Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 9 juillet 2020 par lequel la préfète de l'Aude lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée.
Par un jugement n° 2003253 du 1er septembre 2020, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 janvier 2021, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 1er septembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de l'Aude du 9 juillet 2020 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente ;
- il n'a pas été précédé de la procédure contradictoire prévue par l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- il a été pris en méconnaissance de son droit d'être entendue ;
- il est insuffisamment motivé ;
- le préfet s'est à tort cru lié par les décisions rejetant ses demandes d'asile ;
- il n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- l'arrêté attaqué méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- il porte atteinte au droit de sa fille de pouvoir vivre avec ses deux parents ;
- elle serait exposée à des violences en cas de retour dans son pays d'origine.
La requête a été communiquée à la préfète de l'Aude qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 novembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante russe née en 1992, déclare être entrée en France au cours de l'année 2019. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 28 juin 2019 dont la légalité a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 9 juillet 2020, la préfète de l'Aude lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée. Mme D... relève appel du jugement du 1er septembre 2020 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Il ressort des pièces du dossier, et il n'est d'ailleurs pas contesté, que les services de la préfecture de l'Aude ont été informés au cours du mois de juin 2020, soit antérieurement à l'arrêté attaqué, de ce que Mme D... vit en concubinage avec un ressortissant russe résidant régulièrement en France et qu'une enfant issue de cette union est née le 22 février 2020 à Carcassonne. L'arrêté attaqué, qui se borne à indiquer que Mme D... n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, ne fait pas état des éléments évoqués ci-dessus relatifs à la situation familiale de l'intéressée. Il ressort également des pièces versées aux débats que le compagnon de l'intéressée était, à la date de l'arrêté attaqué, titulaire d'une carte de résident en cours de validité, délivrée par la préfecture de l'Aude et comportant notamment la mention " réfugié russe ". Dans ces conditions, la préfète de l'Aude n'a pas procédé à l'examen particulier de la situation de Mme D... avant de l'obliger à quitter le territoire français. Par suite, l'intéressée est fondée à demander l'annulation de cette décision ainsi que, par voie de conséquence, celle des décisions subséquentes lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être éloignée.
3. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués, Mme D... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de l'Aude du 9 juillet 2020.
4. Mme D... ayant été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me B..., avocat de la requérante, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cet avocat de la somme de 1 500 euros.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Montpellier du 1er septembre 2020 est annulé.
Article 2 : L'arrêté de la préfète de l'Aude du 9 juillet 2020 est annulé.
Article 3 : L'Etat versera à Me B... la somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D..., au ministre de l'intérieur et à Me B....
Copie en sera adressée au préfet de l'Aude et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Carcassonne.
Délibéré après l'audience du 15 juin 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Simon, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 22226 du code de justice administrative,
- Mme E..., première conseillère,
- M. C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juin 2021.
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N° 21MA00092