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15/09/2022 | FRANCE | N°19MA05454

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 15 septembre 2022, 19MA05454


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2018 par lequel le maire de Nîmes a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de la création d'un local commercial sur un terrain situé 1986 chemin Combe des Oiseaux, cadastré section LB n° 23, puis l'arrêté du 2 novembre 2018, en tant que le maire a, à nouveau, refusé de lui délivrer ce permis, après avoir retiré l'arrêté du 20 juillet 2018.

Par un jugement n° 1802901, 1900196 du 15 oc

tobre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a constaté qu'il n'y avait pas lieu de sta...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2018 par lequel le maire de Nîmes a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de la création d'un local commercial sur un terrain situé 1986 chemin Combe des Oiseaux, cadastré section LB n° 23, puis l'arrêté du 2 novembre 2018, en tant que le maire a, à nouveau, refusé de lui délivrer ce permis, après avoir retiré l'arrêté du 20 juillet 2018.

Par un jugement n° 1802901, 1900196 du 15 octobre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 20 juillet 2018, a annulé l'arrêté du 2 novembre 2018 et a rejeté le surplus des conclusions de M. B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 13 décembre 2019, le 8 juillet 2021 et le 28 septembre 2021, la commune de Nîmes, représentée par Me Lhotelier, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M. B... devant le tribunal administratif de Nîmes ;

3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la construction projetée ne remplit pas les conditions fixées par l'article N2/2 du règlement du plan local d'urbanisme pour pouvoir être autorisée dans la zone N2 ;

- les motifs tirés de la méconnaissance des articles N2/11, N2/12 et N2/13 doivent être substitués à ce motif initial.

Par des mémoires en défense enregistrés le 28 mai 2020, le 3 juin 2020 et le 16 août 2021, M. B..., représenté par Me Blanc, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Nîmes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable en ce qu'elle omet de mentionner les nom et domicile des parties, outre que les délibérations produites ne sauraient donner qualité au maire pour agir au nom de la commune ;

- les moyens soulevés par la commune de Nîmes ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me Rouault, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 20 juillet 2018, le maire de Nîmes a refusé de délivrer à M. B... un permis de construire en vue de la création d'un local commercial sur un terrain situé 1986 chemin Combe des Oiseaux. Par un nouvel arrêté du 2 novembre 2018, le maire a, à nouveau, refusé de lui délivrer ce permis, après avoir retiré l'arrêté du 20 juillet 2018. L'intéressé a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler ces deux arrêtés. Par un jugement du 15 octobre 2019, le tribunal administratif a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 20 juillet 2018, a annulé l'arrêté du 2 novembre 2018 et a rejeté le surplus des conclusions de M. B.... La commune de Nîmes relève appel de ce jugement en ce qu'il a annulé l'arrêté du 2 novembre 2018 en tant qu'il refuse la délivrance du permis de construire litigieux.

2. L'article N2/2 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes, applicable au litige, mentionne, au nombre des types d'occupation ou d'utilisation des sols autorisés sous conditions " Les constructions à usage d'activités commerciales, à condition que l'installation respecte le caractère de la zone et soit compatible avec les équipements d'infrastructure existants (voirie et réseaux divers). ". Ce règlement définit le caractère de la zone comme " (...) une zone naturelle de garrigue, occupée séculairement par 1'homme, notamment à partir du XIX siècle sous la forme d'un habitat de type " maset ". En continuité avec cette urbanisation ancestrale, des constructions diffuses sur des unités foncières importantes peuvent être autorisées à la condition qu'elles ne portent pas atteinte à la préservation des milieux naturels et des paysages. (...). Cette zone, partiellement équipée, peut accueillir des activités et services non gênants pour l'habitat, et dont l'implantation ne portera atteinte ni à la préservation des sols forestiers ni à la sauvegarde des sites, des milieux naturels et des paysages. ".

3. Pour refuser le permis de construire sollicité par M. B..., le maire de Nîmes a relevé que le dossier de la demande de permis de construire ne permettait pas " de vérifier si l'activité commerciale projetée était de nature à porter atteinte à la préservation des milieux naturels et des paysages " au sens de l'article N2/2 du règlement du plan local d'urbanisme. Il s'est également fondé sur l'absence au dossier du document attestant de la conformité du projet d'installation d'assainissement non collectif prévu par l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme. Les premiers juges ont estimé que ces deux motifs étaient entachés d'illégalité et que le projet pouvait être autorisé en zone N2/2. La commune de Nîmes soutient en appel que le motif tiré de l'application de ces dernières dispositions suffisait à justifier légalement l'arrêté du 2 novembre 2018.

