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19/04/2022 | FRANCE | N°21MA01402

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 19 avril 2022, 21MA01402


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Les Agaves a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du maire du Lavandou du 29 octobre 2014 par lequel le maire a refusé de lui délivrer un permis de construire pour édifier quatre villas mitoyennes sur un terrain cadastré BR n° 196 situé rue de la Chapelle, lieu-dit A... sur le territoire communal, ensemble la décision implicite de rejet née le 5 janvier 2015 du silence gardé par le maire sur son recours gracieux tendant au retrait de cet arrêté.

Par le jugement

n° 1500706 du 28 novembre 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Les Agaves a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du maire du Lavandou du 29 octobre 2014 par lequel le maire a refusé de lui délivrer un permis de construire pour édifier quatre villas mitoyennes sur un terrain cadastré BR n° 196 situé rue de la Chapelle, lieu-dit A... sur le territoire communal, ensemble la décision implicite de rejet née le 5 janvier 2015 du silence gardé par le maire sur son recours gracieux tendant au retrait de cet arrêté.

Par le jugement n° 1500706 du 28 novembre 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour avant renvoi :

Par une requête enregistrée sous le n° 18MA00003 et des mémoires, enregistrés le 3 janvier 2018, le 20 décembre 2018 et le 6 mars 2019, la SCI Les Agaves, représentée par Me Faure-Bonaccorsi, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 28 novembre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire du Lavandou du 29 octobre 2014 portant refus de permis de construire ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune du Lavandou la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le projet litigieux ne méconnaît pas les dispositions de l'article UD 12 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) en présence de huit places de stationnement ;

- la circonstance que le dossier de demande de permis de construire apporterait des modifications à un précédent permis de construire sur le même terrain est inopérante en l'absence d'un ensemble immobilier unique nécessitant une seule autorisation ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article UD 11 du règlement du PLU ;

- la demande de substitution de motifs de la commune n'est pas fondée en l'absence de méconnaissance de l'article UD 8 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 août 2018, 6 février 2019 et 5 avril 2019, la commune du Lavandou, représentée par Me Barbeau-Bournoville, conclut au rejet de la requête et demande à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la SCI Les Agaves au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- par substitution de motif, le permis méconnaît l'article UD 8 du règlement du PLU ;

- les moyens soulevés par la SCI Les Agaves ne sont pas fondés.

Par un arrêt n° 18MA00003 du 14 février 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal administratif de Toulon du 28 novembre 2017 et l'arrêté du maire du Lavandou du 29 octobre 2014 portant refus de permis de construire.

Sur pourvoi de la commune du Lavandou, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, par décision n° 441302 du 31 mars 2021, a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire devant la Cour.

Procédure devant la Cour après renvoi :

Par un mémoire enregistré le 16 février 2022, la SCI Les Agaves, représentée par la SELARL d'avocats LLC et associés, conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune du Lavandou la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en outre, à ce que la Cour enjoigne au maire de la commune de lui délivrer le permis de construire sollicité dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Elle soutient en outre que :

- le projet en litige ne méconnaît pas l'article UD8 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, dès lors que les quatre bâtiments que constituent les villas au sens de cet article sont implantés à plus de 4,16 m du bâtiment en cours d'édification sur la partie nord du terrain, qu'en tout état de cause, l'article UD8 prévoit que des implantations peuvent être admises à l'intérieur d'opérations présentant un intérêt évident de composition urbaine ou architecturale comme en l'espèce, et qu'au surplus, cette dérogation à la règle d'implantation constitue une adaptation mineure au sens de l'article L. 123-1-9 du code de l'urbanisme ;

- les autres motifs du refus litigieux sont infondés.

