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23/03/2021 | FRANCE | N°19MA04415

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre, 23 mars 2021, 19MA04415


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler, la décision du 15 février 2017 du ministre de la justice rejetant sa demande du 7 février 2017 de réévaluation du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) qui lui est versée, à compter du 1er février 2017, ainsi que la décision implicite de rejet du directeur interrégional des services pénitentiaires PACA/Corse, née du silence gardé plus de deux mois sur son recours du 19 janvier

2017, reçu le 30, tendant à l'octroi de manière rétroactive au 1er janvier 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler, la décision du 15 février 2017 du ministre de la justice rejetant sa demande du 7 février 2017 de réévaluation du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) qui lui est versée, à compter du 1er février 2017, ainsi que la décision implicite de rejet du directeur interrégional des services pénitentiaires PACA/Corse, née du silence gardé plus de deux mois sur son recours du 19 janvier 2017, reçu le 30, tendant à l'octroi de manière rétroactive au 1er janvier 2016 de l'IFSE, et d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat les sommes correspondant aux montants de l'IFSE qu'elle estime lui être dus.

Par un jugement n° 1701956, 1702567 du 19 juillet 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 20 septembre 2019, Mme B... C..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1701956, 1702567 du 19 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

2°) d'annuler la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires PACA/Corse rejetant son recours gracieux réceptionné le 30 janvier 2017 tendant au réexamen de sa situation administrative, et au bénéfice rétroactif de l'IFSE avec la part fonctionnelle et celle de résultat de la PFR dont elle bénéficiait au 31 décembre 2015 ;

3°) d'annuler la décision du 15 février 2017 du ministre de la justice portant maintien de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) et rejet de son recours gracieux du 7 février 2017 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 455,50 euros et le versement des intérêts moratoires au taux légal correspondant au montant de l'IFSE ;

5°) d'enjoindre au ministre de la justice de procéder à un nouvel examen de sa situation administrative et de lui verser le montant adéquat de l'IFSE dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le principe du contradictoire a été méconnu au motif que si le tribunal a rouvert l'instruction close au 3 juin 2019 pour communiquer le mémoire de l'administration et renvoyé l'instance au 5 juillet 2019, le juge n'a pas communiqué son mémoire du 28 juin 2019 qui contenait des éléments nouveaux ;

- les premiers juges ont dénaturé les faits de l'espèce ;

- l'article 6 du décret du 20 mai 2014 a été méconnu ;

- c'est par une erreur manifeste d'appréciation que le tribunal a confondu un changement de fonctions avec une intégration dans un nouveau grade, dès lors que l'application du RIFSEEP ne peut préjudicier à l'agent au motif que l'article 2 du décret du 20 mai 2014 dispose que le niveau d'IFSE " est fixé selon le niveau de responsabilité et d'expertise requis dans l'expertise des fonctions " et que son article 3 indique que la valorisation de l'expérience de l'agent doit conduire à une valorisation à la hausse de son IFSE, et alors que ce décret pose dans son article 6 une garantie indemnitaire de conservation de toutes les indemnités de l'agent au 1er janvier 2016, ce que rappelle la circulaire du 5 décembre 2014 ;

- elle subit une rupture d'égalité de traitement ;

- son préjudice financier est justifié à hauteur de 10 455,50 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 août 2020, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 5 août 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 septembre 2021 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- l'arrêté du 3 juin 2015 pris pour l'application au corps interministériel des attachés d'administration de l'Etat des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me D... représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... fait appel du jugement n° 1701956, 1702567 du 19 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses requêtes tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 15 février 2017 du ministre de la justice rejetant sa demande du 7 février 2017 de réévaluation du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) qui lui est versée à compter du 1er février 2017, et à l'annulation de la décision de rejet du directeur interrégional des services pénitentiaires PACA/CORSE née du silence gardé plus de deux mois sur son recours du 19 janvier 2017, reçu le 30, tendant à l'octroi de manière rétroactive au 1er janvier 2016 de l'IFSE, et d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui verser les sommes correspondant aux montants de l'IFSE qu'elle estime lui être dus.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. D'une part, il appartient au juge d'appel non d'apprécier au titre de la régularité du jugement attaqué le bien-fondé des motifs par lesquels le tribunal s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Mme C... ne peut donc utilement se prévaloir de la dénaturation des faits que les premiers juges auraient commise pour contester la régularité du jugement attaqué.

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire ... " et aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ". Il résulte de ces dispositions, destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction, que la méconnaissance de l'obligation de communiquer tout mémoire contenant des éléments nouveaux, est en principe de nature à entacher la procédure d'irrégularité. Il n'en va autrement que dans le cas où il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, cette méconnaissance n'a pu préjudicier aux droits des parties.

