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24/06/2021 | FRANCE | N°20MA01284

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 24 juin 2021, 20MA01284


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 23 mars 2017 par laquelle le conseil municipal de Cabriès a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1703726 du 9 janvier 2020 le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 mars 2020 et le 28 février 2021, M. B..., représenté par Me A... D..., demande à la Cour :

) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 janvier 2020 ;

2°) d'annuler la d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 23 mars 2017 par laquelle le conseil municipal de Cabriès a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1703726 du 9 janvier 2020 le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 mars 2020 et le 28 février 2021, M. B..., représenté par Me A... D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 janvier 2020 ;

2°) d'annuler la délibération précitée, à titre principal entièrement et à titre subsidiaire en tant qu'elle classe les deux parcelles lui appartenant en zone inconstructible ;

3°) d'enjoindre au maire de Cabriès, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'inscrire à l'ordre du jour le réexamen du classement des parcelles lui appartenant et la révision du PLU ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Cabriès la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la procédure contradictoire a été méconnue, le tribunal n'ayant pas tenu compte de son mémoire enregistré le 1er novembre 2018, alors qu'un mémoire de la commune lui a été communiqué le 25 mai 2018, sans préciser le délai imparti pour répliquer, et que l'instruction a été clôturée à effet immédiat le 11 octobre 2018, sans information préalable adéquate des parties ;

- l'instruction est irrégulière car son avocat a été hospitalisé le 7 juin 2018 et était en arrêt de travail complet jusqu'au 30 septembre 2018 mais le tribunal a refusé de rouvrir l'instruction pour communiquer son mémoire en réplique du 1er novembre 2018, alors que le mémoire en défense de la commune lui avait été communiqué le 25 mai 2018 ;

- il a été porté atteinte au procès équitable au regard de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales alors que plusieurs demandes en annulation du plan local d'urbanisme (PLU) de Cabriès comportant des moyens identiques à ceux invoqués par M. B... ont été enregistrées mais ont été audiencées antérieurement à celle de M. B..., ce qui constituait un pré-jugement, la commune ayant en outre eu connaissance avant M. B... des conclusions du rapporteur public dans ces autres affaires ;

- l'enquête publique a bénéficié d'une insuffisante publicité au regard des articles L. 123-10 et R. 123-11 du code de l'environnement auxquels renvoie l'article L. 153-19 du code de l'urbanisme, ainsi qu'au regard des articles L. 600-11 et L. 103-1 du code de l'urbanisme ;

- le conseil municipal n'a pas bénéficié d'une information suffisante au regard des articles L. 2121-12 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales, alors qu'il a reçu la convocation et les pièces au mieux trois jours avant la séance à laquelle le PLU a été approuvé ;

- le classement des parcelles BM 21 et BM 40 en zone naturelle est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- il appartient aux Etats signataires de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment aux autorités législatives et juridictionnelles de " veiller à ce que la loi réglementant l'usage des biens " au sens de l'article 1er du premier Protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales respecte un " équilibre raisonnable " entre l'intérêt général mis en oeuvre et les conséquences en découlant pour les citoyens concernés ".

- le PLU est également entaché d'erreur manifeste d'appréciation en tant qu'il classe ces parcelles en secteur d'aléa exceptionnel d'incendie ;

- le classement des parcelles de M. B... est incohérent avec le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) qui préconise de conforter la protection du piton qui est à environ 500 mètres ;

- le PLU est déséquilibré ce qui l'entache d'illégalité dans son ensemble ;

les auteurs du PLU n'ont pas tenu compte des réserves déterminantes du commissaire-enquêteur ni de l'avis défavorable du préfet ou y ont insuffisamment répondu ;

- ce faisant il ont commis une erreur d'appréciation et le projet est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT) ;

- le projet est illégal, faute pour la commune d'avoir réellement amendé son contenu en vue de remédier aux dangers sanitaires et environnementaux mis en évidence tant par le commissaire-enquêteur que par l'Etat ;

- à supposer que l'orientation d'aménagement et de progrrammation (OAP) n° 8 ait été abandonnée, il serait porté atteinte à l'économie générale du PLU ;

- il reprend à son compte les observations de l'association locale de défense de Cabriès produites devant le commissaire-enquêteur dont il joint une copie ;

- il existe une contradiction entre le rapport de présentation du PLU page 86 et le classement des parcelles appartenant à M. B....

