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09/06/2022 | FRANCE | N°19MA03861

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 09 juin 2022, 19MA03861


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1801047 du 24 mai 2019, le tribunal administratif de Marseille, après avoir prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge des cotisations de contributions sociales ainsi que des

pénalités afférentes auxquelles M. C... a été assujetti au titre des années 2012 et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1801047 du 24 mai 2019, le tribunal administratif de Marseille, après avoir prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge des cotisations de contributions sociales ainsi que des pénalités afférentes auxquelles M. C... a été assujetti au titre des années 2012 et 2013 à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance, a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 août 2019 et 11 février 2020, M. C..., représenté par la AARPI Steering Legal agissant par Me Bette, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 24 mai 2019 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions demeurant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, outre les dépens, la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la notification de la proposition de rectification du 27 juillet 2015 est irrégulière ;

- le comptable signataire de l'avis de mise en recouvrement n'était pas territorialement compétent en méconnaissance de l'article R. 256-8 du livre des procédures fiscales ;

- la proposition de rectification n'est pas suffisamment motivée ; à ce titre, il se prévaut de la doctrine référencée BOI-CF-IOR-10-40 n° 40 et n° 80 ;

- il n'a pas été correctement informé de la teneur et l'origine des renseignements obtenus par l'administration dans le cadre de son droit de communication en violation de l'article L. 76 B du code général des impôts ; il entend se prévaloir également de la doctrine référencée BOI-CF-PGR-30-10, n° 210 ;

- il est résident fiscal de la collectivité de Saint-Martin en application de l'article 4 de la convention conclue le 21 décembre 2010 entre l'Etat et la collectivité de Saint-Martin ;

- en ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée, les crédits bancaires injustifiés relevés par l'administration fiscale correspondent à des remboursements de frais qu'il a avancés pour le compte de la société La E... en vue d'installer un restaurant " le Shamballa " à Saint-Martin ; ces impositions relèvent de la compétence de Saint-Martin ;

- s'agissant des revenus distribués résultant de la réintégration de charges non déductibles dans le bénéfice imposable de la SARL A..., certaines de ces dépenses sont justifiées ou engagées dans l'intérêt de l'exploitation de la société ; en outre, l'administration ne rapporte pas la preuve du désinvestissement des sommes en litige à son profit du fait de la seule réintégration dans la comptabilité de la SARL A... des charges qu'elle a estimées injustifiées ;

- s'agissant des revenus distribués résultant de la réintégration de charges non déductibles à hauteur de 9 192 euros au titre de l'année 2012 et de 3 397 euros au titre de l'année 2013 dans le bénéfice imposable de la SC B..., l'administration ne rapporte pas la preuve du désinvestissement des sommes en litige du fait de leur seule réintégration dans la comptabilité de la SC B... ;

- les sommes portées au crédit de son compte courant d'associé au sein de la comptabilité de la SC B... correspondent pour partie à des remboursements de frais avancés pour le compte de cette société ;

- les pénalités doivent être déchargées en conséquence de la décharge des impositions en litige.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 15 novembre 2019 et 24 février 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention conclue le 21 décembre 2010 entre l'Etat et la collectivité de Saint-Martin en vue de prévenir les doubles impositions et de lutter contre la fraude et l'évasion fiscale ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bernabeu, présidente assesseure,

- et les conclusions de Mme Courbon, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'un examen de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2012 et 2013, M. C... s'est vu notifier des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales au titre des années 2012 et 2013, à raison de crédits injustifiés sur ses comptes bancaires personnels et de revenus distribués entre ses mains par la SARL A... et la SC B..., selon la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, en l'absence de dépôt de déclarations fiscales au titre de ces années. M. C... relève appel du jugement du 24 mai 2019 par lequel, après avoir prononcé la décharge de la part des cotisations supplémentaires de prélèvements sociaux ayant résulté de la majoration de 25 % de la base imposable au titre des années 2012 et 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté le surplus de sa demande.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, M. C... soutient qu'il n'a pu avoir connaissance de la demande de justification de crédits formulée par courrier du 15 juin 2015 et envoyée à son adresse à Velaux qu'en août 2015, après l'envoi de la proposition de rectification du 27 juillet 2015, alors qu'il avait indiqué à l'administration fiscale son changement de domicile à Saint-Martin par courrier du 19 février 2015. Cependant, il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification, que la lettre datée du 15 juin 2015 adressée au requérant consistait non pas en une demande d'éclaircissements et de justifications modèle 2172 mais en une simple lettre modèle 751 de demande d'informations. En toute hypothèse, le contribuable a fait l'objet d'une procédure de taxation d'office sur le fondement du 1° de l'article L. 66 et de l'article L. 67 du livre des procédures fiscales, pour défaut de déclaration dans le délai de trente jours à compter de la notification d'une mise en demeure, dont il ne conteste pas avoir reçu notification pour chacune des années d'imposition, et non d'une procédure de taxation d'office pour défaut de réponse à une demande d'éclaircissements et de justifications sur le fondement de l'article L. 69 du même livre. Par suite, le moyen du requérant tiré de l'irrégularité de la procédure de taxation d'office suivie ne peut qu'être écarté.