4. Il ressort des pièces du dossier que, dans l'instance n° 1702567, elle a produit un mémoire réceptionné le 28 juin 2019, lequel a été visé dans le jugement attaqué. La circonstance que ce dernier mémoire de Mme C..., enregistré le 8 novembre 2018, n'a pas été communiqué au ministre n'affecte pas le respect du caractère contradictoire de la procédure à son égard, et ne saurait, dès lors, être utilement invoquée par elle. Ainsi, elle n'est pas fondée à faire valoir que, faute pour le tribunal d'avoir communiqué ce document à la partie adverse, les exigences qui découlent des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative, et qui sont destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction, ont été méconnues. Il suit de là que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est intervenu à la suite d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, l'annulation.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les conclusions d'excès de pouvoir :

5. Aux termes de l'article 1er du décret du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat : " Les fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 susvisée peuvent bénéficier, d'une part, d'une indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et, d'autre part, d'un complément indemnitaire annuel lié à l'engagement professionnel et à la manière de servir, dans les conditions fixées par le présent décret. / (...) ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est fixé selon le niveau de responsabilité et d'expertise requis dans l'exercice des fonctions. / Les fonctions occupées par les fonctionnaires d'un même corps ou statut d'emploi sont réparties au sein de différents groupes au regard des critères professionnels suivants : / 1° Fonctions d'encadrement, de coordination, de pilotage ou de conception ; / 2° Technicité, expertise, expérience ou qualification nécessaire à l'exercice des fonctions ; / 3° Sujétions particulières ou degré d'exposition du poste au regard de son environnement professionnel. / (...). ". Aux termes de l'article 3 du même décret : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise fait l'objet d'un réexamen : / 1° En cas de changement de fonctions ; / (...) ; / 3° En cas de changement de grade à la suite d'une promotion. ". Aux termes de l'article 5 du même décret : " L'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et le complément indemnitaire annuel sont exclusifs de toutes autres primes et indemnités liées aux fonctions et à la manière de servir, à l'exception de celles énumérées par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget. ". Aux termes de l'article 6 du même décret : " Lors de la première application des dispositions du présent décret, le montant indemnitaire mensuel perçu par l'agent au titre du ou des régimes indemnitaires liés aux fonctions exercées ou au grade détenu et, le cas échéant, aux résultats, à l'exception de tout versement à caractère exceptionnel, est conservé au titre de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise jusqu'à la date du prochain changement de fonctions de l'agent, sans préjudice du réexamen au vu de l'expérience acquise prévu au 2° de l'article 2. ". Il résulte de ces dispositions que l'agent conserve le montant indemnitaire qu'il percevait avant le classement de son poste au titre du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) et ce, jusqu'à son changement de fonctions ou de grade à la suite d'une promotion.

6. En premier lieu, d'une part, il ressort des pièces du dossier que Mme C... a été promue attachée d'administration principale de l'Etat au 1er janvier 2016 et qu'à cette date, elle a changé de fonctions puisqu'exerçant jusqu'en décembre 2015 au sein de l'administration de la protection judiciaire de la jeunesse, elle a été affectée dans l'administration pénitentiaire, en qualité de responsable administrative et financière à la maison centrale d'Arles. Dans ces conditions, par application des dispositions combinées de l'article 3 et de l'article 6 du décret du 20 mai 2014, l'intéressée n'est pas fondée à revendiquer le régime indemnitaire qui lui a été appliqué avant le 1er janvier 2016, date de sa promotion au grade supérieur de son corps, et de la première application du nouveau régime indemnitaire.

7. D'autre part, Mme C... a été affectée au 1er février 2017 à la Cour d'appel de Montpellier pour y exercer les nouvelles fonctions de chef de cabinet du procureur général. Par application de l'article 3 du décret du 20 mai 2014, elle n'est donc pas fondée à demander le bénéfice du système de prime antérieur à son changement de fonction au 1er février 2017.

8. Enfin, Mme C... n'est pas fondée à se prévaloir de la circulaire du 5 décembre 2014 relative à la mise en oeuvre du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (NOR: RDFF1427139C) qui est dépourvue de valeur réglementaire.

9. En deuxième lieu, le principe d'égalité de traitement des fonctionnaires s'apprécie entre fonctionnaires d'un même corps placés dans une situation identique. Mme C... n'établit pas qu'elle a fait l'objet d'une discrimination ou qu'elle aurait été défavorisée, au regard de l'application des règles rappelées au point 5, par rapport à des fonctionnaires placés dans une situation identique à la sienne. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que les modalités de calcul de son régime indemnitaire retenues depuis le 1er janvier 2016 par l'administration auraient méconnu le principe d'égalité de traitement avec des fonctionnaires appartenant au même corps.

10. Il résulte de ce qui vient d'être dit que les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme C... doivent être rejetées.

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

11. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'établit aucune faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat. Par suite, ses conclusions indemnitaires doivent être rejetées.

En ce qui concerne les conclusions aux fins d'injonction :

12. Le présent arrêt qui rejette les conclusions aux fins d'annulation et d'indemnisation présentées par Mme C... n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions aux fins d'injonctions présentées par Mme C... doivent être rejetées.

13. Il résulte de tout ce qui vient d'être dit que Mme C... n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué du tribunal administratif de Montpellier.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à Mme C... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 23 février 2021, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2021.

N° 19MA04415 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA04415
Date de la décision : 23/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Didier URY
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : PELGRIN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-03-23;19ma04415 ?
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