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19/11/2021 | FRANCE | N°19MA03305

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 19 novembre 2021, 19MA03305


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Vents de Lozère ", l'association " A Contre Vents ", l'association " les Robins des Bois de la Margeride ", M. FX... EX..., Mme GW... EX..., M. EB... EX..., M. GJ... HD... CE..., Mme GU... HD... CE..., Mme EK... HD... CE..., M. C... HD... CE..., Mme BJ... CE..., M. AE... AN..., Mme DR... AN..., Mme EO... AN..., M. I...-GF... HF... AP..., Mme DN... AN..., M. DT... GN..., Mme CH... AN..., M. CT... W..., Mme CZ... GN..., M. X... DB..., Mme FW... DI..., Mme CK... DK... HE..., M. K... AS..., M. A... CG.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Vents de Lozère ", l'association " A Contre Vents ", l'association " les Robins des Bois de la Margeride ", M. FX... EX..., Mme GW... EX..., M. EB... EX..., M. GJ... HD... CE..., Mme GU... HD... CE..., Mme EK... HD... CE..., M. C... HD... CE..., Mme BJ... CE..., M. AE... AN..., Mme DR... AN..., Mme EO... AN..., M. I...-GF... HF... AP..., Mme DN... AN..., M. DT... GN..., Mme CH... AN..., M. CT... W..., Mme CZ... GN..., M. X... DB..., Mme FW... DI..., Mme CK... DK... HE..., M. K... AS..., M. A... CG..., Mme BQ... CG..., M. BX... EF..., Mme H... EF..., Mme DF... GB..., Mme ES... AZ..., Mme AO... BC..., M. EJ... BC..., Mme FT... AL..., Mme FQ... B..., Mme FC... BY..., Mme DM... B..., M. BR... B..., Mme DL... AZ..., Mme CH... EQ..., Mme DU... EH..., M. BK... DE..., Mme CJ... DE..., M. CF... GE..., Mme Q... AH..., M. DC... BB..., Mme DS... L..., Mme AG... FI..., Mme FL... DI..., M. GC... AV..., M. Z... GY..., Mme GT... GY..., Mme D... GY..., Mme BW... GY..., M. EU... BU..., Mme FO... GH..., M. GZ... GH..., Mme FJ... HB..., M. CS... AW..., Mme BG... AU..., M. FD... AW..., Mme CQ... GX..., M. F... GX..., M. Y... GX..., Mme BD... ET..., M. GJ... DH..., Mme GR... DH..., M. N... BN..., Mme EZ... BN..., Mme BJ... EL..., Mme CB... CX..., Mme CZ... CX..., Mme CL... U..., Mme HC... BT... DJ..., M. EC... BT..., Mme EV... DQ..., Mme AF... DK..., M. BK... DK..., Mme CA... DK..., M. G... R..., M. DH... AI..., M. EJ... DD..., Mme FS... DD..., Mme FF... AT..., Mme CW... FM..., Mme FG... CU..., M. I... BB..., Mme EU... CM..., M. GP... BN..., M. FV... CY..., M. BS... EI..., Mme GL... AM..., M. BM... AR..., Mme BP... AD..., Mme GS... FK..., M. J... F..., M. M... EE..., Mme GT... EX..., M. BI... BA..., Mme DL... EP..., M. BO... AA..., Mme EN... T..., M. P... T..., Mme AC... FE..., M. O... FE..., M. AE... F..., M. DT... F..., Mme BG... F..., Mme BZ... BN..., M. CD... CU..., M. BI... AY..., Mme EU... ED..., Mme BI... FK..., M. BX... FK..., M. I... FI..., Mme FW... FI... EW..., M. FN... FZ..., Mme GD... BL..., Mme V... FZ..., M. P... AJ..., M. CP... FZ..., M. GC... F..., Mme EY... FB..., M. GF... F..., M. HA..., Mme GV... DX..., M. GJ... CY..., Mme DL... DY..., M. GC... AT..., M. BX... AT..., Mme CI... AT..., M. AB... EG..., Mme ER... FP..., Mme DN... AW..., M. DT... AW..., Mme DL... AM..., M. AQ... GO..., Mme E... GO..., Mme FQ... B..., M. GQ... B..., M. CD... EA..., Mme DP... EA..., Mme GK... AK..., M. P... AK..., Mme FY... BB..., M. DA... DD..., M. DG... DD..., Mme BF... EM..., Mme AX... CC..., Mme AX... FU..., Mme DL... CT..., M. GA... FZ..., Mme GI... S..., M. FA... CY..., Mme BV... GM..., Mme GG... CY..., Mme CR... EE..., M. FR... DB..., M. BH... DB..., Mme DZ... CO..., M. DO... CO..., Mme CV... CN..., M. BS... AA..., M. BX... DV..., M. I... BE..., Mme CB... BE..., M. FV... BE..., Mme GD... BE..., Mme CB... EW..., M. DW... EW... et Mme FH... R... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2016 par lequel le préfet de Lozère a autorisé la société EDF Renouvelables France à exploiter un parc éolien de cinq aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Servières.

