P. Ribotta et ses Fils a été enregistrée le 15 novembre 2022.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 30 mars 2011, le préfet des Bouches-du-Rhône a prescrit l'élaboration d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles d'incendie de forêt (PPRIF) sur le territoire de la commune de Marseille. L'élaboration de ce plan a donné lieu à une phase de consultation du 1er janvier 2017 au 31 mars 2017, puis à un arrêté du 9 octobre 2017 portant ouverture et organisation d'une enquête publique, réalisée du 30 octobre au 30 novembre 2017, et au terme de laquelle la commission d'enquête a rendu, le 8 janvier 2018, un avis favorable assorti d'une réserve et accompagné de recommandations. Le préfet des Bouches-du-Rhône a, par un arrêté du 22 mai 2018, approuvé le PPRIF, lequel classe en zone rouge une partie de la parcelle cadastrée n° 959H5 appartenant à la SARL P. Ribotta et ses Fils, située au 77 chemin du Vallon de Toulouse dans le 10ème arrondissement de Marseille. La SARL P. Ribotta et ses Fils relève appel du jugement du 8 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 22 mai 2018.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. La SARL P. Ribotta et ses Fils reprend en appel les moyens tirés de l'absence de notification de l'arrêté du 30 mars 2011 aux maires d'arrondissements de la commune de Marseille, de l'absence d'avis de la chambre d'agriculture des Bouches-du-Rhône et de ce que cet avis ne figurait pas au dossier de l'enquête publique. Toutefois, il y a lieu d'écarter ces moyens, qui ne comportent aucun développement nouveau, par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges.
En ce qui concerne la concertation avec le public :
3. Aux termes de l'article L. 562-3 du code de l'environnement : " Le préfet définit les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles. (...) ". Aux termes de l'article R. 562-2 du code précité dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté fixant les modalités de la concertation : " L'arrêté prescrivant l'établissement d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles détermine le périmètre mis à l'étude et la nature des risques pris en compte. Il désigne le service déconcentré de l'Etat qui sera chargé d'instruire le projet. / Cet arrêté définit également les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet. / Cet arrêté définit également les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet. / Il est notifié aux maires des communes ainsi qu'aux présidents des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale compétents pour l'élaboration des documents d'urbanisme dont le territoire est inclus, en tout ou partie, dans le périmètre du projet de plan. / Il est, en outre, affiché pendant un mois dans les mairies de ces communes et aux sièges de ces établissements publics et publié au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département. Mention de cet affichage est insérée dans un journal diffusé dans le département. ". La concertation à destination du public prévue par ces dispositions doit porter sur la nature et les options essentielles du projet et se dérouler avant que celui-ci ne soit arrêté. Il incombe, par ailleurs, à l'autorité administrative de veiller au bon déroulement de la consultation dans le respect des modalités qu'elle a elle-même fixées.
4. Selon l'arrêté préfectoral du 30 avril 2011 prescrivant l'élaboration du PPRIF sur le territoire de la commune de Marseille, les modalités de la concertation avec la population dans le cadre de l'élaboration de ce plan consistaient en l'organisation d'au moins une réunion publique afin de présenter aux habitants les principes d'élaboration du plan de prévention et d'expliciter les mesures de prévention projetées, la présentation d'une exposition en mairie sur les principes d'élaboration du plan de prévention et les mesures de prévention projetées, la présence d'un registre permettant de recueillir les observations du public, ce dernier pouvant également faire parvenir ses remarques par courrier à la direction départementale des territoires de la mer (DDTM), la mise à disposition des documents concernant le PPRIF et l'organisation d'un forum sur le site internet de la préfecture de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et des Bouches-du-Rhône.
5. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie, notamment s'il n'a pas permis une bonne information de l'ensemble des personnes intéressées.
