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08/11/2022 | FRANCE | N°20MA00080

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 08 novembre 2022, 20MA00080


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2016 par lequel le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a suspendu son traitement, à compter du 21 décembre 2015, ensemble toutes les décisions administratives prises sur le fondement de cet arrêté, d'autre part, d'enjoindre à l'Etat d'annuler la révision de sa pension de retraite faisant état d'une fin de carrière au 21 décembre 2015, et de la réactualiser en tenant compte d'une fin de

carrière au 31 août 2016, dans un délai d'un mois et sous astreinte de 200 euro...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2016 par lequel le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a suspendu son traitement, à compter du 21 décembre 2015, ensemble toutes les décisions administratives prises sur le fondement de cet arrêté, d'autre part, d'enjoindre à l'Etat d'annuler la révision de sa pension de retraite faisant état d'une fin de carrière au 21 décembre 2015, et de la réactualiser en tenant compte d'une fin de carrière au 31 août 2016, dans un délai d'un mois et sous astreinte de 200 euros par jour de retard, et, enfin, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1604210 du 8 novembre 2019, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 janvier et 25 juin 2020, M. B..., représenté par Me Bringmann-Sousse, demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler, ou, à titre subsidiaire, de réformer ce jugement du tribunal administratif de Nice du 8 novembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la zone de défense et de sécurité Sud du 8 juillet 2016, ensemble le titre de perception émis le 5 octobre 2016 en vue de la régularisation d'un indu de rémunération d'un montant de 18 706,72 euros, ainsi que " la révision de sa pension de retraite " ;

3°) d'enjoindre à l'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens de l'instance.

Il soutient que :

- le jugement attaqué rendu par le tribunal administratif de Nice est irrégulier en ce qu'il ne prend pas la juste mesure des moyens soulevés ;

- sur la légalité externe : la procédure suivie par le comité médical est entachée de plusieurs vices et il en résulte que le tribunal administratif de Nice a commis une erreur d'appréciation des faits ;

. réuni le 5 juillet 2016, le comité médical n'a pas procédé à un nouvel examen de sa situation : il s'est contenté de confirmer son précédent avis du 10 mai 2016, sans nouvelle instruction, ni examen médical ;

. l'avis du comité médical du 10 mai 2016 se fonde sur un certificat d'aptitude daté du 9 mai 2016, soit la veille ; sur ce certificat, il est indiqué que les conclusions du médecin qui l'a examiné le 13 avril 2016 interviennent " après expertise spécialisée et avis du CMI du 10/05/2016 ", alors que ledit comité ne s'était pas encore réuni ; par ailleurs, ce médecin ne se prononce pas sur son état de santé et son aptitude au service pour la période antérieure à l'examen qu'il a effectué le 13 avril 2016 ; le comité médical, dans son avis du 10 mai 2016, n'a pas pu statuer sur son aptitude, de façon rétroactive au 21 décembre 2015 ;

. le tribunal administratif de Nice ne pouvait pas s'appuyer sur le courrier du 16 juin 2016 dès lors que ce courrier est antérieur à la réunion du comité médical du 5 juillet 2016 ; l'information contenue dans ce courrier était, en outre, incomplète car elle n'indiquait ni les délais, ni le destinataire du recours ;

- sur la légalité interne :

. le tribunal administratif de Nice a commis une erreur de droit en jugeant que le nouvel arrêté de travail n'est que la prolongation du précédent ;

. contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Nice, la décision de maintenir son traitement ne peut être qualifiée de mesure conservatoire ; il s'agit d'une décision créatrice de droit ; l'arrêté contesté du 8 juillet 2016 qui porte ainsi retrait d'une décision créatrice de droit procède donc d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 242-2 du code des relations entre le public et l'administration mais aussi alors qu'il ne peut être avancé d'erreur de liquidation ;

. cette décision portant maintien de son traitement, sans réserve, a créé, envers lui, une confiance légitime tenant à ce que ce traitement ne lui soit pas ultérieurement retiré avec effet rétroactif ;

