Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
I. Sous le n° 1901233, M. C... B..., M. A... B..., Mme F... D... et Mme E... B... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille (AP-HM) à verser à titre provisionnel les sommes de 500 000 euros à M. C... B..., de 40 000 euros à M. A... B..., de 50 000 euros à Mme D... et de 25 000 euros à Mme B... en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de la prise en charge de M. C... B... par l'hôpital de La Timone le 22 janvier 2014.
La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Vaucluse a demandé au tribunal de condamner l'AP-HM à lui verser la somme provisionnelle de 92 643,85 euros au titre des débours et la somme de 1 080 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.
II. Sous le n° 1901253, MM. et Mme B... et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'AP-HM à verser les sommes de 1 121 800,77 euros à M. C... B..., de 157 527,78 euros à M. A... B..., de 173 658 euros à Mme D... et de 15 000 euros à Mme B... à titre indemnitaire.
La CPAM de Vaucluse a demandé au tribunal de condamner l'AP-HM à lui verser la somme de 92 643,85 euros au titre des débours et le remboursement des frais futurs au fur et à mesure de leur dépense à hauteur de 50 % et la somme de 1 080 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.
Par un jugement n° 1901233, 1901253 du 31 décembre 2019, le tribunal administratif de Marseille, après avoir joint ces demandes, a :
- prononcé un non-lieu à statuer sur la requête n° 1901233,
- condamné l'AP-HM à verser, d'une part, à M. C... B... la somme de 396 514,87 euros et à lui rembourser 80 % des frais futurs d'assistance par tierce personne ainsi que des dépenses de santé et de matériels en lien avec son handicap, à Mme D... la somme de 29 120 euros, à M. A... B... la somme de 21 170,45 euros, à Mme B... la somme de 4 000 euros et, d'autre part, à la CPAM de Vaucluse les sommes de 92 643,85 euros au titre des débours et de 1 080 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ainsi que 50 % des frais futurs qui seront exposés,
- mis à la charge définitive de cet établissement les frais de l'expertise,
- rejeté le surplus des conclusions de la requête n° 1901253.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 5 mars 2020, M. B... G..., représentés par Me Preziosi, demandent à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Marseille du 31 décembre 2019 en portant le montant des indemnités mises à la charge de l'AP-HM aux sommes de 1 723 457,58 euros pour M. C... B..., de 263 554,04 euros à titre principal ou de 125 020 euros à titre subsidiaire pour Mme D..., de 243 729,60 euros à titre principal ou de 88 000 euros à titre subsidiaire pour M. A... B..., et de 24 000 euros pour Mme B... ;
2°) de condamner l'AP-HM à verser à M. C... B... une rente trimestrielle de 11 865,60 euros au titre de l'assistance par une tierce personne ;
3°) de mettre à la charge de l'AP-HM la somme de 5 000 euros à verser à chaque requérant en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les frais d'orthodontie et la perte de gains professionnels futurs doivent être indemnisés ;
- le taux horaire de l'assistance par une tierce personne doit être fixé à 24 euros ;
- l'assistance par une tierce personne, le déficit fonctionnel temporaire, les souffrances endurées, le déficit fonctionnel permanent, le préjudice esthétique, le préjudice d'agrément et le préjudice d'établissement ont été insuffisamment indemnisés ;
- les frais de petit matériel, de consommables et des aides techniques ont été insuffisamment indemnisés et doivent être indemnisés sous forme de capital ;
- les frais d'ostéopathie, d'assistance à expertise et de séances de sport, l'incidence professionnelle et le préjudice scolaire ont été justement indemnisés ;
- l'aménagement du logement de Mme D... et celui de M. B... ont été suffisamment indemnisés ;
- les frais de l'aménagement du véhicule de Mme D... et sa perte de revenus ou, à défaut, son préjudice de carrière et la perte de revenus de M. B... ou, à défaut, son préjudice de carrière, doivent être réparés ;
- les préjudices d'affection et d'accompagnement de Mme D... et de M. B... doivent être mieux réparés ;
- le préjudice d'affection de Mme B... n'a pas été suffisamment réparé.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 9 novembre 2020, 8 décembre 2020 et 8 février 2021, l'AP-HM, représenté par Me Le Prado, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- il n'y a pas lieu d'indemniser les frais d'orthodontie, les frais de déménagement du matériel, les frais d'achat d'un électro-stimulateur et des consommables et la perte de gains professionnels de M. C... B... ;
- le taux horaire de l'assistance par une tierce personne a été justement fixé à 13 euros ;
- l'indemnisation des frais liés au handicap sous forme de rente constitue le moyen le plus adapté d'assurer la réparation intégrale du préjudice ;
- les frais de l'assistance par une tierce personne, l'incidence professionnelle, le déficit fonctionnel temporaire total, les souffrances endurées, le déficit fonctionnel permanent, le préjudice esthétique, le préjudice d'agrément, le préjudice sexuel et le préjudice d'établissement ont été suffisamment indemnisés ;
- les demandes de remboursement des frais de véhicule adapté et de la perte de revenus de Mme D... et de M. A... B... doivent être rejetées ;
- les préjudices d'affection et d'accompagnement ont été justement évalués ;
- la créance de la caisse ne peut être indemnisée que dans les limites du taux de perte de chance de 80 %.
