Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2017 par lequel le maire de Gignac-la-Nerthe a refusé de lui délivrer un permis de construire.
Par un jugement n° 1706591 du 11 février 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 7 mai 2020 et le 2 mars 2022, M. B... A..., représenté par Me Porta, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 11 février 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2017 par lequel le maire de Gignac-la-Nerthe a refusé de lui délivrer un permis de construire ;
3°) d'enjoindre au maire de Gignac-la-Nerthe de délivrer le permis sollicité ou à défaut de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Gignac-la-Nerthe la somme de 4 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la requête d'appel n'est pas tardive ;
- le jugement a été obtenu par la fraude ;
- le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article A2 du règlement du plan local d'urbanisme et l'article R. 151-23 du code de l'urbanisme ;
- le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme relatives au raccordement et le coût des travaux de raccordement peut être mis à la charge du pétitionnaire en application des dispositions de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme ;
- le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article A4 du règlement du plan local d'urbanisme sur la desserte en eau potable pour le logement, et en eau brute pour le poulailler, et en assainissement pour le poulailler ;
- le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article A11 du règlement du plan local d'urbanisme relatives aux tuiles rondes ;
- le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article A13 du règlement du plan local d'urbanisme relatives à l'insertion paysagère ;
- le refus de permis résulte d'une discrimination opérée spécifiquement à son encontre en méconnaissance des stipulations de l'article premier du premier protocole additionnel et de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 février 2022, la commune de Gignac-la-Nerthe, représentée par Me d'Albenas, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que la requête d'appel est irrecevable car tardive et que les moyens de la requête sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- les observations de Me Porta représentant M. A... et celles de Me d'Albenas représentant la commune de Gignac-la-Nerthe.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 20 juillet 2017, le maire de Gignac-la-Nerthe a refusé de délivrer à M. A... un permis de construire portant sur la réalisation, sur un terrain situé Bricard Nord, cadastré section AA n° 109, d'un bâtiment agricole à usage d'élevage de poulets et d'une habitation. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Si M. A... soutient que la commune a communiqué au tribunal, à la suite d'une demande de pièce formulée le 3 décembre 2019 en vue de compléter l'instruction, un dossier de permis incomplet qui aurait induit les premiers juges en erreur, cette circonstance, qui relève du bien-fondé du jugement, est sans influence sur la régularité du jugement. Au demeurant, ces pièces ont été soumises le 9 décembre 2019 au contradictoire. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté.
Sur de bien-fondé du jugement :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés ". Ces dispositions poursuivent notamment le but d'intérêt général d'éviter à la collectivité publique ou au concessionnaire d'être contraints, par le seul effet d'une initiative privée, de réaliser des travaux d'extension ou de renforcement des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité et de garantir leur cohérence et leur bon fonctionnement, en prenant en compte les perspectives d'urbanisation et de développement de la collectivité. Il en résulte qu'un permis de construire ne peut être délivré, lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et, d'autre part, l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation. En vertu des dispositions de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme, les bénéficiaires d'autorisations de construire peuvent être tenus de réaliser et de financer les équipements propres à l'opération autorisée mentionnés à l'article L. 332-15 dudit code. Il résulte de ce dernier article que, pour l'alimentation en électricité, relèvent des équipements propres à l'opération ceux qui sont nécessaires à la viabilité et à l'équipement de la construction ou du terrain jusqu'au branchement sur le réseau public d'électricité qui existe au droit du terrain, en empruntant, le cas échéant, des voies privées ou en usant de servitudes, ou, dans les conditions définies au troisième alinéa de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme, en empruntant, en tout ou partie, des voies ou emprises publiques, sous réserve dans ce dernier cas que le raccordement n'excède pas cent mètres. En revanche, pour l'application de ces dispositions, les autres équipements de raccordement aux réseaux publics d'électricité, notamment les ouvrages d'extension ou de branchement en basse tension, et, le cas échéant, le renforcement des réseaux existants, ont le caractère d'équipements publics.