Par un jugement n° 1700835 du 21 mai 2019, le tribunal administratif de Nîmes a, à l'article 1er, annulé cet arrêté du 17 novembre 2016 et, à l'article 2, rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 19 juillet 2019, 30 octobre 2020 et 25 juin 2021 sous le n° 19MA03305, la société EDF Renouvelables France représentée par Me Elfassi, demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 21 mai 2019 ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'association " Vents de Lozère " et autres devant le tribunal administratif de Nîmes ;

3°) à titre subsidiaire, de sursoir à statuer en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ;

4°) de mettre à la charge de chacun des intimés la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les demandeurs de première instance ne justifient pas d'un intérêt à agir ;

- son projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'environnement dès lors que le site d'implantation ne présente aucun intérêt particulier et qu'il ne porte pas atteinte aux paysages et aux lieux environnants ;

- le tribunal s'est fondé à tort sur l'avis du commissaire enquêteur qui est entaché d'erreurs de fait ;

- le service qui a instruit la demande d'autorisation était différent de celui en charge de la préparation de l'avis de l'autorité environnementale.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 17 mai et 24 août 2021, l'association " Vents de Lozère " et autres, représentés par Me Jakubowicz-Ambiaux concluent au rejet de la requête de la société EDF Renouvelables France et demandent à la Cour de mettre à sa charge la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils ont intérêt à agir contre l'arrêté contesté ;

- les moyens soulevés par la société EDF Renouvelables France ne sont pas fondés ;

- l'avis de l'autorité environnementale a été pris en méconnaissance de l'article 6 de la directive du 27 juin 2001.

La requête a été communiquée à la ministre de la transition écologique qui n'a pas produit d'observations.

Le mémoire présenté pour la société EDF Renouvelables France, enregistré le 24 septembre 2021, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 ;

- la directive 2011/92/UE du Parlement et du Conseil du 13 décembre 2011 ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marchessaux,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me Durand substituant Me Elfassi, représentant la société EDF Renouvelables France et de Me Grisel, représentant l'association " Vents de Lozère " et autres.

Considérant ce qui suit :

1. La société EDF EN France, devenue EDF Renouvelables France a déposé le 18 décembre 2014, auprès du préfet de Lozère, une demande d'autorisation d'exploiter un parc éolien dénommé " Lou Paou 2 ", composé de cinq éoliennes et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune de Servières. Par arrêté du 17 novembre 2016, le préfet l'a autorisée à exploiter ce parc éolien. La société EDF Renouvelables France relève appel de l'article 1er du jugement du 21 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a annulé cet arrêté du 17 novembre 2016.

Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :

2. Il ressort des statuts versés au dossier que l'association " Les Robins des Bois de la Margeride " s'est donnée pour objet la préservation des Monts de la Margeride par l'opposition à tout projet tendant à bouleverser le cadre de vie ou les équilibres biologiques ou économiques, notamment par l'opposition à l'implantation d'éoliennes industrielles. L'association " A Contre Vents " a pour but de préserver le cadre de vie des habitants de la commune de Gabrias et des environs, défendre l'environnement, la faune, la flore contre toute atteinte présente ou future, en particulier en s'opposant à l'implantation de parcs éoliens industriels sur le territoire de la commune et alentour. Pour sa part, l'association " Vents de Lozère " s'est fixée comme buts la promotion, la mise en valeur et la défense du patrimoine environnemental, paysager et architectural de la Lozère, notamment par une lutte contre le déploiement et la prolifération des installations industrielles consacrées à l'énergie éolienne. L'exploitation du parc éolien en litige, par sa nature même, est susceptible de porter atteinte aux intérêts que lesdites associations sont conduites à défendre aux termes de leurs statuts. Dans ces conditions, ces associations justifient de leur intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté contesté. Leurs demandes présentées devant le tribunal étaient, par suite, recevables. Il en va de même de la demande collective dans son ensemble, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur sa recevabilité en tant qu'elle émane de chacun des autres demandeurs.

