Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société anonyme coopérative d'intérêt collectif (SACIC) d'habitations à loyer modéré (HLM) Gambetta PACA a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 à 2012 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1500321 du 22 juin 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour avant renvoi :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 août 2017 et le 24 août 2018, la SACIC d'HLM Gambetta PACA, représentée par Me Ponsart, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 22 juin 2017 ;
2°) de prononcer la réduction des impositions en litige et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement n'est pas motivé ;
- elle doit bénéficier de l'exonération d'impôt sur les sociétés à raison des placements de trésorerie qu'elle a effectués au sein de ses filiales au titre des années 2010 à 2012, sur le fondement des dispositions du c du 4° du 1 de l'article 207 du code général des impôts.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la SACIC d'HLM Gambetta PACA ne sont pas fondés.
Par un arrêt n° 17MA03518 du 22 janvier 2019, la Cour a annulé le jugement du tribunal administratif de Toulon (article 1er) mais, statuant par la voie de l'évocation, rejeté la demande de la SACIC d'HLM Gambetta PACA (article 2).
Par une décision n° 429069 du 23 novembre 2020, le Conseil d'Etat a, sur pourvoi de la SACIC d'HLM Gambetta PACA, annulé l'article 2 de l'arrêt du 22 janvier 2019 et renvoyé l'affaire à la Cour dans cette mesure.
Procédure devant la Cour après renvoi :
Par un mémoire, enregistré le 24 février 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut aux mêmes fins que précédemment.
Il fait valoir que le moyen soulevé par la SACIC d'HLM Gambetta PACA n'est pas fondé.
Par un mémoire, enregistré le 14 avril 2021, la SACIC d'HLM Gambetta PACA, représentée par Me Ponsart, conclut aux mêmes fins que précédemment, et demande à la Cour de mettre à la charge de l'Etat une somme portée à 4 000 euros au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- et les conclusions de Mme Courbon, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue d'une vérification de comptabilité et d'un contrôle sur pièces, la SACIC d'HLM Gambetta PACA a été assujettie à l'impôt sur les sociétés à raison des intérêts perçus sur les avances en compte courant qu'elle avait accordées à ses filiales au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012. Le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés en résultant. Par un arrêt n° 17MA03518 du 22 janvier 2019, la Cour, après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Toulon, a rejeté les prétentions de la SACIC d'HLM Gambetta PACA. Par une décision n° 429069 du 23 novembre 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt en tant qu'il a rejeté sa demande présentée devant le tribunal administratif de Toulon, au motif que la Cour s'était fondée, pour rejeter les prétentions de la requérante, sur le non-respect des articles R. 423-74 et R. 423-75 du code de la construction et de l'habitation alors que d'autres dispositions du même code, et notamment celles de l'article L. 423-15, étaient susceptibles de s'appliquer. Le conseil a renvoyé dans cette mesure l'affaire devant la Cour.
2. D'une part, aux termes de l'article L. 423-3 du code de la construction et de l'habitation : " Les règles financières budgétaires et comptables applicables aux organismes d'habitations à loyer modéré sont déterminées par décrets (...) ". Aux termes de l'article R. 423-74 du même code : " Les sociétés d'habitations à loyer modéré déposent leurs fonds auprès du Trésor public, à la Caisse des dépôts et consignations, à la Banque de France, à La Poste ou auprès d'un établissement de crédit ayant obtenu un agrément en vertu des dispositions applicables dans les Etats membres de la Communauté européenne ou les autres Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen. / Elles peuvent également effectuer des dépôts sur un compte à terme ouvert dans les mêmes conditions ou sur un premier livret de la Caisse nationale d'épargne ou des caisses d'épargne et de prévoyance. " Aux termes de son article R. 423-75 : " En dehors des opérations prévues par la législation en vigueur, les sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré et les sociétés coopératives de production, d'intérêt collectif ou de location-attribution d'habitations à loyer modéré ne peuvent effectuer que des achats de titres émis ou garantis par les Etats membres de la Communauté européenne ou les autres Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen, ou de parts ou actions d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières gérant exclusivement des titres émis ou garantis par les Etats membres de la Communauté européenne ou les autres Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen, libellés en euros. "
3. En outre, la loi du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit a ajouté au chapitre III du titre II du livre IV du code de la construction et de l'habitation un article L. 423-15 ainsi rédigé : " Un organisme d'habitations à loyer modéré peut consentir une avance en compte courant à une société d'habitations à loyer modéré dont il détient au moins 5 % du capital. Le taux d'intérêt de cette avance ne peut excéder de 1,5 point le taux servi au détenteur d'un livret A. Cette avance est soumise à un régime de déclaration préalable aux ministres chargés du logement et de l'économie. L'absence d'opposition motivée conjointe des deux ministres dans un délai de deux mois vaut accord. (...) ".
4. D'autre part, aux termes du 1 de l'article 207 du code général des impôts, dans sa version applicable aux années en litige : " Sont exonérés de l'impôt sur les sociétés : / (...) 4° Les organismes d'habitations à loyer modéré mentionnés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation (...) pour : (...) / c.- les produits financiers issus du placement de la trésorerie de ces organismes. / La fraction du bénéfice provenant d'activités autres que celles visées aux alinéas précédents (...) est soumise à l'impôt sur les sociétés ; (...) ".
5. Il résulte de ces dispositions que, eu égard à leurs missions et à leur mode de financement particuliers, les sociétés anonymes d'habitation à loyer modéré mentionnées à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation, dont font partie les sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif (SACIC) d'habitations à loyer modéré, ne peuvent bénéficier de l'exonération d'impôt sur les sociétés sur les produits financiers issus du placement de leur trésorerie que pour autant que ces placements sont effectués conformément aux règles particulières prévues pour l'emploi de leurs fonds.
6. Les avances en compte courant accordées par la SACIC d'HLM Gambetta PACA à ses filiales ne sont pas autorisées par les dispositions des articles R. 423-74 et R. 423-75 du code de la construction et de l'habitation. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que la société requérante détiendrait au moins 5 % du capital de ces filiales, ni que le taux d'intérêt des avances qu'elle leur a consenties n'aurait pas excédé de 1,5 point le taux servi au détenteur d'un livret A, ni que les avances auraient fait l'objet de la déclaration préalable aux ministres chargés du logement et de l'économie prévue par l'article L. 423-15 du code de la construction et de l'habitation. Dans ces conditions, contrairement à ce qui est soutenu, les placements ainsi opérés par la SACIC d'HLM Gambetta PACA ne peuvent être regardés comme ayant été effectués conformément aux règles particulières prévues pour l'emploi de ses fonds. Il s'ensuit que la SACIC d'HLM Gambetta PACA ne pouvait bénéficier, à raison des intérêts rémunérant ces avances, de l'exonération d'impôt sur les sociétés, prévue par le 4° du 1 de l'article 207 du code général des impôts.
7. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la demande présentée par la SACIC d'HLM Gambetta PACA devant le tribunal administratif de Toulon tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 à 2012 et des pénalités correspondantes doivent être rejetées. Par voie de conséquence, doivent être également rejetées ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E
Article 1er : Les conclusions de la demande présentée par la SACIC d'HLM Gambetta PACA devant le tribunal administratif de Toulon tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 à 2012 et des pénalités correspondantes et le surplus de ses conclusions présentées en appel sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme coopérative d'intérêt collectif d'HLM Gambetta PACA et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 17 mars 2022, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- Mme Bernabeu, présidente assesseure,
- Mme Mastrantuono, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 mars 2022.
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N° 20MA04425
nc