Par des mémoires, enregistrés le 7 décembre 2020 et le 25 février 2021, la CPAM de Vaucluse, représentée par le cabinet Faure, Hamdi et Associés, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Marseille du 31 décembre 2019 en tant qu'il a condamné l'AP-HM à lui verser la somme de 92 643,85 euros au titre des débours et à l'indemniser de 50 % des frais de santé futurs ;
2°) de porter le montant des débours mis à la charge de l'AP-HM à la somme de 148 230,16 euros ainsi que les intérêts à compter de la date d'enregistrement du mémoire de première instance, et à 80 % le remboursement des frais futurs ;
3°) de condamner l'AP-HM à lui verser la somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;
4°) de mettre à la charge de l'AP-HM la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a exposé avant la date de consolidation la somme de 185 287,70 euros et exposera après cette date, la somme totale de 772 570,55 euros ;
- il y a lieu de condamner l'établissement de soins, après application du taux de perte de chance de 80 %, à lui verser la somme de 148 203,16 euros au titre des débours exposés avant consolidation et à lui rembourser, au fur et à mesure de l'engagement des dépenses, les frais futurs.
Un mémoire a été présenté pour l'AP-HM le 5 mars 2021, après la clôture de l'instruction, et n'a pas fait l'objet d'une communication contradictoire.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées par la CPAM de Vaucluse tendant à la condamnation de l'AP-HM à lui verser au titre des dépenses de santé actuelles la somme de 148 230,16 euros qui excédent la somme de 92 643,85 euros qui avait été demandée au tribunal administratif et qui sont nouvelles en appel.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me Fort, représentant M. B... G..., de Me Mesellem, représentant la CPAM de Vaucluse, et de Me Demailly, représentant l'AP-HM.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B... a subi, le 22 janvier 2014, à l'hôpital de La Timone, dépendant de l'AP-HM, une opération complexe de la colonne vertébrale pour corriger la scoliose dont il était atteint. Il a été victime, dix jours après l'intervention, d'une paraplégie postopératoire consécutive à un hématome compressif de la moelle. M. C... B..., ses parents, M. A... B... et Mme F... D..., et sa sœur, Mme E... B..., relèvent appel du jugement du 31 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a condamné l'AP-HM à verser à M. C... B... la somme de 396 514,87 euros et à lui rembourser 80 % des frais futurs d'assistance par tierce personne ainsi que des dépenses de santé et de matériels en lien avec son handicap, à Mme D... la somme de 29 120 euros, à M. A... B... la somme de 21 170,45 euros et à Mme B... la somme de 4 000 euros, en sollicitant une meilleure indemnisation de leurs préjudices. La CPAM de Vaucluse sollicite la réformation de ce jugement en demandant un meilleur remboursement des sommes exposées pour le compte de son assuré social. L'AP-HM conclut au rejet de la requête et des conclusions de la CPAM de Vaucluse.