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2020, la Métropole Aix-Marseille-Provence, représentée par Me F..., conclut à titre principal au rejet de la requête et, à titre subsidiaire demande à la Cour de faire application des dispositions de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme. En toutes hypothèses, elle demande de mettre à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. I... G..., en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant M. B... et de Me F..., représentant la métropole Aix Marseille Provence et la commune de Cabriès.

Une note en délibéré présentée pour M. B... a été enregistrée le 10 juin 2021.

Considérant ce qui suit :

1. Le conseil municipal de Cabriès a, par délibération du 23 mars 2017 approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. M. B... relève appel du jugement n° 1703726 du tribunal administratif de Marseille du 9 janvier 2020 tendant à l'annulation de cette délibération.

Sur la régularité du jugement :

2. Dans l'intérêt d'une bonne justice, le juge administratif a toujours la faculté de rouvrir l'instruction, qu'il dirige, lorsqu'il est saisi d'une production postérieure à la clôture de celle-ci. Il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de cette production avant de rendre sa décision et de la viser. S'il décide d'en tenir compte, il rouvre l'instruction et soumet au débat contradictoire les éléments contenus dans cette production qu'il doit, en outre, analyser. Dans le cas particulier où cette production contient l'exposé d'une circonstance de fait ou d'un élément de droit dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et qui est susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire, le juge doit alors en tenir compte, à peine d'irrégularité de sa décision.

3. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la commune de Cabriès a produit son premier mémoire en défense le 25 mai 2018. L'avocat de M. B... a toutefois été hospitalisé pour une embolie pulmonaire le 7 juin 2018 et était en arrêt de travail complet jusqu'au 30 septembre 2018. La clôture immédiate de l'instruction a alors été prononcée le 11 octobre 2018. Et le 24 octobre 2018 le tribunal a refusé de rouvrir l'instruction pour lui accorder un délai supplémentaire pour répliquer. Il ressort en outre du mémoire en réplique produit le 2 novembre 2018, et non communiqué, que M. B... y apportait des éléments de fait concernant notamment l'existence d'un risque incendie grevant ses parcelles. Dans les circonstances de l'espèce, M. B... doit être regardé comme n'ayant pas été mis en mesure de faire état de ces éléments de fait, qui étaient susceptibles d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire, avant la clôture de l'instruction. Le requérant est par conséquent fondé à soutenir qu'en refusant de tenir compte de ses écritures du 2 novembre 2018, le tribunal a entaché d'irrégularité son jugement.

4. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de régularité du jugement, le requérant est fondé à demander l'annulation du jugement n° 1703726 du tribunal administratif de Marseille du 9 janvier 2020.

5. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B....

Sur la légalité de la délibération du 23 mars 2017 :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 123-10 du code de l'environnement, auquel renvoie l'article L. 153-19 du code de l'urbanisme, anciennement codifié à l'article L. 123-10 alinéa du code de l'urbanisme: " I. - Quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et durant celle-ci, l'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête informe le public :/ - de l'objet de l'enquête ; / - de la ou des décisions pouvant être adoptées au terme de l'enquête et des autorités compétentes pour statuer ; / - du nom et des qualités du commissaire enquêteur ou des membres de la commission d'enquête, de la date d'ouverture, du lieu de l'enquête, de sa durée et de ses modalités ; / - de l'existence d'une évaluation environnementale, d'une étude d'impact ou, à défaut, d'un dossier comprenant les informations environnementales se rapportant à l'objet de l'enquête, et du lieu où ces documents peuvent être consultés ; / - lorsqu'ils ont été émis, de l'existence de l'avis de l'autorité environnementale mentionné au III de l'article L. 122-1 et à l'article L. 122-7 du présent code ou à l'article L. 104-6 du code de l'urbanisme et des avis des collectivités territoriales et de leurs groupements mentionnés au IV de l'article L. 122-1, et le lieu où ces avis peuvent être consultés./ II. - L'information du public est assurée par tous moyens appropriés, selon l'importance et la nature du projet, plan ou programme, notamment par voie d'affichage sur les lieux concernés par l'enquête, par voie de publication locale ou par voie électronique.... ". Et selon l'article R. 123-11 du même code alors en vigueur : " I. - Un avis portant les indications mentionnées à l'article R. 123-9 à la connaissance du public est publié en caractères apparents quinze jours au moins avant le début de l'enquête et rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le ou les départements concernés. [...] ./ II. - L'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête désigne les lieux où cet avis doit être publié par voie d'affiches et, éventuellement, par tout autre procédé. / Pour les projets, sont au minimum désignées toutes les mairies des communes sur le territoire desquelles se situe le projet. [...] / Cet avis est publié quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et pendant toute la durée de celle-ci. / [...] . / L'avis d'enquête est également publié sur le site internet de l'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête, lorsque celle-ci dispose d'un site. / III.- En outre, dans les mêmes conditions de délai et de durée, et sauf impossibilité matérielle justifiée, le responsable du projet procède à l'affichage du même avis sur les lieux prévus pour la réalisation du projet. / Ces affiches doivent être visibles et lisibles de la ou, s'il y a lieu, des voies publiques, et être conformes à des caractéristiques et dimensions fixées par arrêté du ministre chargé de l'environnement. "

7. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une enquête publique ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

8. En l'espèce, il résulte de l'article 8 de l'arrêté n° 1034/206 par lequel le maire de Cabriès a ordonné une enquête publique du 27 décembre 2016 au 3 février 2017, sur le projet de plan local d'urbanisme (PLU), que l'avis au public faisant connaitre l'ouverture de l'enquête devait faire l'objet de deux publications dans la presse locale, La Provence et La Marseillaise ce qui a été fait. Il ressort en outre des pièces du dossier que l'avis d'enquête publique a été affiché en mairie de Cabriès, de Calas, au centre technique municipal et sur les panneaux d'affichage municipaux à partir du 12 décembre 2016. En page 11 de son rapport, le commissaire enquêteur précise également que l'avis a été publié sur le site internet de la mairie de Cabriès. Si le requérant soutient que la publication dans les journaux locaux serait insuffisante, il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment du rapport d'enquête publique que l'enquête s'est déroulée sur une période de trente-neuf jours avec douze permanences, que les habitants sont venus en nombre dès le premier jour, le commissaire-enquêteur ayant relevé dans son rapport que l'information avait bien circulé et que quatre cent dix-huit observations avaient été consignées. Par suite, à supposer même que la publication dans les journaux locaux puisse être regardée insuffisante, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une telle irrégularité, à la supposer même établie, ait privé les intéressés d'une garantie ou exercé une influence sur le sens de la délibération attaquée.

9. Par ailleurs, les moyens du requérant selon lesquels la publicité de l'enquête publique méconnaitrait les articles L. 600-11 et L. 103-1 et suivants du code de l'urbanisme doivent être écartés, comme non assortis de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

10. En deuxième lieu, en se bornant à soutenir que le délai entre le dépôt du rapport du commissaire enquêteur, le 13 mars 2017, et l'approbation du PLU par le conseil municipal le 23 mars 2017 est insuffisant, sans notamment préciser quelles dispositions législatives ou règlementaires auraient ainsi été méconnues, le requérant ne fournit pas les précisions suffisantes pour apprécier le bien-fondé du moyen qu'il invoque. De même en se bornant à soutenir que la suppression de l'OAP n° 8 aurait dû être suivie d'une nouvelle enquête publique, sans préciser quelle disposition législative ou règlementaire aurait ainsi été méconnue, le requérant n'assortit pas son moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

11. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée ". Et selon l'article L. 2121-12 de ce code : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal (...). Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs. En cas d'urgence, le délai peut être abrégé par le maire sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc (...) ". D'une part, il résulte de ces dispositions que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, les convocations aux réunions du conseil municipal doivent être envoyées aux conseillers municipaux à leur domicile personnel, sauf s'ils ont expressément fait le choix d'un envoi à une autre adresse, qui peut être celle de la mairie, et qu'il doit être procédé à cet envoi dans un délai de cinq jours francs avant la réunion. La méconnaissance de ces règles est de nature à entacher d'illégalité les délibérations prises par le conseil municipal. Il en va ainsi alors même que les conseillers municipaux concernés auraient été présents ou représentés lors de la séance. Il ne pourrait en aller différemment que dans le cas où il serait établi que les convocations irrégulièrement adressées ou distribuées sont effectivement parvenues à leurs destinataires cinq jours francs au moins avant le jour de la réunion. D'autre part, un requérant qui soutient que les délais légaux d'envoi des convocations à un conseil municipal n'ont pas été respectés alors que, selon les mentions du registre des délibérations du conseil municipal, ces délais auraient été respectés doit apporter des éléments circonstanciés au soutien de son moyen. En l'absence de tels éléments, ses allégations ne sauraient conduire à remettre en cause les mentions factuelles précises du registre des délibérations qui, au demeurant, font foi jusqu'à preuve du contraire.

