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19/04/2022 | FRANCE | N°20MA00043

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 19 avril 2022, 20MA00043


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les sociétés Sotraloc, Nacmat BTP et Domitiana ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 17 juillet 2018 par laquelle le maire de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues a rejeté leur demande tendant à l'abrogation de la délibération du 20 février 2017 portant approbation du plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1804497 du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier, faisant partiellement droit à leur demande, a annulé cette décision "

en tant que le règlement de la zone AUh impose la réalisation d'une étude paysagè...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les sociétés Sotraloc, Nacmat BTP et Domitiana ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 17 juillet 2018 par laquelle le maire de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues a rejeté leur demande tendant à l'abrogation de la délibération du 20 février 2017 portant approbation du plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1804497 du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier, faisant partiellement droit à leur demande, a annulé cette décision " en tant que le règlement de la zone AUh impose la réalisation d'une étude paysagère aux porteurs de projet ".

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 6 janvier et 22 mai 2020, les sociétés Sotraloc, Nacmat BTP et Domitiana, représentées par la SCP Boivin et Associés, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 7 novembre 2019 en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à leurs conclusions à fin d'annulation ;

2°) d'annuler la décision du 17 juillet 2018 par laquelle le maire de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues a rejeté leur demande d'abrogation ;

3°) d'enjoindre à la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues d'abroger la délibération du 20 février 2017 portant approbation du plan local d'urbanisme de la commune, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à venir ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le jugement attaqué est entaché d'une contradiction de motifs ;

- ce jugement ne répond pas à leur argumentation tirée de l'insuffisance de l'évaluation environnementale concernant l'analyse des incidences du projet d'orientation d'aménagement et de programmation sur la biodiversité, l'eau, la santé et les impacts liés au bruit ;

- le tribunal a omis de statuer sur leurs conclusions à fin d'injonction ;

- les dispositions du VI de l'article 12 du décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015 ont été méconnues ;

- les conclusions du commissaire enquêteur sont insuffisamment motivées ;

- l'évaluation environnementale contenue dans le rapport de présentation présente un caractère insuffisant ;

- le plan local d'urbanisme en litige est entaché d'une erreur de fait relative à la description du site de l'ancienne carrière et le tribunal a entaché son jugement d'une dénaturation des faits et des pièces du dossier sur ce point ;

- le classement des terrains de l'ancienne carrière en zone AUh réservée à l'implantation d'un hôtel est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le règlement de la zone AUh est entaché d'une erreur de droit et l'orientation d'aménagement et de programmation relative au secteur en cause comporte des dispositions qui ne sont pas au nombre de celles qu'une telle orientation peut définir.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 avril 2020, la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues, représentée par la SCP Margall-d'Albenas, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge des sociétés requérantes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par les sociétés requérantes ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 ;

- le décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015 ;

- le code de justice administrative.

Par une décision du 24 août 2021, la présidente de la cour a désigné M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mouret,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- les observations de Me Hercé, représentant les sociétés requérantes, et celles de Me d'Audigier, représentant la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues.

Considérant ce qui suit :

1. Le conseil municipal de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues a, par une délibération du 20 février 2017, approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. Par une décision du 17 juillet 2018, le maire de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues a rejeté la demande présentée par les sociétés Sotraloc, Nacmat BTP et Domitiana et tendant à l'abrogation de cette délibération. Ces sociétés relèvent appel du jugement du 7 novembre 2019 en tant que le tribunal administratif de Montpellier n'a fait que partiellement droit à leur demande, en annulant la décision du 17 juillet 2018 " en tant que le règlement de la zone AUh impose la réalisation d'une étude paysagère aux porteurs de projet ". Elles demandent à la cour d'annuler cette décision en totalité.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, il ressort des points 6 à 8 du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments invoqués devant eux, ont suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré du caractère insuffisant de l'évaluation environnementale contenue dans le rapport de présentation du plan local d'urbanisme de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement doit, en tout état de cause, être écarté.

