Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par deux recours distincts, M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, à titre principal, d'annuler, d'une part, la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense sur son recours contre la décision du 8 septembre 2015 par laquelle le commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde lui a demandé le remboursement de la somme de 26 502,58 euros, d'autre part, la décision implicite de rejet du ministre sur son recours contre la décision du 9 octobre 2015 par laquelle le commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde lui a demandé le remboursement de la somme de 7 802,83 euros, à titre subsidiaire, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 33 305,41 euros en réparation de son préjudice financier et d'une somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence, enfin à titre infiniment subsidiaire, de lui accorder un dégrèvement des sommes mises à sa charge pouvant aller jusqu'à une exonération totale du montant total de 33 305,41 euros.
Par un jugement n° 1602538, 1603318 du 21 septembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a annulé les décisions implicites rejetant les recours de M. E... devant la commission des recours des militaires formés les 12 novembre 2015 et 22 décembre 2015 en tant qu'elles mettent respectivement à sa charge des sommes nettes indûment perçues jusqu'au 31 août 2013 et 31 octobre 2013 inclus et a rejeté le surplus de cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 23 novembre 2018 et le 15 octobre 2020, M. E..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 21 septembre 2018 en ce qu'il met à sa charge la somme de 26 502,58 euros et rejette sa demande d'indemnisation de ses préjudices ;
à titre principal :
2°) d'annuler la décision implicite de rejet du ministre de la défense intervenue sur son recours contre la décision du 8 septembre 2015 par laquelle le commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde lui a demandé le remboursement de la somme de 26 502,58 euros et de le décharger de cette somme ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros en réparation de ses préjudices financier, moral et troubles dans les conditions d'existence ;
à tout le moins :
4°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité égale à la somme réclamée au titre de la réparation de son préjudice financier ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il justifie d'une qualité et d'un intérêt pour faire appel et cet appel n'est pas tardif ;
- la décision implicite de rejet confirmative du ministre n'indique pas les bases de liquidation de la créance ;
- la réalité de cette créance n'est pas établie ;
- en ne constatant ses propres erreurs qu'après deux années et en ne parvenant toujours pas à calculer avec précision le montant global du prétendu trop-versé, l'administration a commis une faute ;
- cette situation occasionne pour lui un préjudice.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2020, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la défense ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 93-1353 du 30 décembre 1993 ;
- le décret n° 54-539 du 26 mai 1954 ;
- le décret n° 59-1193 du 15 octobre 1959 ;
- le décret n° 97-900 du 1er octobre 1997 et l'arrêté interministériel du même jour ;
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,
- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant M. E....
Considérant ce qui suit :
1. M. E... est officier de l'armée de terre, au grade de commandant. Il a été affecté au Sénégal pour la période allant du 1er juillet 2012 au 18 juillet 2014 accompagné de son épouse également militaire et de leurs trois enfants. Durant cette période, il a effectué deux OPEX en Côte d'Ivoire, du 8 au 14 décembre 2013, puis du 14 au 21 février 2014. Par décision du 8 septembre 2015, le commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde (CERHS) l'a informé qu'il avait bénéficié d'un trop-versé d'un montant de 26 502,58 euros correspondant à des indemnités servies entre 2013 et 2015, déduction faite des moins-versés entre 2011 et 2015, pour un montant de 7 033 ,13 euros. Le courrier indiquait à M. E... qu'il lui était loisible soit de procéder à un remboursement intégral de cette somme par chèque, soit d'accepter l'échéancier de retenues sur sa solde proposé par l'administration pour la restitution de ce trop-versé, soit enfin de demander un échéancier de retenues sur solde différent de celui proposé. L'intéressé a contesté cette décision devant la commission des recours des militaires. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par le ministre de la défense sur ce recours administratif préalable obligatoire. Entretemps, par décision du 9 octobre 2015, le commandant du CERHS a demandé à l'intéressé le remboursement de la somme de 7 802,83 euros correspondant à des indemnités indûment versées entre 2011 et 2015. M. E... a également contesté cette décision devant la commission des recours des militaires, recours qui a également été implicitement rejeté par le ministre. M. E... a contesté ces deux décisions implicites de rejet devant le tribunal administratif de Montpellier. Il a parallèlement présenté une demande indemnitaire préalable devant son administration, puis devant la commission des recours des militaires, recours qui a été implicitement rejeté par le ministre. M. E... a alors présenté devant le tribunal une demande indemnitaire, par requête distincte. Par jugement du 21 septembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a retenu la prescription pour ce qui concerne, d'une part, les créances découlant de versements intervenus entre le 31 juillet et le 31 août 2013 mentionnées dans la décision du CERHS du 8 septembre 2015, d'autre part, les créances découlant de versements indus intervenus entre le 30 septembre 2011 et le 31 octobre 2013 mentionnées dans la décision du 9 octobre 2015, et a en conséquence annulé les décisions implicites de rejet querellées en tant seulement qu'elles mettent respectivement à la charge de M. E... des sommes nettes perçues jusqu'au 31 août et 31 octobre 2013 inclus. Le tribunal a, par ailleurs, rejeté le surplus de la demande de l'intéressé. En exécution de ce jugement, le commandant du CERHS a informé M. E..., par décision du 31 octobre 2018, que le trop-versé de 7 802,83 euros résultant de la décision du 9 octobre 2015 était " annulé ". Ce dernier relève appel du jugement du 21 septembre 2018, seulement en ce qu'il met à sa charge la somme de 26 502,58 euros et qu'il rejette sa demande d'indemnisation de ses préjudices, et ne demande l'annulation que de la seule décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre sur son recours formé contre la décision du CERHS du 8 septembre 2015.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué en tant qu'il statue sur les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de rejet du ministre de la défense sur le recours administratif préalable contre la décision du commandant du CERHS du 8 septembre 2015 :
En ce qui concerne la motivation :
2. Aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense : " I. -Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. / La saisine de la commission est seule de nature à conserver le délai de recours contentieux jusqu'à l'intervention de la décision prévue à l'article R. 4125-10. (...) / III. Les dispositions de la présente section ne sont pas applicables aux recours contentieux formés à l'encontre d'actes ou de décisions : / (...) 2° (...) qui relèvent de la procédure organisée par les articles 112 à 124 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ". Et aux termes de l'article R. 4125-10 du même code : " Dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine, la commission notifie à l'intéressé la décision du ministre compétent, ou le cas échéant, des ministres conjointement compétents. La décision prise sur son recours, qui est motivée en cas de rejet, se substitue à la décision initiale. Cette notification, effectuée par lettre recommandée avec avis de réception, fait mention de la faculté d'exercer, dans le délai de recours contentieux, un recours contre cette décision devant la juridiction compétente à l'égard de l'acte initialement contesté devant la commission. / L'absence de décision notifiée à l'expiration du délai de quatre mois vaut décision de rejet du recours formé devant la commission ".
3. Aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " (...) Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation. (...) ". L'Etat ne peut mettre en recouvrement une créance sans indiquer, soit dans le titre de perception luimême, soit par une référence précise à un document joint à ce titre ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il s'est fondé pour déterminer le montant de la créance.
4. Enfin, aux termes de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, alors applicable, repris à l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration, " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ".
5. La lettre par laquelle l'administration informe un militaire qu'il doit rembourser une somme indûment payée et qu'en l'absence de paiement spontané de sa part, cette somme sera retenue sur sa solde est une décision susceptible de faire l'objet d'un recours de plein contentieux.
6. Alors que, en vertu des dispositions précitées de l'article R. 4125-10 du code de la défense, la décision que prend le ministre sur le recours administratif préalable prescrit par l'article R. 4125-1 du même code, se substitue à la décision initiale et doit, en cas de rejet, être motivée, il ne résulte pas de l'instruction que M. E... ait demandé que lui soient communiqués les motifs de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre sur son recours formé devant la commission des recours des militaires contre la décision du 8 septembre 2015. En application de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979, l'intéressé n'est dès lors pas fondé, en tout état de cause, à soutenir que cette décision implicite serait illégale au motif qu'elle ne mentionne pas les bases de liquidation de la créance.
