La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/07/2022 | FRANCE | N°20MA04054

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 05 juillet 2022, 20MA04054


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du

11 mai 2020 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a retiré son attestation de demandeur d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2004141 du 10 juillet 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée

le 2 novembre 2020, M. B..., représenté par

Me Bazin-Clauzade, demande à la Cour :

1°) d'annuler le j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du

11 mai 2020 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a retiré son attestation de demandeur d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2004141 du 10 juillet 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 novembre 2020, M. B..., représenté par

Me Bazin-Clauzade, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 juillet 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 11 mai 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet compétent de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour le temps du réexamen de sa situation à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à

Me Bazin-Clauzade au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de l'OFPRA ne lui a pas été régulièrement notifiée ; il s'ensuit qu'à la date de l'arrêté attaqué, le préfet ne pouvait pas lui refuser le séjour en France ;

- elle méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par une décision du 25 septembre 2020, M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Par ordonnance du 3 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 3 juin 2022

à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période ;

- l'ordonnance n° 2020-558 du 13 mai 2020 modifiant l'ordonnance n° 2020-305 du

25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant albanais, né le 21 novembre 2001, a présenté une demande d'asile qui a été rejetée le 28 février 2020 par l'Office français des réfugiés et apatrides (OFPRA). Par un arrêté du 11 mai 2020, le préfet des Bouches-du-Rhône lui a retiré son attestation de demandeur d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé son pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 10 juillet 2020 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes du I de l'article L. 511-1 dans sa rédaction applicable au litige : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". Aux termes de l'article L. 743-1 du même code : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. ". Aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. / Dans le cas où le droit de se maintenir sur le territoire a pris fin en application des 4° bis ou 7° de l'article L. 743-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné statuant sur le recours formé en application de l'article L. 512-1 contre l'obligation de quitter le territoire français de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin fait droit à la demande de l'étranger lorsque celui-ci présente des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire durant l'examen de son recours par la cour. ". Aux termes de l'article L. 743-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) 7° L'office a pris une décision de rejet dans les cas prévus au I et au 5° du III de l'article L. 723-2 ( ...) ". L'article

L. 723-2 du même code dispose : " I. L'office statue en procédure accélérée lorsque : / 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr en application de l'article L. 722-1 ; (...). ".

3. Il ressort des pièces du dossier que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté le 28 février 2020 la demande d'asile de M. B..., qui est originaire d'un pays d'origine sûr, en statuant suivant la procédure accélérée prévue au 1° du I de l'article L. 723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Au vu de cette décision, le préfet des Bouches-du-Rhône a pris l'arrêté contesté, dès lors que l'intéressé disposait du droit de se maintenir sur le territoire français que jusqu'au 19 mars 2020, date de la notification de la décision de l'OFPRA rejetant sa demande d'asile.

4. M. B... se prévaut des termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui dispose que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Toutefois, en application de l'article L. 743-2 du code susvisé, l'étranger dont la demande d'asile a fait l'objet d'une procédure accélérée, ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français dès que l'OFPRA a pris une décision de rejet. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que la décision de l'OFPRA, datée du 28 février 2020, ne lui a pas été régulièrement notifiée au

19 mars 2020, comme le soutient le préfet, et qu'à la date de l'arrêté attaqué, au 11 mai 2020, il disposait du droit au maintien sur le territoire français, est inopérant.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir une ingérence dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire (...) à la protection de la santé, de la morale ou de la protection des droits et liberté d'autrui ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est célibataire et sans charge de famille sur le territoire alors qu'il ne soutient ni même allègue être démuni d'attaches dans son pays d'origine où il a très majoritairement vécu. En outre, s'il fait valoir la présence en France d'un oncle et sa participation active dans un club de football, ces circonstances ne sont pas suffisantes pour considérer que M. B... aurait fixé le centre de ses intérêts personnels en France. Dans ces conditions, et dès lors que l'intéressé ne justifie d'aucune intégration particulière dans la société française, le préfet des Bouches-du-Rhône en refusant de l'admettre au séjour, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de M. B....

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

8. M. B..., dont la demande de reconnaissance du statut de réfugié présentée auprès de l'OFPRA été rejetée par une décision du 28 février 2020, en se bornant à soutenir qu'il " risque sa vie en cas de retour au pays ", n'établit pas la réalité des risques personnels encourus en cas de retour en Albanie. Par suite, en prenant la décision fixant le pays de destination contestée, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 mai 2020.

10. Dès lors, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions présentées en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent être accueillies.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à Me Bazin-Clauzade et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 21 juin 2022, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Ury, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022.

N° 20MA040542


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA04054
Date de la décision : 05/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Didier URY
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : BAZIN-CLAUZADE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-07-05;20ma04054 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award