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24/05/2022 | FRANCE | N°20MA01228

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 24 mai 2022, 20MA01228


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 10 mai 2017 par lequel le maire de la commune de Gardanne l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 11 octobre 2016.

Par un jugement n° 1705316 du 14 janvier 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 mars 2020, Mme A..., représentée par Me Mboup, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement

du tribunal administratif de Marseille du 14 janvier 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 mai 2017 p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 10 mai 2017 par lequel le maire de la commune de Gardanne l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 11 octobre 2016.

Par un jugement n° 1705316 du 14 janvier 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 mars 2020, Mme A..., représentée par Me Mboup, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 14 janvier 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 mai 2017 par lequel le maire de la commune de Gardanne l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 11 octobre 2016 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Gardanne la somme de

2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la commune ne pouvait légalement, en l'absence de tout élément médical le justifiant, la placer d'office en congé de maladie ordinaire ;

- l'arrêté a été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'a pas été précédé de la recherche d'un aménagement de son poste ou d'un reclassement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 septembre 2020, la commune de Gardanne, représentée par Me Sindres, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la requête est irrecevable, faute de comporter des moyens dirigés contre le jugement en litige, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 411-1 du code de justice administrative, et que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

La clôture d'instruction a été fixée au 18 avril 2022 par ordonnance du 4 avril 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 85 1054 du 30 septembre 1985 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me Chavalarias, substituant Me Sindres, représentant la commune de Gardanne.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A..., adjoint technique de 1ère classe au sein de la commune de Gardanne, relève appel du jugement du 14 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation l'arrêté du 10 mai 2017 par lequel le maire de la commune l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 11 octobre 2016.

Sur la fin de non-recevoir opposé par la commune de Gardanne :

2. Une requête d'appel qui se borne à reproduire intégralement et exclusivement le texte du mémoire de première instance ne satisfait pas aux prescriptions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, en vertu desquelles la requête doit, à peine d'irrecevabilité, contenir l'exposé des faits et moyens ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge et ne peut être régularisée que jusqu'à l'expiration du délai d'appel.

3. Dans sa requête devant la cour administrative d'appel, Mme A... critique la position des premiers juges. Dans ces conditions, la requête ne saurait être regardée comme ne satisfaisant pas aux exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative. Par suite, la fin de non-recevoir soulevée par la commune de Gardanne ne peut qu'être écartée.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du maire de Gardanne du

10 mai 2017 :

4. D'une part, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) ". Aux termes de l'article 14 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " (...) en cas de maladie dûment constatée et mettant le fonctionnaire dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, celui-ci est de droit mis en congé de maladie. ", et aux termes de l'article 17 du même décret, dans sa version alors en vigueur : " Lorsque, à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, le fonctionnaire est inapte à reprendre son service, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir (...) ".

5. D'autre part, aux termes de l'article 81 de la loi du 26 janvier 1984 :

" Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi, emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes.

Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ". Aux termes de l'article 1er du décret du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires, dans sa version alors en vigueur : " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial ne lui permet plus d'exercer normalement ses fonctions et que les nécessités du service ne permettent pas d'aménager ses conditions de travail, le fonctionnaire peut être affecté dans un autre emploi de son grade après avis de la commission administrative paritaire. / L'autorité territoriale procède à cette affectation après avis du service de médecine professionnelle et de prévention, dans l'hypothèse où l'état de ce fonctionnaire n'a pas rendu nécessaire l'octroi d'un congé de maladie, ou du comité médical si un tel congé a été accordé. (...) ", et aux termes de l'article 2 de ce même décret, dans la même version : " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas d'exercer des fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'autorité territoriale ou le président du centre national de la fonction publique territoriale ou le président du centre de gestion, après avis du comité médical, invite l'intéressé soit à présenter une demande de détachement dans un emploi d'un autre corps ou cadres d'emplois, soit à demander le bénéfice des modalités de reclassement prévues à l'article 82 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984. ".

