Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Hérault lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, a prononcé une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de quatre mois et lui a fait obligation de se présenter en préfecture tous les mardis après-midi afin de vérifier les diligences accomplies pour préparer le départ.
Par un jugement n° 1903955 en date du 3 septembre 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 décembre 2019 et le 28 mai 2020, Mme C..., représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 3 septembre 2019 du magistrat désigné du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2019 du préfet de l'Hérault ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de réexaminer sa situation et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire au séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
Sur l'irrégularité du jugement attaqué :
- le jugement attaqué a omis de répondre au moyen soulevé tiré de ce que le préfet s'est estimé en situation de compétence liée alors qu'il devait porter une appréciation sur sa situation ;
- le magistrat désigné a commis une erreur de droit et d'appréciation dans sa réponse au moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile ; en ne retenant pas les moyens tirés du défaut de base légale et de l'illégalité du retrait implicite de l'attestation d'asile ou de son abrogation postérieure, le jugement est entaché de telles erreurs ;
Sur le vice de procédure relatif à l'ensemble des décisions contestées :
- l'obligation de remise à l'intéressée du document prévu par le " règlement 2013/32 " ainsi que le prévoit le dernier alinéa de l'article R. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, laquelle est constitutive d'une garantie, n'a pas été respectée, dès lors qu'elle s'est vue remettre une version du guide du demandeur d'asile dans sa version de 2015, qui n'intègre pas les dernières réformes procédurales ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est insuffisamment motivée en droit et en fait dès lors qu'elle ne vise pas l'une des hypothèses de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vertu duquel son droit au maintien a pris fin ;
- en l'absence de retrait de l'attestation de demandeur d'asile, elle est entachée d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; en outre, le préfet s'est cru en situation de compétence liée alors qu'il devait porter une appréciation sur sa situation ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur la décision portant interdiction de retour :
- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 511-1 III, alinéa 4, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle n'a jamais fait l'objet d'une mesure d'éloignement et ne représente pas une menace pour l'ordre public ;
- elle est susceptible de porter gravement atteinte au droit d'asile par l'entrave de son retour sur le territoire français si le statut de réfugié lui est accordé ;
Sur la décision lui faisant obligation de se présenter en préfecture tous les mardis matin :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la demande de suspension :
- elle est fondée à invoquer les dispositions de l'article L. 743-3 du code précité dès lors qu'elle a des éléments sérieux à faire valoir devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA).
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mars 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
Mme C... a été admise à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 octobre 2019.
Par lettre du 26 février 2021, la Cour a, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, informé les parties de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant, en application de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la suspension de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire, dès lors que par décision du 16 août 2019, soit antérieurement à l'enregistrement de la présente requête, la CNDA a rejeté le recours formé par Mme C... à l'encontre de la décision de l'OFPRA du 3 juillet 2019 rejetant sa demande d'asile.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- la directive n° 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ;
- la directive n° 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., de nationalité géorgienne, née le 24 mai 1987, et mariée à un ressortissant albanais, a demandé l'asile. Cette demande a fait l'objet d'une décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 10 avril 2019. L'intéressée relève appel du jugement du 3 septembre 2019 du magistrat désigné du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 3 juillet 2019 portant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination, portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de quatre mois et lui faisant obligation de se présenter en préfecture tous les mardis après-midi afin de vérifier les diligences accomplies pour préparer le départ.
Sur la régularité du jugement :
2. Mme C... soutient que le jugement contesté ne répond pas au moyen soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire, tiré de ce que le préfet s'est estimé en situation de compétence liée. Cependant, il ressort du point 5 du jugement que le magistrat désigné a écarté ce moyen.
3. Il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens invoqués dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Pour demander l'annulation du jugement attaqué, Mme C... ne peut donc utilement se prévaloir des erreurs de droit, de fait ou d'appréciation que le magistrat désigné aurait commises en confirmant les décisions contestées.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne le moyen tiré du vice de procédure relatif à l'ensemble des décisions contestées :
4. A supposer que Mme C... ait entendu se prévaloir non pas du " règlement 2013/32 ", lequel n'existe pas, mais de l'article 5 de la directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale, un tel moyen est inopérant dès lors que ce texte a été régulièrement transposé en droit interne au dernier alinéa de l'article R. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par l'intervention du décret n° 2015-1166 du 21 septembre 2015 pris pour l'application de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile.