3. En deuxième lieu, si les sociétés requérantes soutiennent que le jugement attaqué est entaché d'une contradictions de motifs, un tel moyen affecte son bien-fondé et non sa régularité. Par suite, il doit être écarté.

4. En troisième lieu, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, les sociétés requérantes ne peuvent utilement soutenir que les premiers juges ont commis une dénaturation des faits et des pièces du dossier.

5. En quatrième lieu, en revanche, il ressort des motifs du jugement attaqué que le tribunal administratif de Montpellier, après avoir accueilli l'un des moyens invoqués devant lui puis annulé partiellement la décision de refus d'abrogation en litige, a omis de se prononcer sur les conclusions à fin d'injonction présentées par les sociétés Sotraloc, Nacmat BTP et Domitiana. Dès lors, il y a lieu d'annuler ce jugement en tant qu'il n'a pas statué sur ces conclusions à fin d'injonction.

6. Il y a lieu de statuer sur ces conclusions à fin d'injonction par la voie de l'évocation et de statuer sur le surplus des conclusions par la voie de l'effet dévolutif.

Sur la légalité de la décision de refus d'abrogation en litige :

7. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration : " L'administration est tenue d'abroger expressément un acte réglementaire illégal ou dépourvu d'objet, que cette situation existe depuis son édiction ou qu'elle résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures, sauf à ce que l'illégalité ait cessé ".

8. En premier lieu, si, dans le cadre de la contestation d'un acte réglementaire intervenant après l'expiration du délai de recours contentieux contre cet acte, par la voie de l'exception ou sous la forme d'un recours pour excès de pouvoir contre le refus de l'abroger, la légalité des règles qu'il fixe, la compétence de son auteur et l'existence d'un détournement de pouvoir peuvent être utilement critiquées, il n'en va pas de même des conditions d'édiction de cet acte, les vices de forme et de procédure dont il serait entaché ne pouvant être utilement invoqués que dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'acte réglementaire lui-même et introduit avant l'expiration du délai de recours contentieux.

9. Il résulte des principes rappelés au point précédent que les moyens de légalité externe invoqués par les sociétés requérantes, tirés respectivement de l'insuffisance de motivation des conclusions du commissaire enquêteur et du caractère insuffisant de l'évaluation environnementale contenue dans le rapport de présentation du plan local d'urbanisme de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues, ne peuvent être utilement invoqués à l'encontre de la décision litigieuse refusant d'abroger ce document d'urbanisme.

10. En deuxième lieu, le VI de l'article 12 du décret du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du livre Ier du code de l'urbanisme et à la modernisation du contenu du plan local d'urbanisme dispose que : " Les dispositions des articles R. 123-1 à R. 123-14 du code de l'urbanisme dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2015 restent applicables aux plans locaux d'urbanisme dont l'élaboration, la révision, la modification ou la mise en compatibilité a été engagée avant le 1er janvier 2016. Toutefois, dans les cas d'une élaboration ou d'une révision prescrite sur le fondement du I de l'article L. 123-13 en vigueur avant le 31 décembre 2015, le conseil communautaire ou le conseil municipal peut décider que sera applicable au document l'ensemble des articles R. 151-1 à R. 151-55 du code de l'urbanisme dans leur rédaction en vigueur à compter du 1er janvier 2016, par une délibération expresse qui intervient au plus tard lorsque le projet est arrêté (...) ".