Sur les règles applicables au litige :

3. Aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'environnement : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. / L'autorisation, dénommée autorisation environnementale, est délivrée dans les conditions prévues au chapitre unique du titre VIII du livre Ier. ". Selon l'article L. 511-1 du même code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ". Aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 susvisée : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre (...) du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance (...) sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état ; / 2° Les demandes d'autorisation au titre du (...) chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement (...) régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable ; / (...) ".

4. En vertu de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, issu de l'article 1er de l'ordonnance du 26 janvier 2017 et applicable depuis le 1er mars 2017, l'autorisation environnementale est soumise, comme l'était avant elle l'autorisation délivrée au titre de la police des installations classées pour la protection de l'environnement mentionnées au 1° de l'article 15 de cette même ordonnance, à un contentieux de pleine juridiction. L'autorisation d'exploitation en litige ayant été délivrée le 17 novembre 2016, soit avant le 1er mars 2017, elle constitue donc une autorisation environnementale au sens de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017.

5. Il appartient, dès lors, au juge du plein contentieux d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond applicables aux autorisations environnementales au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :

6. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement, applicable au litige en vertu de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que, si les installations projetées portent atteinte aux paysages naturels avoisinants, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer l'autorisation sollicitée ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel de nature à fonder le refus d'autorisation d'exploitation ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de cette autorisation, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel l'exploitation de l'installation est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette autorisation compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.

8. Pour faire droit à la demande d'annulation de l'autorisation en litige, le tribunal administratif de Nîmes a estimé que le projet " Lou Paou 2 ", qui ne peut être regardé comme une extension du parc initial " Lou Paou 1 ", portait atteinte aux intérêts protégés par les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'environnement en raison de son atteinte au paysage.

9. Il résulte de l'instruction que le projet éolien " Lou Paou 2 " comportant cinq aérogénérateurs d'une hauteur de mât de quatre-vingt-cinq mètres et d'un poste de livraison s'implante à proximité du parc éolien existant de " Lou Paou 1 " composé de sept éoliennes mises en service en 2006 dont il en constitue l'extension, dans les contreforts de la zone montagneuse de la Margeride, sur les parties sommitales nord du massif de la Boulaine localisé sur le territoire de la commune de Servières. Il s'inscrit, en outre, dans l'unité paysagère " Vallée du rebord sud de la Margeride ". Selon l'avis favorable de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS) du 30 septembre 2016 qui reprend le rapport de l'inspection des installations classées, il s'agit d'un milieu naturel montagneux où se juxtaposent des sommets tabulaires et des vallées fortement encaissées. Du point de vue de l'occupation des sols, le paysage environnant se caractérise par une alternance de parcelles boisées denses, de parcelles ouvertes et par un environnement de tradition agricole. L'avis précité de la CDNPS indique que l'aire d'étude immédiate se trouve en dehors de tout périmètre de protection du milieu naturel, seule la ZNIEFF de type II des " Causses de Marjevols et de Mende " concerne une partie de la zone du projet sur la frange ouest sur une surface de 1,28 km². L'étude d'impact précise également que la zone du projet ne concerne aucun espace naturel sensible (ENS). Si le périmètre éloigné est riche en monuments historiques et sites classés/inscrits, seuls deux monuments historiques inscrits sont impactés par le projet, à savoir le domaine de La Grange situé sur la commune de Servières (à 2,7 km) et le domaine de Cougoussac sur la commune de Gabrias (à 3,7 km).