5. L'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 énonce que : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement et notamment : / a) des objectifs du présent règlement (...) / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée (...) Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent (...) b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères (...) c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5 (...) ".
6. L'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit en outre que : " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l'Etat responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d'engagements identiques à ceux prévus par le même règlement, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Tout demandeur reçoit, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend, une information sur ses droits et obligations en application dudit règlement, dans les conditions prévues à son article 4. / (...) ". Aux termes de l'article R. 741-4 du même code, dans sa rédaction applicable : " (...) Il est remis au demandeur d'asile l'imprimé mentionné à l'article R. 723-1 lui permettant d'introduire sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides selon la procédure prévue au même article. Il lui est également remis un document d'information sur la procédure de demande d'asile, sur ses droits et sur les obligations qu'il doit respecter au cours de la procédure, sur les conséquences que pourrait avoir le non-respect de ses obligations ou le refus de coopérer avec les autorités et sur les moyens dont il dispose pour l'aider à introduire sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Ce document l'informe également sur ses droits et sur les obligations au regard des conditions d'accueil, ainsi que sur les organisations qui assurent une assistance aux demandeurs d'asile. Cette information se fait dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser que le demandeur d'asile la comprend. (...) ".
7. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tous cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature desdites informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les stipulations précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
8. Eu égard à l'objet du document d'information, visé par les stipulations et dispositions citées ci-dessus sur les droits et obligations des demandeurs d'asile, sur les organisations susceptibles de leur procurer une assistance juridique, de les aider ou de les informer sur les conditions d'accueil qui peuvent leur être proposées, la remise de ce document doit intervenir au début de la procédure d'examen des demandes d'asile, ainsi que le prévoient ces dispositions, pour permettre aux intéressés de présenter utilement leur demande aux autorités compétentes, dans le respect notamment des délais prévus. En revanche, le défaut de remise de ce document ne peut être utilement invoqué à l'appui d'un recours mettant en cause la légalité de la décision par laquelle le préfet statue, en fin de procédure, après intervention de l'OFPRA, comme c'est le cas en l'espèce. Par suite, le moyen tiré de ce que le guide remis à Mme C... dans sa version de novembre 2015 n'était pas à jour au regard des dernières évolutions règlementaires doit être écarté comme inopérant.
En ce qui concerne les moyens soulevés à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) constituent une mesure de police... ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ". Le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose en outre que : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) ".
10. Après avoir visé les dispositions textuelles dont il a été fait application, notamment les articles L. 511-1, L. 723-2 et L. 743-1 à L. 743-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la décision contestée a mentionné, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressée d'en comprendre les motifs, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. A cet égard, elle précise en particulier que le droit au maintien sur le territoire français de Mme C... a pris fin depuis le 16 mai 2019, date de notification de la décision de rejet de sa demande d'asile par l'OFPRA, sans que le préfet soit tenu de mentionner que cette demande avait été examinée selon la procédure prioritaire prévue au I de l'article L. 723-2 en sa qualité de ressortissant originaire d'un pays sûr, ou une décision de retrait de l'attestation de demandeur d'asile, qui n'avait au demeurant pas été prise. L'intéressée a ainsi été mise en mesure de comprendre les motifs pour lesquels l'obligation de quitter le territoire français qui lui était imposée était fondée sur le rejet de sa demande d'asile par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides. Elle n'est donc pas fondée à soutenir que la décision litigieuse serait insuffisamment motivée, faute d'avoir précisé " l'hypothèse " en vertu de laquelle son droit au maintien sur le territoire avait pris fin.
11. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse (...), lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ". Aux termes de l'article L. 743-2 de ce code : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) / 7° L'office a pris une décision de rejet dans les cas prévus au I et au 5° du III de l'article L. 723-2 ; (...) ". Aux termes de l'article L. 723-2 du même code : " I. - L'office statue en procédure accélérée lorsque : / 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr en application de l'article L. 722-1 (...) ".
12. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile formulée par Mme C..., ressortissante de Géorgie, pays considéré comme un pays d'origine sûr en application de l'article L. 722-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a été rejetée par l'OFPRA, statuant en procédure accélérée au titre de l'article L. 723-2 du code précité, le 10 avril 2019. Dans ces conditions, elle ne bénéficiait plus du droit de se maintenir sur le territoire français et le préfet de l'Hérault pouvait en conséquence, en application des dispositions précitées, édicter à son encontre une mesure d'éloignement le 3 juillet 2019, sans qu'il soit nécessaire pour l'autorité préfectorale de prendre une décision portant retrait ou refus de renouvellement d'une attestation de demande d'asile.