6. Il ressort des pièces du dossier et plus particulièrement du bilan de la concertation publique versé au débat que l'annonce de la concertation a été publiée par voie de presse et sur le site internet de la préfecture, que la mise à disposition des pièces du projet de PPRIF, en particulier, le rapport de présentation, le zonage et le règlement et d'un registre a été effectuée dans cinq mairies de secteur, ainsi que la mise en ligne de ces pièces sur le site de la préfecture des Bouches-du-Rhône, qu'il a également été prévue la possibilité de contacter la DDTM par courriel ou par courrier pour faire part de remarques éventuelles sur le projet précité, que cinq réunions publiques ont été organisées dans les mairies des secteurs I, IV, V, VI, VII et VIII organisées entre le 13 janvier et le 6 février 2017, mobilisant environ 300 personnes au total, ainsi que la mise en place d'une exposition de quatre panneaux dans cinq mairies de secteur. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le forum prévu par les modalités de la concertation fixées par l'arrêté du 30 avril 2011 mentionnées au point 4 ait été organisé. Néanmoins, le tribunal a estimé à juste titre que ce vice a été pallié par les autres initiatives de concertation prévues et respectées, notamment par la possibilité de solliciter la DDTM par courriel ou par courrier, l'organisation de réunions publiques et la tenue de registres lesquelles ont permis au public non seulement de s'informer du projet de plan au travers des documents variés mis à sa disposition, mais également d'être en mesure de pouvoir utilement faire connaître ses observations sur l'un des supports mis à sa disposition. Si la société requérante invoque une différence substantielle entre les mesures de concertation physique telle que les réunions et l'affichage en mairie et les mesures virtuelles telles que le forum qui ont des finalités différentes et des moyens différents, d'autres mesures virtuelles ont été organisées par le préfet telles que la mise en ligne des pièces du projet de plan sur le site de la préfecture des Bouches-du-Rhône et la possibilité de contacter la DDTM par courriel ou par courrier. Sur ce point, le bilan de la concertation mentionne que cette administration a reçu 23 courriers et que 81 mails ainsi que 12 remarques ont été inscrites sur les registres en mairie. Par suite et dans les circonstances de l'espèce, cette irrégularité n'a pas privé les personnes intéressées d'une garantie et n'a pas exercé une influence sur le sens de la décision prise lors de l'approbation du PPRIF en litige.
7. La société P. Ribotta et ses Fils soutient que seules cinq mairies de secteur ont fait l'objet d'un affichage, de la consultation des dossiers du plan en litige ainsi que de l'organisation de réunions publiques, pour les trois autres mairies de secteur représentant six arrondissements, il n'y avait aucun moyen sérieux de connaître l'existence d'une phase de concertation ni de faire valoir ses observations au service préfectoral compétent. Toutefois, elle ne conteste pas que la phase de concertation a été annoncée par voie de presse dans le journal quotidien La Provence et sur le site internet de la préfecture, certaines mairies de secteur ayant par ailleurs communiqué des informations sur la tenue des réunions publiques relatives au projet de plan contesté sur leur site internet et sur les réseaux sociaux. Ainsi, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté prescrivant le plan contesté, qui faisait état des modalités de la concertation en son article 4, a été, conformément aux dispositions de l'article R. 562-2 du code de l'environnement, publié au recueil des actes administratifs n° 92 de la préfecture des Bouches-du-Rhône du mois de juillet 2011 et a fait l'objet d'un avis dans le journal local " La Provence " le 10 mai 2011, ce dernier avis faisant état de l'affichage en mairie de cet acte pendant un mois. Dès lors, le moyen tiré de ce que le public n'aurait pas été suffisamment informé des modalités de la concertation doit être écarté.
8. La circonstance que la phase de concertation n'ait mobilisé que 300 personnes n'est pas de nature à établir qu'elle aurait été insuffisante. Il en va de même du fait qu'il n'y aurait eu que cinq réunions publiques dans les mairies de secteur alors que l'arrêté du 30 avril 2011 ne prévoyait l'organisation que d'au moins une réunion publique.