3. En deuxième lieu, M. C... soutient que l'administration fiscale lui a adressé la proposition de rectification du 27 juillet 2015 à une adresse ne correspondant pas à celle de son domicile à Saint-Martin, ni à celle de son principal établissement professionnel, en invoquant les dispositions de l'article 45 à l'annexe III au code général des impôts, qui ne concernent nullement les modalités de notification de la proposition de rectification mais les modalités selon lesquelles les déclarations sont remises ou adressées par les contribuables au service des impôts. Cependant, l'intéressé, dont les rectifications en litige ont fait l'objet d'une procédure de taxation d'office, doit être regardé comme ayant entendu se prévaloir des dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, aux termes desquelles : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. (...) ". En l'espèce, il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 27 juillet 2015, envoyée à M. C... et adressée chemin de Roquepertuse à Velaux, a été retirée le 14 août 2015, sans que celui-ci ne fasse valoir qu'elle aurait été distribuée à une personne non habilitée. Au contraire, le requérant reconnaît lui-même, dans sa requête d'appel, avoir pris connaissance de cette proposition de rectification au mois d'août 2015, alors que les impositions en litige ont été mises en recouvrement par voie de rôle le 31 octobre 2015. Par suite, l'intéressé ne pouvant se prévaloir en l'espèce de la privation d'aucune garantie que lui assure la procédure d'imposition, le moyen tiré de l'irrégularité de la notification des bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office doit être écarté.

4. En troisième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales qu'au titre des exigences prévues à cet article, relatif à la procédure de taxation d'office, figure celle de porter à la connaissance du contribuable non seulement les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office mais aussi leurs modalités de détermination. Si l'intéressé soutient, pour la première fois en appel, qu'il n'a pas été informé des motifs de droit et de fait justifiant les rectifications mises à sa charge, il résulte cependant de la proposition de rectification du 27 juillet 2015 qu'elle comporte avec suffisamment de précision les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office mais aussi leurs modalités de détermination. A cet égard, l'administration y mentionne l'ensemble des crédits bancaires dont elle précise le montant et qu'elle identifie par année, par compte bancaire, par date et par libellé, et que M. C... n'a pas justifié. Par ailleurs, elle explicite également les rectifications effectuées en matière de traitements et salaires ainsi qu'en matière de revenus de capitaux mobiliers, en donnant des indications très précises sur leurs modalités de détermination. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office mises à la charge de M. C... au titre des années 2012 et 2013 doit être écarté comme manquant en fait.

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les rectifications, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les seuls renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications.

6. M. C... fait valoir, pour la première fois en appel, qu'il n'a pas été correctement informé de la teneur et l'origine des renseignements obtenus par l'administration dans le cadre de son droit de communication en violation de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales. Il se plaint à cet égard de ce que l'administration n'a pas précisé, s'agissant des crédits bancaires injustifiés, la teneur ni l'origine des renseignements obtenus de tiers. Cependant la proposition de rectification du 27 juillet 2015 mentionne clairement, en page 3, que le vérificateur a fait usage de son droit de communication pour obtenir les relevés bancaires non fournis par M. C..., auprès du Crédit du Nord (Agence Joliette à Marseille) le 27 mars 2015, de sorte que l'intéressé a pu aisément en demander la communication, ce qu'il s'est abstenu de faire. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales.

7. En cinquième lieu, M. C... ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de l'article R. 256-8 du livre des procédures fiscales, qui concernent les règles relatives au comptable public territorialement compétent pour établir l'avis de mise en recouvrement et qui ne sauraient s'appliquer à des impositions recouvrées par voie de rôle. A supposer qu'il ait entendu contester le lieu d'imposition des rectifications en litige, il résulte des dispositions de l'article L. 206 du livre des procédures fiscales qu' " En ce qui concerne l'impôt sur le revenu (...), les contestations relatives au lieu d'imposition ne peuvent, en aucun cas, entraîner l'annulation de l'imposition. ". Ainsi, le moyen tiré de ce que c'est le centre des impôts de Saint-Martin (97150) qui, au regard de sa résidence, aurait dû établir et rendre exécutoires les avis d'imposition litigieux, et non celui d'Aix-en-Provence, dans les Bouches-du-Rhône, est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition.