. l'administration comme le tribunal administratif de Nice ont commis une erreur d'appréciation de faits en faisant abstraction du fait qu'il avait été placé en arrêt maladie jusqu'au 21 février 2016 ; ainsi, la mise en demeure en date du 12 février 2016 était objectivement injustifiée ;

. ses traitements ont été versés alors même que l'administration était informée de sa situation et le moyen tiré du service non fait doit donc être écarté ;

. l'avis du médecin inspecteur régional du 12 février 2016 joint à la mise en demeure datée du même jour, n'a pas été précédé d'un nouvel examen de son état de santé ; le préfet ne pouvait fonder sa décision sur cet avis ;

. l'arrêté du 8 juillet 2016 se présente comme une mesure de sanction pour un prétendu service non fait, et non comme une régularisation de la demande de placement en congé de longue maladie ;

- c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a écarté comme inopérant le moyen tiré de ce que l'administration a commis une erreur d'appréciation en révisant sa pension de retraite et en ne lui versant pas son salaire du mois d'août 2016 au motif que celui-ci est dénué de tout lien avec l'arrêté litigieux ;

- il est légitime à solliciter l'annulation du titre de perception lui réclamant la somme de 18 706,72 euros ainsi que la révision de sa pension de retraite ;

- le tribunal administratif de Nice n'a pas statué sur sa demande à fin d'injonction et a ainsi commis une nouvelle erreur de droit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mai 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué manque en fait ;

- le moyen tiré de l'erreur de droit est inopérant ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés et il s'en réfère tant aux écritures en défense produites en première instance qu'à la motivation du jugement attaqué du tribunal administratif de Nice.

Par une ordonnance du 5 février 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 février 2021, à 12 heures.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur des moyens relevés d'office tirés :

. de l'incompétence de la cour administrative d'appel pour connaître de la partie du jugement attaqué du 8 novembre 2019 du tribunal administratif de Nice se prononçant sur les conclusions tendant à l'annulation du titre de pension concédé à M. B... par un arrêté du 8 août 2016, laquelle, en application du 7° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, a été rendue en premier et dernier ressort et n'est donc susceptible que d'un pourvoi en cassation formé devant le Conseil d'Etat ;

. et de l'irrecevabilité des conclusions présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Nice tendant à l'annulation du titre de perception émis le 5 octobre 2016 d'un montant de 18 706,72 euros, faute d'avoir été précédées de la réclamation auprès du comptable chargé de son recouvrement, prévue à l'article 118 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.

Des observations en réponse à ces deux moyens d'ordre public, présentées pour M. B..., par Me Bringmann-Sousse, ont été enregistrées les 6 et 13 octobre 2022.

Il soutient que :

- s'agissant de ce premier moyen d'ordre public :

. le litige concerne un différend en matière de congé maladie de longue durée et l'aptitude de l'agent au service et ne relève pas des litiges en matière de pensions au sens du 7° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative ; s'il sollicite l'annulation de " toutes les décisions administratives sur le fondement de l'arrêté litigieux ", dont celle portant révision de sa pension de retraite, cette partie de sa requête n'est pas dissociable du reste du litige et elle doit en conséquence être attribuée à la compétence de la Cour ;

. le tribunal administratif de Nice n'a pas estimé avoir statué en premier et

dernier ressort, le courrier de notification du jugement ayant visé le recours en appel pour l'ensemble du litige ;

. a contrario, il y aurait lieu, en application des dispositions de l'article R. 351-2 du code de justice administrative de renvoyer ces conclusions au Conseil d'Etat ;

- s'agissant de ce second moyen d'ordre public : il a contesté le titre de perception émis le 5 octobre 2016, par courrier du 21 novembre 2016 et il verse, à ce titre, une nouvelle pièce aux débats.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 61-825 du 29 juillet 1961 ;

- la loi de finances rectificative du 29 juillet 1961 ;

