Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 28 décembre 2018 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 1902131 en date du 11 juin 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 5 février 2021, M. A... D..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 11 juin 2020 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 décembre 2018 du préfet de l'Hérault ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour, à défaut de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne vise pas l'accord franco tunisien, ni l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne fait pas mention d'un certain nombre d'éléments de sa situation personnelle ;
- il est entaché d'un défaut d'examen réel et complet de sa situation personnelle ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 31311 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient s'en remettre aux observations produites devant le tribunal administratif.
M. A... D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 novembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... D..., de nationalité tunisienne, né le 15 juillet 1990, déclare être entré sur le territoire français en 2002. Il a sollicité du préfet de l'Hérault, le 13 septembre 2016, la délivrance d'un titre de séjour. Il relève appel du jugement du 11 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 décembre 2018 du préfet de l'Hérault portant refus de lui délivrer un titre de séjour.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui :/ 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". En application des dispositions de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
3. Contrairement à ce qui est soutenu, l'arrêté en litige vise l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988. Dès lors qu'il ressort des pièces du dossier et en particulier du récépissé de demande de carte de séjour que l'intéressé a demandé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention visiteur, le préfet, n'était pas tenu de viser l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoit la délivrance de plein droit d'un titre de séjour pour les étrangers ayant notamment servi dans la Légion étrangère. La circonstance que l'arrêté ne mentionne pas certains éléments tels que la date d'entrée alléguée sur le territoire français, son engagement dans la Légion, la présence de sa mère et de sa soeur en France ou encore son comportement satisfaisant en détention, n'est pas de nature à l'entacher d'une insuffisance de motivation, dès lors qu'il vise les dispositions sur lesquelles il est fondé et expose les raisons pour lesquelles le préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour, tenant à ce que sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public. M. A... D... était ainsi à même de contester utilement ces motifs devant le tribunal administratif. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.
4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault a examiné la situation personnelle de M. A... D.... Le moyen d'erreur de droit soulevé sur ce point par le requérant doit dès lors être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Selon l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".
6. M. A... D... fait valoir qu'il est entré en France en 2002, qu'il a été scolarisé de 2002 à 2007, qu'il a servi durant cinq années dans la Légion étrangère, que ses états de service sont méritoires, que sa mère et sa soeur sont en situation régulière en France et qu'il entretient une relation sentimentale avec une ressortissante française. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le requérant, bien que s'étant acquitté de ses obligations militaires pendant cinq années, a été condamné à une peine de quatre ans d'emprisonnement pour des faits de " transport non autorisé de stupéfiants et détention non autorisée de stupéfiants et offre ou cession non autorisée de stupéfiants et importation non autorisée de stupéfiants, trafic et participation à association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit, puni de dix ans d'emprisonnement " par un jugement du 9 mars 2016 du tribunal correctionnel de Montpellier et incarcéré à la maison d'arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone. Le même tribunal l'a également condamné le 31 mai 2017 à une peine de quatre ans d'emprisonnement pour des faits d' " extorsion par violence, menace ou contrainte de signature, promesse, secret, fonds, valeur ou bien et escroquerie, tentative et détention non autorisée de stupéfiants et acquisition non autorisée de stupéfiants et offre ou cession non autorisée de stupéfiants et vol par effraction dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt et usage illicite de stupéfiants ", peine confirmée par la cour d'appel de Montpellier le 21 août 2018. Si M. A... D... se prévaut de son bon comportement en détention, des efforts accomplis en vue de sa réinsertion et de l'aménagement de peine qu'il a obtenu, ces circonstances ne suffisent pas pour faire regarder l'intéressé comme ne présentant plus une menace pour l'ordre public à la date de l'arrêté en litige dès lors que les faits ayant valu à M. A... D... les condamnations précitées et une incarcération depuis mai 2015 présentent un caractère récent, répété et suffisamment grave. Enfin, il ressort des pièces du dossier que si sa mère et sa soeur possèdent une carte de résident, l'intéressé, qui est célibataire ne démontre pas être dépourvu de tout lien privé ou familial dans son pays d'origine. La relation sentimentale qu'il a nouée avec une ressortissante française est récente et limitée à des visites ponctuelles au parloir du centre de détention. Dans ces conditions, le refus de délivrance d'une carte de séjour opposé à M. A... D... n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit ainsi être écarté. Pour les mêmes motifs, l'arrêté contesté n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A... D....
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 28 décembre 2018.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A... D..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être également rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique s'opposent à ce que la somme réclamée par M. A... D... sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 17 juin 2021, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- Mme Bernabeu, présidente assesseure,
- Mme C..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juillet 2021.
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N° 21MA00545
mtr