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28/05/2021 | FRANCE | N°20MA00065

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 28 mai 2021, 20MA00065


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.

Par un jugement n° 1905373 du 6 décembre 2019, la magistrate d

signée par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Pro...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.

Par un jugement n° 1905373 du 6 décembre 2019, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 6 janvier 2020 et le 9 décembre 2020, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 décembre 2019 ;

2°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2019 du préfet des Alpes-Maritimes et, à titre subsidiaire, d'annuler cet arrêté en tant qu'il porte refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et en tant qu'il prononce une interdiction de retour sur le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une attestation de demandeur d'asile jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur son recours ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 500 euros à verser à son conseil en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle, sous réserve que son conseil renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Il soutient que :

- le préfet a incompétemment décidé de placer sa demande d'asile en procédure accélérée ;

- cette décision de placement en procédure accélérée a été prise sans motif légitime ;

- la décision portant refus de titre de séjour et celle portant obligation de quitter le territoire français sont illégales en ce qu'elles sont fondées sur les dispositions de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'elles ne lui étaient pas applicables ;

- la décision refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire est illégale dès lors qu'il établit la stabilité et l'effectivité de son domicile ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,

- et les observations de Me D..., substituant Me C..., représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant turc, relève appel du jugement du 6 décembre 2019 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 octobre 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.

Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français :

2. Aux termes de l'article L. 723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'office statue en procédure accélérée lorsque : / 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr en application de l'article L. 722-1 / 2° Le demandeur a présenté une demande de réexamen qui n'est pas irrecevable. / II. - L'office peut, de sa propre initiative, statuer en procédure accélérée lorsque : / 1° Le demandeur a présenté de faux documents d'identité ou de voyage, fourni de fausses indications ou dissimulé des informations ou des documents concernant son identité, sa nationalité ou les modalités de son entrée en France afin de l'induire en erreur ou a présenté plusieurs demandes d'asile sous des identités différentes ; / 2° Le demandeur n'a soulevé à l'appui de sa demande que des questions sans pertinence au regard de la demande d'asile qu'il formule ; / 3° Le demandeur a fait à l'office des déclarations manifestement incohérentes et contradictoires, manifestement fausses ou peu plausibles qui contredisent des informations vérifiées relatives au pays d'origine. / III. - L'office statue également en procédure accélérée lorsque l'autorité administrative chargée de l'enregistrement de la demande d'asile constate que : (...) / 5° La présence en France du demandeur constitue une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat. (...) / VI. - La décision de l'office mentionnée au II, celle de l'autorité administrative mentionnée au III ou le refus de l'office de ne pas statuer en procédure accélérée prévu au V ne peut pas faire l'objet, devant les juridictions administratives de droit commun, d'un recours distinct du recours qui peut être formé, en application de l'article L. 731-2, devant la Cour nationale du droit d'asile à l'encontre de la décision de l'office. ".

3. Il résulte des dispositions précitées que, dans le cas où le préfet constate, notamment, que la présence en France de l'étranger qui dépose devant lui une demande d'asile constitue une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides doit examiner cette demande en procédure accélérée et que la décision du préfet ne peut être contestée devant les juridictions administratives de droit commun. Ces dispositions ont ainsi implicitement, mais nécessairement, pour effet de conférer au préfet le pouvoir de décider que ladite demande doit être examinée par l'Office en procédure accélérée. Il s'ensuit qu'il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que le préfet aurait été matériellement incompétent pour ce faire.

4. M. A... ne peut utilement soutenir que la décision du préfet plaçant sa demande d'asile en procédure accélérée a été prise sans motif légitime dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point précédent, le VI de l'article L. 723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité dispose notamment que la décision par laquelle l'autorité administrative constate, comme le prévoit le 5° du III de cet article, que la présence en France de l'étranger qui dépose devant lui une demande d'asile constitue une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat ne peut être contestée devant les juridictions administratives de droit commun, et donc devant la cour administrative d'appel de Marseille.

5. Aux termes de l'article L. 743-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) / 7° L'office a pris une décision de rejet dans les cas prévus au I et au 5° du III de l'article L. 723-2 ; (...) ". Aux termes de l'article L. 743-3 de ce code : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile présentée par M. A... a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par une décision du 12 septembre 2019. En application du 7° de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, le droit au maintien de l'intéressé sur le territoire français a donc pris fin à la date de la notification de cette décision et le préfet pouvait, en vertu des dispositions de l'article L. 743-3 de ce code, prendre une mesure d'éloignement à son encontre dès lors qu'il ne pouvait être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre. Eu égard à ce qui a été dit aux points 3 et 4 ci-dessus, M. A... ne peut utilement soutenir que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français qui lui ont été opposées seraient illégales en ce qu'elles sont fondées sur cet article L. 743-3 alors que la décision préfectorale plaçant sa demande d'asile en procédure accélérée serait elle-même illégale.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

7. Le 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permet au préfet de ne pas accorder de délai de départ à l'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français lorsqu'il existe un risque qu'il se soustraie à cette obligation, et que ce risque est établi, " sauf circonstance particulière ", " f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente ".

8. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui ne justifiait pas être en possession d'un passeport en cours de validité, ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes. Le risque qu'il se soustraie à la mesure d'éloignement pouvait donc être présumé en application des dispositions précitées du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

9. Il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français porterait une atteinte disproportionnée au droit à la vie privée et familiale de M. A... par adoption des motifs retenus à bon droit par la magistrate désignée par le président du tribunal.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter en tout état de cause ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que, en tout état de cause, celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Coutier, premier conseiller,

- Mme E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mai 2021.

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N° 20MA00065

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00065
Date de la décision : 28/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Bruno COUTIER
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : AARPI OLOUMI et HMAD AVOCATS ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-05-28;20ma00065 ?
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