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01/02/2022 | FRANCE | N°21MA01052

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 01 février 2022, 21MA01052


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 24 février 2020 du préfet de l'Hérault portant refus de délivrance d'un certificat de résidence et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2002560 du 8 octobre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 mars 2021, M. B..., représenté par Me Moulin, demand

e à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 octobre 2020 du tribunal administratif de Montpelli...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 24 février 2020 du préfet de l'Hérault portant refus de délivrance d'un certificat de résidence et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2002560 du 8 octobre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 mars 2021, M. B..., représenté par Me Moulin, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 octobre 2020 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 février 2020 du préfet de l'Hérault portant refus de délivrance d'un certificat de résidence et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour mention

" vie privée et familiale " et à défaut de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 1 440 euros à verser à son conseil qui renonce en ce cas à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit ;

- l'arrêté est insuffisamment motivé car il ne mentionne pas sa qualité d'athlète de haut niveau et à ce titre employé par l'Athlétic club de Montpellier depuis

l'année 2016, qu'il ne fait pas état de la deuxième demande d'autorisation de travail fournie au préfet de l'Hérault qui justifie d'une possibilité d'emploi salarié pour 40 heures par semaine, et qu'il ne relève pas que son épouse est titulaire d'un titre de séjour mention " profession non salariée " qui lui donne vocation à demeurer sur le territoire national ;

- le préfet de l'Hérault n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa situation personnelle, notamment en lui opposant une entrée en France le 30 juillet 2019 alors qu'il y réside de manière continue depuis l'année 2016 ;

- il justifie d'une promesse d'embauche pour 40 heures par semaine qui justifie son admission au séjour en France ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de fait et d'une erreur de droit au motif que le préfet a retenu que son épouse disposait d'un titre mention " étudiant " alors qu'elle dispose d'un titre " profession non salariée " ce qui démontre que la famille peut régulièrement demeurer sur le territoire national ;

- l'arrêté attaqué a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet de l'Hérault a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de son refus du droit au séjour sur sa situation personnelle et familiale.

Par décision du 22 janvier 2021, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête de M. B... comme non fondée.

Une ordonnance du 23 novembre 2021 a clos l'instruction au 7 décembre 2021

à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-467 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Ury a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien, né le 8 juin 1988, a présenté au préfet de l'Hérault le 10 février 2020 une demande de délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié, laquelle a été rejetée, par un arrêté du 24 février 2020, lui ayant également fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. B... relève appel du jugement du

8 octobre 2020 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si M. B... soutient que le jugement est entaché d'erreur de droit, un tel moyen se rattache au raisonnement suivi par le tribunal sur le fond du litige et est sans incidence sur sa régularité.

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

En ce qui concerne la motivation :

3. L'arrêté attaqué vise l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles de l'accord franco-algérien du

27 décembre 1968 et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquels le préfet s'est fondé. La décision portant refus de titre de séjour est ainsi suffisamment motivée en droit. En ce qui concerne les faits, l'arrêté rappelle les conditions d'entrée et de séjour en France de M. B..., indique les fondements de sa demande de titre de séjour et les raisons pour lesquelles elle est rejetée, et notamment les motifs pour lesquels le préfet a conclu que l'article 7 de l'accord franco-algérien n'est pas méconnu, qu'il ne peut pas bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour, et qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie personnelle et familiale tel que prévu à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, alors même que l'arrêté ne mentionne pas l'ensemble des éléments de la situation de M. B..., notamment sa qualité d'ancien athlète de haut niveau, ni une deuxième demande d'autorisation de travail par une entreprise de fruits et légumes en sus de la première demande effectuée au titre de l'Athlétic club de Montpellier qui a seule été visée, ou que l'épouse de l'intéressé bénéficie d'un titre de séjour mention " profession non salariée " et non pas étudiant, comme indiqué par erreur dans la décision contestée, ces indications ont permis à l'intéressé de comprendre et de contester la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de sa motivation insuffisante doit être écarté.

4. M. B... soutient que l'arrêté litigieux est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle dès lors que le préfet de l'Hérault lui oppose sa dernière entrée en France le 30 juillet 2019 alors qu'il y réside de manière continue depuis l'année 2016 pour y être entré en janvier de cette année. Cependant, il est constant que M. B... a exécuté la mesure d'éloignement prise à son encontre le 16 avril 2018. Par suite, le préfet était fondé à ne retenir que la dernière entrée en France de M. B.... Ainsi, il ne ressort pas des pièces que le préfet de l'Hérault n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation du requérant.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'arrêté litigieux :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié : " (...) b) Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi , un certificat de résidence valable un an pour toutes les professions et toutes les régions, renouvelable et portant la mention " salarié " ; cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française (...) " et aux termes de son article 9 : " (...) / Pour être admis à entrer et à séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, 7 bis alinéa 4 - lettre c et d - et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises (...) ".