- la loi n° 83 634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 8 juillet 2016, le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a privé M. B..., alors brigadier de police, affecté à la circonscription de sécurité publique (CSP) de Nice, de son traitement, avec effet rétroactif, à compter du 21 décembre 2015. M. B... relève appel du jugement du 8 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant principalement à l'annulation de cet arrêté, ensemble les décisions administratives prises sur son fondement, soit, eu égard aux termes de ses écritures et des pièces qui y étaient jointes, le titre de perception émis le 5 octobre 2016 d'un montant de 18 706,72 euros en vue de la régularisation d'un indu de rémunération et l'arrêté du 8 août 2016 portant révision du titre de pension qui lui a été concédé par un arrêté du 27 juin 2016.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 août 2016 portant révision du titre de pension qui lui a été concédé par un arrêté du 27 juin 2016 :

2. L'article R. 811-1 du code de justice administrative dispose que : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. / Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : / (...) 7° Sur les litiges en matière de pensions de retraite des agents publics (...) ".

3. Les conclusions présentées par M. B... tendant à l'annulation du jugement attaqué rendu par le tribunal administratif de Nice le 8 novembre 2019 en tant que celui-ci a statué sur sa demande dirigée contre l'arrêté du 8 août 2016 portant révision du titre de pension qui lui a été concédé par un arrêté du 27 juin 2016 se rapportent à un litige en matière de pensions, sans pouvoir être regardé comme étant indissociables du litige relatif à la légalité de l'arrêté du 8 juillet 2016 du préfet de la zone de défense et de sécurité Sud. En vertu des dispositions précitées de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, de telles conclusions ne ressortissent pas à la compétence de la Cour mais à celle du Conseil d'Etat, statuant en tant que juge de cassation. Il y a lieu, dès lors, de transmettre au Conseil d'Etat ces conclusions qui ne sont pas manifestement irrecevables.

Sur la régularité du jugement attaqué du tribunal administratif de Nice du 8 novembre 2019 :

4. D'une part, si M. B... soutient que le jugement attaqué rendu par le tribunal administratif de Nice serait irrégulier " en ce qu'il ne prend pas la juste mesure des moyens soulevés ", une telle critique ne relève pas de la régularité de cette décision juridictionnelle mais de son bien-fondé.

5. D'autre part, il ressort de la lecture du jugement attaqué du 8 novembre 2019 que les premiers juges ont indiqué, en son point 10, rejeter la demande de première instance " en toutes ses conclusions ". Dans ces conditions, le moyen, au demeurant soulevé sans aucune autre précision par M. B..., et tiré de l'omission à statuer sur les conclusions à fin d'injonction ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué du tribunal administratif de Nice du 8 novembre 2019 :

En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2016 du préfet de la zone de défense et de sécurité Sud,et du titre de perception émis le 5 octobre 2016 :

6. D'une part, aux termes de l'article 20 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. (...) ". Selon l'article 64 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Les fonctionnaires régis par le présent titre ont droit, après service fait, à une rémunération fixée conformément aux dispositions de l'article 20 du titre Ier du statut général. " Enfin, aux termes de l'article 4 de la loi susvisée du 29 juillet 1961 de finances rectificatives pour 1961, dans sa rédaction applicable au présent litige : " (...) L'absence de service fait, pendant une fraction quelconque de la journée, donne lieu à une retenue dont le montant est égal à la fraction du traitement frappée d'indivisibilité en vertu de la réglementation prévue à l'alinéa précédent. / Il n'y a pas service fait : / 1°) Lorsque l'agent s'abstient d'effectuer tout ou partie de ses heures de services ; / 2°) Lorsque l'agent, bien qu'effectuant ses heures de service, n'exécute pas tout ou partie des obligations de service qui s'attachent à sa fonction telles qu'elles sont définies dans leur nature et leurs modalités par l'autorité compétente dans le cadre des lois et règlements. (...) ". Il résulte de ces dispositions que le fonctionnaire n'a droit au paiement de son traitement qu'en contrepartie de l'accomplissement de son service.

7. D'autre part, si les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir, s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires, l'administration peut, en dérogation à cette règle, leur conférer une portée rétroactive dans la stricte mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation (Conseil d'Etat, 17 mars 2004, n° 225426, B).