Sur la responsabilité :
2. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport du collège d'experts désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, que c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la responsabilité de l'AP-HM était engagée en raison, d'une part, d'un défaut de surveillance du taux de la coagulation du sang de M. C... B... qui venait de subir une opération complexe de la colonne vertébrale pour corriger la scoliose dont il était atteint et qui présentait par ailleurs une cardiopathie congénitale et, d'autre part, d'une prise en charge tardive après le début des troubles neurologiques. C'est, par ailleurs, à juste titre que le tribunal a fixé à 80 % le taux de perte de chance dont il a ainsi été victime, qui n'est, au demeurant, pas contesté par l'AP-HM.
Sur les préjudices :
En ce qui concerne les préjudices de M. C... B... :
3. En application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant de la loi du 21 décembre 2006 relative au financement de la sécurité sociale, le juge saisi d'un recours de la victime d'un dommage corporel et du recours subrogatoire d'un organisme de sécurité sociale doit, pour chacun des postes de préjudices, déterminer le montant du préjudice en précisant la part qui a été réparée par des prestations de sécurité sociale et celle qui est demeurée à la charge de la victime. Il lui appartient ensuite de fixer l'indemnité mise à la charge de l'auteur du dommage au titre du poste de préjudice en tenant compte, s'il a été décidé, du partage de responsabilité avec la victime. Le juge doit allouer cette indemnité à la victime dans la limite de la part du poste de préjudice qui n'a pas été réparée par des prestations, le solde, s'il existe, étant alloué à l'organisme de sécurité sociale.
4. Par ailleurs, la personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur. Cette personne n'est toutefois recevable à majorer ses prétentions en appel que si le dommage s'est aggravé ou s'est révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement qu'elle attaque. Il suit de là qu'il appartient au juge d'appel d'évaluer, à la date à laquelle il se prononce, les préjudices invoqués, qu'ils l'aient été dès la première instance ou le soient pour la première fois en appel, et de les réparer dans la limite du montant total demandé devant les premiers juges. Il ne peut mettre à la charge du responsable une indemnité excédant ce montant que si le dommage s'est aggravé ou révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement attaqué.
S'agissant des préjudices patrimoniaux :
Quant aux préjudices patrimoniaux temporaires :
Dépenses de santé actuelles
5. D'une part, c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté la demande d'indemnisation des frais d'orthodontie de M. B... qui ont été exposés avant l'intervention chirurgicale du 22 janvier 2014 et sont par suite sans lien avec les fautes commises par l'AP-HM.
6. M. B... justifie avoir exposé des frais pour la location d'un lit médical dont 30 euros n'ont pas été pris en charge par la CPAM de Vaucluse. Les frais d'achat d'un fauteuil roulant et de motorisation de ce fauteuil, qui se montent respectivement à 2 335,35 euros et à 5 391 euros, doivent être remboursés au patient ainsi que les sangles de fixation du thorax d'un montant de 35,40 euros et la chaise portoir d'un montant de 289 euros, sous déduction de l'aide d'un montant de 2 968,28 euros accordée le 25 août 2015 par le département de Vaucluse au titre de l'aide technique de la prestation de compensation du handicap. Par ailleurs, il établit avoir acquitté la somme de 3 598,82 euros pour bénéficier des soins d'ergothérapie nécessités par la paraplégie dont il demeure atteint. Le montant des dépenses de santé actuelles exposées par M. B... s'élève ainsi à 8 711,29 euros.
7. D'autre part, il résulte de l'instruction, et notamment de la notification définitive des débours et de l'attestation d'imputabilité produites par la CPAM de Vaucluse en première instance, que les débours actuels de celles-ci s'élèvent à la somme totale de 185 302,20 euros.
8. Après application du taux de perte de chance de 80 %, le montant total des dépenses de santé actuelles s'élève ainsi à 155 210,79 euros, dont 8 711,29 euros au profit de M. B... et 146 499,50 euros au profit de la caisse. Toutefois, cette somme excède celle de 92 643,85 euros qui avait été demandée en première instance par la CPAM de Vaucluse et qu'elle a obtenu du tribunal. Il suit de là que l'indemnité qui doit être mise à la charge de l'AP-HM au titre des débours de la caisse s'élève à 92 643,85 euros.