11. Il est constant que l'élaboration du plan local d'urbanisme de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues a été prescrite avant le 1er janvier 2016. En l'absence de délibération expresse intervenue avant l'arrêt du projet de plan et optant pour l'application des articles R. 151-1 à R. 151-55 du code de l'urbanisme, il résulte des dispositions citées au point précédent que ce document d'urbanisme demeure régi par les articles R. 123-1 à R. 123-14 de ce code dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2015. S'il ressort des pièces du dossier que le règlement du plan local d'urbanisme en litige, ainsi que son rapport de présentation, se réfèrent à plusieurs reprises à certaines dispositions réglementaires nouvelles, en vigueur à compter du 1er janvier 2016, les sociétés requérantes n'établissent pas que les dispositions réglementaires applicables à ce plan local d'urbanisme auraient été méconnues en raison de ces erreurs de numérotation, ni en quoi la légalité d'une ou plusieurs composantes du plan local d'urbanisme de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues pourrait avoir été affectée en raison de ces références textuelles erronées, alors au demeurant que de nombreuses dispositions réglementaires issues du décret du 28 décembre 2015 ont un contenu analogue à celles antérieurement applicables. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du VI de l'article 12 du décret du 28 décembre 2015 ne saurait être accueilli. Par ailleurs, l'allégation selon laquelle la référence concomitante aux dispositions réglementaires antérieures et postérieures au 1er janvier 2016 a " introduit une confusion préjudiciable à la bonne compréhension du document d'urbanisme pour le public " n'est pas assortie de précisions suffisantes permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé.

12. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 123-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable en l'espèce en vertu du VI de l'article 12 du décret du 28 décembre 2015 : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs à caractère naturel de la commune destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies publiques et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement définissent les conditions d'aménagement et d'équipement de la zone. Les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement. / Lorsque les voies publiques et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU n'ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, son ouverture à l'urbanisation peut être subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d'urbanisme ".

13. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils peuvent être amenés, à cet effet, à classer en zone à urbaniser, pour les motifs énoncés à l'article R. 123-6 du code de l'urbanisme alors en vigueur, dont les dispositions sont aujourd'hui reprises en substance à l'article R. 151-20 du même code, un secteur qu'ils entendent ouvrir à l'urbanisation. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

14. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme en litige classe en zone AUh une unité foncière d'une superficie totale d'environ 2,7 hectares située à proximité immédiate de la route départementale n° 17 dont elle est séparée par un talus bordant sa partie ouest. Ce tènement, qui s'ouvre en particulier à l'est et au sud, sur une vaste zone à caractère naturel et boisé, et qui est séparé de la zone d'activités située au nord par des parcelles boisées, correspond au site d'une ancienne carrière sur lequel plusieurs activités sont exercées. A cet égard, les photographies du secteur litigieux insérées dans le projet d'aménagement et de développement durables, le rapport de présentation, ainsi que dans l'orientation d'aménagement et de programmation relative à la requalification du site de l'ancienne carrière, permettent de constater la présence de diverses activités et, plus généralement, d'apprécier les caractéristiques de ce site ainsi que la configuration du secteur dans lequel il s'insère. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier, en dépit de la circonstance que le site en cause soit qualifié de " dépotoir " dans plusieurs composantes du plan local d'urbanisme de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues, que l'appréciation des auteurs de ce plan en ce qui concerne cette zone serait fondée sur des faits matériellement inexacts.

15. D'autre part, le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues comporte, dans son axe n° 2, une orientation intitulée " Reconvertir l'ancienne carrière en hôtel ", laquelle indique notamment que le site en cause, qui s'inscrit dans un secteur présentant un " fort enjeu paysager ", présente un " potentiel en termes de développement économique ou d'aménagement d'intérêt collectif ", avant de préciser les raisons pour lesquelles les auteurs du plan ont retenu ce projet d'hôtel et d'envisager une possible modification ultérieure du plan local d'urbanisme en cas de non-réalisation de ce projet. Le rapport de présentation énonce, à l'instar du préambule du règlement de la zone AUh, que celle-ci est une zone à urbaniser dite " bloquée ", qui fait l'objet d'une orientation d'aménagement et de programmation, et identifie la destination des constructions susceptibles d'y être autorisées. Si les sociétés requérantes font état du risque d'éboulement auquel est exposé le secteur en raison de la présence des fronts de taille de l'ancienne carrière, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce risque présenterait une intensité telle que l'ouverture à l'urbanisation de ce site serait, à terme, inenvisageable. Par ailleurs, la circonstance alléguée que le projet d'aménagement futur de la zone AUh, prévoyant notamment l'implantation d'un hôtel de catégorie supérieure, est susceptible de ne pas être réalisé ne saurait suffire à remettre en cause le bien-fondé du classement de cette zone à urbaniser, classement dont il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier l'opportunité. Compte tenu du parti d'urbanisme retenu par les auteurs du plan local d'urbanisme en litige en ce qui concerne le secteur de l'ancienne carrière, ainsi que des caractéristiques et de la situation de ce secteur exposées au point précédent, l'institution de la zone AUh n'apparaît pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

16. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme, reprenant en substance les dispositions de l'ancien article L. 123-1-5 du même code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". L'article R. 123-9 du même code, dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 31 décembre 2015, applicable en l'espèce pour les raisons exposées ci-dessus, dispose que : " (...) / Les règles édictées dans le présent article peuvent être différentes, dans une même zone, selon que les constructions sont destinées à l'habitation, à l'hébergement hôtelier, aux bureaux, au commerce, à l'artisanat, à l'industrie, à l'exploitation agricole ou forestière ou à la fonction d'entrepôt. En outre, des règles particulières peuvent être applicables aux constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif (...) ".

17. S'il est loisible aux auteurs des plans locaux d'urbanisme de préciser, pour des motifs d'urbanisme et sous le contrôle du juge, le contenu des catégories énumérées à l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme, les dispositions de cet article ne leur permettent, toutefois, ni de créer de nouvelles catégories de destination pour lesquelles seraient prévues des règles spécifiques, ni de soumettre certains des locaux relevant de l'une des catégories qu'il énumère aux règles applicables à une autre catégorie.

18. Il ressort des pièces du dossier que les auteurs du plan local d'urbanisme de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues envisagent, ainsi que l'indique le préambule du règlement de la zone AUh, une possible requalification du site de l'ancienne carrière par l'accueil d'un hôtel de " catégorie supérieure ". L'article 2 - AUh prévoit que sont notamment autorisées dans cette zone à urbaniser, sous réserve du respect de certaines conditions, les " constructions et installations destinées à l'hébergement hôtelier " ainsi que les " constructions destinées à l'habitation ". Il résulte des dispositions de ce règlement que les auteurs de ce plan local d'urbanisme ont seulement entendu préciser la nature du projet hôtelier envisagé dans la zone AUh, sans créer une catégorie distincte de celle dénommée " hébergement hôtelier " et mentionnée à l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme. Par suite, les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le règlement de la zone AUh est entaché d'une erreur de droit.

19. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les orientations d'aménagement et de programmation comprennent, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, des dispositions portant sur l'aménagement, l'habitat, les transports et les déplacements (...) " Selon l'article L. 151-7 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Les orientations d'aménagement et de programmation peuvent notamment : / 1° Définir les actions et opérations nécessaires pour mettre en valeur l'environnement, notamment les continuités écologiques, les paysages, les entrées de villes et le patrimoine, lutter contre l'insalubrité, permettre le renouvellement urbain et assurer le développement de la commune ; / 2° Favoriser la mixité fonctionnelle en prévoyant qu'en cas de réalisation d'opérations d'aménagement, de construction ou de réhabilitation un pourcentage de ces opérations est destiné à la réalisation de commerces ; / 3° Comporter un échéancier prévisionnel de l'ouverture à l'urbanisation des zones à urbaniser et de la réalisation des équipements correspondants ; / 4° Porter sur des quartiers ou des secteurs à mettre en valeur, réhabiliter, restructurer ou aménager ; 5° Prendre la forme de schémas d'aménagement et préciser les principales caractéristiques des voies et espaces publics ; / 6° Adapter la délimitation des périmètres, en fonction de la qualité de la desserte ".