4. Il ressort des pièces du dossier que le projet contesté porte sur la construction d'un local commercial de 41,8 m² comportant un comptoir en façade permettant de servir la clientèle à l'abri de l'avancée du toit sur une profondeur de 1,58 mètre. Il prévoit en continuité l'aménagement de deux places de stationnement sur un espace bétonné et d'un bassin de rétention d'une capacité de 10,75 m³ collectant les eaux en provenance des toitures créées. La parcelle, dont la surface est de 3 181,36 m² supporte une maison individuelle de 151,88 m². L'architecture du projet est en cohérence avec celle de cette maison, s'agissant de la pente du toit et de la couverture en tuiles rondes anciennes, des menuiseries en teinte pastel et de l'enduit extérieur frotassé. S'il résulte de la vue aérienne produite par la commune que cette parcelle s'inscrit dans un paysage de garrigue habitée qui présente une densité conforme à la moyenne de 4 à 5 logements à l'hectare, mentionnée par le rapport de présentation du plan local d'urbanisme ultérieurement révisé, certains terrains bâtis défrichés et engazonnés à l'est du projet et la largeur du chemin Combe des Oiseaux, supérieure à cet endroit à celle des autres voies, ne sont pas caractéristiques de ce type de paysage. En dépit d'un conflit entre d'une part le propriétaire du terrain d'assiette et de la construction, déjà érigée, d'autre part, le voisin immédiat du projet, ce dernier ne peut être regardé comme étant gênant pour l'habitat, le tribunal judiciaire de Nîmes ayant d'ailleurs débouté le voisin en question de son action qui tendait à la démolition du bâtiment et à la cessation de l'activité de pizzeria entreprise. Eu égard à la localisation et à l'importance limitée de la construction en litige, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'activité commerciale qu'il permet soit incompatible avec la voirie existante, le projet prévoyant le renforcement du dispositif d'assainissement non collectif en place. Il n'est pas établi que les équipements de défense contre l'incendie disponibles soient insuffisants. Dans ces conditions, la commune de Nîmes n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article N2/2 du règlement du plan local d'urbanisme, déjà invoquées dans l'arrêté contesté, s'opposaient à l'implantation du projet dans la zone N2.

5. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

6. Aux termes de l'article N2/11 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes, applicable au litige et relatif à l'aspect extérieur des constructions : " 1. Style de construction. / Pour éviter le pastiche ''néo-provençal'' ou ''néo-languedocien'' qui banalise les paysages et les sites sub-urbains, les constructions de style traditionnel relèvent d'une reconstitution à l'identique de l'architecture traditionnelle languedocienne sans concession à la modernité. / Par opposition, les constructions de style contemporain sont admises. (...) ".

7. Le projet de local commercial en litige, qui, selon la notice jointe au dossier de demande, propose des prestations architecturales identiques à celle de la maison existante, présente une surface de plancher de 41,80 m² et une hauteur au faîtage de 3,38 mètres. Eu égard à ses dimensions réduites, à sa toiture à deux pentes revêtue de tuiles rondes anciennes et à l'application d'un enduit extérieur frotassé, le style de construction choisi, en dépit de la destination purement fonctionnelle du local, doit être regardé comme relevant d'une reconstitution à l'identique de l'architecture traditionnelle languedocienne au sens de l'article N2/11 du règlement du plan local d'urbanisme. Dès lors, la substitution de motif correspondante invoquée par la commune de Nîmes ne peut être admise.

8. Aux termes de l'article N2/12 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes N2/12 relatif au stationnement des véhicules : " Le stationnement des véhicules correspondant aux besoins des constructions et installations, doit être assuré en dehors des voies publiques ou privées, sur des emplacements prévus à cet effet. / Il est exigé : / 1. Pour les constructions à usage d'habitation. / Habitat individuel : / - 2 (deux) places par logement à l'intérieur de la parcelle. / 2. Pour les établissements commerciaux. / Le nombre de places de stationnement à prévoir est égal à 60 % de la surface de plancher. ".

