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28/05/2021 | FRANCE | N°17MA04805

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 28 mai 2021, 17MA04805


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Alpes-Maritimes a déféré au tribunal administratif de Nice, comme prévenu d'une contravention de grande voirie, M. D... L....

Par un jugement n° 1401514 du 24 octobre 2017, le tribunal administratif de Nice a relaxé M. L... des fins de la poursuite pour la contravention de grande voirie engagée à son encontre par le préfet des Alpes-Maritimes.

Par un arrêt n° 17MA04805 du 28 juin 2019, la Cour administrative d'appel de Marseille a, à l'article 1er, annulé ce jugement du 24

octobre 2017, à l'article 2, condamné M. L... au paiement d'une amende de 1 500 euros, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Alpes-Maritimes a déféré au tribunal administratif de Nice, comme prévenu d'une contravention de grande voirie, M. D... L....

Par un jugement n° 1401514 du 24 octobre 2017, le tribunal administratif de Nice a relaxé M. L... des fins de la poursuite pour la contravention de grande voirie engagée à son encontre par le préfet des Alpes-Maritimes.

Par un arrêt n° 17MA04805 du 28 juin 2019, la Cour administrative d'appel de Marseille a, à l'article 1er, annulé ce jugement du 24 octobre 2017, à l'article 2, condamné M. L... au paiement d'une amende de 1 500 euros, ainsi que d'une somme de 97,78 euros au titre des frais de procès-verbal et, à l'article 3, lui a enjoint de libérer sans délai la dalle en béton et la parcelle cadastrée DP 8a occupée par un cabanon de 42 m² et une cour privative de 56 m², à évacuer les matériaux issus de la démolition vers un centre de traitement agréé et à remettre dans son état naturel la dépendance du domaine public maritime qu'il occupe irrégulièrement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, dans un délai de quatre mois à compter de la date de notification de cet arrêt et, à l'article 4, autorisé l'administration, en cas d'inexécution par M. L... après le délai de quatre mois à compter de la date de notification de l'arrêt, à procéder d'office, aux frais et risques et périls de l'intéressé à l'évacuation des installations et ouvrages implantés sans autorisation sur le domaine public maritime.

Par une décision n° 434059 du 13 février 2020, le Conseil d'Etat n'a pas admis le pourvoi de M. L... contre l'arrêt n° 17MA04805 du 28 juin 2019.

Procédure devant la Cour :

Par deux mémoires, enregistrés les 18 janvier et 15 avril 2021, la ministre de la transition écologique et la ministre de la mer ont demandé à la Cour de procéder à la liquidation de l'astreinte prononcée par l'arrêt du 28 juin 2019 pour la période allant du 29 octobre 2019 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir dont le montant sera mis à la charge de M. L... et versé à l'Etat.

Elles soutiennent que :

- la condamnation de M. L... à la remise en état naturel des lieux prononcée par l'arrêt du 28 juin 2019 n'a toujours pas été exécutée ;

- les circonstances tenant à l'existence d'un pourvoi en cassation et d'un projet de délimitation du domaine public sont inopérantes ;

- l'extrait du rapport d'un géomètre n'est pas de nature à remettre en cause le bien-fondé de l'arrêt de la Cour quant à la domanialité publique de l'emprise du cabanon appartenant à M. L... ;

- selon l'article R. 421-29 du code de l'urbanisme, les démolitions effectuées en application d'une décision de justice devenue définitive sont dispensées de permis de démolir ;

- M. L... n'établit pas que la démolition des cabanons posera des difficultés eu égard à l'espace remarquable dans lequel se trouve la plage de la Mala et entraînera la destruction d'espèces protégées ;

- la circonstance que la parcelle des constructions en litige se situe dans une zone protégée n'est pas de nature à faire obstacle à la remise en état prononcée par l'arrêt de la Cour ;

- les opérations de remise en état de la plage sont techniquement réalisables ;

- elles permettront à la plage de retrouver son état naturel.

Par lettre du 20 janvier 2021, le président de la 7ème chambre de la Cour a demandé à M. L... de justifier de la nature et de la date des mesures prises pour assurer l'exécution de l'arrêt n° 17MA04805 du 28 juin 2019, dans un délai de quinze jours à compter de la réception de la lettre et l'a informé de ce que faute de réponse dans le délai, la Cour procédera à la liquidation de l'astreinte.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 février 2021, M. L..., représenté par Me J..., demande à la Cour de rejeter la demande de liquidation d'astreinte de la ministre de la transition écologique et de la ministre de la mer.