Assistance par une tierce personne
9. Lorsque le juge administratif indemnise dans le chef de la victime d'un dommage corporel la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne, il détermine le montant de l'indemnité réparant ce préjudice en fonction des besoins de la victime et des dépenses nécessaires pour y pourvoir. Il doit à cette fin se fonder sur un taux horaire déterminé, au vu des pièces du dossier, par référence, soit au montant des salaires des personnes à employer augmentés des cotisations sociales dues par l'employeur, soit aux tarifs des organismes offrant de telles prestations, en permettant le recours à l'aide professionnelle d'une tierce personne d'un niveau de qualification adéquat et sans être lié par les débours effectifs dont la victime peut justifier. Il n'appartient notamment pas au juge, pour déterminer cette indemnisation, de tenir compte de la circonstance que l'aide a été ou pourrait être apportée par un membre de la famille ou un proche de la victime.
10. Pour la période allant du 12 février 2014 au 1er février 2016, veille de la date de la consolidation de son état de santé, il résulte du rapport d'expertise que M. B... a eu besoin de l'assistance d'une tierce personne pour les actes de la vie courante, à raison de six heures par jour tous les jours de la semaine, hors les périodes pendant lesquelles il a été hospitalisé à l'hôpital de La Timone, au centre de rééducation de Hyères ou au centre Propara de Montpellier, soit du 12 au 25 février 2014, du 30 avril au 25 mai 2014, du 27 mai au 2 juin 2014, du 13 janvier au 1er février 2015 et du 30 avril 2015 au 1er février 2016, et, à raison de trois heures par jour, lors de son séjour au centre de rééducation de jour Les Cyprès du 7 juin 2014 au 12 janvier 2015. Eu égard aux tarifs pratiqués par les organismes d'aide à la personne dont justifie le requérant, la moyenne horaire de cette assistance peut être fixée, entre le 12 février 2014 et le 1er février 2016, à 24 euros. Les frais d'assistance par une tierce personne représentent ainsi, sur la base du nombre de jours et d'heures précédemment défini dès lors que cette moyenne horaire est réputée intégrer l'ensemble des charges sociales ainsi que les droits à congés payés des salariés, la somme de 73 631,74 euros, de laquelle il convient de déduire le montant de la prestation de compensation du handicap de 716,30 euros par mois perçue à compter du 1er octobre 2015, soit 2 865,20 euros. Le préjudice lié à l'assistance temporaire par une tierce personne doit donc être évalué à la somme de 70 766,54 euros, dont 80 %, soit 56 613,23 euros, doit être mis à la charge de l'AP-HM.
Quant aux préjudices patrimoniaux permanents :
Dépenses de santé futures
11. D'une part, et ainsi que l'a jugé à juste titre que le tribunal, il ne résulte pas de l'instruction que l'état de santé de M. B... en lien avec les fautes médicales nécessiterait l'achat de sacs poubelle, de désinfectant et de lessive ou de produits pharmaceutiques d'hygiène et de soins tels de la crème hydratante, de l'huile de massage, du sérum physiologique ou du gel hydro alcoolique qui ne seraient pas pris en charge par l'organisme de santé.
