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12/10/2021 | FRANCE | N°20MA02811

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 12 octobre 2021, 20MA02811


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 1er août 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de renvoi.

Par un jugement n° 1904825 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 5 août 2020, M. A..., représenté par

Me Khadraou

i-Zgaren, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 10 juillet...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 1er août 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de renvoi.

Par un jugement n° 1904825 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 5 août 2020, M. A..., représenté par

Me Khadraoui-Zgaren, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 10 juillet 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er août 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à défaut de lui enjoindre de réexaminer sa demande dans le même délai, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué méconnaît le principe d'impartialité en refusant d'admettre sa résidence habituelle et continue en France depuis plus de dix ans ;

- le refus de titre de séjour en litige, identique à celui annulé par le tribunal, est insuffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen circonstancié de sa situation personnelle, n'a pas tenu compte des critères posés par la circulaire du ministre de l'intérieur du

28 novembre 2012 mais a fondé sa décision uniquement sur l'avis défavorable de la commission consultative départementale du titre de séjour ;

- le préfet a commis une erreur de droit en s'abstenant d'examiner sa demande sur le fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié et de l'article 2.3.3 de l'accord-cadre franco-tunisien du 28 avril 2008, alors qu'il disposait d'un récépissé et d'un contrat de travail ;

- le préfet a commis une autre erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquelles était fondée sa demande d'admission au séjour, en subordonnant son admission à la preuve irréfragable de la continuité de son séjour en France ;

- l'arrêté méconnaît son droit à mener une vie privée et familiale normale, tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du même code, compte tenu notamment de sa présence effective en France depuis plus de dix ans, admise par le tribunal dans son jugement d'annulation du 3 mai 2018, et emporte sur sa situation des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'entachant d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'arrêté viole les stipulations de l'article 3-1 et de l'article 8-1 de la convention de New York relative aux droits de l'enfant.

M. A... n'a pas été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 27 novembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Revert,

- et les observations de Me Belarbi, substituant Me Khadraoui-Zgaren, représentant M. A....

Une note en délibéré présentée pour M. A... a été enregistrée le 5 octobre 2021.

Une note en délibéré présentée par le préfet des Alpes-Maritimes a été enregistrée le

11 octobre 2021.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 26 mai 1974, de nationalité tunisienne et déclarant être entré en France le 14 décembre 2005, a présenté au préfet des Alpes-Maritimes une demande d'admission exceptionnelle au séjour qui a été rejetée par arrêté du 17 août 2017. Par jugement du

3 mai 2018, le tribunal administratif de Nice a annulé le refus de titre de séjour, au motif que la commission du titre de séjour aurait dû être saisie de cette demande pour avis, et a enjoint au préfet de réexaminer celle-ci. Après avis défavorable de la commission départementale consultative du titre de séjour du 25 avril 2019, le préfet a, de nouveau, refusé d'admettre M. A... au séjour par arrêté du 1er août 2019 qui lui a fait également obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Nice du 10 juillet 2020 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est présent de manière habituelle en France depuis 2011 où il a été rejoint la même année par son fils aîné, né en 2000 en Tunisie, et le 7 août 2014 par son épouse, sa fille et son autre fils, nés en 2002 et 2013 également en Tunisie. L'aîné de ses enfants, qui s'est vu délivrer un titre de séjour valable jusqu'en août 2019, a effectué en France l'essentiel de sa scolarité secondaire, assure des activités de jeune arbitre au sein de la fédération française de football et a conclu des contrats de missions d'intérim. Sa fille, titulaire d'une bourse scolaire depuis le 3 septembre 2018, a été munie d'un récépissé de demande de titre de séjour valable du 2 janvier 2016 au 1er juillet 2021. Le plus jeune fils du requérant est quant à lui scolarisé depuis son arrivée en France. Compte tenu de la durée et des conditions de leur séjour en France, la scolarisation des deux plus jeunes enfants de M. A... fait obstacle à la poursuite de la vie familiale hors de France, malgré la situation irrégulière de son épouse qui, néanmoins, exerce l'activité professionnelle d'assistante de vie suivant contrat à durée indéterminée depuis le 5 novembre 2018. Dans les circonstances particulières de l'espèce, l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 1er août 2019 a porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. M. A... est donc fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Sans qu'il soit besoin d'examiner d'autres moyens, il y a lieu d'annuler ce jugement ainsi que l'arrêté en litige.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

3. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".

4. Le présent arrêt implique nécessairement, compte tenu de son motif et en l'absence au dossier de tout élément indiquant que la situation du requérant se serait modifiée, en droit ou en fait, depuis l'intervention de l'arrêté en litige, la délivrance à M. A... d'un titre de séjour. Il y a lieu d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer ce titre dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, en application de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour durant ces deux mois. En revanche il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

5. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, qui est la partie perdante dans la présente instance, la somme de 1 500 euros à verser à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1904825 du 10 juillet 2020 du tribunal administratif de Nice et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 1er août 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. A... un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour durant ces deux mois.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au préfet des

Alpes-Maritimes et au ministre de l'intérieur.

Copie pour information en sera adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nice.

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2021, où siégeaient :

- Mme Helmlinger, présidente la Cour,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Ury, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2021.

N° 20MA028112


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA02811
Date de la décision : 12/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: M. Michaël REVERT
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : KHADRAOUI-ZGAREN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-10-12;20ma02811 ?
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