En ce qui concerne l'enquête publique :
9. L'article L. 562-1 du code de l'environnement dispose dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté prescrivant la réalisation du plan en litige que : " I.- L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II.- Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; / 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; / 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existants à la date de l'approbation du plan qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs. (...) ". L'article L. 562-4 du code précité prévoit dans sa version en vigueur alors que : " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique. Il est annexé au plan d'occupation des sols, conformément à l'article L. 126-1 du code de l'urbanisme. (...) ". Aux termes de l'article R. 562-2 du même code, dans sa rédaction applicable à la même date : " L'arrêté prescrivant l'établissement d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles détermine le périmètre mis à l'étude et la nature des risques pris en compte. Il désigne le service déconcentré de l'Etat qui sera chargé d'instruire le projet. (...) ". Selon l'article R. 562-3 du même code en vigueur à la date précitée : " 1° Une note de présentation indiquant le secteur géographique concerné, la nature des phénomènes naturels pris en compte et leurs conséquences possibles, compte tenu de l'état des connaissances ;/ 2° Un ou plusieurs documents graphiques délimitant les zones mentionnées aux 1° et 2° du II de l'article L. 562-1 ; / 3° Un règlement précisant, en tant que de besoin : / a) Les mesures d'interdiction et les prescriptions applicables dans chacune de ces zones en vertu des 1° et 2° du II de l'article L. 562-1 ; / b) Les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde mentionnées au 3° du II de l'article L. 562-1 et les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existant à la date de l'approbation du plan, mentionnées au 4° de ce même II. Le règlement mentionne, le cas échéant, celles de ces mesures dont la mise en oeuvre est obligatoire et le délai fixé pour celle-ci. ".
10. Il résulte des dispositions du II de l'article L. 562-1 du code de l'environnement, combinées à celles de son article L. 562-4 et de son article R. 562-3, que les documents graphiques des plans de prévention des risques naturels prévisibles, dont les prescriptions s'imposent directement aux autorisations de construire, doivent, au même titre que les documents d'urbanisme, être suffisamment précis pour permettre de déterminer les parcelles concernées par les mesures d'interdiction et les prescriptions qu'ils prévoient et, notamment, d'en assurer le respect lors de la délivrance des autorisations d'occupation ou d'utilisation du sol. Ces dispositions n'ont, toutefois, ni pour objet ni pour effet d'imposer que ces documents fassent apparaître eux-mêmes le découpage parcellaire existant.
11. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une enquête publique ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise à l'issue de cette enquête publique que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
12. Il ne ressort pas des extraits du rapport de la commission d'enquête dont se prévaut la société P. Ribotta et ses Fils que cette commission aurait estimé le zonage du PPRIF en cause incohérent ou entaché d'erreur dès lors qu'elle a seulement recommandé un affinage de l'analyse de la gradation entre deux zones adjacentes qui passent du rouge au bleu B2, une amélioration de la finesse des cartes, notamment entre deux planches adjacentes au niveau du recoupement ou une évolution de la précision des carte de zonage. Dans ses conclusions motivées, la commission d'enquête a admis que le contenu de la composition du projet était correct et parfaitement lisible par le public tout en donnant un avis favorable au projet de PPRIF qui était selon elle largement justifié. En outre, le commissaire enquêteur du secteur V où se situent les parcelles de la société requérante a admis que les documents étaient à la portée de tous, d'une excellente qualité, la méthode de classement des zones ayant été parfaitement comprise par la majorité du public, seules les cartes ont causé quelques difficultés. Par ailleurs, l'identification des parcelles et de leur risque était réalisée à partir d'un plan de Marseille puis du cadre de zonage dans le tableau d'assemblage et l'ouverture du fichier correspondant. Après avoir zoomé sur la parcelle recherchée grâce au fond cartographique, celle-ci apparaissait en transparence de façon suffisamment précise. La circonstance que la carte d'aléa ne soit pas définie suivant les parcelles cadastrales mais suivant les pixels de l'image informatique est sans incidence dès lors qu'ainsi qu'il a été dit au point 10, les dispositions du II de l'article L. 562-1 du code de l'environnement, combinées à celles de son article L. 562-4 et de son article R. 562-2 du même code n'ont ni pour objet ni pour effet d'imposer que ces documents fassent apparaître eux-mêmes le découpage parcellaire existant. Ainsi, les documents graphiques du dossier de l'enquête publique et en particulier, la carte de zonage, étaient suffisamment précis pour permettre aux personnes intéressées de déterminer les parcelles concernées par les mesures d'interdiction et les prescriptions qu'ils prévoient. Par suite, la société appelante n'est pas fondée à soutenir que le dossier mis à l'enquête publique serait entaché d'erreurs et d'imprécisions ni, en tout état de cause, que les documents graphiques de ce dossier auraient méconnu le principe de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme.
13. Aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans une présentation séparée, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet ".
14. Il résulte des dispositions combinées des articles L. 123-15 et R. 123-19 du code de l'environnement que, si elles n'imposent pas au commissaire-enquêteur ou à la commission d'enquête de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête publique, elles l'obligent à indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis.