20. En matière d'aménagement, une orientation d'aménagement et de programmation implique un ensemble d'orientations définissant des actions ou opérations visant, dans un souci de cohérence à l'échelle du périmètre qu'elle couvre, à mettre en valeur des éléments de l'environnement naturel ou urbain, ou à réhabiliter, restructurer ou aménager un quartier ou un secteur. Si les orientations d'aménagement et de programmation peuvent, en vertu des dispositions citées au point précédent, prendre la forme de schémas d'aménagement, ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre aux auteurs du plan local d'urbanisme, qui peuvent y préciser les principales caractéristiques des voies et espaces publics, de fixer précisément, au sein de telles orientations, les caractéristiques des constructions susceptibles d'être réalisées.

21. Il ressort des pièces du dossier que l'orientation d'aménagement et de programmation dénommée " Requalification de l'ancienne carrière en hôtel " se borne à rappeler que l'objectif des auteurs du plan local d'urbanisme de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues consiste, ainsi que l'indique notamment le préambule du règlement de la zone AUh, à permettre la reconversion de l'ancienne carrière en hôtel de " catégorie supérieure ". Par ailleurs, la règle d'implantation des établissements recevant du public en retrait de l'axe de la route départementale n° 17 énoncée dans cette orientation d'aménagement et de programmation constitue un rappel de la règle fixée par le premier alinéa de l'article 6 - AUh du règlement du plan local d'urbanisme. Enfin, l'indication selon laquelle, " dans le cadre de l'aménagement, toutes les anciennes constructions liées à l'exploitation de la carrière doivent être démolies " n'entre en contradiction avec aucune prescription du règlement de la zone AUh du plan local d'urbanisme. Dans ces conditions, les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que l'orientation d'aménagement et de programmation en cause serait illégale faute de respecter les exigences rappelées au point précédent.

22. Il résulte de ce qui précède que les sociétés Sotraloc, Nacmat BTP et Domitiana ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier n'a fait que partiellement droit à leur demande en annulant la décision litigieuse dans la seule mesure rappelée au point 1.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

23. D'une part, la décision de refus d'abrogation en litige a été annulée par le jugement attaqué du 7 novembre 2019 en tant seulement que le règlement de la zone AUh impose la réalisation d'une étude paysagère aux porteurs de projet. Par un jugement n° 1900701 du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la délibération du 20 février 2017 par laquelle le conseil municipal de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, ainsi que la décision implicite portant rejet du recours gracieux formé à son encontre, en tant seulement que le règlement de la zone AUh impose la réalisation d'une étude paysagère aux porteurs de projet. En l'absence d'appel incident de la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues contre ce dernier jugement dont il a été relevé appel dans l'instance n° 20MA00045, ce jugement est devenu définitif en tant qu'il prononce cette annulation contentieuse partielle. Dans ces conditions, les conclusions à fin d'injonction présentées par les sociétés requérantes et tendant à ce que la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues procède à l'abrogation du plan local d'urbanisme de la commune, en tant que le règlement de la zone AUh impose la réalisation d'une étude paysagère aux porteurs de projet, sont sans objet et ne peuvent qu'être rejetées.

24. D'autre part, le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par les sociétés requérantes dans le cadre de la présente instance d'appel, n'appelle aucune mesure d'exécution.

Sur les frais liés au litige :

25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par les sociétés Sotraloc, Nacmat BTP et Domitiana au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 7 novembre 2019 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions à fin d'injonction présentées par les sociétés Sotraloc, Nacmat BTP et Domitiana.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Sotraloc, à la société Nacmat BTP, à la société Domitiana et à la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Carassic, première conseillère,

- M. Mouret, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 avril 2022.

2

N° 20MA00043


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00043
Date de la décision : 19/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Disparition de l'acte - Abrogation - Abrogation des actes réglementaires.

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP BOIVIN et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-04-19;20ma00043 ?
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