12. Par ailleurs, après la consolidation de son état de santé, M. B... a exposé des frais d'ostéopathie d'un montant de 120 euros et a acquis un lit médicalisé pour un coût de 1 660 euros, puis a été dans l'obligation de le déménager pour un coût de 95 euros lorsqu'il a dû quitter le domicile familial après la séparation de ses parents pour aller vivre chez sa mère. M. B... justifie en outre avoir exposé des frais de réparation du fauteuil roulant acquis en 2015 à hauteur de 398,42 euros. Il a aussi été dans l'obligation d'acheter un nouveau fauteuil roulant plus adapté à son âge que le précédent pour un coût de 5 964 euros. Son état de santé justifie en outre l'acquisition d'un fauteuil électrique notamment pour l'extérieur d'un coût de 13 035 euros pour lequel il n'a perçu aucune aide technique au titre de la prestation de compensation du handicap. Contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, l'acquisition de barrières de lit d'un montant de 189 euros présente une utilité certaine au regard du handicap dont M. B... est atteint et doit, par suite, être regardée comme présentant un lien suffisant avec les fautes retenues à la charge de l'AP-HM. Le coût de cette acquisition ainsi que celui de l'achat d'un fauteuil de douche et d'un coussin, à hauteur de 1 343,49 euros, doivent donc être indemnisés. Enfin, M. B... a acquis un électro stimulateur d'un coût de 949,05 euros dont l'usage présente aussi une utilité compte tenu des séquelles que présente l'intéressé. Il y a lieu de déduire du montant total des dépenses de santé futures, soit 23 753,96 euros, la somme totale de 13 110,83 euros versée au titre de la compensation du handicap. Le montant du reste à charge sur les dépenses de santé futures de M. B... jusqu'à la date de lecture du présent arrêt s'élève ainsi à 10 643,13 euros.
13. Après la date de l'arrêt, il y a lieu, par ailleurs, de mettre à la charge de l'AP-HM le coût du reste à charge pour M. B... du renouvellement tous les dix ans du lit médicalisé pour un montant annuel de 166 euros et des barrières de lit pour un montant annuel de 18,90 euros ainsi que du renouvellement tous les cinq ans du fauteuil roulant manuel pour un montant annuel de 1 192,80 euros, du fauteuil roulant électrique pour un montant annuel de 2 607 euros, d'un fauteuil de douche avec coussin pour un montant annuel de 229,60 euros, de la chaise portoir pour un montant annuel de 57,80 euros ainsi que de l'électro stimulateur pour un montant annuel de 189,81 euros. Le montant annuel des dépenses de santé futures qui resteront à la charge de M. B... après la date du présent arrêt s'élève ainsi à 4 461,91 euros. Compte tenu du prix de l'euro de rente viagère fixé à 56,335 par le barème publié par la Gazette du Palais en 2020 applicable pour un jeune homme âgé de vingt-trois ans à la date d'attribution de cette rente, le montant du capital des dépenses afférentes s'élève à 251 361,70 euros.
14. Le montant total des dépenses de santé futures de M. B... s'élève par suite à la somme de 262 004,83 euros.
15. D'autre part, il résulte de l'attestation d'imputabilité et de l'état définitif des débours que les débours futurs que la caisse exposera pour le compte de son assuré s'élèveront à la somme annuelle de 2 138,27 euros comprenant quatre consultations chez un médecin généraliste d'un montant total de cent euros, un traitement contre la constipation d'un montant total de 151,56 euros, du matériel destiné à l'incontinence urinaire et fécale d'un montant total de 1 159,71 euros et des frais d'appareillage d'un montant de 727 euros. La CPAM de Vaucluse a ainsi exposé, pour la période allant de la date de consolidation jusqu'à la date de l'arrêt la somme de 11 505,65 euros, au titre des dépenses de santé de M. B..., qui n'excède pas ce qu'elle avait demandé en première instance. Pour le futur, en faisant application du taux de l'euro de rente viagère fixé à 56,335 par le barème publié par la Gazette du Palais en 2020 applicable pour un jeune homme âgé de vingt-trois ans au lendemain de l'arrêt, le montant capitalisé des débours de la caisse s'élève à la somme de 120 459,44 euros. Il s'ensuit que le coût des prestations de sécurité sociale futures de la CPAM de Vaucluse est de 131 965,09 euros.
16. Le montant total des dépenses de santé futures s'élève à 393 969,92 euros, soit après application du taux de perte de chance de 80 %, à la somme de 315 175,94 euros. Il y a lieu ainsi de condamner l'AP-HM à verser à M. B... au titre de ses dépenses de santé futures la somme de 262 004,83 euros. L'AP-HM versera à la caisse la somme de 53 171,11 euros.