13. En troisième lieu, si, dans la mesure d'éloignement contestée, le préfet a fait mention du rejet précité par l'OFPRA de la demande d'asile de Mme C..., il ne s'est pas cru lié par celui-ci et a pris en considération les éléments caractérisant la situation personnelle et familiale de la requérante, tels que portés à la connaissance de l'autorité préfectorale et cités dans sa décision. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
En ce qui concerne les moyens soulevés à l'encontre du pays de destination :
14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision du préfet de l'Hérault portant obligation de quitter le territoire français.
15. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Selon l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Pour l'application des stipulations et des dispositions précitées, il appartient à l'autorité administrative de s'assurer que la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger ne l'expose pas à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
16. L'obligation de quitter le territoire français édictée à l'encontre de la requérante ne fixe par elle-même aucun pays de destination. Le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut dès lors être utilement soulevé à l'encontre de cette décision.
En ce qui concerne les moyens soulevés à l'encontre de l'interdiction de retour de quatre mois :
17. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision du préfet de l'Hérault portant obligation de quitter le territoire français.
18. En deuxième lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".
19. L'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'examen de l'un d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.
20. Il ressort de la motivation de cette décision que le préfet de l'Hérault s'est fondé sur les critères mentionnés au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour prononcer la mesure d'interdiction de retour sur le territoire français et a notamment indiqué que Mme C... s'était maintenue sur le territoire français malgré la décision de l'OFPRA rejetant sa demande d'asile. La double circonstance que Mme C... n'avait jamais fait l'objet d'une mesure d'éloignement et que sa présence ne constituait pas une menace pour l'ordre public ne fait pas obstacle à ce que le préfet prenne une interdiction de retour de quatre mois. Le moyen tiré de l'erreur d'appréciation doit, par suite, être écarté.
21. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 16 août 2019, la CNDA a rejeté le recours présenté par Mme C... contre la décision de l'OFPRA du 3 juillet 2019. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision en litige serait susceptible de faire entrave à son retour sur le territoire français si le statut de réfugié lui serait accordé, est en tout de cause, inopérant.
En ce qui concerne les moyens soulevés à l'encontre de l'obligation de se présenter en préfecture une fois par semaine :
22. Aux termes de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel un délai de départ volontaire a été accordé en application du II de l'article L. 511-1 peut, dès la notification de l'obligation de quitter le territoire français, être astreint à se présenter à l'autorité administrative ou aux services de police ou aux unités de gendarmerie pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ. ".
23. La décision contestée qui vise l'article L. 513-4 du code précité est suffisamment motivée, notamment par la motivation afférente aux autres décisions contestées.
24. Si Mme C... soutient que la décision litigieuse qui lui fait obligation de se présenter une fois par semaine à la préfecture de l'Hérault, la contrarie dans les démarches médicales de son époux et de sa fille, tous deux atteints de saturnisme, elle n'apporte toutefois aucun élément de nature à préciser les difficultés induites par une telle obligation. Dans ces conditions, et en l'absence de toute justification, elle n'est pas fondée à soutenir que cette mesure serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Sur les conclusions à fin de suspension :
25. Aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans le cas où le droit de se maintenir sur le territoire a pris fin en application des 4° bis ou 7° de l'article L. 743-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné statuant sur le recours formé en application de l'article L. 512-1 contre l'obligation de quitter le territoire français de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin fait droit à la demande de l'étranger lorsque celui-ci présente des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire durant l'examen de son recours par la cour. ".
26. En l'espèce, la CNDA a, par décision du 16 août 2019, soit antérieurement à l'enregistrement de la présente requête, rejeté le recours formé par Mme C... à l'encontre de la décision de l'OFPRA du 3 juillet 2019 rejetant sa demande d'asile. Par suite, les conclusions de la requérante dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant, en application de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la suspension de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire dont elle a fait l'objet, sont irrecevables et doivent être rejetées comme telles.
27. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être également rejetées ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'allocation à son conseil de frais liés au litige.
D É C I D E :
Article 1er : La requête présentée par Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., à Me A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2021, où siégeaient :
- M. Lascar, président,
- Mme E..., présidente assesseure,
- Mme D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 mars 2021.
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N° 19MA05558
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