8. Enfin, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) ". L'article 25 du décret susvisé du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des conseils médicaux, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, dispose, dans sa rédaction applicable au présent litige, que : " Pour obtenir un congé de maladie ainsi que le renouvellement du congé initialement accordé, le fonctionnaire adresse à l'administration dont il relève, dans un délai de quarante-huit heures suivant son établissement, un avis d'interruption de travail. Cet avis indique, d'après les prescriptions d'un médecin, d'un chirurgien-dentiste ou d'une sage-femme, la durée probable de l'incapacité de travail. / (...) L'administration peut faire procéder à tout moment à la contre-visite du demandeur par un médecin agréé ; le fonctionnaire doit se soumettre, sous peine d'interruption du versement de sa rémunération, à cette contre-visite. / Le comité médical compétent peut être saisi, soit par l'administration, soit par l'intéressé, des conclusions du médecin agréé. " Si, en vertu des dispositions précitées, l'agent qui adresse à l'administration un avis d'interruption de travail est placé de plein droit en congé de maladie dès la demande qu'il a formulée sur le fondement d'un certificat médical, cela ne fait pas obstacle à ce que l'administration conteste le bien-fondé de ce congé.

9. Par ailleurs, aux termes de l'article 113-45 de l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale : " Les fonctionnaires actifs des services de la police nationale atteints d'une maladie dûment constatée, les mettant dans l'impossibilité d'assurer leur service, sont de droit placés en congé de maladie, conformément aux dispositions du titre III du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 modifié. / Sauf cas de force majeure, ils en donnent ou font donner avis à leur supérieur hiérarchique avant l'heure fixée pour la prise de service. / Dans les quarante-huit heures, les fonctionnaires empêchés adressent au chef de service le certificat médical d'avis d'arrêt de travail précisant la durée de leur indisponibilité. " Selon l'article 113-46 du même arrêté : " Le chef de service peut demander au service médical de diligenter une visite à domicile par un médecin agréé, notamment lorsque le fonctionnaire actif concerné n'a pas adressé de certificat d'arrêt de travail dans le délai prévu à l'article précédent. Une telle visite s'impose dans l'hypothèse d'un arrêt de travail pour maladie ordinaire ou blessure en service d'une durée égale ou supérieure à 15 jours. "

10. Au cas particulier, il ressort des pièces du dossier que M. B... s'est vu délivrer des certificats médicaux d'arrêt de travail, du 21 décembre 2015 au 31 août 2016, l'intéressé ayant été admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er septembre suivant, par un arrêté du 25 avril 2016 du préfet de la zone de défense et de sécurité Sud. Si, par des courriers en date des 12 février et 8 mars 2016, le directeur départemental de la sécurité publique des Alpes-Maritimes a mis en demeure M. B... de reprendre ses fonctions, respectivement dans les trois et six jours suivant leur réception, cet agent bénéficiait alors, ainsi qu'il vient d'être dit, de certificats médicaux d'arrêt de travail couvrant cette période et dont il n'est ni établi, ni même allégué qu'ils n'auraient pas été transmis, dans les délais, par ce dernier à son administration. En outre, et à la différence de ceux couvrant la période courant à compter du 18 septembre 2015, lesquels ont été infirmés par une contre-visite effectuée le 13 novembre 2015, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces certificats médicaux d'arrêt de travail auraient été contestés par l'administration selon la procédure prévue par les dispositions précitées de l'article 25 du décret susvisé du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des conseils médicaux, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, et à celles de l'article 113-46 de l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale. D'ailleurs, tant dans son courrier du 12 février 2016 que dans son attestation du 3 mars suivant, le médecin inspecteur régional de la zone de défense et de sécurité Sud se fonde sur la contre-visite effectuée le 13 novembre 2015 pour affirmer qu'est en cause la même pathologie avant d'en conclure que les nouveaux certificats médicaux d'arrêt de travail à compter du 21 novembre 2015 ne constituaient en réalité qu'une prolongation de ceux produits à compter du 18 septembre 2015 et que cette prolongation était dès lors " nulle et non avenue ". Toutefois, et alors que le médecin spécialiste qui a délivré le certificat du 21 décembre 2015 a coché la case " initial ", ces deux seules pièces émanant du médecin inspecteur régional de la zone de défense et de sécurité Sud sont insuffisantes pour écarter l'hypothèse d'une nouvelle affection ou d'une aggravation de l'état de santé initial de l'appelant, et, dans ces conditions, elles ne sauraient pallier l'exigence tenant à faire procéder à une nouvelle contre-visite par un médecin agréé. Au demeurant, il ne ressort d'aucun texte législatif ou réglementaire, ni même des dispositions de l'arrêté susvisé du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale que les médecins inspecteurs régionaux des zones de défense et de sécurité pourraient infirmer les certificats médicaux d'arrêt de travail reçus par l'administration. Placé de plein droit en congé de maladie en vertu de ces certificats médicaux d'arrêt de travail, M. B... ne pouvait donc, en l'absence de contestation de leur bien-fondé selon la procédure requise, être regardé comme se trouvant en situation d'absence irrégulière à la date à des deux mises en demeure susmentionnées des 12 février et 8 mars 2016. Dans ces conditions, l'administration ne pouvait pas regarder les congés de maladie ordinaire qu'elle avait accordés à M. B..., à partir du 21 décembre 2015, comme infondés et, par suite, l'arrêté contesté du 8 juillet 2016 doit être annulé.

