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25/06/2021 | FRANCE | N°20MA02913

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 25 juin 2021, 20MA02913


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2020 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2001545 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le

13 août 2020, sous le n° 20MA02913, M. A..., représenté par Me D... demande à la Cour :

1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2020 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2001545 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 août 2020, sous le n° 20MA02913, M. A..., représenté par Me D... demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 juillet 2020 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2020 en tant qu'il porte refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir et, subsidiairement, de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté a été pris par une autorité incompétente ;

- le préfet était tenu de saisir la commission prévue à l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il bénéficie d'une présence en France depuis 10 ans ;

- l'arrêté en litige viole les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît la circulaire du 28 novembre 2012 ;

- il est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 décembre 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- et les observations de Me D..., représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 4 septembre 1973, de nationalité marocaine serait entré en France sous couvert d'un visa court séjour délivré par les autorités allemandes, valable du 12 août 2003 au 11 novembre 2003. Il a fait l'objet de trois décisions de refus de séjour assorties d'obligations de quitter le territoire le 13 juillet 2012, le 26 mars 2015 et le 23 août 2018. Le 27 janvier 2020, M. A... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié ou au regard de sa vie privée et familiale et de ses dix ans de présence en France. Il relève appel du jugement du 10 juillet 2020 du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2020 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Par arrêté n° 2020-I-008 du 7 janvier 2020, publié au recueil des actes administratifs du même jour, le préfet de l'Hérault a accordé à M. Pascal C..., secrétaire général de la préfecture et signataire de l'arrêté contesté, à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions et circulaires relevant des attributions de l'Etat dans le département de l'Hérault et notamment en ce qui concerne les affaires intéressant plusieurs services départementaux, des administrations civiles de l'Etat, à l'exception, notamment, d'une part, des réquisitions prises en application de la loi du 11 juillet 1938 relative à l'organisation générale de la nation pour temps de guerre, d'autre part, de la réquisition des comptables publics régie par le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique. Cet arrêté précise que cette délégation comprend donc, notamment, la signature de tous les actes administratifs et correspondances relatifs au séjour et à la police des étrangers. Cette délégation, qui n'est pas générale, habilitait dès lors M. C... à signer l'arrêté contesté. La circonstance que cette délégation de signature ne soit pas visée par cet arrêté est sans incidence. Il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté.

3. Aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 312-2 de ce code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 " et aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du même code : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ".

4. Si M. A... soutient résider en France de façon habituelle depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté, les pièces produites au dossier pour les années 2010 et 2011, constituées essentiellement des pièces médicales, d'un avis d'impôt sur le revenu 2011 au titre des revenus de 2010, d'une facture bancaire de 51,60 euros et d'un relevé de compte du mois de décembre 2011 faisant apparaître quatre opérations, sont insuffisantes pour établir une présence autre que ponctuelle au cours de cette période. Il en va de même de l'année 2013 pour laquelle ne sont produits que deux courriers de relance de la société BetYou des mois de mars et octobre 2013, un avis d'impôt 2013 sur les revenus de l'année 2012 et un relevé de compte du 7 octobre 2013. Dès lors, le moyen tiré du vice de procédure tenant au défaut de saisine de la commission du titre de séjour doit être écarté.

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

6. M. A... soutient qu'il est entré en France sous couvert d'un visa court séjour délivré par les autorités allemandes, valable du 12 août 2003 au 11 novembre 2003. Toutefois, si la page de son passeport qu'il produit témoigne de l'obtention d'un tel visa, le tampon illisible qui y est apposé ne témoigne pas de son entrée sur le territoire français, à cette date. Par ailleurs, il a fait l'objet de trois décisions de refus de séjour assorties d'obligations de quitter le territoire le 13 juillet 2012, le 26 mars 2015 et le 23 août 2018 qu'il n'a pas exécutées. Le requérant, sans charge de famille, n'établit ni même n'allègue être dépourvu d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 30 ans et où réside son épouse. Dans ces conditions et alors même qu'il bénéficie d'un emploi dans une société de plomberie et de la présence de son frère, l'arrêté en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Dès lors, le moyen tiré de ce que cet arrêté aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

7. L'article L. 111-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que les dispositions de ce code s'appliquent sous réserve des conventions internationales. Aux termes du 1er alinéa de l'article 3 de l'accord franco-marocain : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum (...) reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an et portant la mention salarié. ". Le 1er alinéa de l'article 9 du même accord stipule que : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. ". Enfin, aux termes de l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23 et L. 313-24 sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1 .".

8. Aux termes des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2.. (...) ". Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain susvisé prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord francomarocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour portant la mention " salarié ".

9. M. A... ne peut utilement invoquer la circulaire du 28 novembre 2012 dès lors qu'elle est dépourvue de caractère réglementaire. Au regard de la situation personnelle et familiale de l'intéressé telle qu'exposée au point 6 ci-dessus, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir de régularisation.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 17 janvier 2020.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

11. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A... n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction de M. A....

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 11 juin 2021, où siégeaient :

- M. Guidal, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Coutier, premier conseiller,

- Mme E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 juin 2021.

2

N° 20MA02913


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA02913
Date de la décision : 25/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GUIDAL
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : AVALLONE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-06-25;20ma02913 ?
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