La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/11/2022 | FRANCE | N°21MA01160

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 08 novembre 2022, 21MA01160


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 7 novembre 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable du 22 juin 2017 devant la commission des recours des militaires contre les décisions du 16 juin 2017 portant non attribution d'un pécule modulable d'incitation au départ (PMID) pour l'année 2017 et du 13 juillet 2017 portant non attribution de la pension afférente au grade supérieur (PAGS), d'autre part, d'enjoindr

e à la ministre, à titre principal, de lui octroyer la pension afférente ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 7 novembre 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable du 22 juin 2017 devant la commission des recours des militaires contre les décisions du 16 juin 2017 portant non attribution d'un pécule modulable d'incitation au départ (PMID) pour l'année 2017 et du 13 juillet 2017 portant non attribution de la pension afférente au grade supérieur (PAGS), d'autre part, d'enjoindre à la ministre, à titre principal, de lui octroyer la pension afférente au grade supérieur dans les deux mois suivant la notification du jugement, et à titre subsidiaire, de réexaminer son dossier pour statuer à nouveau sur ses demandes à bénéficier de la pension afférente au grade supérieur et du pécule modulable d'incitation au départ et ce, sous astreinte de 250 euros par jour de retard suivant la notification du jugement à intervenir, et, enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par ordonnance du 8 février 2018, la présidente de la 5ème section du tribunal administratif de Paris a transmis au tribunal administratif de Toulon le dossier de la requête de M. A....

M. A... a, par ailleurs, demandé au tribunal administratif de Toulon, par une requête distincte, d'une part, d'annuler, à titre principal, la décision du 18 septembre 2018 faisant suite à son recours exercé devant la commission des recours des militaires par laquelle la ministre des armées lui a refusé le bénéfice du pécule modulable d'incitation au départ (PMID) au titre de l'année 2018, et à titre subsidiaire, d'annuler cette décision en tant qu'elle lui a refusé le bénéfice de la pension afférente au grade supérieur (PAGS), d'autre part, d'enjoindre à la ministre de régulariser sa situation, sous astreinte de 250 euros par jour de retard à compter d'un délai d'un mois suivant la notification du jugement à intervenir, et, enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1800470, 1803669 du 21 janvier 2021, le tribunal administratif de Toulon a annulé les décisions des 7 novembre 2017 et 18 septembre 2018, a enjoint à la ministre des armées d'octroyer à M. A... la pension afférente au grade supérieur dans un délai de deux mois, et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'instance n° 1800470 et la somme de 1 500 euros au titre de l'instance n° 1803669 en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

I - Par une requête et un mémoire, enregistrés le 22 mars 2021 et le 23 avril 2021 sous le n° 21MA01160, la ministre des armées demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1800470, 1803669 du 21 janvier 2021 du tribunal administratif de Toulon, et de rejeter la demande de première instance de M. A....

Elle soutient que c'est à tort que ce jugement a retenu une erreur manifeste d'appréciation à l'encontre des décisions attaquées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mars 2022, M. A..., représenté par Me Hoffmann, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que le moyen soulevé par la ministre n'est pas fondé, de sorte que le jugement du tribunal administratif de Toulon sera confirmé.

II - Par une requête, enregistrée le 23 avril 2021 sous le n° 21MA01627, la ministre des armées demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Toulon du 21 janvier 2021.

Elle soutient qu'elle développe à l'appui de sa demande d'annulation de ce jugement des moyens sérieux de nature à en justifier l'annulation, et que le versement des sommes auquel il a été enjoint de procéder s'avère particulièrement complexe.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2021, M. A..., représenté par Me Hoffmann, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que le moyen soulevé par la ministre n'est pas fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 ;

- l'arrêté du 21 décembre 2016 pris en application des articles 36 et 38 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., officier supérieur de la marine, capitaine de frégate, a demandé à bénéficier d'une aide au départ sous la forme d'un pécule modulable d'incitation au départ (PMID) ou d'une pension afférente au grade supérieur (PAGS) au titre de l'année 2017. Par décisions du 16 juin 2017 et du 13 juillet 2017, le bénéfice de ces dispositifs lui a été refusé, et, après avis de la commission de recours des militaires, la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable obligatoire par décision du 7 novembre 2017. M. A... a réitéré ses demandes au titre de l'année 2018. Par décision du 18 septembre 2018, la ministre a rejeté le recours administratif préalable obligatoire exercé par l'intéressé à l'encontre des décisions lui ayant refusé le bénéfice du PMID et de la PAGS au titre de l'année 2018. Par jugement n° 1800470, 1803669 du 21 janvier 2021, le tribunal administratif de Toulon a annulé les décisions des 7 novembre 2017 et 18 septembre 2018 et enjoint à la ministre des armées d'octroyer à M. A... la pension afférente au grade supérieur dans un délai de deux mois. La ministre des armées relève appel de ce jugement par sa requête n° 21MA01160 et demande le sursis à exécution par sa requête n° 21MA01627.

2. Les requêtes n° 21MA01160 et n° 21MA01627 présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Par suite, il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt.