10. Si les intimés se prévalent de l'étude des sensibilités paysagère et naturaliste au regard de l'éolien industriel en Lozère réalisée en 2011 par le cabinet Cassini à la demande de la direction départementale du territoire de la Lozère (DDT), qui a considéré qu'il convenait d'éviter l'implantation d'éoliennes sur la crête principale de la Boulaine et privilégier les crêtes inférieures, comprises entre 1 100 et 1 200 m d'altitude, moins importantes à l'échelle du grand paysage, cette étude mentionne toutefois qu'il s'agit d'un document de travail et que la zone propice au développement de l'éolien n'est pas encore définitive et validée. Elle est par ailleurs dépourvue de toute valeur normative. Au surplus, elle conclut que ce secteur serait apte à recevoir des machines supplémentaires selon une densification cohérente et qualitative. De même, l'avis défavorable du commissaire enquêteur ne s'impose pas à l'autorité administrative.

11. L'avis de la CDNPS du 30 septembre 2016 précise qu'en vue immédiate dans un rayon de 500 m autour du projet, depuis la RD 50, les éoliennes sont reculées et n'altèrent pas les perceptions et que depuis le village de Servières, qui est un site sensible au projet éolien, le photomontage montre que la vision du parc n'est que très partielle et fortement atténuée par le relief. Elle estime, par ailleurs, que l'impact visuel depuis le hameau de Villeneuve, est modéré à faible. Le photomontage de l'étude d'impact réalisé depuis le Truc de Fortunio montre une perception lointaine du parc éolien en cause, ainsi que celui de " Lou Paou 1 ", ces parcs étant visibles en contre plongée et n'émergent plus dans le ciel comme pour les autres points de vue. Les éoliennes se fondent ainsi dans ce grand paysage. L'impact visuel est ainsi faible. En outre, le Truc de Fortunio est équipé à son sommet d'une tour de diffusion télévisuelle d'une hauteur de 105 m, ce qui atténue son caractère remarquable. Par ailleurs, il résulte du photomontage réalisé depuis le château de La Grange, monument historique inscrit se trouvant à une distance de 2,7 km du projet, que les éoliennes des deux parcs apparaissent sur la ligne de crête mais de manière très lointaine. S'agissant du château de Cougoussac classé monument historique de la commune de Gabrias distante de 3,7 km, si les éoliennes du projet " Lou Paou 2 " en cause sont visibles sur la ligne de crête, les pales de deux éoliennes de l'autre parc existant " Lou Paou 1 " apparaissent déjà dans le paysage. Pour ce qui est du point de vue depuis le Mont Mima, les deux parcs s'alignent à l'horizon de manière très éloignée. Enfin, la circonstance, à la supposer même avérée, selon laquelle le parc éolien en litige serait visible depuis les espaces des grands causses des Cévennes, qui ont fait l'objet en 2011 d'une inscription sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO, n'est pas à elle seule en l'espèce de nature à porter une atteinte excessive aux paysages de ce bien, qui est distant de plus de dix kilomètres en son point le plus proche du site d'implantation des éoliennes.

12. Il résulte de ce qui précède que la société EDF Renouvelables France est fondée à soutenir que c'est à tort que, pour annuler l'autorisation en litige, le tribunal administratif de Nîmes s'est fondé sur le moyen tiré de ce que l'autorisation délivrée comportait des inconvénients tels pour la protection des paysages, de la nature et de l'environnement qu'elle méconnaissait les prescriptions des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement.

13. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'association " Vents de Lozère " et autres devant le tribunal administratif de Nîmes et devant la Cour.

Sur le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de l'autorité environnementale :

14. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement : " Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les autorités susceptibles d'être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d'environnement, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d'ouvrage et sur la demande d'autorisation. À cet effet, les États membres désignent les autorités à consulter, d'une manière générale ou au cas par cas. (...) ". L'article L. 122-1 du code de l'environnement, pris pour la transposition des articles 2 et 6 de cette directive, dispose, dans sa rédaction applicable en l'espèce, que : " I. - Les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements publics et privés qui, par leur nature, leurs dimensions ou leur localisation sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine sont précédés d'une étude d'impact. (...) / III. - Dans le cas d'un projet relevant des catégories d'opérations soumises à étude d'impact, le dossier présentant le projet, comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation, est transmis pour avis à l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement. (...). / IV. - La décision de l'autorité compétente qui autorise le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage à réaliser le projet prend en considération l'étude d'impact, l'avis de l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement et le résultat de la consultation du public (...) ". En vertu du III de l'article R. 122-6 du même code, dans sa version issue du décret du 29 décembre 2011 portant réforme des études d'impact des projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagement, applicable au litige, l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement mentionnée à l'article L. 122-1, lorsqu'elle n'est ni le ministre chargé de l'environnement, dans les cas prévus au I de cet article, ni la formation compétente du Conseil général de l'environnement et du développement durable, dans les cas prévus au II de ce même article, est le préfet de la région sur le territoire de laquelle le projet de travaux, d'ouvrage ou d'aménagement doit être réalisé.

