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08/07/2022 | FRANCE | N°22MA01135

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 08 juillet 2022, 22MA01135


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 16 février 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2105399 du 5 novembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête et un mémoire, enr

egistrés les 20 avril 2022 et 25 mai 2022, sous le n° 22MA01135, Mme B..., représentée par Me Cau...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 16 février 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2105399 du 5 novembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 avril 2022 et 25 mai 2022, sous le n° 22MA01135, Mme B..., représentée par Me Cauchon-Riondet, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 novembre 2021 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 février 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'un an mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa demande, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte, laquelle pourra être liquidée au terme d'un délai de trois mois et une nouvelle astreinte fixée, et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

- l'avis du collège de médecins est fondé sur un rapport médical du 17 novembre 2020 erroné ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet s'est senti à tort lié par l'avis du collège des médecins de l'OFII ;

- elle viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle viole l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet n'a pas examiné de manière distincte et autonome si la décision en litige était entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle ;

- elle viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mars 2022.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2022, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête de Mme B....

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

II. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 avril 2022 et 25 mai 2022, sous le n° 22MA01136, Mme B... représentée par Me Cauchon-Riondet, demande à la Cour :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille du 5 novembre 2021 ;

2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner pour elle des conséquences difficilement réparables ;

- les moyens énoncés dans sa requête sont sérieux.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mars 2022.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2022, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête de Mme B....

Il faut valoir que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné Mme Virginie Ciréfice, présidente assesseure, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les observations de Me Guarnieri substituant Me Cauchon-Riondet représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Les deux requêtes n° 22MA01135 et 22MA01136, qui sont présentées par la même requérante, sont relatives à la même décision et ont fait l'objet d'une instruction commune. Par suite, il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt.

2. Mme B..., née le 18 février 1954, de nationalité vénézuélienne, déclare être entrée en France le 11 novembre 2019 afin de rendre visite à ses deux filles qui résident sur le territoire national. Elle a sollicité le 23 octobre 2020, une demande de titre de séjour mention " étranger malade ". Mme B... relève appel du jugement du 5 novembre 2021 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 février 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination et demande à la Cour de sursoir à l'exécution de ce jugement.

Sur la requête n° 22MA01135 :

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué :

S'agissant de la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

3. Mme B... reprend en appel les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision contestée et du défaut d'examen de sa situation. Toutefois, il y a lieu d'écarter ces moyens, qui ne comportent aucun développement nouveau, par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges.

4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code précité, dans sa version en vigueur à la date de la décision en litige : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Le premier alinéa de l'article R. 313-23 du même code dispose que : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22 (...) ". Selon l'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application de ces dispositions : " Au vu du certificat médical et des pièces qui l'accompagnent ainsi que des éléments qu'il a recueillis au cours de son examen éventuel, le médecin de l'office établit un rapport médical, conformément au modèle figurant à l'annexe B du présent arrêté. ".

5. Il ressort des pièces du dossier qu'un rapport médical a été établi le 17 novembre 2020 par le médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, à partir d'un certificat médical fourni par la requérante, daté du 23 octobre 2020. Si, au titre du " type de traitement ", ce rapport ne mentionne pas le médicament Kardégic alors que le certificat médical produit par l'intéressée à l'appui de la demande en faisait état, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette indication n'aurait pas permis au collège des médecins d'apprécier effectivement la nature de la prise en charge dont l'intéressée devait bénéficier, d'autant qu'il ressort d'un certificat médical rédigé le 19 août 2020 par un médecin neurologue de Lille que le Kardégic a été arrêté. Par suite, le moyen tiré de ce que le rapport médical serait erroné du fait de cette omission doit être écarté.

6. Pour prendre la décision contestée, le préfet des Bouches-du-Rhône, après avoir visé l'avis du 31 décembre 2020 du collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), a estimé qu'au vu des éléments du dossier et à la date de cet avis, l'état de santé de l'intéressée ne nécessite pas son maintien sur le territoire dès lors que, s'il nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, elle peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié et qu'elle peut voyager sans risque vers le Venezuela. Par suite, Il ne ressort pas de cette décision que le préfet se serait estimé lié par cet avis.

7. En l'espèce, Mme B... est entrée en France le 11 novembre 2019. Toutefois, son séjour sur le territoire national de près de quinze mois ne présente pas le caractère d'ancienneté suffisant pour permettre de regarder l'intéressée comme résidant habituellement en France. Ainsi, le préfet des Bouches-du-Rhône a pu légalement refuser de délivrer à Mme B... un titre de séjour en qualité d'étranger malade pour ce motif.

8. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a présenté un accident vasculaire cérébral (AVC) en 2010 et souffre d'une hypertension artérielle, de troubles neurologiques dégénératifs, d'une perte d'autonomie, ainsi que d'un état dépressif pour lesquels elle bénéficie d'un traitement et d'un suivi médical. Elle a, par ailleurs, bénéficié de la pose d'une prothèse du genou. Si la requérante a passé, le 21 février 2020, à l'hôpital de La Timone une IRM cérébrale en raison d'une suspicion d'AVC, celle-ci n'indique pas d'anomalie vasculaire ni de syndrome de masse cérébrale. De même, le scanner passé le 20 février 2020 pour des céphalées de l'hémicrâne droit et des troubles oculaires ne montre pas de lésion ischémique ni d'anomalie vasculaire selon la conclusion du compte-rendu médical. Pour prendre la décision contestée, le préfet des Bouches-du-Rhône s'est fondé sur l'avis du 31 décembre 2020 du collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui a estimé que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, elle peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et que son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers le pays d'origine. Toutefois, cet avis n'est pas valablement remis en cause par les certificats médicaux produits par Mme B... qui ne se prononcent pas sur la disponibilité effective de son traitement dans ce pays. Elle ne peut utilement se prévaloir d'un courrier rédigé le 9 avril 2021 par un médecin vénézuélien postérieurement à la décision contestée selon lequel " actuellement, vu la situation dans son pays, elle a besoin d'un traitement médical qu'elle ne peut se permettre en raison de sa situation précaire ". Il en va de même des certificats établis en des termes trop généraux, le 5 avril 2021, par une psychologue selon lesquels " ces soins et cet accompagnement lui sont inaccessibles au Venezuela " et le 4 mars 2021, de son médecin généraliste mentionnant que " il semble qu'elle ne peut accéder à ce niveau de soins dans son pays ". Enfin, les documents dont elle se prévaut concernant la situation sanitaire défaillante dans ce pays, à savoir une déclaration du 20 mars 2019 du haut-commissaire des Nations-Unies et un rapport d'Amnesty International qui sont dépourvus d'élément personnalisé ne sont pas de nature à contredire l'avis précité du collège des médecins de l'OFII. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

9. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

10. Mme B... se prévaut d'une résidence en France depuis le 11 novembre 2019. Toutefois, sa durée de séjour de moins de quinze mois sur le territoire national est brève. Si elle soutient que la présence de ses filles à ses côtés est indispensable pour l'aider dans sa vie quotidienne en raison de sa perte d'autonomie importante, ce qui est établi par les certificats médicaux produits au dossier, elle n'établit pas que ses deux autres enfants majeurs ne pourraient pas la prendre en charge au Venezuela où ils résident en produisant une attestation de résidence du 6 mars 2022 mentionnant que son fils n'a pas de salaire minimum et un certificat de travail du 4 mars 2022 selon lequel sa fille qui travaille comme conseiller parlementaire perçoit une rémunération de 5,78 euros et des primes de 53,93 euros, ces documents étant par ailleurs postérieurs à la décision en litige. La requérante n'établit ni même n'allègue être dépourvue de toute attache dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 65 ans et résident deux de ses quatre enfants comme déjà indiqué. Enfin, si Mme B... se prévaut de son état de santé, ainsi qu'il a été dit au point 8, elle ne démontre pas qu'elle ne pourrait pas accéder effectivement à un traitement approprié dans son pays d'origine. Dans ses conditions, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, la décision contestée n'a pas porté une atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

11. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".

12. Au regard de ce qui a été dit au point 10, il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande de titre de séjour de Mme B... répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels. Il s'ensuit que le moyen tiré de la violation de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

S'agissant de la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :

13. Pour les motifs indiqués aux points 3 à 12, Mme B... n'est pas fondée à invoquer par voie d'exception, contre la décision contestée, l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

14. Les moyens tirés de la violation des dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux mentionnés aux points 8 et 10.

15. Il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le préfet des Bouches-du-Rhône n'aurait pas examiné de manière distincte et autonome les effets de sa décision portant obligation de quitter le territoire sur la situation personnelle de l'intéressée.

S'agissant de la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

16. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger a l'obligation de s'assurer, au vu du dossier dont elle dispose et sous le contrôle du juge, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle est en droit de prendre en considération à cet effet les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou de la Cour nationale du droit d'asile ayant statué sur la demande d'asile du requérant, sans pour autant être liée par ces éléments.

17. Comme dit au point 8, Mme B... n'établit pas qu'elle ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ni qu'elle y serait personnellement exposée à des risques en cas de retour du fait de la crise politique qui y sévit. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être qu'écarté.

18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 16 février 2021.

Sur la requête n° 22MA01136 tendant au sursis à exécution du jugement contesté :

19. La Cour statuant au fond dans la présente affaire, il n'y a plus lieu pour elle de se prononcer sur la demande de sursis à exécution du jugement attaqué, enregistrée sous le n° 22MA01136.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

20. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme B... n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte de Mme B....

Sur les frais liés au litige :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, tout ou partie de la somme que le conseil de Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 22MA01136.

Article 2 : La requête n° 22MA01135 de Mme B... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., à Me Cauchon-Riondet et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2022, où siégeaient :

- Mme Ciréfice, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Prieto, premier conseiller,

- Mme Marchessaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 juillet 2022.

La rapporteure,

Signé

J. C...La présidente,

Signé

V. CIREFICE

La greffière,

Signé

S. EYCHENNE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 22MA01135, 22MA01136

fa


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01135
Date de la décision : 08/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme CIREFICE
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : CAUCHON-RIONDET

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-07-08;22ma01135 ?
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