6. M. B... est rentré en France le 30 juillet 2019 muni d'un visa de court séjour " entrées multiples " de 90 jours, valable 5 ans du 2 novembre 2014 au 1er novembre 2019. Il est constant que le requérant ne justifie pas être titulaire d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises tel que prévu par l'article 9 de l'accord franco-algérien pour être admis à entrer et à séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre de l'article 7 dudit accord. Dès lors, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Hérault lui aurait opposé un motif entaché d'erreur de droit, ou qu'il aurait méconnu les stipulations précitées des articles 7

et 9 de l'accord franco-algérien en refusant de lui délivrer le titre de séjour sollicité.

7. En demandant son admission au séjour en qualité de salarié, alors qu'il est dépourvu du visa de long séjour susmentionné, M. B... a formé une demande d'admission exceptionnelle au séjour. Il appartient au préfet, saisi par un ressortissant algérien d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

8. A l'appui de sa demande d'admission au séjour en qualité de salarié, M. B... a, d'une part, produit une demande d'autorisation de travail pour un emploi d'entraineur auprès d'un club sportif de Montpellier pour une activité professionnelle de 20 heures par semaine répartie sur 34 heures par an pour une rémunération mensuelle de 625,87 euros. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet de l'Hérault a considéré que cette perspective d'emploi n'était pas de nature à justifier une admission exceptionnelle au séjour.

9. D'autre part, M. B... a présenté une promesse d'embauche par une entreprise de fruits et légumes pour un emploi de manutentionnaire avec une date prévisible d'embauche au

1er avril 2020 pour une rémunération de 666, 39 euros. S'il est constant que le préfet ne s'est pas prononcé dans l'arrêté attaqué sur cette promesse de contrat de travail, eu égard à la faiblesse des ressources procurées par cet emploi, M. B... ne démontre pas que le préfet aurait méconnu son pouvoir d'appréciation pour l'admettre exceptionnellement au séjour en France, alors même qu'il aurait cumulé cet emploi avec celui dont il est fait état au point 8.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5° Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " -1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Cette dernière disposition ne saurait s'interpréter comme comportant pour un Etat contractant l'obligation générale de respecter le choix, par des couples mariés, de leur domicile commun et d'accepter l'installation de conjoints non nationaux dans le pays.

11. Il ressort des pièces du dossier que M. B... qui est entré une première fois en France en janvier 2016 muni d'un visa de court séjour " entrées multiples " de 90 jours, valable 5 ans du 2 novembre 2014 au 1er novembre 2019, a obtenu un certificat de résidence mention " travailleur temporaire " valable du 1er novembre 2016 au 30 octobre 2017 au titre d'un contrat d'aide entraîneur en athlétisme à temps partiel conclu avec l'Athlétic club Montpellier pour un salaire brut de 554,48 euros. Il s'est marié le 6 mars 2017 avec une compatriote résidant régulièrement en France sous statut étudiant. Sa demande de renouvellement de titre de séjour a été rejetée par un arrêté du 16 avril 2018 qui lui a fait obligation de quitter le territoire français. L'intéressé qui a exécuté la mesure d'éloignement est rentré en France le 30 juillet 2019. Dans ces circonstances, la vie commune avec son épouse est très récente à la date de l'arrêté attaqué du 24 février 2020. Aussi, est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée l'erreur commise par le préfet sur le statut de l'épouse de l'intéressé au regard de la législation sur l'entrée et le séjour des étrangers en France. Enfin, M. B... a vécu la plus grande partie de sa vie en Algérie où résident ses parents et sa fratrie, pays dont son épouse à la nationalité et où elle peut le rejoindre, alors qu'elle ne justifie, à la date de la décision attaquée, d'aucun revenu provenant de son entreprise. Dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour en France de M. B..., et en dépit des quelques attestations de proches produites, l'arrêté contesté n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts poursuivis. Par suite, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. En outre et pour les mêmes motifs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault aurait entaché son appréciation des conséquences de la décision attaquée sur la situation personnelle de l'appelant d'une erreur manifeste.

12. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. L'ensemble des conclusions, y compris celles aux fins d'injonction et celles présentées par l'avocat de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doit donc être rejeté.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Moulin et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2021, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Ury, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er février 2022.

N° 21MA010522


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01052
Date de la décision : 01/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Didier URY
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : MOULIN

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-02-01;21ma01052 ?
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