Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 10 mai 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a retiré le titre de séjour dont elle était titulaire.
Par un jugement n° 1903455 du 30 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête, enregistrée le 3 juin 2021 sous le n° 21MA02117, Mme A..., représentée par Me Passet, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 décembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 mai 2019 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son conseil renonce à la part contributive de l'Etat versée au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- le préfet ne l'a pas mise à même de présenter des observations préalablement à la mesure de retrait, en méconnaissance de l'article L. 313-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision de retrait est entachée d'une erreur de fait quant à son inscription au titre de l'année universitaire 2018/2019 ;
- elle est entachée d'une erreur de droit quant au défaut d'information des services préfectoraux de son changement d'adresse.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 août 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 23 avril 2021.
II. Par une requête, enregistrée le 3 juin 2021 sous le n° 21MA02118, Mme A..., représentée par Me Passet, demande à la Cour :
1°) de prononcer le sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 décembre 2020 ;
2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 décembre 2020 ;
3°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 mai 2019 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son conseil renonce à la part contributive de l'Etat versée au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner pour elle des conséquences difficilement réparables ;
- les moyens d'annulation sur lesquels est fondée sa requête au fond présentent un caractère sérieux.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 août 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 23 avril 2021.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Mastrantuono a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante chinoise née en 1996, s'est vu délivrer une carte de séjour pluriannuelle en qualité d'étudiante valable du 25 septembre 2017 au 24 septembre 2020. Par un arrêté du 10 mai 2019, le préfet de l'Hérault a procédé au retrait de ce titre de séjour. Par une requête, enregistrée sous le n° 21MA02117, Mme A... relève appel du jugement du 30 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Par une requête enregistrée sous le n° 21MA02118, elle demande qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement.
Sur la jonction :
2. Les requêtes n° 21MA02117 et n° 21MA02118 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur les conclusions en annulation :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle doit être en mesure de justifier qu'il continue de remplir les conditions requises pour la délivrance de cette carte. L'autorité administrative peut procéder aux vérifications utiles pour s'assurer du maintien du droit au séjour de l'intéressé et, à cette fin, convoquer celui-ci à un ou plusieurs entretiens. / Si l'étranger cesse de remplir l'une des conditions exigées pour la délivrance de la carte de séjour dont il est titulaire, fait obstacle aux contrôles ou ne défère pas aux convocations, la carte de séjour peut lui être retirée ou son renouvellement refusé par une décision motivée. La décision de retrait ne peut intervenir qu'après que l'intéressé a été mis à même de présenter ses observations dans les conditions prévues aux articles L. 121-1 et L. 121-2 du code des relations entre le public et l'administration (...) ".
4. Si le préfet de l'Hérault a envoyé à Mme A... une lettre datée du 9 avril 2019, qui a été présentée à son adresse connue le 13 avril 2019, puis retournée à la préfecture le 30 avril 2019 avec la mention " pli avisé et non réclamé ", cette correspondance se bornait à demander à l'intéressée d'adresser aux services préfectoraux la copie de ses résultats des années universitaires 2017/2018 et 2018/2019, de son inscription pour l'année universitaire 2018/2019, et d'une lettre explicative en cas de changement de cursus ou de redoublement. Par suite, et alors même que la lettre indiquait également que " tout dossier non complété sous un délai de 15 jours à compter de la réception de ce courrier vous expose, en cas de persistance de refus de vous présenter aux convocations ou d'obstacles aux contrôles, à faire l'objet d'une décision de retrait de votre titre ", le préfet de l'Hérault ne peut être regardé comme ayant mis à même Mme A... de présenter de présenter ses observations préalablement à la décision de retrait du titre de séjour de l'intéressée. Dans ces conditions, Mme A... est fondée à soutenir que la procédure suivie a été irrégulière.
5. En second lieu, aux termes de l'article R. 311-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Le titre de séjour est retiré : / (...) 8° Si l'étranger titulaire de la carte de séjour temporaire ou de la carte de séjour " pluriannuelle " cesse de remplir l'une des conditions exigées pour sa délivrance (...) ". Aux termes du I de l'article L. 313-7 du même code, alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant " (...) ".
6. Pour décider, le 10 mai 2019, du retrait de la carte de séjour en qualité d'étudiant de Mme A..., le préfet de l'Hérault s'est fondé sur les circonstances que l'intéressée n'a pas présenté d'inscription scolaire pour l'année universitaire 2018/2019, que le courrier qui lui a été envoyé à sa dernière adresse connue est revenu en préfecture avec la mention " pli avisé non réclamé ", et que Mme A... s'est soustraite à son obligation d'informer les services préfectoraux de tout changement de situation ou d'adresse. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige, Mme A... était inscrite en deuxième année d'études d'économie gestion à l'école internationale privée de droit comparé et d'économie. Par suite, en décidant du retrait de la carte de séjour de Mme A..., le préfet de l'Hérault, qui ne saurait utilement faire valoir que la requérante se serait soustraite à son obligation de justification d'une inscription scolaire, cette obligation ne résultant ni de l'article L. 313-5-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni d'aucun autre texte, a commis une erreur de fait et méconnu les dispositions précitées.
7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les conclusions tendant au sursis à exécution :
8. La Cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête de Mme A... n° 21MA02118 tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de sa requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont devenues sans objet. Il n'y a, par suite, plus lieu d'y statuer.
Sur les frais liés au litige :
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme globale de 1 500 euros à verser à Me Passet, avocate de Mme A..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sous réserve que Me Passet renonce à la perception de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 21MA02118 tendant au sursis à l'exécution du jugement.
Article 2 : Le jugement n° 1903455 du 30 décembre 2020 du tribunal administratif de Montpellier et l'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 mai 2019 sont annulés.
Article 3 : L'Etat versera à Me Passet, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes de Mme A... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., à Me Passet et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 27 janvier 2022, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- Mme Bernabeu, présidente assesseure,
- Mme Mastrantuono, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 février 2022.
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N° 21MA02117, 21MA02118