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13/10/2022 | FRANCE | N°20MA04711

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 13 octobre 2022, 20MA04711


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) La Maison de Verre a demandé au tribunal administratif de Nice, par deux requêtes distinctes, de prononcer la décharge des cotisations de taxe sur les logements vacants auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2017 et 2018.

Par un jugement n° 1801951, 1900838 du 22 octobre 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18

décembre 2020 et le 23 septembre 2022, l'EURL La Maison de Verre, représentée par la société d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) La Maison de Verre a demandé au tribunal administratif de Nice, par deux requêtes distinctes, de prononcer la décharge des cotisations de taxe sur les logements vacants auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2017 et 2018.

Par un jugement n° 1801951, 1900838 du 22 octobre 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 décembre 2020 et le 23 septembre 2022, l'EURL La Maison de Verre, représentée par la société d'avocats Askesis, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 octobre 2020 du tribunal administratif de Nice ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le bien en cause était impropre à l'habitation au titre des années en litige compte tenu de son état, comme cela a été constaté par un huissier de justice ; la taxe sur les logements vacants n'était pas due conformément à l'article 232 du code général des impôts et à la doctrine administrative référencée BOI-IF-AUT-60 n° 50, n° 60 et n° 140 ;

- la production d'un devis de travaux n'est qu'une modalité pratique permettant d'attester le cas échéant que le logement est inhabitable et non une condition formelle exigée par les dispositions précitées ; en tout état de cause, sont produits en appel une attestation et des devis établissant l'importance des travaux à réaliser.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 avril 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par l'EURL La Maison de Verre ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la décision n° 98-403 DC du 29 juillet 1998 du Conseil constitutionnel ;

- la décision n° 2012-662 DC du 29 décembre 2012 du Conseil constitutionnel ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus, au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,

- et les observations de Me Koban, représentant l'EURL La Maison de Verre.

Considérant ce qui suit :

1. La société La Maison de Verre, propriétaire d'un bien immobilier sis C..., à A..., a été assujettie à des cotisations de taxe sur les logements vacants au titre des années 2017 et 2018, pour des montants de 6 293 et 12 737 euros, à raison de la vacance de ce bien. Elle relève appel du jugement du 22 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur l'application de la loi fiscale :

2. Aux termes de l'article 232 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition : " I.- La taxe annuelle sur les logements vacants est applicable dans les communes appartenant à une zone d'urbanisation continue de plus de cinquante mille habitants où existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements (...). / II. - La taxe est due pour chaque logement vacant depuis au moins une année, au 1er janvier de l'année d'imposition (...) / VI. - La taxe n'est pas due en cas de vacance indépendante de la volonté du contribuable (...) ". Le Conseil constitutionnel, dans ses décisions n° 98-403 DC du 29 juillet 1998 et n° 2012-662 DC du 29 décembre 2012, n'a admis la conformité à la Constitution des dispositions instituant la taxe sur les logements vacants que sous certaines réserves en précisant que : " (...) ne sauraient être assujettis des logements qui ne pourraient être rendus habitables qu'au prix de travaux importants et dont la charge incomberait nécessairement à leur détenteur ; / (...) ".

