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08/03/2022 | FRANCE | N°20MA03963

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 08 mars 2022, 20MA03963


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... A... D... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 15 mai 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2002281 du 24 septembre 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté la requête de Mme A... D....

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Par une requête, enregistrée le 22 octobre 2020, Mme E... A... D..., représentée par Me ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... A... D... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 15 mai 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2002281 du 24 septembre 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté la requête de Mme A... D....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 octobre 2020, Mme E... A... D..., représentée par Me Chadam-Coullaud, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 24 septembre 2020 du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler la décision en litige ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, conformément à l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à titre principal, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; et, sur le fondement des articles L. 911-1,2 et 3 du code de justice administrative, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 à verser à son conseil, au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- l'administration ne justifie pas d'une délégation de signature régulièrement publiée ;

- la décision d'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en droit et en fait ;

- le préfet a commis une erreur de droit en ne lui délivrant pas une carte de séjour à titre temporaire pour motif médical ;

- il a commis une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle en relevant une absence de vie privée et familiale et a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales , l'article L. 313-11 7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien de 1988 ;

- le refus de séjour étant illégal, l'obligation de quitter l'est par voie de conséquence.

Le bénéfice de l'aide juridictionnelle a été refusé à Mme A... D... par une décision du 29 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, concernant le séjour et le travail des ressortissants tunisiens en France, modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Badie.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... A... D..., de nationalité tunisienne, relève appel du jugement du

24 septembre 2020 du tribunal administratif de Nice qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 mai 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de destination.

2. En premier lieu, l'arrêté attaqué du 15 mai 2020 est signé par délégation, pour le préfet, par le directeur adjoint de la réglementation, de l'intégration et des migrations,

M. C... B.... Par un arrêté n° 2019-1007 du 20 décembre 2019, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial n° 257.2019, accessible tant au juge qu'aux parties sur la base internet de la préfecture, M. C... B... a reçu délégation à l'effet de signer au nom du préfet des Alpes-Maritimes les actes et les documents relevant de la compétence de cette direction, dont la décision portant refus de titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision en cause doit être écarté comme manquant en fait.

Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire doit être écarté.

3. En deuxième lieu, sur le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français, il y a lieu de retenir la réponse apportée à ce moyen par les premiers juges par adoption des motifs retenus aux points 4 et 10 du jugement attaqué. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté, la requérante ayant été mise à même de comprendre les motifs pour lesquels l'arrêté a été pris afin de lui permettre et le cas échéant, d'en contester le bien-fondé devant le tribunal et le juge d'appel.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vigueur à la date du dépôt de la demande d'admission au séjour de la requérante sur ce fondement : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration./ L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé.. (...) ".

5. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties,

il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte-tenu, le cas échéant,

de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter

et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui

des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour.

Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

5. Pour refuser à Mme A... D... la délivrance de son titre de séjour sollicité sur le fondement de l'article L. 313-11 11° susvisé, le préfet des Alpes-Maritimes s'est fondé sur l'avis du collège de médecins du 1er juillet 2018, qui a indiqué que, si l'état de santé de la requérante nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle était néanmoins susceptible de bénéficier effectivement d'un traitement approprié eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Tunisie et voyager sans risque vers son pays d'origine. S'il ressort des pièces du dossier que

Mme A... D... souffre de troubles d'anxiété, de stress, de panique sur un fond dépressif, les documents très généraux qu'elle produit, qui dénoncent la mauvaise qualité du système de protection de la santé mentale tunisien, ne suffisent pas à établir que l'affection anxio-dépressive dont elle souffre ne pourrait pas être prise en charge par des structures ou des médecins tunisiens ni que les médicaments qu'elle prend actuellement ou leurs équivalents ne seraient pas disponibles en Tunisie. Il suit de là qu'en refusant de délivrer à l'intéressée un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas méconnu ces dispositions.

6. En quatrième lieu, Mme A... D... reprend en appel à l'encontre de l'arrêté en litige, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en se prévalant de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien de 1988 aux termes duquel " Sans préjudice des dispositions du b) et du d) de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ". Mais elle n'assortit son argumentation, par rapport au litige soumis aux premiers juges, d'aucun élément nouveau ou complémentaire, déterminant.

Il ressort des pièces du dossier que si Mme A... D... fait valoir qu'elle séjourne en France depuis mars 2015, elle a vécu en Tunisie jusqu'à l'âge de 26 ans. Certes, elle fait état de la présence en France de son père, résident, de sa mère et de trois frères dont la carte de résident est en cours de renouvellement. Mais la seule circonstance que plusieurs membres de sa famille résident régulièrement en France, ne saurait suffire à caractériser une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, par rapport aux buts en vue desquels l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes a été pris. Dès lors, eu égard aux conditions et à la durée de son séjour en France, les moyens tirés de ce que l'arrêté en litige méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, l'arrêté n'est pas plus entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. En conséquence, il y a lieu d'écarter les moyens soulevés par Mme A... D... qui ont été précédemment invoqués dans les mêmes termes devant le tribunal administratif de Nice, par adoption des motifs retenus aux points 6 du jugement, la requérante ne faisant état devant la Cour d'éléments sur sa situation personnelle et familiale sensiblement distincts de ceux soumis aux premiers juges.

7. En dernier lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit que l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français délivrée à son encontre serait, par voie d'exception, illégale, car fondée sur une décision de refus de séjour elle-même illégale. Par suite, ce moyen doit être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que la requête de Mme A... D... doit ainsi, en toutes ses conclusions, y compris celles présentées aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, être rejetée.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... A... D..., à Me Chadam-Coullaud et au ministre de l'intérieur.

Copie du présent arrêt sera adressée au préfet des Alpes -Maritimes.

Délibéré après l'audience du 22 février 2022, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Ury, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 8 mars 2022.

2

N° 20MA03963


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA03963
Date de la décision : 08/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Alexandre BADIE
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : CHADAM-COULLAUD MIREILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-03-08;20ma03963 ?
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