9. La règle relative aux aires de stationnement édictée par ces dispositions vise à déterminer un nombre de places de stationnement adapté à la fréquentation des établissement concernés, compte tenu en particulier des effectifs de personnes qui y travaillent ou du nombre de clients qu'ils reçoivent. Ainsi, ces dispositions doivent être interprétées comme impliquant la création, dans le cas, comme en l'espèce, d'un projet portant sur la construction d'un local commercial d'une surface de plancher de 41,80 m², non pas, comme le soutient la commune de Nîmes, de 25 places de stationnement, mais d'une surface affectée au stationnement correspondant à 60 % de cette surface de plancher. Il ressort des plans du projet que celui-ci prévoit la création de deux places de stationnement occupant une surface totale de 40,79 m², égalant quasiment la surface de plancher du local. Ainsi, la surface affectée au stationnement, qui est assuré en dehors de la voie privée aménagée sur le terrain d'assiette rend le projet conforme aux dispositions de l'article N2/12 du règlement du plan local d'urbanisme. La commune de Nîmes ne peut utilement exciper de ce que les plans du projet ne font apparaître aucune place de stationnement pour la maison d'habitation déjà construite sur le terrain d'assiette dès lors que le projet ne porte pas sur cette construction. La circonstance que le pétitionnaire aurait ultérieurement utilisé cette surface comme une terrasse destinée aux clients est sans incidence sur le respect de ces dispositions. Ainsi, le motif reposant sur les dispositions de l'article N2/12 n'étant pas fondé, il ne peut être substitué aux motifs initiaux.

10. Aux termes de l'article N2/13 du règlement du plan local d'urbanisme de Nîmes relatif aux espaces libres et aux plantations : " (...) 2. PLANTATIONS : / Toutes les constructions seront implantées de manière à respecter au maximum le couvert végétal. / 2.1. Espaces libres. / Les espaces libres de construction feront l'objet d'un aménagement paysager composé, soit de massifs arbustifs respectant les règles de densité, soit d'un enherbement, soit d'un aménagement minéral. / Ces espaces libres seront plantés d'arbres de haute tige, d'essence méditerranéenne, à raison d'un arbre pour 100 m² (cent mètres carrés) d'espace aménagés. / Les haies vives peuvent être utilisées pour accompagner ou non les clôtures. / 2.2. Aires de stationnement. / Les aires de stationnement doivent être plantées à raison d'un arbre de haute tige pour 4 (quatre) places de stationnement. / Chaque parc de stationnement doit être planté d'une même variété d'arbres de haute tige. (...) 2.3. Bassins de rétention. / Les bassins auront une forme s'intégrant au paysage. (...) Les abords immédiats et talus feront l'objet d'un aménagement paysager pouvant intégrer le minéral et le végétal. / Les abords seront plantés d'arbres de haute tige, d'essence méditerranéenne, à raison d'un arbre pour 100 m² (centre mètre carrés) d'espaces aménagés y compris la surface du bassin. (...) ".

11. Ainsi qu'il a été indiqué au point 4, la parcelle d'assiette du projet, dont la surface est de 3 181,36 m² supporte déjà une maison individuelle de 151,88 m². Cette parcelle en pente, qui est clôturée, est entièrement complantée d'arbres et de plantations diverses qui composent avec la création d'une voie interne et de murets de soutènement un aménagement paysager que le projet litigieux ne remet pas en cause, même si la commune de Nîmes soutient que deux arbres de haute tige ont été abattus en vue de la construction du local en cause. Elle ne conteste pas la présence sur cet espace d'arbres de haute tige d'essence méditerranéenne en nombre suffisant pour répondre aux prescriptions de l'article N2/13 du règlement du plan local d'urbanisme régissant les espaces libres, l'emprise du local en litige et des emplacements de stationnement ne constituant pas par hypothèse des espaces libres. L'aire de stationnement prévue ne comportant que deux emplacements, elle n'avait pas à être plantée d'un ou plusieurs arbres de haute tige. Enfin, il ne résulte des plans de la demande de permis de construire ni que la forme du bassin de rétention ne permettrait pas son intégration au paysage, ni que les abords immédiats de ce bassin ne s'intégreraient pas dans l'aménagement paysager existant, le plan de masse représentant par ailleurs à cet endroit des arbres de haute tige déjà plantés.

12. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par M. B..., la commune de Nîmes n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du 2 novembre 2018.

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Nîmes demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Nîmes une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Nîmes est rejetée.

Article 2 : La commune de Nîmes versera à M. B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Nîmes et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2022, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Quenette, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 septembre 2022.

N° 19MA05454 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19MA05454
Date de la décision : 15/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Régimes de déclaration préalable.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SELARL BAUDUCCO-ROTA-LHOTELLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 25/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-09-15;19ma05454 ?
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