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12/05/2022 | FRANCE | N°21MA01009

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 12 mai 2022, 21MA01009


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de La Garde a demandé au tribunal administratif de Toulon, d'une part, d'annuler l'avis du 15 juin 2018 du conseil de discipline de recours de la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur (PACA) proposant de ne pas prononcer de sanction disciplinaire à l'encontre de Mme A... D..., à laquelle le maire de La Garde avait infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée d'une année, dont 6 mois avec sursis et, d'autre part, de confirmer la sanction initiale.

Par un jugement n° 180

2136 du 22 janvier 2021, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'avis ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de La Garde a demandé au tribunal administratif de Toulon, d'une part, d'annuler l'avis du 15 juin 2018 du conseil de discipline de recours de la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur (PACA) proposant de ne pas prononcer de sanction disciplinaire à l'encontre de Mme A... D..., à laquelle le maire de La Garde avait infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée d'une année, dont 6 mois avec sursis et, d'autre part, de confirmer la sanction initiale.

Par un jugement n° 1802136 du 22 janvier 2021, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'avis du 15 juin 2018 du conseil de discipline de recours de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 mars 2021, Mme D..., représentée par Me Hoffman, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 janvier 2021 ;

2°) de mettre à la charge de la commune de La Garde la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucune faute ni aucun manquement à ses obligations ne peut lui être reproché ;

- la sanction n'est pas proportionnée aux faits reprochés ni à son comportement exemplaire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 avril 2021, la commune de La Garde, représentée par la société d'avocats Houlliot, Kieffer, Lecolier, conclut au rejet de la requête, à l'annulation en tant que de besoin de l'avis du 15 juin 2018 du conseil de discipline de recours de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, demande à la cour de dire et juger que la sanction d'exclusion provisoire de fonctions d'un an dont 6 mois avec sursis prononcée par le maire de La Garde par arrêté du 28 mars 2018 est proportionnée et adaptée aux faits de l'espèce et à la situation de Mme A... D... et, enfin, à ce qu'il soit mis à la charge de Mme D... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés et qu'une sanction d'exclusion provisoire de fonctions d'un an dont 6 mois avec sursis prononcée par l'arrêté du 28 mars 2018 de son maire est proportionnée et adaptée aux faits de l'espèce et à la situation de Mme B... A....

La clôture de l'instruction a été fixée au 4 mars 2022, par application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du même jour.

La procédure a été communiquée au centre de gestion de la fonction publique territoriale des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit d'observation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Kieffer représentant la commune de La Garde.

Une note en délibéré présentée pour la requérante a été enregistrée le 6 mai 2022 et n'a pas été communiquée.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 28 mars 2018, le maire de la commune de La Garde a infligé une sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée d'une année assortie d'un sursis de 6 mois à Mme D..., auxiliaire de puériculture principale de 2ème classe, affectée à la halte-garderie " Les Gardinous ". Par un avis du 15 juin 2018, le conseil de discipline de recours de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, saisi par Mme D..., a émis l'avis qu'aucune sanction ne devait être infligée à l'intéressée. Au vu de ce dernier avis qui le liait, le maire de La Garde a retiré son arrêté du 28 mars 2018 et a réintégré Mme B... en qualité d'auxiliaire de puériculture principal de 2ème classe, à compter du 13 avril 2018.

2. Par un jugement du 22 janvier 2021, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'avis du 15 juin 2018 du conseil de discipline de recours de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Mme D... relève appel de ce jugement dont elle demande l'annulation. La commune de La Garde conclut au rejet de la requête et à la confirmation de la sanction initialement infligée à Mme D....

Sur la légalité de l'avis du 15 juin 2018 du conseil de discipline de recours de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur :

3. Aux termes, d'une part, de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". Aux termes, d'autre part, de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...) Deuxième groupe : abaissement d'échelon ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours (...). Troisième groupe : la rétrogradation ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans (...) Quatrième groupe : la mise à la retraite d'office ; la révocation (...) ". Aux termes de l'article 91 de la même loi : " Les fonctionnaires qui ont fait l'objet d'une sanction des deuxième, troisième et quatrième groupes peuvent introduire un recours auprès du conseil de discipline départemental ou interdépartemental dans les cas et conditions fixés par un décret en Conseil d'Etat. / L'autorité territoriale ne peut prononcer de sanction plus sévère que celle proposée par le conseil de discipline de recours ". Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. Il lui appartient également de rechercher si la sanction proposée par un conseil de discipline de recours statuant sur le recours d'un fonctionnaire territorial est proportionnée à la gravité des fautes qui lui sont reprochées.