Par un mémoire enregistré le 15 février 2022, la commune du Lavandou, représentée par la SCP d'avocats Coulombie-Gras-Cretin-Becquevort-Rosier-Soland-Gilliocq-Barbeau Bournoville, conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures et à ce qu'il soit mis à la charge de la SCI Les Agaves la somme de 2 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que le projet méconnaît l'article UD8 du règlement du PLU.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carassic,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me Faure-Bonaccorsi représentant la SCI les Agaves et de Me Germe représentant la commune du Lavandou.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Les Agaves est propriétaire d'un terrain en pente d'une superficie de 1 887 m² cadastré BR n° 196 situé rue de la Chapelle, lieu-dit A..., classé en zone UD par le règlement, sur le territoire de la commune du Lavandou. Par arrêté du 12 juin 2012, elle a obtenu un permis de construire pour édifier sur la partie haute de son terrain un immeuble de 376 m² de surface de plancher comprenant cinq logements. En cours de chantier, elle a déposé le 1er août 2014 une demande de permis de construire pour édifier quatre villas mitoyennes en R+1 en contrebas du même terrain. Par l'arrêté en litige du 29 octobre 2014, le maire a refusé de délivrer ce permis de construire. Il a implicitement rejeté le recours gracieux formé le 4 janvier 2015 par la société pétitionnaire tendant au retrait de cet arrêté. Le tribunal administratif de Toulon, par le jugement attaqué du 28 novembre 2017, a rejeté la demande de la SCI Les Agaves tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 octobre 2014 du maire, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Par un arrêt du 14 février 2020, la cour administrative d'appel de Marseille, faisant droit à l'appel de la société requérante, a annulé le jugement du tribunal administratif de Toulon du 28 novembre 2017 et l'arrêté du maire litigieux du maire du Lavandou du 29 octobre 2014. Sur pourvoi de la commune du Lavandou, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, par décision n° 441302 du 31 mars 2021, a annulé cet arrêt au motif que la Cour avait entaché son erreur de droit en faisant à tort application des dispositions de l'article 9 du règlement relatives notamment à la hauteur des bâtiments édifiés sur un terrain en pente pour évaluer la distance devant être respectée, en application de l'article UD8 de ce règlement entre les nouvelles constructions et l'immeuble voisin et a renvoyé l'affaire devant la Cour.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Pour refuser de délivrer le permis de construire en litige, le maire du Lavandou s'est fondé sur trois motifs tirés de ce que la demande en litige modifiait le permis de construire accordé le 12 juin 2012 sans avoir préalablement obtenu l'autorisation administrative nécessaire, de ce que le projet méconnaissait l'article UD12 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune approuvé le 28 mars 2013 et de ce qu'il portait atteinte au caractère des lieux avoisinants en méconnaissance de l'article UD11 de ce règlement.

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le permis délivré le 12 juin 2012 et la demande formée le 1er août 2014 portent sur des constructions distinctes ne comportant aucun lien physique entre elles et que les éléments relevés dans la décision litigeuse, même pris ensemble, ne sont pas suffisants pour caractériser un lien fonctionnel indispensable à l'existence d'un ensemble immobilier unique exigeant une autorisation d'urbanisme unique. Par suite, le motif de la décision en litige tiré de ce que la présentation de deux demandes de permis successives n'a pas mis l'autorité administrative à même de vérifier, par une appréciation globale, que le respect des règles et la protection des intérêts généraux que garantirait un permis unique sont assurés par l'ensemble des permis délivrés ne peut pas fonder légalement le refus de permis de construire du maire.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article UD 12 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) du Lavandou : " Il est exigé pour les constructions à usage : / - d'habitation : deux places par logement individuel, sauf pour les logements aidés pour lesquels une seule place est nécessaire ".

5. Le projet consiste en l'édification de quatre villas mitoyennes exigeant ainsi huit places de stationnement. Il ressort du formulaire Cerfa joint à la demande de permis de construire que huit places de stationnement sont prévues. Le plan de masse joint à la demande, ainsi que les plans de la façade sud font apparaître quatre places couvertes dans les garages attenants à chacune des quatre villas, trois places non couvertes et non closes ainsi qu'une huitième place de stationnement (n° 7) en extérieur à l'est de la villa D. Par suite, le motif du refus de délivrance du permis de construire litigieux tiré de ce que le projet méconnaîtrait l'article UD12 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune ne peut pas fonder légalement la décision en litige.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article UD 11 du règlement du PLU du Lavandou : " En cas de fortes pentes, les constructions doivent être adaptées au profil du terrain par paliers successifs pour éviter les terrassements importants et mieux intégrer le projet au site. / Les constructions susceptibles d'être autorisées ne doivent pas porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites et aux paysages par leur situation, leur dimension, leur volume, ou leur aspect extérieur(...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que le secteur dans lequel le projet doit s'implanter comporte des maisons individuelles et de petits collectifs ne présentant pas de caractère ou d'intérêt particulier. Le projet de construction des quatre villas individuelles en R+1 présente un gabarit et une ampleur comparables à ceux des constructions voisines. Par suite, le motif tiré de ce que le projet porterait atteinte au caractère du site en méconnaissance de l'article UD11 du règlement ne peut pas fonder légalement la décision en litige.