15. L'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 a pour objet de garantir qu'une autorité compétente et objective en matière d'environnement soit en mesure de rendre un avis sur l'évaluation environnementale des projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences. Eu égard à l'interprétation de l'article 6 de la directive du 27 juin 2001 donnée par la Cour de justice de l'Union européenne par son arrêt rendu le 20 octobre 2011 dans l'affaire C-474/10, il résulte clairement des dispositions de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce que l'entité administrative concernée dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée en donnant un avis objectif sur le projet concerné.

16. Lorsque le projet est autorisé par un préfet de département autre que le préfet de région, l'avis rendu sur le projet par le préfet de région en tant qu'autorité environnementale doit, en principe, être regardé comme ayant été émis par une autorité disposant d'une autonomie réelle répondant aux exigences de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011, sauf dans le cas où c'est le même service qui a, à la fois, instruit la demande d'autorisation et préparé l'avis de l'autorité environnementale. En particulier, les exigences de la directive, tenant à ce que l'entité administrative appelée à rendre l'avis environnemental sur le projet dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, ne peuvent être regardées comme satisfaites lorsque le projet a été instruit pour le compte du préfet de département par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) et que l'avis environnemental émis par le préfet de région a été préparé par la même direction, à moins que l'avis n'ait été préparé, au sein de cette direction, par le service mentionné à l'article R. 122-21 du code de l'environnement qui a spécialement pour rôle de préparer les avis des autorités environnementales.

17. Il ressort des pièces du dossier que le rapport de l'inspecteur de l'environnement sur la demande d'autorisation d'exploiter en litige présenté devant la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS) a été signé par l'inspecteur de l'environnement de l'unité territoriale Gard-Lozère de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) de la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées. Le projet en litige a donc été instruit par cette direction pour le compte du préfet de Lozère qui a signé l'arrêté contesté. Il ressort, par ailleurs, des énonciations de l'avis rendu sur le projet le 24 septembre 2015 par l'autorité environnementale sur le fondement de l'article R. 122-6 du même code qu'il a été préparé par le même inspecteur des installations classées de l'unité territoriale Gard-Lozère de la DREAL Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, placée sous l'autorité du préfet de cette région, cet avis ayant été signé par le directeur régional adjoint. Par suite, la même DREAL de la région Languedoc-Roussillon a à la fois instruit la demande d'autorisation et préparé l'avis de l'autorité environnementale. Dans ces conditions, cet avis n'a pas été rendu par une entité interne disposant d'une autonomie réelle à l'égard de l'auteur de l'arrêté contesté. Par suite, les exigences découlant des dispositions précitées de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 ont été méconnues.

En ce qui concerne la régularisation du vice retenu :

18. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. "

19. En vertu des dispositions de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 précitée, ces dispositions, qui instituent des règles de procédure concernant exclusivement les pouvoirs du juge administratif en matière de contentieux portant sur une autorisation environnementale ou sur une autorisation devant être considérée comme telle, sont, en l'absence de dispositions expresses contraires, d'application immédiate aux instances en cours depuis le 1er mars 2017, date de leur entrée en vigueur.

20. Les dispositions précitées du 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement permettent au juge, même pour la première fois en appel, lorsqu'il constate un vice qui entache la légalité de l'autorisation environnementale attaquée mais qui peut être régularisé par une décision modificative, de rendre un jugement avant dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation et sursoit à statuer sur le recours dont il est saisi. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation, qui implique l'intervention d'une décision corrigeant le vice dont est entachée la décision attaquée. Un vice de procédure, dont l'existence et la consistance sont appréciées au regard des règles applicables à la date de la décision attaquée, doit en principe être réparé selon les modalités prévues à cette même date. Si ces modalités ne sont pas légalement applicables, notamment du fait de l'illégalité des dispositions qui les définissent, il appartient au juge de rechercher si la régularisation peut être effectuée selon d'autres modalités qu'il lui revient de définir en prenant en compte les finalités poursuivies par les règles qui les ont instituées et en se référant, le cas échéant, aux dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue.