Il soutient que :

- depuis la décision du Conseil d'Etat, un projet de délimitation a été réalisé par les services de l'Etat, l'arrêté étant actuellement contesté par la commune et d'autres occupants ;

- dans une procédure parallèle un autre expert géomètre a rendu un rapport selon lequel le cabanon ne se trouve pas sur le domaine public ;

- la décision au fond consécutive à ce rapport est toujours pendante devant le tribunal administratif de Nice ;

- l'arrêt de la Cour sera modifié suivant les conclusions de cet expert ;

- il a pris toutes les mesures utiles pour exécuter l'arrêt en déposant une demande de permis de démolir ;

- l'exécution posera des difficultés eu égard à l'espace remarquable de la plage Mala et de son inaccessibilité en voiture ou pour une grue ;

- par la mer, il sera indispensable d'obtenir une dérogation à la destruction d'espèces protégées dans le cadre de la démolition des installations.

Le mémoire présenté pour M. L..., enregistré le 28 avril 2021, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme M...,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me J... représentant M. D... L....

Une note en délibéré présentée pour M. L... a été enregistrée le 20 mai 2021.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêtés des 18 février 1982 et 14 mai 1996, le préfet des Alpes-Maritimes a concédé à la commune de Cap d'Ail l'équipement, l'entretien et l'exploitation de la " plage de la Mala ". Par plusieurs conventions signées au cours de l'année 1997, la commune de Cap d'Ail a accordé des sous-traités d'exploitation portant sur les lots de plage n° 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12 et 13 ayant respectivement pour assiette les parcelles cadastrées DP 8a, DP 8b, DP 8c, DP 8d, DP 8e, DP 8f, DP 8g et DP 25a, occupées par des cabanons et des cours. La concession de la " plage de la Mala " étant venue à expiration le 31 décembre 2010 et n'ayant pas été renouvelée, le préfet des Alpes-Maritimes a invité M. G... L..., Mme N..., M. H..., M. F..., Mme B... épouse E..., M. D... L..., Mme I... épouse C..., Mme A... épouse K..., respectivement occupants des lots n° 6, 8, 9, 10, 11, 12, et 13 sur les parcelles DP 8f, DP 8c, DP 8g, DP 8b, DP 8e, DP 8a, DP 8d et DP 25a à présenter une demande d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public maritime aux fins de régularisation éventuelle de leur situation. Par décisions des 31 janvier 2013, le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté leur demande d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public maritime et leur a demandé, dès lors qu'ils étaient occupants sans droit ni titre, de procéder, dans un délai maximum de trois mois, à la démolition des constructions se trouvant illégalement sur ce domaine. Par ailleurs, des contraventions de grande voirie ont été dressées à l'encontre des occupants précités aux termes de procès-verbaux du 16 octobre 2013. Saisi par le préfet des Alpes-Maritimes, le tribunal administratif de Nice a, par un jugement du 24 octobre 2017, relaxé M. L... des fins de la poursuite pour la contravention de grande voirie engagée à son encontre par le préfet des Alpes-Maritimes. Par un arrêt du 28 juin 2019, la Cour a, à l'article 1er, annulé ce jugement du 24 octobre 2017, à l'article 2, condamné M. L... au paiement d'une amende de 1 500 euros, ainsi que d'une somme de 97,78 euros au titre des frais de procès-verbal et, à l'article 3, lui a enjoint de libérer sans délai la dalle en béton et la parcelle cadastrée DP 8a occupées par un cabanon de 42 m² et une cour privative de 56 m², à évacuer les matériaux issus de la démolition vers un centre de traitement agréé et à remettre dans son état naturel la dépendance du domaine public maritime qu'il occupe irrégulièrement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, dans un délai de quatre mois à compter de la date de notification de cet arrêt et, à l'article 4, autorisé l'administration, en cas d'inexécution par M. L... après le délai de quatre mois à compter de la date de notification de l'arrêt, à procéder d'office, aux frais et risques et périls de l'intéressé à l'évacuation des installations et ouvrages implantés sans autorisation sur le domaine public maritime. Par une décision du 13 février 2020, le Conseil d'Etat n'a pas admis le pourvoi formé par M. L... contre l'arrêt du 28 juin 2019.