12. En l'espèce, il ressort des mentions de la délibération attaquée, qui, au demeurant, font foi jusqu'à preuve contraire, que le conseil municipal a été convoqué le 17 mars 2017 pour la séance du 23 mars 2017, soit dans le délai de cinq jours francs imparti par l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, ces mentions étant corroborées par une attestation du directeur général des services de Cabriès du 23 avril 2018. Ces éléments ne sont pas sérieusement contestés par le requérant qui se borne à soutenir que ces convocations ont nécessairement été reçues moins de cinq jours francs avant la séance, alors que seule compte la date d'envoi, en application de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales cité au point précédent, M. B... ne soutenant pas qu'elles n'auraient pas été adressées au domicile des conseillers municipaux.

13. En quatrième lieu, l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales dispose que : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ". Il résulte de ces dispositions que les membres du conseil municipal appelés à délibérer de l'élaboration du plan local d'urbanisme doivent disposer, avant la séance, de l'ensemble du projet de plan local d'urbanisme que la délibération a pour objet d'approuver, et que s'ils doivent pouvoir obtenir communication des autres pièces et documents nécessaires à leur information sur la révision de ce plan, notamment du rapport du commissaire enquêteur, aucun texte ni aucun principe n'impose toutefois au maire de leur communiquer ces pièces et documents en l'absence d'une demande de leur part.

14. En l'espèce, il ressort de deux attestations du directeur général des services du 23 avril 2018 que les convocations transmises aux conseillers municipaux contenaient le projet de délibération relatif à l'approbation du plan local d'urbanisme, ainsi qu'une note de synthèse et que l'entier dossier du PLU a été mis à disposition des conseillers municipaux. Si le requérant soutient que le rapport du commissaire-enquêteur aurait été analysé seulement le 16 mars 2017 pour une délibération adoptée le 23 mars suivant et insiste sur les modifications importantes apportées au PLU après l'enquête et sur les enjeux complexes de ce document, compte tenu notamment des réserves importantes du commissaire-enquêteur et de l'avis défavorable émis par l'Etat, il ne ressort pas des pièces du dossier, et il n'est pas non plus allégué, qu'un membre du conseil municipal aurait demandé en vain la communication d'informations ou se serait estimé insuffisamment informé. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les membres du conseil municipal auraient bénéficié d'une information insuffisante avant l'adoption du PLU attaqué.

15. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; /2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; /3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ;/ 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; / 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues. " Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils peuvent être amenés, à cet effet, à classer en zone naturelle, pour les motifs énoncés à l'article R. 151-24, un secteur qu'ils entendent soustraire, pour l'avenir, à l'urbanisation. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

16. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que les parcelles cadastrées section BM n° 21 et n° 40 appartenant à M. B..., sont situées en continuité du vaste espace boisé protégé du plateau de l'Arbois. La parcelle cadastrée BM n° 40 est vierge de toute construction recouverte de végétation et est à l'état boisé, contrairement à ce que soutient M. B.... Elle est incluse dans un vaste massif forestier, d'une superficie dont elle constitue la terminaison. La parcelle cadastrée BM n° 21 ne comporte qu'une construction isolée et présente pour le reste le caractère d'un jardin La présence de constructions d'un lotissement au Sud ne permet pas de regarder le terrain comme physiquement séparé de ce grand ensemble forestier. Le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) prévoit au titre de l'orientation générale 2A notamment de mettre en valeur le paysage de campagne aixoise comme espace de transition entre les espaces naturels et les espaces urbains et au titre de l'orientation générale 1C des objectifs de modération de la consommation d'espace et de lutte contre l'étalement urbain. Il ressort en outre de la carte de synthèse du PADD page 36 que ces parcelles sont incluses dans les " espaces à dominante naturelle ". La circonstance que ces parcelles seraient équipées est sans incidence alors qu'il résulte des dispositions de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme citées au point précédent que le classement en zone " naturelle " par un plan local d'urbanisme peut concerner des zones desservies par des équipements publics. Le requérant ne peut davantage se prévaloir du fait que ses parcelles étaient classées sous l'ancien plan d'occupation des sols en zone constructible dès lors que les auteurs du PLU ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme. Il ne peut davantage utilement soutenir qu'un classement en zone urbaine aurait été plus adapté dès lors qu'il n'appartient pas au juge administratif de vérifier qu'un autre classement était possible mais seulement de s'assurer que le classement retenu n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation, ainsi qu'il a été dit au point précédent. La seule circonstance, à la supposer même établie, que dans la carte de synthèse des capacités de densification du tissu urbanisé existant qui se trouve en page 86 du rapport de présentation, les parcelles de M. B... auraient été répertoriées comme ayant un " très bon potentiel " n'est pas suffisante pour démontrer qu'en les classant en secteur naturel, les auteurs du PLU auraient entaché leur décision d'erreur manifeste d'appréciation. Par suite, eu égard notamment au parti d'urbanisme retenu, le classement de ces parcelles en zone naturelle n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

17. En revanche, s'il ressort de la cartographie d'aléa feux de forêt subi du porter à connaissance que le massif forestier dans le prolongement duquel se situent les parcelles servant d'assiette au projet est soumis à un risque incendie qualifié de très fort à exceptionnel, il n'en ressort pas que les parcelles cadastrées section BM n° 21 et 40 seraient elles-mêmes classées en risque très fort ou exceptionnel, la commune n'apportant aucun autre élément de nature à établir le niveau d'exposition du projet au risque incendie. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que le classement de ses parcelles en indice " f1 " est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

18. En sixième lieu, la circonstance que le PADD ait préconisé de conforter la protection du piton qui est à environ 500 mètres des parcelles appartenant à M. B... n'est pas davantage de nature à caractériser une incohérence du classement retenu avec le PADD.

19. En septième lieu, le requérant ne peut utilement soutenir que la délibération attaquée est illégale, à défaut d'avoir levé les réserves du commissaire-enquêteur et d'avoir tenu compte de l'avis défavorable du préfet, les auteurs du PLU n'étant pas tenus par de tels avis.

20. En huitième lieu, les moyens tirés de l'existence d'un déséquilibre du PLU, d'une erreur d'appréciation, d'une incompatibilité avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT), de ce que la suppression de l'OAP n° 8 porterait atteinte à l'économie générale du PLU, et le moyen selon lequel le projet est illégal, faute pour la commune d'avoir réellement amendé son contenu en vue de remédier aux dangers sanitaires et environnementaux mis en évidence tant par le commissaire-enquêteur que par l'Etat, ne sont pas assortis de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

21. En neuvième lieu en se bornant à soutenir que la suppression de l'OAP n° 8 porterait atteinte à l'économie générale du projet, la commune n'ayant selon lui pas d'autre projet alternatif admissible en-dehors de cette zone en matière d'animation du tissu commercial, le requérant ne démontre pas que le PLU attaqué est incompatible avec le principe d'équilibre énoncé par l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme, anciennement codifié à l'article L. 121-1 du même code.

22. En dixième lieu, si le requérant se réfère aux observations de l'association " Cabriès : les enfants du pays " formulées dans le cadre de l'enquête publique, jointes à sa requête, l'association n'y soulève pas de moyen ;

23. En onzième lieu, l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme dispose que : " Les plans locaux d'urbanisme [...] sont compatibles avec : / 1° Les schémas de cohérence territoriale prévus à l'article L. 141-1 ... ". Et selon l'article L. 141-6 du même code : " Le document d'orientation et d'objectifs [du SCOT] arrête, par secteur géographique, des objectifs chiffrés de consommation économe de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain et décrit, pour chacun d'eux, les enjeux qui lui sont propres. ". Enfin l'article L. 151-4 du même code, en vigueur à la date de la décision attaquée précise que : " Le rapport de présentation / [...] la capacité de densification et de mutation de l'ensemble des espaces bâtis, en tenant compte des formes urbaines et architecturales... ". Pour apprécier la compatibilité d'un PLU avec un SCOT, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier. Pour apprécier la compatibilité d'un PLU avec un SCOT, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier.