15. En l'espèce, la commission d'enquête, composée de cinq membres en raison de l'ampleur du territoire de la commune de Marseille, a recueilli les observations du public, chaque membre de la commission étant chargé de l'un des secteurs de la commune concerné par le risque d'incendie de forêt. Aucune disposition législative ou réglementaire et notamment pas celle de l'article R. 123-19 du code de l'environnement interdisait à la commission d'enquête de se référer aux différents rapports émis par les commissaires enquêteurs de secteur lesquels ont suffisamment analysé la situation de chaque secteur et émis des avis personnels avec réserves après avoir examiné et répondu aux observations du public, comme c'est le cas des conclusions du commissaire du Vème secteur couvrant le 9ème et 10ème arrondissements de Marseille qui a notamment traité la demande de la société P. Ribotta et ses Fils. Par ailleurs, la commission d'enquête, après avoir présenté le plan en en litige et rappelé les modalités de l'enquête, a émis des conclusions suffisamment motivées sur la forme de la procédure et le fond. Sur ce dernier point, elle a constaté l'énorme risque d'incendie de forêt auquel certains secteurs de la commune de Marseille sont potentiellement confrontés, en relevant que celle-ci avait connu des feux de forêts importants à ses portes et qu'ainsi, le PPRIF apparaissait légitime. Elle a ainsi émis un avis favorable avec la réserve et les recommandations développées dans les conclusions motivées propres à chacun des secteurs soumis à l'enquête publique. Il s'ensuit que le rapport et les conclusions motivées de la commission d'enquête sont suffisamment motivés.
16. Aux termes de l'article L. 562-3 du code de l'environnement : " (...) / Après enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier et après avis des conseils municipaux des communes sur le territoire desquelles il doit s'appliquer, le plan de prévention des risques naturels prévisibles est approuvé par arrêté préfectoral. Au cours de cette enquête, sont entendus, après avis de leur conseil municipal, les maires des communes sur le territoire desquelles le plan doit s'appliquer. ". L'article R. 562-8 du code précité dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté contesté prévoit que : " (...) / Les maires des communes sur le territoire desquelles le plan doit s'appliquer sont entendus par le commissaire enquêteur ou par la commission d'enquête une fois consigné ou annexé aux registres d'enquête l'avis des conseils municipaux. ".
17. Il ressort des pièces du dossier que par une délibération du 20 octobre 2017, le conseil municipal de Marseille a émis un avis favorable au projet de PPRIF en litige dans le cadre de la consultation personnes et organismes associées. En revanche, il ne ressort pas du rapport de la commission d'enquête que le maire de Marseille ait été entendu par cette commission. Toutefois, comme le fait valoir la ministre de la transition écologique, le maire de Marseille a indiqué dans un courrier 12 juin 2020 adressé au préfet que " l'avis exprimé par le conseil municipal dans sa délibération du 16 octobre 2017 reflète exactement ma position et je n'ai pas d'autre remarque particulière à formuler à cet égard " et que " les personnes rencontrées par la commission d'enquête ont pu exprimer l'ensemble des remarques et observations au nom de la ville de Marseille ". Par suite, dans les circonstances de l'espèce, ce vice n'a pas eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ni n'a été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
En ce qui concerne les moyens tirés de l'erreur de droit et l'erreur manifeste d'appréciation entachant la méthodologie du PPRIF en litige :
18. Il résulte des dispositions mentionnées au point 9 que les plans de prévention des risques naturels prévisibles constituent des documents qui, élaborés à l'initiative de l'Etat, ont pour objet de définir, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, des zones exposées à des risques naturels à l'intérieur desquelles s'appliquent, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines, des contraintes d'urbanisme importantes.