Sur l'appel :

3. Aux termes du I de l'article 36 de la loi du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 : " Les officiers de carrière en position d'activité servant dans les grades de colonel, de lieutenant-colonel, de commandant, de capitaine ou dans un grade équivalent et les sous-officiers de carrière en position d'activité servant dans les grades d'adjudant-chef, d'adjudant ou dans un grade équivalent qui ont accompli, à la date de leur radiation des cadres, survenue entre le 1er janvier 2014 et le 31 décembre 2019, la durée de services effectifs prévue respectivement au 1° ou au 2° du II de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite et qui se trouvent à plus de cinq ans de la limite d'âge applicable à leur grade avant l'entrée en vigueur de la présente loi peuvent, sur demande agréée par le ministre de la défense, bénéficier de la liquidation immédiate d'une pension dans les conditions prévues par le présent article ". Aux termes du I de l'article 38 de cette même loi : " Peuvent prétendre, à compter du 1er janvier 2014 et jusqu'au 31 décembre 2019, sur demande agréée par le ministre de la défense et dans la limite d'un contingent annuel fixé par arrêté conjoint du ministre de la défense et des ministres chargés de la fonction publique et du budget, au versement d'un pécule modulable d'incitation au départ déterminé en fonction de la solde budgétaire perçue en fin de service : 1° Le militaire de carrière en position d'activité se trouvant à plus de trois ans de la limite d'âge de son grade et pouvant bénéficier d'une solde de réserve en application de l'article L. 51 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'une pension de retraite liquidée dans les conditions fixées aux articles L. 24 et L. 25 du même code ; (...) Le pécule est attribué en tenant compte des nécessités du service, de l'ancienneté de service du militaire et de l'intervalle le séparant de la limite d'âge de son grade ".

4. Il résulte de ces dispositions que le bénéfice de l'avantage qu'elles prévoient est subordonné non seulement à la réunion, par les militaires qui le demandent, de certaines conditions d'âge et d'ancienneté, mais encore à l'agrément du ministre qui peut l'accorder ou le refuser après avoir procédé à un examen particulier de la demande et par des motifs tirés exclusivement des besoins du service.

5. Pour rejeter les demandes de M. A... tendant au bénéfice du PMID et de la PAGS, qui constituent deux des leviers conjoncturels intégrés au dispositif d'incitation au départ des militaires dans un objectif de renforcement des missions opérationnelles et prioritaires, la ministre des armées, qui ne conteste pas que l'intéressé remplissait les conditions d'âge, d'ancienneté ou de grade fixées pour être éligible à ces avantages, s'est néanmoins fondée sur la circonstance qu'il présentait un potentiel d'employabilité avéré nécessitant, pour les besoins du service, qu'il soit conservé dans ses effectifs. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'après avoir été placé en disponibilité de 2011 à 2016, M. A... a sollicité, et obtenu, sa réintégration dans les services du ministère à compter du 21 mars 2016 et qu'il a été affecté sur un poste de responsable soutien technique au sein de la division infrastructures de l'état-major de commandement de la région maritime méditerranée. Si la ministre soutient que M. A... a donné entière satisfaction sur ce poste sensible et correspondant tant à son grade qu'à ses qualifications, il ressort des pièces du dossier que cette affectation a été réalisée dans un contexte de retour après plusieurs années de disponibilité, sur un poste destiné à un capitaine de corvette et pouvant, le cas échéant, être occupé par un lieutenant de vaisseau, grade correspondant à un officier subalterne. Au demeurant, alors que la notation de 2017 fait état " d'un positionnement et d'objectifs à venir à préciser ", la ministre des armées ne saurait, à la vue de cette seule notation indiquant, il est vrai, la réalisation d'un travail sérieux et efficace, soutenir que la manière de servir de l'intéressé, jugée excellente, commandait qu'il soit conservé dans l'intérêt du service, alors même que ce poste ne correspondait pas à son grade et qu'aucun poste de cette nature ne lui a été proposé. En outre, à supposer même que le tribunal aurait commis un amalgame entre le potentiel d'employabilité dans le grade et le potentiel pour l'accession au grade de capitaine de vaisseau, il ressort du relevé classant les officiers en 2017 que M. A... n'a pas été inscrit au tableau d'avancement en raison d'un potentiel d'emploi à tendance négative, ce qui corrobore l'affirmation selon laquelle une telle circonstance l'a placé dans une situation concurrentielle défavorable, par rapport aux officiers mieux classés, pour obtenir un poste valorisant. Au demeurant, en se bornant à faire état de l'existence de 116 postes vacants à l'issue du plan annuel de mutations 2017 et de 197 postes vacants à l'issue du plan de mutation de 2018, ainsi que de postes à l'étranger, plus précisément à l'OTAN, qui auraient pu lui être proposés, ou encore au sein de la direction interarmées des réseaux d'infrastructure et des systèmes d'information, sans apporter la moindre précision sur la nature des postes, correspondant à son grade, réellement vacants et sur lesquels M. A... aurait été à même de faire bénéficier le service de ses compétences, notamment dans le domaine informatique, la ministre n'établit pas la réalité du potentiel d'employabilité allégué, et ce, en dépit du contexte d'arrêt de la diminution des effectifs depuis les attentats de 2015. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé ses décisions des 7 novembre 2017 et 18 septembre 2018.

6. Il résulte de ce qui précède que la requête d'appel de la ministre des armées doit être rejetée.

Sur la demande de sursis à exécution :

7. La Cour s'étant prononcée sur l'appel de la ministre des armées contre le jugement du 21 janvier 2021, il n'y a pas lieu pour elle de statuer sur les conclusions de son recours tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.

Sur les frais d'instance :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 21MA01627 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 1800470, 1803669 du 21 janvier 2021 du tribunal administratif de Toulon.

Article 2 : La requête n° 21MA01160 de la ministre des armées est rejetée.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros à M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2022, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 novembre 2022.

2

N° 21MA01160, 21MA01627


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01160
Date de la décision : 08/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

48-02-03-02 Pensions. - Pensions civiles et militaires de retraite. - Pensions militaires. - Conditions d'ouverture du droit à pension.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Stéphen MARTIN
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : HOFFMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-11-08;21ma01160 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award