21. Par sa décision n° 400559 du 6 décembre 2017, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé le décret du 28 avril 2016 portant réforme de l'autorité environnementale en tant qu'il maintient, au IV de l'article R. 122-6 du code de l'environnement, la désignation du préfet de région en qualité d'autorité compétente de l'Etat en matière d'environnement, en méconnaissance des objectifs énoncés au paragraphe 1 de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement. Le vice de procédure qui résulte de ce que l'avis prévu par le III de l'article L. 122-1 du code de l'environnement a été rendu en méconnaissance des dispositions de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011, peut être réparé par la consultation, sur le projet en cause, à titre de régularisation, d'une autorité présentant les garanties d'impartialité requises.

22. Il résulte de ce qui précède que le vice entachant la procédure d'adoption de l'arrêté en litige est régularisable. Les dispositions précitées du I de l'article L. 181-18 du code l'environnement ne peuvent toutefois être mises en œuvre qu'après qu'ait été constaté que les autres moyens dirigés contre l'autorisation ne sont pas fondés. Il appartient, par suite, à la Cour d'examiner l'ensemble des autres moyens soulevés par l'association " Vents de Lozère " et autres à l'encontre de l'arrêté en litige.

Sur les autres moyens dirigés contre l'arrêté du préfet de la Lozère du 17 novembre 2016 :

En ce qui concerne l'étude d'impact :

23. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

S'agissant des nuisances sonores :

24. Si l'association " Vents de Lozère " et autres se prévalent de l'avis défavorable de l'agence régionale de santé (ARS) du 9 juillet 2012 qui a estimé que la partie nuisances sonores de l'étude d'impact ne prend pas en compte la présence du parc " Lou Paou 1 ", cet avis concerne la première version du projet qui a été retirée. En outre, par un autre avis du 9 février 2015, l'ARS a indiqué que les différentes problématiques ont été prise en compte dans l'évaluation environnementale et ne mentionne plus cette remarque à propos de l'étude d'impact. Cette dernière comprend une partie analysant les impacts sur le milieu humain dont les impacts sur l'ambiance sonore (IV.4), les effets cumulés acoustiques (IV.5.2), ainsi que les mesures d'évitement des risques liés au bruit. La partie IV.4 de l'étude indique que l'impact de l'ambiance sonore a été déterminé pour l'ensemble du projet " Lou Paou ", a pris en compte les données du parc existant " Lou Paou 1 " et a intégré l'apport en termes de bruit du parc " Lou Paou 2 ". Elle mentionne aussi qu'en période diurne, aucun dépassement des émergences réglementaires n'est constaté et que des dépassements ont été constatés en période nocturne pour certains secteurs. Par suite, l'étude d'impact est suffisante quant à l'analyse des nuisances sonores.

S'agissant de l'impact sur le captage d'eau Champclos et l'aquifère :

25. Il ressort de l'avis complémentaire du 25 juillet 2016 de l'ARS que le captage de Champclos n'étant pas en service, ses services ne possèdent aucune donnée sanitaire. Dès lors, l'étude d'impact n'avait pas à analyser l'impact du projet en litige sur ce captage. Cette insuffisance à la supposer établie n'a en tout état de cause pas pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ni avoir été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. En outre, l'étude d'impact analyse de manière suffisante l'état initial du contexte hydrogéologique et hydrologique, les impacts sur les eaux superficielles et souterraines et prévoit des mesures vis-à-vis de la vulnérabilité hydrogéologique du secteur d'implantation. Par ailleurs, son annexe 2 comportait des éléments concernant l'hydrogéologie ainsi qu'une étude hydrogéologique Berga-Sud réalisée au mois d'août 2013.

S'agissant de l'impact sur l'avifaune nicheuse et les chiroptères :

26. L'association " Vents de Lozère " et autres ne peuvent utilement soutenir que selon l'avis de l'autorité environnementale l'étude d'impact du projet serait limitée quant aux chiroptères à et à l'avifaune nicheuse dès lors que comme dit au point 17, cet avis est irrégulier.