8. En dernier lieu, les énonciations des doctrines référencées BOI-CF-IOR-10-40, n° 40 et n° 80, ainsi que BOI-CF-PGR-30-10, n° 210, sont relatives à la procédure d'imposition et ne constituent donc pas une interprétation d'un texte fiscal dont M. C... pourrait se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la résidence fiscale de M. C... :

9. En vertu du premier alinéa de l'article LO. 6313-1 du code général des collectivités territoriales : " Les dispositions législatives et réglementaires sont applicables de plein droit à Saint-Martin, à l'exception de celles intervenant dans les matières qui relèvent (...) de la compétence de la collectivité en application de l'article LO. 6314-3 ". Aux termes du 1° du I de l'article LO. 6314-3 du même code, la collectivité de Saint-Martin fixe les règles applicables en matière d'impôts, droits et taxes, dans les conditions prévues à l'article LO. 6314-4 du même code. Aux termes de cet article LO. 6314-4 : " I. - La collectivité de Saint-Martin exerce les compétences qu'elle tient du 1° du I de l'article LO. 6314-3 en matière d'impôts, droits et taxes dans le respect des dispositions suivantes : / 1° Les personnes physiques dont le domicile fiscal est établi dans un département de métropole ou d'outre-mer ne peuvent être considérées comme ayant leur domicile fiscal à Saint-Martin qu'après y avoir résidé pendant cinq ans au moins. (...) / I bis. - Les modalités d'application du I sont précisées par une convention conclue entre l'Etat et la collectivité de Saint-Martin en vue de prévenir les doubles impositions et de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales (...) ".

10. L'article 4 de la convention fiscale du 21 décembre 2010 conclue entre l'Etat et la collectivité d'outre-mer de Saint-Martin stipule en outre que : " 1. Au sens de la présente Convention, l'expression " résident d'une partie contractante " désigne : a) En ce qui concerne l'Etat, toute personne qui, en vertu de la législation nationale est assujettie à l'impôt de l'Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction, ou de tout autre critère de nature analogue. Cette expression s'applique aussi aux personnes qui sont assujetties à l'impôt de l'Etat en vertu des conditions de résidence issues de l'article LO. 6314-4 du code général des collectivités territoriales. Cette expression s'applique en outre à l'Etat ainsi qu'aux collectivités territoriales et aux autres personnes morales de droit public. / b) En ce qui concerne Saint-Martin, toute personne qui, en vertu de la réglementation de cette collectivité est assujettie à l'impôt sur ce territoire, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. Cette expression s'applique en outre à la collectivité de Saint-Martin et à ses personnes morales de droit public (...) ".

11. Il résulte des dispositions et stipulations précitées qu'à supposer même que M. C... aurait établi son domicile à Saint-Martin en 2013, il ne pouvait, compte tenu de sa date d'installation, justifier y avoir résidé cinq ans au moins, et, par suite, être regardé comme étant résident fiscal à Saint-Martin au titre de l'année précitée. En outre et en tout état de cause, les pièces produites à l'instance, consistant en une facture pour une place de port pour la période du 28 janvier 2013 au 28 janvier 2014, une lettre de bienvenue d'EDF Archipel Guadeloupe datée du 3 avril 2013, une facture de téléphone du 5 mai 2013, ainsi qu'un récépissé de dépôt d'une demande de permis de construire du 9 août 2013, ne suffisent pas à établir qu'il aurait établi son domicile à Saint-Martin dès 2013. Enfin, M. C... n'indique pas les stipulations spécifiques de la convention, en dehors de celles relatives au champ d'application de cette dernière, dont il entend se prévaloir pour faire échec à l'imposition. Par suite, le moyen tiré de ce que M. C... était résident fiscal de Saint-Martin au titre de l'année 2013 et qu'il aurait dû se voir appliquer les stipulations de la convention fiscale du 21 décembre 2010 conclue entre l'Etat et la collectivité d'outre-mer de Saint-Martin doit être écarté.

En ce qui concerne les revenus non dénommés :

12. A titre liminaire, aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". Selon l'article R. 193-1 du même code : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré ". Les impositions contestées ayant régulièrement fait l'objet d'une procédure de taxation d'office, il appartient à M. C... de rapporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition.