Sur la liquidation de l'astreinte :

2. Lorsqu'il qualifie de contravention de grande voirie des faits d'occupation irrégulière d'une dépendance du domaine public, il appartient au juge administratif, saisi d'un procès-verbal accompagné ou non de conclusions de l'administration tendant à l'évacuation de cette dépendance, d'enjoindre au contrevenant de libérer sans délai le domaine public et, s'il l'estime nécessaire et au besoin d'office, de prononcer une astreinte. Lorsqu'il a prononcé une astreinte dont il a fixé le point de départ, le juge administratif doit se prononcer sur la liquidation de l'astreinte, en cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive. Il peut, le cas échéant, modérer l'astreinte provisoire ou la supprimer, même en cas d'inexécution de la décision juridictionnelle. Il peut notamment la supprimer pour le passé et l'avenir, lorsque la personne qui a obtenu le bénéfice de l'astreinte n'a pas pris de mesure en vue de faire exécuter la décision d'injonction et ne manifeste pas l'intention de la faire exécuter ou lorsque les parties se sont engagées dans une démarche contractuelle révélant que la partie bénéficiaire de l'astreinte n'entend pas poursuivre l'exécution de la décision juridictionnelle, sous réserve qu'il ne ressorte pas des pièces du dossier qui lui est soumis qu'à la date de sa décision, la situation que l'injonction et l'astreinte avaient pour objet de faire cesser porterait gravement atteinte à un intérêt public ou ferait peser un danger sur la sécurité des personnes ou des biens.

3. Il résulte de l'instruction et plus particulièrement d'un procès-verbal dressé le 21 octobre 2020 par un agent assermenté que le cabanon en cause était toujours présent sur le domaine public maritime. Par suite, l'article 3 de l'arrêt du 28 juin 2019, qui a été notifié à M. L... le 2 juillet 2019, n'a pas été exécuté. Ce dernier ne peut utilement se prévaloir du pourvoi en cassation qu'il a formé le 29 août 2019 devant le Conseil d'Etat pour justifier cette non exécution dès lors que ce pourvoi est dépourvu d'effet suspensif.

4. Le juge de l'exécution saisi aux fins de liquidation d'une astreinte est tenu par l'autorité de la chose jugée par l'arrêt dont l'exécution est demandée. S'il peut modérer ou supprimer cette astreinte, même en cas d'inexécution constatée, il n'a pas le pouvoir de remettre en cause les mesures décidées par le dispositif de la décision juridictionnelle dont l'exécution est demandée. Ainsi, M. L... ne peut utilement se prévaloir de la contestation devant le tribunal administratif de Nice, par la commune et des occupants, d'un arrêté pris par les services de l'Etat portant délimitation du domaine public et d'un rapport d'un expert géomètre rendu le 30 septembre 2020 selon lequel son cabanon ne se trouve pas sur le domaine public. Par ailleurs, l'arrêt du 28 juin 2019 ne peut être modifié en fonction de l'issue de cette instance actuellement pendante devant le tribunal dès lors qu'il est devenu définitif.

5. Il résulte de l'instruction que M. L... a déposé, le 1er février 2021, une demande de permis de démolir, soit quinze mois au-delà du délai imparti et postérieurement à la demande de liquidation présentée par les ministres. Dans ces conditions, cette circonstance n'est pas de nature à justifier une modération de l'astreinte provisoire.

6. Si M. L... entend se prévaloir des difficultés d'exécution de l'arrêt de la Cour eu égard à l'inaccessibilité de la plage de la Mala, en voiture ou pour une grue, il ne produit, dans la présente instance, aucune pièce à l'appui de ses allégations selon lesquelles la remise en état du domaine public serait impossible en l'absence d'un accès côté terre et qu'une dérogation à la destruction d'espèces protégées serait nécessaire dans le cadre d'un accès par la mer, en vue de la démolition des installations. En revanche, la ministre de la transition écologique et la ministre de la mer démontrent qu'une solution technique est possible et que l'exécution de l'arrêt de la Cour permettra à la plage de la Mala de retrouver son état naturel d'origine. Le caractère remarquable du site n'est pas de nature à faire obstacle à cette remise en état de lieux prononcée par l'arrêt de la Cour du 28 juin 2019.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. L... doit être condamné à verser à l'Etat la somme de 28 650 euros au titre de la liquidation de l'astreinte, pour la période courant du 2 novembre 2019, jusqu'à la date du présent arrêt, soit 573 jours.

D É C I D E :

Article 1er : M. L... versera à l'Etat la somme de 28 650 euros.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de la transition écologique, à la ministre de la mer et à M. D... L....

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2021, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Coutier, premier conseiller,

- Mme M..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 mai 2021.

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N° 17MA04805

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17MA04805
Date de la décision : 28/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Analyses

Domaine - Domaine public - Consistance et délimitation - Domaine public naturel - Consistance du domaine public maritime.

Domaine - Domaine public - Protection du domaine - Contraventions de grande voirie.

Procédure - Jugements - Exécution des jugements - Astreinte.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : REBUFAT-FRILET

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-05-28;17ma04805 ?
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