24. Le moyen selon lequel le PLU serait incompatible avec l'objectif du schéma de cohérence territoriale du pays d'Aix approuvé le 17 décembre 2015, qui évalue à 1010 l'offre de logements nécessaire à Cabriès d'ici 2030 doit être écarté, comme manquant en fait ;

25. En douzième lieu, en se référant au risque d'inondation dénoncé par le préfet dans son avis défavorable du 15 décembre 2016, le requérant doit être regardé comme invoquant un moyen tiré de la méconnaissance de l'article D5 du schéma d'aménagement et de gestion de l'eau de l'Arc. Toutefois, un tel moyen est inopérant, en application des dispositions combinées des articles L. 131-1 et L. 131-7 du code de l'urbanisme, le territoire de la commune de Cabriès étant couvert par le SCOT du pays d'Aix ainsi qu'il a été dit au point 24.

26. En treizième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales au motif que la Métropole Aix-Marseille-Provence serait exclusivement compétente en matière d'extension des zones commerciales est, en tout état de cause, inopérant, le PLU en litige ayant un objet urbanistique et non de gestion des zones commerciales.

27. En quatorzième lieu, à supposer que le requérant ait entendu invoquer un moyen tiré de l'existence d'un détournement de pouvoir dans le classement de ses parcelles, ce moyen doit être écarté, alors notamment qu'ainsi qu'il a été dit au point 16 leur classement en secteur " N " n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

28. En quinzième lieu, ce classement n'a pas pour objet ni pour effet de priver la requérante de la propriété de son bien mais de réglementer le droit de l'occupation du sol qui relève de l'usage d'un tel bien, et il ne méconnaît pas dès lors le premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

29. Enfin, en seizième et dernier lieu, en se bornant à se référer aux avis défavorables du préfet des Bouches-du-Rhône et de l'agence régionale de la santé pour soutenir que l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) n° 6 de Saint-Victor porterait atteinte à la situation sanitaire, que le plan local d'urbanisme serait entaché d'erreur d'appréciation et incompatible avec le SCOT du pays d'Aix en matière d'habitat et de prise en compte du risque d'inondation, alors que certaines OAP comme celle de Canto Perdix n° 7 et l'OAPn° 8 ont été abandonnées pour tenir compte de l'existence d'un tel risque, le requérant n'apporte pas de précisions suffisantes sur les moyens invoqués permettant à la Cour d'apprécier le bien-fondé. Il en est de même des moyens tirés de l'incompatibilité du classement de la zone du Grand Arbois avec le SCOT qui porterait atteinte à l'environnement agricole et naturel, et de l'incompatibilité avec le SCOT et d'une incohérence avec le PADD de l'ouverture à l'urbanisation de secteurs éloignés de l'urbanisation.

30. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que le classement des parcelles cadastrées section BM 21 et 40 en zone indicée " f1 " est illégal et que la délibération du conseil municipal de Cabriès du 23 mars 2017 doit être annulée, en tant qu'elle a approuvé un tel classement.

Sur les conclusions en injonction :

31. Le présent jugement qui annule seulement l'indice de classement " f1 " " en zone de risque d'incendie dont étaient affectées les parcelles appartenant à M. B... n'implique pas que le maire inscrive à l'ordre du jour le réexamen du classement des parcelles en cause.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

32. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... ni de la Métropole Aix-Marseille Provence une somme à verser en application de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1703726 du tribunal administratif de Marseille du 9 janvier 2020 est annulé.

Article 2 : La délibération du conseil municipal de Cabriès du 23 mars 2017 est annulée, en tant qu'elle a approuvé le classement des parcelles cadastrées section BM 21 et 40 appartenant à M. B... en zone indicée " f1 ".

Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande de première instance et de la requête d'appel est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la Métropole Aix-Marseille Provence formées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... B... et à la Métropole Aix-Marseille Provence.

Copie en sera adressée à la commune de Cabriès.

Délibéré après l'audience du 10 juin 2021, où siégeaient :

- M. G..., président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme E..., première conseillère,

- Mme C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 juin 2021.

N° 20MA01284 2

hw


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