19. La société P. Ribotta et ses Fils ne peut utilement se prévaloir de la note technique interministérielle du 29 juillet 2015 relative à la prise en compte du risque incendie de forêt dans les documents de prévention et d'aménagement du territoire dès lors qu'elle est postérieure à l'arrêté du 30 mars 2011 prescrivant le plan en litige, le préfet ne pouvait ainsi en tenir compte pour l'élaboration du plan contesté. En tout état de cause, il ressort du rapport de présentation du PPRIF contesté que six classes d'intensité ont été retenues, très faible, faible, moyenne, forte, très forte et exceptionnelle selon la grille établie par le CEMAGREF (IRSTEA) laquelle mentionne six classes y compris une classe exceptionnelle, dont la note technique précitée préconise l'utilisation. Par suite, la circonstance qu'une 6ème classe d'aléa " exceptionnel " ait été retenue au lieu des 5 classes préconisées par cette note est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté d'autant que, par principe, les PPRIF constituent des documents qui, élaborés à l'initiative de l'Etat, ont pour objet de définir, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, des zones exposées à des risques naturels à l'intérieur desquelles s'appliquent, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines, des contraintes d'urbanisme importantes comme dit au point 18. Par ailleurs, il ressort des énonciations du rapport de présentation que lors des visites de terrain, il a été tenu compte du débroussaillement. En outre, dans le cadre de la méthode d'élaboration de la cartographie de l'aléa, il a été réalisé une cartographie des types de végétation recensés sur le territoire de la commune de Marseille. Ce rapport mentionne aussi que l'évolution de la végétation a été retenue notamment après un incendie afin d'établir une carte d'aléa qui ne soit pas rapidement obsolète. Il s'ensuit que la méthodologie du PPRIF en litige n'est pas en contradiction avec les préconisations de la note technique du 29 juillet 2015 ni n'est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation quant au classement d'une partie de la parcelle cadastrée n° 959H5 en zone rouge :
20. Aux termes de l'article A2.2.3 de l'annexe 2 du règlement du PPRIF : " Proximité du point d'eau incendie au bâtiment : Toute construction ne devra pas se trouver éloignée de plus de 200 mètres d'un point d'eau normalisé ou d'une réserve agréée. / Ces distances sont mesurées en projection horizontale selon l'axe des circulations effectivement accessibles aux engins de secours ". En outre, le rapport de présentation du PPRIF précise que : " ne sont pris en compte que les hydrants publics présentant la garantie d'une accessibilité en tout temps pour les moyens de secours. Les éventuelles réserves privées ne sont pas intégrées à ce recensement (cas notamment des piscines) ".
21. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée n° 959H5 appartenant à la SARL P. Ribotta et ses Fils d'une superficie de 153 032 m² est classée dans le plan local d'urbanisme en zone UEa " zone économique - activités " dans sa partie ouest, sur une surface de 42 500 m², et en zone NL " zone naturelle - loi littoral " dans sa partie est. Elle est bordée au nord par une zone NL qui s'étend sur le massif. Selon le zonage brut de la carte d'aléa du PPRIF, la parcelle cadastrée n° 959H7 est classée en aléa faible et la parcelle n° 959H5 en aléa très fort dans sa bordure nord, puis vers l'est en aléa moyen puis faible. Cette carte montre également que la parcelle cadastrée n° 959H5 se situe, au nord et à l'est, en lisère d'un massif classé en aléa très fort, qui a été parcouru plusieurs fois par le feu selon la carte des feux élaborée par le SDIS. Par ailleurs, en juillet 2009, l'incendie de Carpiagne a ravagé la majeure partie de cette parcelle. Le constat d'huissier dressé le 28 novembre 2017 produit par la société P. Ribotta et ses Fils qui se borne a indiqué que toute la partie nord-est qui était à l'époque plantée mais au-delà des limites de la propriété du requérant, a brûlé n'est pas de nature à remettre en cause la carte des feux élaborée par le SDIS ni ne démontre que cette parcelle n'aurait pas brûlé lors de l'incendie précité. La visite du terrain effectuée le 3 décembre 2015, dans le cadre de l'élaboration du PPRIF a relevé qu'au nord de la carrière, des constructions sont en contact du massif en aléa très fort, que le secteur accueille une activité de dépôt de fioul domestique et que des dépôts sensibles sont entreposés à proximité des constructions. La seconde visite réalisée le 15 février 2018 a confirmé que le niveau d'aléa était fort. Ces deux visites ne sont ainsi pas contradictoires puisqu'elles concluent toutes les deux à un aléa fort. La requérante n'établit pas que la dangerosité de l'installation d'un dépôt de fioul sur la parcelle est à relativiser en se bornant à se prévaloir sans le démontrer de son positionnement sur le terrain alors que la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) a constaté lors de la visite de terrain du 3 décembre 2015 qu'il se situait à proximité des constructions qui sont au contact du massif classé en aléa très fort, ainsi que cela ressort du rapport du commissaire enquêteur du Vème secteur et des photos produites par le préfet des Bouches-du-Rhône en première instance. Si elle soutient que cet élément ne figure pas au titre de la méthodologie adoptée par le préfet, il ressort du rapport de présentation du PPRIF contesté que cette méthodologie prend en compte les différents types d'occupation du sol en vue de qualifier leur comportement vis-à-vis du feu et de définir leur plus ou moins grande sensibilité à un feu et leur capacité à le propager. Enfin, le commissaire enquêteur a estimé que si la partie construire située dans une zone en aléa faible pourrait effectivement être déclassée, " par contre le reste de la parcelle est classé en aléa très fort, en l'état il semble donc impossible de donner suite à leur demande pour le solde de terrain quelle que soit la défendabilité mise en évidence par leur constat ". Dans ces conditions, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en classant, après un premier zonage brut et une expertise de terrain, une partie de la parcelle n° 959H5 en aléa fort.