Assistance par une tierce personne
17. Pour la période allant de la date de consolidation de son état de santé, le 2 février 2016, à la date du présent arrêt, il résulte du rapport d'expertise que M. B... a eu besoin de l'assistance d'une tierce personne pour les actes de la vie courante, à raison de six heures par jour tous les jours de la semaine, du 2 février 2016 au 1er septembre 2019 puis du 11 juillet 2020 à la date du présent arrêt. Durant son hospitalisation à la clinique médicale et pédagogique " Les Cadrans Solaires ", soit du 2 septembre 2019 au 10 juillet 2020, ce besoin d'assistance par une tierce personne ne portait que sur les permissions de sortie un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires. En faisant application des modalités de calcul déterminées aux points 9 et 10, il y a lieu d'évaluer les frais liés à l'assistance par une tierce personne, sur la base d'un coût horaire moyen de 24 euros, à la somme totale de 280 548,30 euros, dont il convient de déduire la prestation de compensation du handicap d'un montant total sur la période du 2 février 2016 au 3 juin 2021 de 41 195,06 euros. Il suit de là que le montant de l'assistance par une tierce personne doit être évalué, après application du taux de perte de chance de 80 %, à la somme de 191 482,59 euros.
18. Enfin, pour la période postérieure à la date du présent arrêt, le besoin d'assistance par une tierce personne est fixé à six heures par jour tous les jours de présence au domicile et de trois heures lors des périodes d'hospitalisation de jour. Eu égard à l'importance des sommes en jeu et à l'âge de la victime, il y a lieu de décider que la réparation de ce chef de préjudice doit prendre la forme d'une rente, qui interviendra par mois échu, avec revalorisation par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. En faisant application des modalités déterminées aux points 9 et 10, le montant de la rente trimestrielle s'élève, sur la base d'un coût horaire moyen de 24 euros, à 14 832 euros. Ainsi, doit être mis à la charge de l'AP-HM le versement d'une rente trimestrielle de 11 865,60 euros, compte tenu du taux de perte de chance de 80 % et sous déduction, d'une part, des jours d'hospitalisation qu'il appartiendra à M. B... de justifier et, d'autre part, de la prestation de compensation du handicap perçue chaque mois ou de toute autre prestation sociale ayant pour objet d'indemniser ses besoins en assistance d'une tierce personne.
Perte de gains professionnels, incidence professionnelle et préjudice scolaire et de formation
19. En premier lieu, il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'intervention du 22 janvier 2014, M. B..., scolarisé en classe de 2nde professionnelle " gestion administrative ", a interrompu ses études et les a reprises une première fois au mois de septembre 2015 avant d'être contraint de les abandonner à nouveau compte tenu des séquelles qu'il conserve, puis une seconde fois, au mois de septembre 2019, dans un clinique médicale et pédagogique afin de passer le baccalauréat, qu'il a obtenu au mois de juillet 2020. Il se trouve désormais gravement handicapé pour poursuivre des études supérieures. En conséquence, les premiers juges ont fait une exacte appréciation du préjudice scolaire et de formation en en fixant la réparation, après application du taux de perte de chance, à la somme de 16 000 euros.
20. En second lieu, il résulte du rapport d'expertise, ainsi que l'a jugé à juste titre le tribunal, que M. B... risque de connaître d'importantes difficultés pour s'insérer sur le marché de l'emploi et sera fortement limité dans le choix de son activité professionnelle mais, disposant notamment de la plénitude de ses fonctions intellectuelles, il ne peut être regardé comme se trouvant, de façon certaine, dans l'impossibilité totale et définitive d'exercer une activité professionnelle. Il n'est dès lors pas fondé à solliciter l'indemnisation totale de la perte de revenus qu'une activité professionnelle lui aurait procurés et de la pension de retraite consécutive, par l'octroi, à compter de la date de l'accident ou de sa majorité, et sa vie durant, d'une rente fixée sur la base du salaire médian net mensuel.
21. En revanche, il y a lieu d'indemniser l'incidence professionnelle subie par M. B... à hauteur des conséquences dommageables de son déficit fonctionnel permanent de 52 % et notamment de la circonstance que l'exercice de la profession de pâtissier à laquelle il se destinait sera compromise en raison des séquelles dont il reste atteint. Il sera donc fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en le portant à la somme de 500 000 euros, soit après application du taux de perte de chance, une somme de 400 000 euros.