3. Il est constant que le bien, construit en 2002, dont la société La Maison de Verre est propriétaire était vacant depuis au moins une année à la date du 1er janvier 2017. La société requérante soutient que d'importants travaux sont nécessaires pour rendre le bien habitable. Toutefois, elle ne l'établit pas par la production des procès-verbaux de constat d'huissier établis les 3 septembre 2015 et 28 décembre 2017 selon lesquels l'huissier a constaté la présence de fils électriques arrachés ou non raccordés sur les tableaux électriques ainsi que l'absence d'aménagement des salles d'eau situées à l'étage. Si la société produit en appel un procès-verbal de constat d'huissier établi le 10 novembre 2020 indiquant que le bien ne présente " aucun raccordement électrique, aucune arrivée d'eau, aucun sanitaire, aucune cuisine " et " semble inhabitable en l'état ", ces éléments contredisent la déclaration modèle H1, produite par l'administration, établie le 24 mai 2002, selon laquelle le bien en cause, classé en catégorie 2, présente un bon état d'entretien, dispose de l'eau courante, de l'électricité, d'installations sanitaires et de chauffage. L'EURL La Maison de Verre produit également, en appel, des devis de travaux de climatisation, chauffage, remplacement de fosse septique, plomberie, électricité et maçonnerie, d'un montant total de 647 787 euros. Toutefois, ainsi que le relève le ministre, ces devis, à l'exception de celui relatif aux travaux d'électricité d'un montant total de 103 033,20 euros, ne mentionnent pas d'adresse de chantier alors que la société requérante est propriétaire d'une autre maison sur la commune de A.... Au demeurant, ces devis sont contradictoires avec la description de la maison lors de la souscription de la déclaration H1. En outre, lesdits devis, dont celui n° 2012500 établi le 5 décembre 2020 par la société Carè Renov d'un montant de 344 637,96 euros, faisant état de divers travaux de réfection des agencements, de réaménagement des espaces et d'amélioration, certes fort importants et onéreux, ne permettent pas d'apprécier l'état antérieur du bien, notamment sa conformité aux normes en vigueur, et d'établir avec suffisamment de précision les travaux de réhabilitation strictement nécessaires à l'occupation du logement en question, dans des conditions normales d'habitation. A cet égard, l'attestation d'une agence immobilière, qui souligne la nécessité de réaliser des travaux importants et indique que le bien ne remplit pas les critères d'habitabilité, établie le 26 janvier 2021, est insuffisamment probante. Ainsi, les pièces produites n'établissent pas que le logement en litige ne pouvait être rendu habitable qu'au prix de travaux importants. Au surplus, il ne résulte pas de l'instruction que la société requérante aurait effectué les démarches nécessaires à la réalisation des travaux qui seraient strictement nécessaires pour rendre le logement habitable, ni qu'elle aurait été empêchée de le faire, notamment en étant dans l'incapacité de financer de tels travaux. Dans ces conditions, l'EURL La Maison de Verre n'est pas fondée à soutenir que le logement en cause serait inhabitable au cours des années d'imposition, au sens des dispositions précitées de l'article 232 du code général des impôts telles qu'interprétées par le Conseil constitutionnel dans les décisions sus rappelées.

Sur l'application de la doctrine administrative :

4. D'une part, l'EURL La Maison de Verre n'est fondée à invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ni le paragraphe 50 de la doctrine référencée BOI-IF-AUT-60 selon lequel : " Seuls les logements habitables, c'est-à-dire clos, couverts et pourvus des éléments de confort minimum (installation électrique, eau courante, équipement sanitaire) entrent dans le champ d'application de la TLV ", ni le paragraphe 140 de cette même doctrine, concernant la notion de vacance indépendante de la volonté du propriétaire, qui ne font pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt.

5. D'autre part, la société requérante se prévaut également du paragraphe 60 de cette doctrine selon lequel : " Ne sont donc pas assujettis les logements qui ne peuvent être rendus habitables qu'au prix de travaux importants et dont la charge incombe nécessairement à leur détenteur. / Les travaux nécessaires pour rendre un logement habitable s'entendent de ceux qui remplissent au moins l'une des conditions suivantes : / - avoir pour objet d'assurer la stabilité des murs, charpentes et toitures, planchers ou circulations intérieures (notamment les escaliers) ; / - avoir pour objet l'installation, dans un logement qui en est dépourvu ou, dans le cas contraire, la réfection complète de l'un ou l'autre des éléments suivants : équipement sanitaire élémentaire, chauffage, électricité, eau courante, ensemble des fenêtres et portes extérieures. / Par ailleurs, les travaux doivent être importants. La production de devis devrait permettre, la plupart du temps, d'apprécier l'importance des travaux. A titre de règle pratique, il peut être admis que cette condition est remplie lorsque le montant des travaux nécessaires pour rendre le logement habitable excède 25 % de la valeur vénale du logement au 1er janvier de l'année d'imposition. ".

6. Il n'est pas démontré, ainsi qu'il a été dit précédemment, que des travaux importants auraient été nécessaires pour rendre le logement dont il s'agit habitable. En outre, la société ne verse aucun élément de nature à justifier la valeur vénale dudit logement, qu'elle fixe à 2 600 000 euros, et partant, que le montant des travaux à réaliser excèderait 25 % de sa valeur vénale. Il suit de là que l'EURL La Maison de Verre n'est pas fondée à invoquer la doctrine administrative précitée.

7. Il résulte de tout ce qui précède, que l'EURL La Maison de Verre n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de l'EURL La Maison de Verre est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée La Maison de Verre et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2022, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- Mme Carotenuto, première conseillère,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 octobre 2022.

2

N° 20MA04711


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA04711
Date de la décision : 13/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-06 Contributions et taxes. - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. - Taxes ou redevances locales diverses.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS ASKESIS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-10-13;20ma04711 ?
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