22. En deuxième lieu, il ressort de la carte versée au débat par le préfet des Bouches-du-Rhône que l'hydrant sur le terrain de la société Pissaro est situé à 320 m de la parcelle cadastrée n° 959H7 lorsque l'on suit les voies de circulation, soit au-delà de la distance des 200 m maximale requise par l'article A.2.2.3 du règlement du PPRIF mentionné au point 20. Cette carte indique également la présence d'un second hydrant à l'entrée de la parcelle cadastrée n° 959H7 situé à 200 m du début de l'autre parcelle cadastrée n° 959H5 classée en aléa très fort. Toutefois, si la présence de cet hydrant a permis le classement en zone bleue de la pointe ouest de cette dernière parcelle, il n'est pas démontré qu'il permettrait de défendre l'ensemble de cette parcelle d'une superficie de 153 032 m² et alors même que le préfet retiendrait une longueur supplémentaire de 80 m pour le rayon d'action de l'hydrant. Si la société requérante fait valoir qu'elle s'est engagée à prolonger le réseau incendie à moins de 200 mètres de la partie supérieure exploitable de la zone et à installer une citerne souple de 120 m3, le préfet n'avait pas à tenir compte des aménagements susceptibles d'être réalisés qui n'existaient pas à la date de l'arrêté contesté. En outre, la présence de deux bassins d'eau ne peut que constituer un moyen d'appoint d'une efficacité limitée dans la lutte contre les incendies dont il n'est pas démontré que la note technique du 29 juillet 2015 les prendrait en compte et alors que le rapport de présentation du PPRIF ne retient que les hydrants publics présentant la garantie d'une accessibilité en tout temps pour les moyens de secours. Ils sont ainsi sans incidence sur le classement opéré au regard des objectifs poursuivis par le plan qui vise à prévenir les risques naturels d'incendies de forêt.
23. En troisième lieu, il ne saurait être garanti par principe que la société P. Ribotta et ses Fils s'acquitte en permanence de son obligation de débroussaillement alors qu'il n'est pas démontré qu'il serait conforme aux règles fixées par l'arrêté du 12 novembre 2014 notamment en matière de distance minimale à respecter entre les houppiers des arbres. Enfin la circonstance que le terrain serait entièrement accessible par des voies doubles quotidiennement empruntées par des poids lourds n'est pas à elle seule de nature à établir le caractère défendable de la partie de la parcelle cadastrée n° 959H5 en zone rouge.
24. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 20 à 23, le classement d'une partie de la parcelle cadastrée n° 959H5 de la SARL P. Ribotta et ses Fils en zone rouge n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
25. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL P. Ribotta et ses Fils n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 22 mai 2018. Par voie de conséquence, ces conclusions subsidiaires tendant à l'annulation de cet arrêté en tant qu'il classe les parcelles cadastrées n° 959H5 et n° 959H7 en zone rouge doivent être rejetées.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
26. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par la SARL P. Ribotta et ses Fils n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction de la SARL P. Ribotta et ses Fils.
Sur les frais liés au litige :
27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la SARL P. Ribotta et ses Fils au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL P. Ribotta et ses Fils est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL P. Ribotta et ses Fils et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré après l'audience du 4 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,
- Mme Ciréfice, présidente assesseure,
- Mme Marchessaux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 novembre 2022.
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N° 20MA03398
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