S'agissant des préjudices personnels :
Quant aux préjudices personnels temporaires :
Déficit fonctionnel temporaire
22. Il résulte du rapport d'expertise que M. B... a subi des périodes de déficit fonctionnel temporaire total du 2 février 2014 au 29 avril 2015 et à hauteur de 80 % entre le 30 avril 2015 et le 2 février 2016. Il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence endurés à ce titre en les évaluant à 8 900 euros, compte tenu du taux de perte de chance.
Souffrances endurées
23. Les premiers juges ont fait une estimation suffisante de la réparation des souffrances endurées par M. B... évaluées à 5 sur une échelle de 1 à 7 en lui allouant la somme de 12 000 euros, après application du taux de perte de chance de 80 %.
Quant aux préjudices personnels permanents :
Déficit fonctionnel permanent
24. Il y a lieu d'évaluer le préjudice résultant du déficit fonctionnel permanent imputable à l'état de santé de M. B..., âgé de 18 ans et demi à la date de consolidation, en lien avec les fautes médicales et évalué au taux non contesté de 52 % par le tribunal à la somme de 144 000 euros, après application du taux de perte de chance.
Préjudice d'agrément
25. Les premiers juges ont fait une évaluation qui n'est pas insuffisante du préjudice d'agrément de M. B... en le fixant, compte tenu du taux de perte de chance, à la somme de 6 400 euros.
Préjudice esthétique
26. Le préjudice esthétique de M. B... a été évalué par l'expert à 4 sur une échelle de 1 à 7. Les premiers juges ont fait une évaluation insuffisante de ce préjudice, qui sera justement indemnisé par l'allocation d'une somme de 6 560 euros, après application du taux de perte de chance.
Préjudice sexuel et préjudice d'établissement
27. Compte tenu du taux de perte de chance, le préjudice sexuel et le préjudice d'établissement seront justement indemnisés par la somme de 80 000 euros.
28. Il résulte de tout ce qui précède que, d'une part, le montant des indemnités que l'AP-HM a été condamné à payer à M. C... B... doit être porté à la somme de 1 196 247,94 euros, étant précisé que l'indemnisation des frais d'assistance à expertise d'un montant de 2 160 euros et d'étude du dossier médical du patient par le médecin conseil pour un coût de 480 euros et des frais de l'entraînement sportif pour apprendre le maniement du fauteuil roulant à hauteur de 936 euros n'est contestée par aucune des parties et, d'autre part, que l'AP-HM devra verser à M. B... une rente trimestrielle de 11 865,60 euros au titre des frais d'assistance par tierce personne futurs selon les modalités déterminées au point 18 de la décision. Par ailleurs, l'AP-HM versera à la caisse, outre la somme de 92 643,85 euros au titre des dépenses de santé actuelles, la somme de 53 171,11 euros au titre des dépenses de santé futures.
En ce qui concerne les préjudices de Mme D... :
29. Il résulte de l'instruction que Mme D..., qui était assistante maternelle, a dû cesser son activité professionnelle pour s'occuper de son fils jusqu'au 10 juillet 2020 et n'a repris qu'une activité à temps partiel après cette date. Elle ne peut prétendre être indemnisée des pertes de salaires par elle alléguées à raison de l'assistance qu'elle apporte à son fils dès lors que l'indemnité allouée par la présente décision tient compte de la nécessité de l'aide d'une tierce personne dont son fils a besoin. Au demeurant, elle ne justifie pas de pertes de revenus supérieures au montant alloué, aux termes du présent arrêt, au titre de cette assistance.
30. Contrairement à ce qu'ont décidé les premiers juges, il y a lieu d'indemniser au titre des frais de véhicule adapté la différence entre le prix d'achat d'une voiture plus grande que Mme D... a été dans l'obligation d'acquérir pour pouvoir transporter son fils et ranger son fauteuil roulant et celui de revente du précédent véhicule de Mme D..., soit la somme de 12 232,99 euros, après application du taux de perte de chance.
31. La somme de 5 120 euros allouée à Mme D... au titre des frais de logement adapté n'est pas contestée par les parties.