S'agissant de l'analyse des effets cumulés du parc éolien en cause et de celui de la Villedieu :

27. Aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement dans sa version applicable à la date de l'arrêté contesté : " I.- Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, installations, ouvrages, ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. (...) / II.- En application du 2° du II de l'article L. 122-3, l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire : (...) / 5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres : (...) / e) Du cumul des incidences avec d'autres projets existants ou approuvés, en tenant compte le cas échéant des problèmes environnementaux relatifs à l'utilisation des ressources naturelles et des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement susceptibles d'être touchées. Ces projets sont ceux qui, lors du dépôt de l'étude d'impact : / ont fait l'objet d'un document d'incidences au titre de l'article R. 214-6 et d'une enquête publique ; / ont fait l'objet d'une évaluation environnementale au titre du présent code et pour lesquels un avis de l'autorité environnementale a été rendu public. (...) ".

28. Si l'étude d'impact n'analyse pas les effets cumulés du projet en litige avec celui de la Villedieu, il ressort des pièces du dossier et notamment des cartes et photomontages de l'étude que depuis le Truc de Fortunio et Rieutord de Randon, les deux projets sont situés dans des champs visuels distincts. Aucun effet cumulé des deux projets n'est ainsi possible. Par suite, cette omission n'a pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ni n'a été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'environnement :

29. Si comme dit au point 24, des dépassements des seuils règlementaires en période nocturne ont été constatés, l'étude d'impact mentionne que des mesures de bridages et d'arrêt temporaire des éoliennes seront à mettre en place, les principes de solutions étant décrits dans l'étude acoustique de GAMBA, de l'annexe 8 pour ramener le parc à une conformité réglementaire.

30. Les intimés ne peuvent utilement se prévaloir d'un impact sur le captage de Champclos qui n'était pas en service ainsi qu'il a été dit au point 25. Par ailleurs, l'étude mentionnée au point 25 conclut que seules deux éoliennes, sur les sept, se situent en bordure de bassins versants de deux captages, les cinq autres éoliennes ne dégageant aucun enjeu hydrogéologique sur les sources captées et qu'aucun impact quantitatif ou qualitatif significatif ne peut être attendu au niveau de ces sources. Des mesures de prévention des pollutions accidentelles en phase de chantier sont prévues telles que la vidange des engins qui sera effectuée hors site, dans un espace adapté, l'absence de stockage d'hydrocarbures sur les bassins versants des sources, la réalisation de l'entretien du matériel uniquement sur les aires étanches équipée d'un dispositif de collecte.

En ce qui concerne les conséquences à tirer du seul vice entachant d'illégalité l'arrêté en litige :

31. Les dispositions précitées du 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement permettent au juge, même pour la première fois en appel, lorsqu'il constate un vice qui entache la légalité de l'autorisation environnementale attaquée mais qui peut être régularisé par une décision modificative, de rendre un jugement avant dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation et sursoit à statuer sur le recours dont il est saisi. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation, qui implique l'intervention d'une décision corrigeant le vice dont est entachée la décision attaquée. Un vice de procédure, dont l'existence et la consistance sont appréciées au regard des règles applicables à la date de la décision attaquée, doit en principe être réparé selon les modalités prévues à cette même date. Si ces modalités ne sont pas légalement applicables, notamment du fait de l'illégalité des dispositions qui les définissent, il appartient au juge de rechercher si la régularisation peut être effectuée selon d'autres modalités qu'il lui revient de définir en prenant en compte les finalités poursuivies par les règles qui les ont instituées et en se référant, le cas échéant, aux dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue.

32. En l'espèce, l'illégalité relevée au point 17 peut être régularisée par la consultation, s'agissant du projet présenté par la société EDF Renouvelables France, d'une autorité environnementale présentant les garanties d'impartialité requises. Pour que cette régularisation puisse être effectuée, ce nouvel avis devra être rendu dans les conditions définies aux articles R. 122-6 à R. 122-8 et R. 122-24 du code de l'environnement, applicables à la date de l'émission de cet avis ou de la constatation de l'expiration du délai requis pour qu'il soit rendu, par la mission régionale de l'autorité environnementale (MRAE) du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) compétente pour la région Occitanie Pyrénées-Méditerranée.