6. Si les dispositions du décret du 30 juillet 1987 ne subordonnent pas la mise en congé de maladie d'un fonctionnaire à une demande de ce dernier et ne font pas obstacle à ce qu'il soit placé d'office en cette position, dès lors que la maladie a été dûment constatée et qu'il est établi qu'elle met effectivement l'agent dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, Mme A... soutient que la commune ne pouvait la placer d'office en congé de maladie ordinaire faute d'établir qu'elle était dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, en l'absence de certificat ou d'examen médicaux entre le 19 novembre 2016, date jusqu'à laquelle son médecin traitant l'a placée en arrêt de travail, et le 31 mai 2017.

7. Mme A..., titularisée en 1994 au grade d'agent d'entretien territorial, a été affectée en qualité d'agent d'entretien au sein de la médiathèque de la commune, après avoir été reconnue inapte totalement et définitivement aux fonctions statutaires d'adjoint technique, par avis du comité médical du 23 mars 2016, mais " apte à un poste à la médiathèque " par avis du

30 mai 2016 du service de la santé au travail. A la suite d'un malaise survenu le

20 septembre 2016, Mme A... a été placée en arrêt de travail par son médecin traitant jusqu'au 18 novembre 2016 inclus, et soutient, sans être contestée, avoir demandé à reprendre son activité à compter du 19 novembre 2016, mais ne pas y avoir été autorisée par la commune qui l'a renvoyée chez elle. Le 13 octobre 2016, un nouvel avis du médecin du travail, sollicité à la demande de la commune, l'a déclarée " inapte au poste d'agent d'entretien mais apte sur un poste sans contact avec des produits d'entretien, en fonction des propositions ". Le comité médical départemental, saisi une nouvelle fois par la commune, a déclaré, dans un avis du

27 avril 2017, Mme A..., " inapte de façon absolue et définitive et à toute fonction dans la fonction publique, à l'issue des droits au congé de maladie ordinaire ".

8. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... souffre d'une hypersensibilité aux composants chimiques des produits d'entretien, qu'elle a elle-même signalée aux services de la commune le 4 septembre 2015, qui lui interdit l'exercice de fonctions comportant l'utilisation de tels produits. Toutefois, malgré le malaise de l'intéressé du 20 septembre 2016, consécutif à l'inhalation de vapeurs de produits d'entretien émanant du local d'entretien de la médiathèque, la commune, qui n'a pas procédé à l'examen médical de l'intéressée entre le 19 novembre 2016, date à laquelle elle ne bénéficiait plus d'arrêt maladie prescrits par son médecin traitant, et le

27 avril 2017, alors que les fonctions exercées à la médiathèque n'impliquaient pas nécessairement le contact, même indirect, avec des produits d'entretiens, n'établit pas que l'état de santé de Mme A... lui interdisait d'exercer normalement ses fonctions ou que les nécessités du service ne permettaient pas d'aménager ses conditions de travail afin qu'elle puisse reprendre son activité. La collectivité ne pouvait, par suite, sans entacher sa décision d'erreur d'appréciation, la placer d'office en congé de maladie ordinaire postérieurement au

18 novembre 2016.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté litigieux, en tant qu'il la place d'office en congé maladie ordinaire, à compter du

19 novembre 2016.

10. Il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Gardanne, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros au titres des frais exposés et non compris dans les dépens. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la commune de Gardanne sur ce fondement.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Gardanne du

10 mai 2017 en tant qu'il place d'office Mme A... en congé de maladie ordinaire à compter du 19 novembre 2016 et l'arrêté du maire de Gardanne du 10 mai 2017 est annulé dans cette même mesure.

Article 2 : La commune de Gardanne versera à Mme A... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Gardanne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Gardanne.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2022, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. Revert, président assesseur,

- Mme Renault, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 24 mai 2022.

N° 20MA01228 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA01228
Date de la décision : 24/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés de maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Thérèse RENAULT
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : SELARL SINDRES - AVOCATS MARSEILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-05-24;20ma01228 ?
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