La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/02/2021 | FRANCE | N°19MA01098

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 16 février 2021, 19MA01098


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... G... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 22 septembre 2016 par laquelle le président du centre communal d'action sociale d'Agde l'a placé en congé pour accident du travail du 31 mai au 30 juin 2016 seulement puis en maladie ordinaire du 20 juillet au 23 août 2016 et d'enjoindre au président de ce centre communal de reconnaître comme imputables au service ses arrêts de travail et ses soins du 20 juillet 2016 jusqu'au 23 août 2016.

Par jugement n° 1605

493 du 28 décembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... G... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 22 septembre 2016 par laquelle le président du centre communal d'action sociale d'Agde l'a placé en congé pour accident du travail du 31 mai au 30 juin 2016 seulement puis en maladie ordinaire du 20 juillet au 23 août 2016 et d'enjoindre au président de ce centre communal de reconnaître comme imputables au service ses arrêts de travail et ses soins du 20 juillet 2016 jusqu'au 23 août 2016.

Par jugement n° 1605493 du 28 décembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 mars 2019 et par des mémoires complémentaires enregistrés les 23 juillet 2019 et 29 janvier 2021, M. G..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 décembre 2018 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler la décision du 22 septembre 2016 du président du centre communal d'action sociale d'Agde ;

3°) d'enjoindre à titre principal, au président du centre communal d'action sociale d'Agde de le placer en congé pour accident du travail du 20 juillet 2016 au 23 août 2016 et de fixer dans sa décision un taux d'incapacité permanente partielle de 2 % avec un taux préexistant de 5 %, à titre subsidiaire, de prendre une nouvelle décision ;

4°) de mettre à la charge du centre communal d'action sociale d'Agde la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ;

- la décision en litige est insuffisamment motivée en tant qu'elle refuse de reconnaître l'imputabilité au service de son arrêt de travail du 20 juillet au 23 août 2016 ;

- la commission de réforme était irrégulièrement composée, dès lors qu'un médecin non agréé a siégé lors de la séance de la commission de réforme et qu'aucun médecin spécialiste agréé n'était présent, ce qui l'a privé d'une garantie ;

- l'incomplétude du dossier soumis à la commission de réforme aurait dû amener cette commission à faire usage des pouvoirs d'instruction qu'elle tient de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 ;

- il n'est pas établi que le médecin de prévention ait été informé conformément à l'article 15 de l'arrêté du 4 août 2004, ce qui l'a privé d'une garantie ;

- la décision en litige en tant qu'elle le place en congé maladie ordinaire à compter du 20 juillet 2016 est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle omet de fixer le taux d'incapacité permanente partielle de 2 % reconnu par la commission de réforme.

Par des mémoires en défense enregistrés les 2 mai 2019 et 29 janvier 2021, le centre communal d'action sociale d'Agde, représenté par la SCP d'avocats CGCB, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du requérant la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- à titre principal, la requête est irrecevable dès lors qu'elle est tardive et insuffisamment motivée ;

- à titre subsidiaire, les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- les conclusions de M. A...,

- et les observations de Me D... représentant le centre communal d'action sociale d'Agde.

Considérant ce qui suit :

1. M. G..., technicien principal de 1ère classe exerçant ses fonctions de gestionnaire de maintenance et d'assistance informatique au centre communal d'action sociale d'Agde, a été victime le 31 mai 2016 d'une chute en arrière sur le côté droit en rangeant un ordinateur qu'il tenait dans les mains. Cet accident, après avis du 8 septembre 2016 de la commission de réforme, a été reconnu imputable au service, par la décision en litige du 22 septembre 2016, du 31 mai au 30 juin 2016, date de sa consolidation. Cette décision a pris en charge au titre de la maladie ordinaire ses arrêts de travail ultérieurs du 20 juillet au 23 août 2016, date de sa reprise d'activité. M. G... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler cette décision en tant qu'elle prend en charge ses arrêts de travail au titre de la législation des accidents du travail jusqu'au 30 juin 2016 seulement et d'enjoindre au président de ce centre communal de reconnaître comme imputables au service ses arrêts de travail et ses soins du 20 juillet 2016 jusqu'au 23 août 2016. Par le jugement dont le requérant relève appel, les premiers juges ont rejeté sa demande.

Sur les fins de non-recevoir opposées par le centre communal d'action sociale à la requête d'appel de M. G... :

2. Le jugement attaqué du 28 décembre 2018 a été notifié au requérant par lettre du 9 janvier 2019 du greffe du tribunal de Montpellier, dont ce dernier a accusé réception le 10 janvier 2019. Par suite, la requête de M. G..., enregistrée le 7 mars 2019 au greffe de la Cour, n'était pas tardive.