4. Le maire de Gignac-la-Nerthe a refusé de délivrer le permis de construire sollicité par M. A..., au motif notamment que le projet en litige n'est pas desservi par un réseau public de distribution d'électricité et que la commune n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quel concessionnaire les travaux pourraient être exécutés. Il ressort des pièces du dossier que le projet en litige a pour objet la réalisation d'une habitation et d'un élevage de volailles nécessitant une alimentation en électricité et que, selon l'avis rendu par la société ENEDIS le 10 mars 2017, le raccordement au réseau existant, quoi que distant d'une trentaine de mètres de la parcelle, nécessite d'étendre la ligne haute tension d'une vingtaine de mètres et d'implanter un poste de transormation de haute tension en basse tension PPS B permettant son raccordement. Or, il résulte des dispositions précitées que les ouvrages de branchement en basse tension ont le caractère d'équipements publics et qu'en l'absence d'un tel équipement, la parcelle ne peut être regardée comme desservie. Il ne ressort également d'aucun élément présent au dossier qu'une extension du réseau public de distribution d'électricité ait été envisagée dans ce secteur non urbanisé et que le maire de Gignac-la-Nerthe était en mesure d'indiquer dans quel délai ces travaux pourraient être exécutés. La seule circonstance que l'opérateur ENEDIS soit en capacité de réaliser l'extension dans un délai de quatre à six mois ne peut, en l'absence de décision en ce sens de la commune qui en est le cofinanceur, être regardé comme un délai d'exécution des travaux. Dans ces conditions, au regard de l'absence de raccordement possible au réseau de distribution d'électricité, le maire de Gignac-la-Nerthe était tenu de refuser le permis de construire en litige sollicité par M. A....
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article A4 du règlement du plan local d'urbanisme de Gignac-la-Nerthe : " Toute constructions ou installations requérant une alimentation en eau doivent être raccordées au réseau public d'assainissement s'il existe. / (...) Dans les secteurs non desservis (...) : - dans les secteurs favorables à l'assainissement non collectif (...), un dispositif conforme à la réglementation en vigueur est autorisée sous réserve du respect de l'article 5. / - Toutefois, l'assainissement non collectif est interdit (...) pour les activités sauf à précéder à une étude spécifique de faisabilité déterminant la filière, le positionnement et le dimensionnement adapté ".
6. Il ressort des pièces du dossier, alors même qu'il est constant que l'élevage de volailles envisagé doit être raccordé à l'eau et qu'il est situé dans une zone non desservie par l'assainissement collectif, qu'aucun dispositif d'assainissement non collectif n'a été prévu pour cette installation. Si le pétitionnaire soutient qu'il envisage de travailler sur litière accumulée, cette circonstance ne l'exonère pas de prévoir un système d'assainissement adapté aux eaux résiduelles issue de l'exploitation. Par suite, la commune est fondée à soutenir que le projet méconnait les dispositions de l'article A4 du règlement du plan local d'urbanisme en ce qui concerne le projet de construction d'un poulailler.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article A2 du plan local d'urbanisme : " Sont autorisées sous conditions (...) les constructions à usage d'habitation et leurs annexes à condition que leur présence sur la zone soit nécessaire pour le fonctionnement de l'exploitation ".
8. Le requérant soutient que le logement dont il demande le permis de construire serait nécessaire à son exploitation agricole. Il se prévaut à ce titre d'un rapport d'expert établi par M. C..., ingénieur agronome, qui indique que la présence de M. A... sur l'exploitation est nécessaire en permanence. Toutefois, si le rapport souligne l'obligation de nourrir quotidiennement les animaux et régler la température du poulailler, d'assurer la protection contre les prédateurs, d'accueillir des agents de services sanitaires et fournisseurs ou encore d'assurer une surveillance sanitaire, il n'établit nullement que de telles tâches nécessitent une présence permanente sur le site, ces dernières pouvant soit être réalisées en journée et automatisées, soit, s'agissant des prédateurs, être assurées par des éléments de protection au demeurant prévus dans le permis de construire. Par suite, la commune est fondée à soutenir que le projet méconnait les dispositions de l'article A2 du règlement du plan local d'urbanisme en ce qui concerne la présence d'un logement sur l'exploitation.
9. Il résulte de ce qui précède qu'en fondant son refus sur la méconnaissance de règles d'urbanisme, le maire ne peut être regardé comme ayant entaché sa décision d'une discrimination à l'égard de M. A... et ainsi comme ayant méconnu les stipulations de l'article premier du premier protocole additionnel et de l'article 14 de la convention européenne des droits de l'homme.
10. Par suite, et sur ces seuls motifs, le maire était fondé à s'opposer à la demande du permis de construire sollicité. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner la tardiveté de la requête opposée par la commune de Gignac-la-Nerthe, M. A... n'est pas fondé à se plaindre que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête à fin d'annulation de l'arrêté du 20 juillet 2017. Dès lors, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Gignac-la-Nerthe, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée par M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. A... une somme à verser à la commune de Gignac-la-Nerthe au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Gignac-la-Nerthe tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Gignac-la-Nerthe.
Délibéré après l'audience du 27 octobre 2022, où siégeaient :
- M. Portail, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. Quenette, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 novembre 2022.
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N° 20MA01803
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