4. Il est notamment reproché à Mme D... d'avoir, le 7 septembre 2017, oublié et enfermé dans les locaux de la halte-garderie un enfant qui était sous sa garde et sa surveillance, de ne pas avoir respecté les horaires d'ouverture de l'établissement et de s'être absentée sans autorisation dans l'après-midi. Il lui est également reproché l'absence de mise en place d'une procédure de pointage fiable des enfants à leur sortie de la structure et de contrôle de la présence des enfants au sein de la halte-garderie et d'en avoir exclu des enfants alors qu'ils étaient en période d'adaptation.

5. En l'absence de dispositions législatives contraires, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire, à laquelle il incombe d'établir les faits sur le fondement desquels elle inflige une sanction à un agent public, peut apporter la preuve de ces faits devant le juge administratif par tout moyen. Toutefois, tout employeur public est tenu, vis-à-vis de ses agents, à une obligation de loyauté. Il ne saurait, par suite, fonder une sanction disciplinaire à l'encontre de l'un de ses agents sur des pièces ou documents qu'il a obtenus en méconnaissance de cette obligation, sauf si un intérêt public majeur le justifie. Il appartient au juge administratif, saisi d'une sanction disciplinaire prononcée à l'encontre d'un agent public, d'en apprécier la légalité au regard des seuls pièces ou documents que l'autorité investie du pouvoir disciplinaire pouvait ainsi retenir.

6. Il résulte de l'instruction et notamment des images extraites de la vidéo surveillance installée devant la halte-garderie ainsi que des nombreuses attestations produites par la commune et, plus particulièrement celles émanant du directeur de la police municipale, du directeur adjoint des services, de la directrice générale adjointe des services en charge de la Petite Enfance, de la cheffe du service Petite Enfance et de l'adjointe administrative de ce service, que, le 7 septembre 2017, Mme D... a quitté, en même temps que la directrice de la structure et que deux de ses autres collègues, les locaux de la structure avant l'heure réglementaire - 17h30 - en y laissant un enfant de 21 mois qui dormait dans le dortoir. Il résulte également de l'instruction que, alors que Mme D... qui était, après la directrice, l'agent le plus qualifié de la halte-garderie, ne pouvait ignorer l'absence de tout système de pointage de sortie des enfants au moment de leur restitution aux familles, n'a pris aucune mesure ni interrogé ses collègues pour s'assurer que tous les enfants avaient quitté la structure avant de fermer celle-ci prématurément lors de son retour au sein de cette dernière. D'ailleurs, elle expose dans ses écritures s'être uniquement fiée à l'habitude selon laquelle aucun enfant ne dormait à l'heure où elle est revenue à la crèche après s'en être absentée. Par suite, l'oubli et l'enfermement sur place d'un enfant qui était sous sa garde et sa surveillance, à cette occasion, caractérise, un manquement de l'intéressée à ses obligations professionnelles, justifiant que lui fût infligée une sanction disciplinaire. A cet égard, l'intéressée ne peut utilement se prévaloir de ce qu'il s'agit d'un " incident involontaire " demeuré sans incidence pour l'enfant concerné, ni de ce que les parents de ce dernier ont ensuite maintenu leur confiance à l'établissement, ni de ses qualifications professionnelles et de ce qu'elle n'aurait jamais été sanctionnée antérieurement.

7. Il résulte de ce qui vient d'être dit que c'est à tort que le conseil de discipline de recours de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a estimé que de tels faits, qui constituent des manquements aux obligations professionnelles, ne présentaient pas un caractère fautif de nature à justifier une sanction disciplinaire et c'est donc à bon droit que les premiers juges ont annulé l'avis émis par cette instance le 15 juin 2018. Il suit de là que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal a annulé cet avis.

Sur les conclusions de la commune de La Garde à fin de confirmer la sanction initiale :

8. C'est à bon droit que, par des motifs qui ne sont pas utilement critiqués, les premiers juges ont rejeté les conclusions de la commune de La Garde à fin de confirmer la sanction initiale.

Sur les frais de procédure :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à chacune des parties la charge de ses frais d'instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la commune de La Garde est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D..., à la commune de La Garde et au centre de gestion de la fonction publique territoriale des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 5 mai 2022 où siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- Mme Massé-Degois, présidente-assesseure,

- M. Mahmouti, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 mai 2022.

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N° 21MA01009

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01009
Date de la décision : 12/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-03-01 Fonctionnaires et agents publics. - Discipline. - Motifs. - Faits de nature à justifier une sanction.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Jérôme MAHMOUTI
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : HOULLIOT KIEFFER LECOLIER AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 24/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-05-12;21ma01009 ?
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