En ce qui concerne la réalité de la créance :
S'agissant des avances ministérielles et des " PAIMAN " :
7. Alors que, dans ses écritures, M. E... a expressément exposé que les sommes réclamées au titre d'" avances ministérielles " ou de " PAIMAN " qui lui auraient prétendument été indûment versées au cours des mois d'août et novembre 2014 pour un montant global de 7 188,19 euros, ne ressortaient ni des bulletins de soldes, ni de certificats administratifs ou d'ordres de versement, la ministre, si elle a certes produit, pour la première fois en appel, des fiches d'analyse concernant la situation de l'intéressé au regard de chacune des indemnités et primes concernées par l'action en répétition des trop-versés, s'est toutefois abstenue de produire dans l'instance les justificatifs de versement correspondants à ces " avances ministérielles " et ces " PAIMAN ". Les documents versés par l'administration font néanmoins apparaître que, s'agissant de l'indemnité pour charges militaires (ICMILI) et de la prime de qualification pour les officiers titulaires de certains brevets militaires (QAOF54), les montants " PAIMAN ", respectivement de 845,68 euros et 395,50 euros, sont des montants négatifs, comptabilisés comme tels dans la balance des trop et des moins-versés, qui atténuent d'ores et déjà le trop-versé global. Il y a donc lieu de retrancher ces 1 241,18 euros du total de 7 188,19 euros invoqué par M. E.... Dans ces conditions, l'intéressé est seulement fondé à soutenir que la créance correspondant aux montants prétendument versés au titre d'" avances ministérielles " et de " PAIMAN " pour la majoration familiale à l'étranger (MAJETR), le supplément familial de solde à l'étranger (SUFETR) et l'indemnité de résidence à l'étranger (RESETER) n'est pas établie par l'administration à hauteur de 4 705,93 euros.
S'agissant de la majoration familiale à l'étranger (MAJETR) :
8. La fiche d'analyse relative à la majoration familiale à l'étranger produite dans l'instance par la ministre mentionne les textes applicables s'agissant de la majoration familiale à l'étranger (MAJETR), soit le décret n° 97-900 du 1er octobre 1997 et l'arrêté interministériel du même jour, fait apparaître le montant des " droits ouverts " à ce titre pour M. E..., tant sur la période de juillet 2012 à août 2013, qui est atteinte par la prescription, que sur la période non prescrite de septembre 2013 à novembre 2014, soit 626,97 euros pour chacun de ses trois enfants au titre de la majoration familiale à l'étranger (MFETRA), 156,74 euros pour son fils B... au titre de la majoration familiale à l'étranger pour enfant de moins de 10 ans (MFE10A) pour la période du 17 juillet 2012 au 28 septembre 2013 et, pour ce même enfant, 313,59 euros au titre de la majoration familiale à l'étranger pour enfant de moins de 15 ans (MFE15A) pour la période du 29 septembre 2013 au 17 juillet 2014, en précisant que depuis le 1er avril 2015, la MFETRA, la MFE10A et la MFE15A sont additionnées pour être versées sous l'indemnité MAJETR. Les droits ouverts pour la première période s'élèvent à 2 037,65 euros par mois, et pour la seconde à 2 194,50, calculés prorata temporis.
9. Cette fiche indique également que trois " rappels " ont été effectués au cours de cette seconde période, pour un montant de 14 085,93 euros en juin 2014 censés régulariser des sommes qui auraient été dues à l'intéressé sur la période courant de juillet 2012 à mai 2014, ainsi que pour des montants de 339,60 euros et 2 444,78 euros correspondant respectivement à une " avance ministérielle " (PUM) en août 2014 et un " PAIMAN " en novembre de la même année, ces deux sommes étant incluses dans les 4 705,93 euros mentionnés au point 7 ci-dessus.