13. Il résulte de l'instruction qu'au cours de l'examen de situation fiscale personnelle dont M. C... a fait l'objet, l'administration fiscale a relevé que des comptes bancaires détenus par le requérant auprès du Crédit Agricole, du Crédit du Nord, du Crédit Mutuel et de la Société Générale avaient été crédités à hauteur de 168 975 euros au titre de l'année 2012 et de 267 784 euros au titre de l'année 2013. En l'absence d'explication sur l'origine des fonds, l'administration a considéré que les sommes en litige devaient être regardées comme des revenus non dénommés.

14. S'agissant de l'année 2012, le requérant dresse un tableau des dépenses qu'il aurait effectuées pour le compte de la société La E..., correspondant à des travaux d'installation et de rénovation d'un restaurant qu'il comptait installer à Saint-Martin, en ne fournissant aucun justificatif de la nature exacte de ces dépenses et en se bornant à produire des extraits de son compte bancaire à la Société Générale au titre des mois de mars, juin, juillet, août et octobre 2012. Ces documents ne permettent toutefois pas de justifier que M. C... aurait engagé des dépenses pour le compte de la société La E... qui l'aurait ensuite remboursé à hauteur des crédits constatés sur son compte personnel. De plus, aucune correspondance ne peut être établie entre les dépenses figurant sur le compte de M. C... et les supposés remboursements que constituent les crédits bancaires considérés comme injustifiés par le vérificateur.

15. S'agissant de l'année 2013, M. C... dresse un tableau des frais engagés, selon lui, pour le compte de la société La E... en mentionnant pour chacune des dépenses, la date, le mode de paiement, le bénéficiaire et l'objet. Cependant, il résulte de l'instruction que les justificatifs produits à l'instance constitués de messages électroniques adressés à des destinataires non identifiables, et au contenu parfois illisible, de documents relatifs à l'achat d'un fonds de commerce, d'un constat d'huissier, d'un arrêté interruptif de travaux, d'un récépissé de dépôt d'un permis de construire, de diverses factures ou tickets de caisse, la plupart non nominatifs, et concernant parfois des dépenses de repas, de téléphone, de location de voiture ou de cigares, des relevés bancaires du compte à la Société Générale de M. C... d'avril à juillet 2013 et de septembre 2013, ainsi que de quelques factures de travaux ne faisant figurer que l'adresse de facturation et non celle du lieu des travaux, ne permettent pas d'établir que ces sommes débitées du compte bancaire de M. C... constitueraient des avances consenties à la société La E... en vue de la réalisation des travaux invoqués et que cette dernière lui aurait remboursées. Aucune correspondance ne peut à cet égard être établie entre les crédits figurant sur les différents comptes bancaires de M. C... et les dépenses qu'il a effectuées en 2013.

16. Par suite, dès lors que le contribuable, en situation de taxation d'office, ne produit pas, au sujet de crédits bancaires non déclarés, d'éléments probants permettant de justifier leur origine et de rattacher ces revenus à une catégorie de revenus, et que ni cette origine ni la nature du revenu ne ressortent des documents ou d'informations versées au dossier, M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a taxé d'office les sommes de 168 975 euros au titre de l'année 2012 et de 267 784 euros au titre de l'année 2013. L'intéressé, qui n'est pas résident fiscal de Saint-Martin, ainsi qu'il a été déjà exposé au point 11, n'est pas davantage fondé à soutenir que les impositions afférentes à ces rectifications relèveraient de la seule compétence de la collectivité de Saint-Martin.

En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers résultant de la réintégration de charges non déductibles dans le bénéfice imposable de la SARL A... :

17. Aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ". Le contribuable, qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle.

18. Il résulte de l'instruction que la SARL A..., dont M. C... est le gérant, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a réintégré dans le bénéfice imposable de la société, des sommes correspondant à des charges qu'elle a considérées comme non déductibles.