8. En quatrième lieu et toutefois, la commune demande au juge d'appel, par la voie de la substitution de motifs, de confirmer le bien-fondé de son refus de délivrer à la société requérante le permis de construire sollicité en invoquant la méconnaissance du premier alinéa de l'article UD8 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune relatif à l'implantation des constructions les unes par rapport aux autres sur la même propriété, qui prévoit que : " Les bâtiments non contigus doivent être implantés de telle sorte que la distance comptée horizontalement de tout point du bâtiment (balcon non compris) au point le plus proche d'un autre bâtiment soit au moins égale à la moitié de la hauteur du bâtiment le plus élevé, sans pouvoir être inférieure à 4 mètres./Toutefois, des implantations différentes peuvent être admises : à l'intérieur d'opérations présentant un intérêt évident de composition urbaine ou architecturale. ".

9. Il résulte de ces dispositions qu'en cas de bâtiments non contigus sur un même terrain d'assiette, la distance horizontale de tout point du bâtiment A au point le plus proche du bâtiment B doit être au moins égale à la moitié de la hauteur du bâtiment le plus élevé calculée à son point culminant à l'égout du toit, où que ce point se situe sur le bâtiment le plus élevé, et d'autre part, à la distance minimale de quatre mètres.

10. Il ressort des pièces du dossier que le point le plus haut à l'égout du toit de l'immeuble collectif autorisé par l'arrêté du 12 juin 2012 situé en haut de la pente du terrain d'assiette, est situé sur la façade nord de cet immeuble donnant sur l'arrière et s'élève à 8,32 mètres. Par suite, la distance entre ce bâtiment et la villa projetée la plus proche doit, en application de l'article UD8 du règlement, être de 4,16 mètres. Le plan de masse joint à la demande de permis de construire fait apparaître que cette distance est de 4 mètres. Si la société requérante fait valoir que cette distance de 4 mètres est calculée à tort à compter de la limite nord des terrasses végétales et des patios situés au nord des villas jusqu'à la façade sud du bâtiment autorisé en 2013 et non pas entre les bâtiments eux-mêmes des villas et celui existant, ces terrasses et patios accolés aux villas projetées font partie intégrante de ces bâtiments d'habitation et doivent être pris en compte pour l'application de la règle de distance d''implantation des constructions les unes par rapport aux autres sur la même propriété. Par suite, le projet méconnaît la distance minimale prévue par l'article UD8 du règlement. Contrairement à ce que soutient la société requérante, la création de patios et de terrasses végétalisés séparant l'immeuble collectif existant des villas projetées situées en contrebas ne peut être regardée comme " présentant un intérêt évident de composition architecturale " au sens de l'article UD8 du règlement permettant de déroger à cette règle de distance minimale. Si la SCI Les Agaves soutient aussi que le permis de construire aurait pu lui être délivré dès lors que cette règle de prospect peut faire l'objet d'une dérogation au titre d'une adaptation mineure au sens de l'article L. 123-1-9 du code de l'urbanisme alors applicable et désormais repris à l'article L. 152-3 du même code, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette adaptation soit rendue nécessaire par la pente de 12 % du terrain d'assiette du projet combiné avec sa forme triangulaire sur le versant sud, dès lors que la longueur des patios et des terrasses peut être aisément réduite pour respecter la règle du prospect. Il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Par suite, il y a lieu d'accueillir la substitution de motifs demandée par la commune, dès lors que le maire a pu légalement refuser de délivrer le permis en litige au motif que le projet méconnaît l'article UD8 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune.

11. Il résulte de ce qui précède que la SCI Les Agaves n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire du Lavandou du 29 octobre 2014, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'enjoindre au maire de lui délivrer le permis de construire sollicité doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune du Lavandou, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que lui demande la SCI les Agaves au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI Les Agaves la somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la commune du Lavandou.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI Les Agaves est rejetée.

Article 2 : La SCI Les Agaves versera à la commune du Lavandou la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Les Agaves et à la commune du Lavandou.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2022, où siégeaient :

- M. Chazan, président de chambre,

- Mme Carassic, première conseillère,

- M. Mouret, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 avril 2022.

2

N° 21MA01402


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01402
Date de la décision : 19/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Nature de la décision. - Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : LLC et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-04-19;21ma01402 ?
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