10. Si M. E... soutient que, pour les mois de juillet 2012 et août 2014, ses " droits ouverts " concernant cette indemnité étaient non pas de 950,95 euros, comme l'a indiqué l'administration, mais de 1 018,82 euros, il n'en justifie pas. Il apparaît au demeurant que l'intéressé a perçu, au cours de la période courant de juillet 2012 à mai 2014, qui est la période concernée par le rappel de 14 085,93 euros mentionné au point précédent, la somme totale de 47 043,35 euros au titre de cette majoration familiale à l'étranger alors que les droits ouverts correspondants s'élevaient, selon l'administration, à 47 044,46 euros, soit une différence de 1,11 euros, constituant un moins-versé et comptabilisé comme tel dans la fiche d'analyse. Dès lors, à supposer même que les droits ouverts pour le seul mois de juillet 2012, le mois d'août 2014 n'étant pas inclus dans la période concernée par le rappel de 14 085,93 euros, seraient de 1 018,82 euros et non de 950,95 euros, la différence entre ces deux sommes, soit 67,87 euros, serait alors à regarder comme un moins-versé. Cette différence ne peut, en tout état de cause, apparaître comme un trop-versé qui serait inclus dans le rappel de 14 085,93 euros et dont M. E... serait redevable. Par suite, il y a lieu de considérer que cette somme de 14 085,93 euros versée à M. E... au mois de juin 2014 constitue effectivement un trop-versé pour lequel l'administration est fondée à procéder à la répétition.
S'agissant du complément forfaitaire de l'indemnité pour charges militaires (COMICM) et du supplément forfaitaire de l'indemnité pour charges militaires (SUPICM) :
11. Il résulte de l'instruction que, conformément aux dispositions de l'article 5 du décret du 15 octobre 1959, M. E... avait droit, à l'occasion de sa mutation au Sénégal en juillet 2012, au versement du complément forfaitaire de l'indemnité pour charges militaires (COMICM) et du supplément forfaitaire de l'indemnité pour charges militaires (SUPICM) pour des montants respectifs de 2 192,75 euros et 1 973,48 euros, et à l'occasion de sa mutation en France à l'été 2014, au versement des mêmes indemnités pour des montants respectifs de 7 071,65 euros et 6 364,49 euros.
Concernant la mutation au Sénégal en juillet 2012 :
12. Il résulte de l'instruction que l'administration a versé à M. E..., sur la solde du mois d'août 2013, les sommes de 2 192,75 euros et 1 973,48 euros correspondant aux droits ouverts au titre du complément forfaitaire de l'indemnité pour charges militaires (COMICM) et du supplément forfaitaire de l'indemnité pour charges militaires (SUPICM) pour sa mutation au Sénégal en juillet 2012. Sur la solde du mois de novembre 2014, sont intervenus de nouveaux versements à ce titre pour des montants respectifs de 8 047,43 euros et 6 364,12 euros.
Concernant la mutation en France à l'été 2014 :
13. M. E... s'est vu verser, sur la solde du mois d'août 2014, les sommes de 7 071,65 euros et 6 364,49 euros correspondant aux droits ouverts au titre du complément forfaitaire de l'indemnité pour charges militaires (COMICM) et du supplément forfaitaire de l'indemnité pour charges militaires (SUPICM) pour sa mutation en France à l'été 2014. Sur la solde du mois de novembre 2014, est intervenu un nouveau versement au titre de la première indemnité pour un montant de 1 414,33 euros et une retenue de 0,59 euros a été opéré au titre de la seconde.
14. Ainsi, les sommes de 8 047,43 euros et 1 414,33 euros perçues au titre du complément forfaitaire de l'indemnité pour charges militaires (COMICM) respectivement pour les mutations de 2012 et 2014, soit un total de 9 461,76 euros, apparaissent comme des trop-versés pour lesquels l'administration est fondée à procéder à la répétition. Il en est de même pour la somme de 6 364,12 euros, minorée de la somme de 0,59 euros, soit un total de 6 363,53 euros, perçue au titre du supplément forfaitaire de l'indemnité pour charges militaires (SUPICM) pour les mutations de 2012 et 2014.