32. Les troubles dans les conditions d'existence et le préjudice moral de Mme D... ont été suffisamment indemnisés par la somme totale de 24 000 euros, après application du taux de perte de chance.
33. Il résulte de ce qui précède que la somme que l'AP-HM est condamnée à verser à Mme D... doit être portée à la somme de 41 352,99 euros.
En ce qui concerne les préjudices de M. A... B... :
34. C'est à bon droit que les premiers juges ont considéré, pour rejeter la demande de M. A... B..., qu'il ne résultait pas de l'instruction que la perte de revenus dont il se prévaut à partir de l'année 2017 et la rupture conventionnelle de son emploi le 24 mars 2017 était en lien avec les fautes médicales commises par l'AP-HM.
35. La somme de 5 170,43 euros allouée à M. A... B... au titre des frais de logement adapté n'est pas contestée par les parties.
36. Les troubles dans les conditions d'existence et le préjudice moral de M. A... B... ont été suffisamment indemnisés par la somme totale de 16 000 euros, après application du taux de perte de chance.
37. Les conclusions de M. A... B... tendant à l'augmentation de l'indemnité de 21 170,45 euros que le tribunal administratif a condamné l'AP-HM à lui verser doivent donc être rejetées.
En ce qui concerne le préjudice de Mme E... B... :
38. Le préjudice moral de Mme B... a été suffisamment indemnisé par la somme totale de 4 000 euros, après application du taux de perte de chance. Ses conclusions tendant à l'augmentation de cette indemnité doivent donc être écartés.
Sur les intérêts :
39. Ainsi qu'elle le demande, la caisse a droit aux intérêts au taux légal, même s'ils sont demandés pour la première fois en appel, sur la somme de 92 643,85 euros à compter du 8 novembre 2019, date d'enregistrement de son mémoire devant le tribunal, et sur la somme de 52 324,33 euros à compter de la date du présent arrêt.
Sur l'indemnité forfaitaire de gestion :
40. Il y a lieu de porter le montant de l'indemnité forfaitaire, prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, accordée par les premiers juges à 1 098 euros.
Sur les frais liés au litige :
41. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'AP-HM une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par M. C... B... et les autres requérants et une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la CPAM de Vaucluse.
D É C I D E :
Article 1er : La somme de 396 514,87 euros que l'AP-HM a été condamnée à verser à M. C... B... par l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Marseille du 31 décembre 2019 est portée à 1 196 247,94 euros.
L'AP-HM versera, en outre, à M. C... B... une unique rente trimestrielle de 11 865,60 euros dans les conditions précisées au point 18 de la présente décision.
Article 2 : La somme de 29 120 euros que l'AP-HM a été condamnée à verser à Mme D... par l'article 3 du jugement du tribunal administratif de Marseille du 31 décembre 2019 est portée à 41 352,99 euros.
Article 3 : L'AP-HM versera à la CPAM de Vaucluse, outre la somme de 92 643,85 euros fixée par l'article 5 du jugement du tribunal administratif de Marseille du 31 décembre 2019, la somme de 53 171,11 euros, au titre de l'ensemble de ses frais futurs.
La somme de 1 080 euros que l'AP-HM a été condamnée à verser à la CPAM de Vaucluse par ce même article 5, au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, est portée à 1 098 euros.
Article 4 : La somme de 92 643,85 euros portera intérêt au taux légal à compter du 8 novembre 2019 et la somme de 52 324,33 euros à compter de la date du présent arrêt.
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 31 décembre 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 : L'AP-HM versera, d'une part, à M. C... B... G... une somme de 3 000 euros et, d'autre part, à la CPAM de Vaucluse une somme de 2 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête et de la CPAM de Vaucluse est rejeté.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., représentant unique des requérants, à la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse et à l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille.
Copie en sera adressée à la caisse primaire d'assurance maladie des Hautes-Alpes.
Délibéré après l'audience du 20 mai 2021 où siégeaient :
- Mme Hemlinger, présidente de la cour,
- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure,
- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 juin 2021.
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N° 20MA01117