11. Le titre de perception émis à l'encontre de M. B... le 5 octobre 2016 est relatif à un indu sur rémunération issu de la paye du mois d'août 2016 consécutivement à l'édiction de l'arrêté préfectoral du 8 juillet 2016. Il s'ensuit qu'il y a lieu, compte tenu de l'annulation de cet arrêté, d'annuler par voie de conséquence ce titre de perception.

12. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 8 novembre 2019, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2016 du préfet de la zone de défense et de sécurité Sud, et du titre de perception émis à son encontre le 5 octobre suivant.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

13. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. " Selon l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. / La juridiction peut également prescrire d'office l'intervention de cette nouvelle décision. " Enfin, l'article L. 911-3 du même code précise que : " La juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. "

14. Eu égard à ses motifs, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que le ministre de l'intérieur et des outre-mer réexamine et régularise la situation administrative de M. B..., dans un délai de trois mois à compter de la notification de cette décision juridictionnelle. Il y a lieu de lui adresser une injonction en ce sens sans que, dans les circonstances de l'espèce, il y ait lieu de l'assortir d'une astreinte.

Sur les dépens :

15. La présente instance n'a pas donné lieu à dépens au sens de ces dispositions. Les conclusions de M. B... tendant à ce que les entiers dépens soient mis à la charge de l'Etat ne peuvent donc qu'être rejetées.

Sur les autres frais liés au litige :

16. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. B... présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Les conclusions de la requête de M. B... tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nice du 8 novembre 2019 en tant que celui-ci a statué sur ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 août 2016 portant révision du titre de pension qui lui a été concédé par un arrêté du 27 juin 2016 sont transmises au Conseil d'Etat.

Article 2 : Le jugement n° 1604210 du tribunal administratif de Nice du 8 novembre 2019 est annulé, sauf en ce qu'il a statué sur les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 août 2016 portant révision du titre de pension qui lui a été concédé par un arrêté du 27 juin 2016.

Article 3 : L'arrêté du préfet de la zone de défense et de sécurité Sud du 8 juillet 2016 est annulé.

Article 4 : Le titre de perception émis le 5 octobre 2016 à l'encontre de M. B... est annulé.

Article 5 : M. B... est déchargé de l'obligation de payer la somme de 18 706,72 euros.

Article 6 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de réexaminer et de régulariser la situation de M. B... dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir.

Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat.

Copie en sera adressée au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2022, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 novembre 2022.

2

No 20MA00080

ot


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00080
Date de la décision : 08/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés de maladie - Questions communes.

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération - Traitement - Retenues sur traitement - Retenues sur traitement pour absence du service fait.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Laurent LOMBART
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : AARPI RGR AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-11-08;20ma00080 ?
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