S'agissant de la prime de qualification pour les officiers titulaires de certains brevets militaires (QAOF54) :
15. Aux termes de l'article 1er du décret n° 54-539 du 26 mai 1954 instituant une prime de qualification en faveur de certains officiers et militaires non officiers à solde mensuelle " Lorsqu'ils sont titulaires de certains brevets ou de certains titres de guerre, les personnels militaires à solde mensuelle, à l'exception des officiers généraux, des fonctionnaires des corps de contrôle, des ingénieurs des corps de direction et ingénieurs de direction de travaux, peuvent percevoir une prime de qualification dans les conditions qui seront définies par arrêté interministériel. ".
16. Toutefois, l'article 51 de la loi de finances rectificative pour 1993 dispose que la rémunération des personnels militaires en service à l'étranger ne comprend pas la prime de qualification instituée par le décret n° 64-1374 du 31 décembre 1964 relatif à la prime de qualification de certains officiers, lequel décret est venu compléter celui du 26 mai 1954. En conséquence, M. E... n'avait pas droit au versement de cette prime durant son séjour au Sénégal et ses droits n'ont été de nouveau ouverts qu'à compter du mois d'août 2014.
17. Il ressort de la fiche d'analyse produite par l'administration relative à cette prime de qualification pour les officiers titulaires de certains brevets militaires (QAOF54) que le montant auquel à droit M. E... à ce titre correspond à 16 % de sa solde mensuelle brute, plafonné à l'indice 616, soit 456,36 euros, ce que l'intéressé ne conteste pas. La fiche fait ressortir que sur la période de juillet 2014 à mai 2015, M. E... a perçu 4 776,56 euros au titre de cette prime, montant duquel l'administration a retranché un " PAIMAN " négatif effectué en novembre pour un montant de 395,50 euros, soit un total sur la période de 4 381,06 euros, alors que les droits ouverts, sur cette même période, s'élevaient au total à 4 365,84 euros. La différence de 15,22 euros constitue donc effectivement un trop-versé pour lequel l'administration est fondée à procéder à la répétition.
18. Il résulte de tout ce qui précède que M. E..., qui ne conteste pas sérieusement les autres montants que l'administration présente comme étant des trop-versés, est fondé à soutenir que la créance n'est pas établie par l'administration à hauteur de 4 705,93 euros. Il est dès lors fondé à demander à être déchargé de l'obligation de rembourser cette somme.
Sur le bien-fondé du jugement en tant qu'il statue sur les conclusions indemnitaires :
19. M. E... n'établit pas les préjudices financiers qu'il invoque et qui résulteraient du comportement fautif, selon lui, de l'administration à son égard. Il y a lieu, dès lors, de rejeter ses conclusions indemnitaires à ce titre.
20. Eu égard aux nombreuses démarches qu'a dû faire M. E... pour obtenir des explications sur les modalités de calcul des sommes qui lui étaient réclamées et au fait que l'administration ne lui a transmis des informations compréhensibles qu'en janvier 2019, soit trois ans et demi après l'avoir informé qu'il était redevable d'une somme globale de 26 502,58 euros, il est alloué à l'intéressé une somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral et du trouble dans ses conditions d'existence.
Sur les conclusions présentées à titre infiniment subsidiaire tendant au dégrèvement des sommes mises à sa charge :
21. L'argumentation de M. E... tenant à ce que le trop-versé ne résulterait que de la faute de l'autorité militaire et que cette faute lui est préjudiciable ne saurait conduire la cour à prononcer le dégrèvement des sommes restantes réclamées par l'administration.
Sur les frais liés au litige :
22. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
23. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. E... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense sur le recours de M. E... contre la décision du 8 septembre 2015 par laquelle le commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde lui a demandé le remboursement de la somme de 26 502,58 euros est annulée en tant qu'elle a pour effet de mettre à la charge de l'intéressé la somme de 4 705,93 euros.
Article 2 : M. E... est déchargé de l'obligation de rembourser cette somme de 4 705,93 euros.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser à M. E... une somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral et du trouble dans ses conditions d'existence.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 septembre 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : L'Etat versera à M. E... une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. E... est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et à la ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 11 juin 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président-assesseur,
- M. Coutier, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 juin 2021.
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N° 18MA04953
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