19. Si M. C... entend contester la qualification de charges injustifiées retenue par le service pour des frais extérieurs à l'entreprise, des honoraires de consulting et des frais de déplacement et mission pour des montants respectifs de 37 500 euros, 47 250 euros et 10 086 euros, il résulte de l'instruction, notamment des mentions de la proposition de rectification, que ces dépenses concernent l'année 2011 et non 2012, ainsi que l'indique de manière erronée le requérant, et que l'administration n'a procédé à aucune rectification à l'encontre de l'intéressé au titre de 2011. S'agissant des dépenses d'honoraires de 8 500 euros et de 8 508,32 euros au titre de l'année 2012, et non 2013 comme mentionné à tort par M. C..., ces dernières ne sont toujours pas justifiées par l'intéressé en appel. Si ce dernier soutient que, s'agissant de l'exercice clos en 2012, les dépenses de 37 500 euros et 47 250 euros HT correspondent en réalité à des honoraires versés notamment à un cabinet d'avocat espagnol et de détective privé pour retrouver du matériel volé à la société en Espagne ainsi qu'au cabinet Syrec d'expertise-comptable, ces dépenses concernent en réalité l'exercice clos en 2011, et n'ont pas donné lieu à rectification. S'agissant de l'exercice clos en 2013, M. C... fait valoir que le service a rejeté à tort la provision d'un montant de 372 650 euros constituée à la suite d'une procédure de redressement judiciaire de la société Dueto dont la SARL A... s'est portée caution. Cependant, il résulte de l'instruction, et il n'est pas contesté, que le montant de la provision concernée ayant donné lieu à rectification est en réalité de 262 282,94 euros et que la rectification correspondante a fait l'objet, après présentation par l'intéressé de justificatifs, d'un dégrèvement par la décision d'admission partielle du 20 septembre 2017.

20. Si le requérant soutient que la réintégration de l'ensemble de ces charges ne justifie pas que les sommes correspondantes, à l'exception de celles relatives aux dépenses de déplacement et de frais de mission, soient regardées comme des revenus distribués, dès lors qu'elles n'ont pas été désinvesties de la SARL A... à son profit, les bénéfices de cette dernière, tels que reconstitués par l'administration à l'issue des opérations de contrôle, n'ayant été ni mis en réserve, ni incorporés au capital, sont toutefois présumés avoir été distribués en application des dispositions précitées du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts. En outre, M. C..., qui est gérant de droit de l'entreprise et seul détenteur de la procuration sur les comptes bancaires de la société, doit être regardé comme le seul maître de l'affaire qui a effectivement appréhendé les sommes qui correspondent aux bénéfices reconstitués de la SARL A....

En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers résultant de la réintégration de charges non déductibles dans le bénéfice imposable de la SC B... :

21. Si M. C... reprend en appel, sans l'assortir d'éléments de fait ou de droit nouveaux, le moyen tiré de ce que la réintégration des charges injustifiées dans le bénéfice imposable de la société B... ne justifie pas que les sommes correspondantes soient regardées comme des revenus distribués à son profit, il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif au point 14 du jugement attaqué.

En ce qui concerne les sommes portées au crédit du compte courant d'associé de

M. C... au sein de la comptabilité de la SC B... :

22. Aux termes du 1. de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

23. M. C... persiste à soutenir que les sommes portées au crédit de son compte courant d'associé de la SC B... correspondent pour partie à des remboursements de frais avancés pour le compte de cette société. Cependant, en se bornant à produire un chèque de 2 691 euros établi à l'ordre de Me R., ainsi que divers relevés bancaires faisant mention de chèques ou de virements, l'intéressé n'établit pas que les sommes inscrites en compte courant d'associé de montants respectifs de 90 000 euros au titre de 2012 et de 25 000 euros au titre de 2013 seraient en lien avec des avances faites par M. C... pour le compte de la SC B.... L'intéressé ne justifie ainsi pas que ces sommes ne correspondraient pas à la mise à disposition d'un revenu mais constitueraient la transcription comptable d'une opération impliquant une contrepartie pour la société. En outre, le requérant n'établit davantage ni même n'allègue avoir été dans l'impossibilité de procéder, en droit ou en fait, au prélèvement de ces sommes créditées sur son compte. Par suite, en l'absence d'une telle démonstration par l'appelant, c'est à bon droit que ces dernières ont été imposées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en application du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts.

Sur les pénalités :

24. La contestation des majorations pour dépôt tardif des déclarations de revenus après mise en demeure prévue au b du 1 de l'article 1728 du code général des impôts doit être rejetée par voie de conséquence du rejet des conclusions aux fins de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à la charge de M. C... qui ne soulève à cet égard aucun moyen propre.

25. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté le surplus de sa demande. Ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées, ainsi qu'en tout état de cause, celles afférentes aux entiers dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2022, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- Mme Bernabeu, présidente assesseure,

- Mme Carotenuto, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 juin 2022.

2

N° 19MA03861

nc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA03861
Date de la décision : 09/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Mylène BERNABEU
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : AARPI STEERING LEGAL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-06-09;19ma03861 ?
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