33. Lorsque ce nouvel avis aura été rendu, ou lorsqu'il sera constaté que la MRAE du CGEDD compétente pour la région Occitanie Pyrénées-Méditerranée n'a pas émis d'observations dans le délai qui lui est imparti par les dispositions du code de l'environnement mentionnées au point précédent, ce nouvel avis ou l'information relative à l'absence d'observations émises par la MRAE sera mis en ligne sur un site internet suffisamment accessible et ayant une notoriété suffisante, tels que le site de la préfecture de la région Occitanie Pyrénées-Méditerranée ou celui de la préfecture de Lozère, de manière à ce qu'une information suffisante du public soit assurée et que celui-ci ait la possibilité, par des cadres définis et pouvant accepter un nombre suffisant de caractères, de présenter ses observations et propositions. L'accessibilité de cet avis implique également qu'il soit renvoyé à son contenu intégral par un lien hypertexte figurant sur la page d'accueil du site en cause.

34. Dans l'hypothèse où ce nouvel avis indiquerait, après avoir tenu compte d'éventuels changements significatifs des circonstances de fait, que, tout comme l'avis irrégulier émis le 24 septembre 2015, le dossier d'exploitation du projet " Lou Paou 2 " de la société EDF Renouvelables France est assorti d'une étude d'impact de bonne qualité permettant d'appréhender les effets et les conséquences de l'installation sur l'ensemble des composantes environnementales, le préfet de Lozère pourra décider de procéder à l'édiction d'un arrêté modificatif régularisant le vice initial lié à l'irrégularité retenue par la Cour. Le préfet pourra procéder de manière identique en cas d'absence d'observations de l'autorité environnementale émises dans le délai requis par les dispositions du code de l'environnement mentionnées au point 32.

35. Dans l'hypothèse où, à l'inverse, le nouvel avis émis par la MRAE diffèrerait substantiellement de celui qui avait été émis le 24 septembre 2015, une enquête publique complémentaire devra être organisée à titre de régularisation, selon les modalités prévues par les articles L. 123-14 et R. 123-23 du code de l'environnement, dans le cadre de laquelle seront soumis au public, outre l'avis recueilli à titre de régularisation, tout autre élément de nature à régulariser d'éventuels vices révélés par le nouvel avis, notamment une insuffisance de l'étude d'impact. Au vu des résultats de cette nouvelle enquête organisée comme indiqué précédemment, le préfet de Lozère pourra décider de procéder à l'édiction d'un arrêté modificatif régularisant le vice entachant la procédure initiale d'enquête publique.

36. Dans l'hypothèse où, comme rappelé au point 33, le préfet devrait organiser une simple procédure de consultation publique du nouvel avis émis par la MRAE avant de décider de prendre un arrêté de régularisation, il sera sursis à statuer sur la présente requête, pendant un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, jusqu'à ce que le préfet de Lozère ait transmis à la Cour l'arrêté de régularisation pris à la suite de cette procédure.

37. Dans l'hypothèse où, comme rappelé au point 35, le préfet devrait organiser une nouvelle enquête publique, il sera sursis à statuer sur la présente requête, pendant un délai de douze mois à compter de la notification du présent arrêt, jusqu'à ce que le préfet de Lozère ait transmis à la Cour l'arrêté de régularisation pris à la suite de cette procédure d'enquête publique.

D É C I D E :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de la société EDF Renouvelables France jusqu'à ce que le préfet de Lozère ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation édicté après le respect des différentes modalités définies aux points 31 à 37 du présent arrêt jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt lorsqu'il n'aura été fait usage que de la procédure définie au point 33 et jusqu'à l'expiration d'un délai de douze mois lorsque, à l'inverse, l'organisation d'une nouvelle enquête publique sera nécessaire comme indiqué au point 35.

Article 2 : Le préfet de Lozère fournira à la Cour (greffe de la 7ème chambre), au fur et à mesure de leur accomplissement, les actes entrepris en vue de la régularisation prévue à l'article précédent.

Article 3 : Tous droits et conclusions des parties, sur lesquels il n'a pas été statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société EDF Renouvelables France, à Mme FV... CY..., nommée en qualité de représentant unique et à la ministre de la transition écologique.

Copie en sera adressée au préfet de Lozère.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2021, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- Mme Ciréfice, présidente assesseure,

- Mme Marchessaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 novembre 2021.

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N° 19MA03305

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA03305
Date de la décision : 19/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Energie.

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : ELFASSI

Origine de la décision
Date de l'import : 30/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-11-19;19ma03305 ?
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