3. La requête de M. G... qui contient une critique du jugement attaqué et qui conclut à l'annulation de ce jugement, est suffisamment motivée. Par suite, le centre communal d'action sociale d'Agde n'est pas fondé à soutenir que la requête de M. G... serait irrecevable pour ces deux motifs.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. D'une part, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...)2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...) Toutefois, si la maladie provient (...) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme (...) ". Aux termes de l'article 108-2 de cette loi dans sa rédaction alors en vigueur, le service de médecine préventive " (...) est consulté par l'autorité territoriale sur les mesures de nature à améliorer l'hygiène générale des locaux, la prévention des accidents et des maladies professionnelles et l'éducation sanitaire (...) " et " (...) a pour mission d'éviter toute altération de l'état de santé des agents du fait de leur travail, notamment en surveillant les conditions d'hygiène du travail, les risques de contagion et l'état de santé des agents (...) ".

5. D'autre part, aux termes de l'article 9 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le médecin du service de médecine préventive prévu à l'article 108-2 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée compétent à l'égard du fonctionnaire dont le cas est soumis au comité médical est informé de la réunion et de son objet. Il peut obtenir s'il le demande communication du dossier de l'intéressé. Il peut présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion. Il remet obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus aux articles 16, 23, 24 et 33 ci-dessous. L'intéressé et l'administration peuvent faire entendre le médecin de leur choix par le comité médical. ". Aux termes de l'article 16 de ce décret alors applicable : " Sous réserve du deuxième alinéa du présent article, la commission de réforme prévue par le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 modifié relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales est obligatoirement consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 57 (2°, 2e alinéa) de la loi du 26 janvier 1984 susvisée. Le dossier qui lui est soumis doit comprendre un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive compétent à l'égard du fonctionnaire concerné. Lorsque l'administration est amenée à se prononcer sur l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident, elle peut, en tant que de besoin, consulter un médecin expert agréé (...) ". L'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière prévoit que la commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis et qu'elle peut faire procéder à toutes mesures d'instructions, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires.

6. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé l'intéressé d'une garantie.

7. Il est constant que la commission de réforme a apprécié l'imputabilité au service du prolongement des congés de maladie du requérant sans que le médecin de prévention ait été informé de la date de la séance à laquelle devait être examinée la situation de M. G... et sans que ce dernier ne remette ainsi le rapport écrit prévu par l'article 9 du décret du 30 juillet 1987, dès lors que le centre communal d'action sociale d'Agde affirme lui-même que le poste de médecin de prévention de ce centre était vacant à la date de la réunion de la commission de réforme le 8 septembre 2016 et sans que le centre, saisi d'une mesure d'instruction de la Cour sur ce point, établisse avoir accompli les diligences nécessaires pour pourvoir ce poste à cette date et par suite, sans établir que la consultation de ce médecin de prévention constituait en l'espèce une formalité impossible. La circonstance, invoquée par le centre communal, que le requérant a été examiné par un médecin agréé dont le rapport a été communiqué à la commission de réforme, n'est pas de nature à suppléer l'absence du rapport du médecin du service de médecine préventive, dès lors que les missions de ce dernier, notamment rappelées à l'article 108-2 de la loi du 26 janvier 1984, ne se confondent pas avec celles du médecin agréé. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que ce rapport du médecin agréé a été établi le 7 juillet 2016 à partir d'une expertise médicale réalisée le 28 juin 2016 pour la seule première période de congés du requérant du 31 mai 2016 au 30 juin 2016 reconnue imputable au service et qu'il ne comportait aucune information sur l'imputabilité au service de son second arrêt de travail pour la période litigieuse du 20 juillet au 23 août 2016 et ce, sans que la commission de réforme, saisie le 4 août 2016 et nécessairement informée de la prolongation des arrêts maladie de M. G..., ne fasse usage sur ce point des pouvoirs d'instruction qu'elle tient de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que le requérant s'est vu reconnaître par une décision du 5 novembre 2015 par la maison des personnes handicapées de l'Hérault le statut de travailleur handicapé en raison de ses possibilités réduites de trouver ou de conserver un emploi eu égard à son handicap, qui comportait des restrictions quant à l'exercice de ses activités professionnelles pour une première période s'étendant du 1er juin 2015 au 31 mai 2020. Les observations écrites du médecin du service de médecine préventive auraient ainsi permis d'éclairer les membres de la commission de réforme sur l'existence ou non de conditions particulières de travail le jour de la reprise d'activités du requérant, soit le 20 juillet 2016. Dans les circonstances de l'espèce, ce vice de procédure a ainsi privé M. G... d'une garantie sans que le centre communal d'action sociale puisse invoquer la circonstance, à la supposer établie, que cette irrégularité n'a pas été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision en litige refusant de reconnaître l'imputabilité de ses arrêts de travail du 20 juillet au 23 août 2016. Par suite, le requérant est fondé à soutenir que la décision en litige a été prise au terme d'une procédure irrégulière et à en demander l'annulation pour ce motif.

8. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de M. G..., que le jugement du 28 décembre 2018 du tribunal administratif de Montpellier et la décision du 22 septembre 2016 par laquelle le président du centre communal d'action sociale d'Agde l'a placé en congé de maladie ordinaire du 20 juillet au 23 août 2016 doivent être annulés.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

9. Le présent arrêt, par lequel la Cour fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par M. G..., n'implique pas nécessairement, eu égard au motif d'annulation retenu, que le centre communal d'action sociale d'Agde prenne une nouvelle décision dans un sens déterminé, mais seulement que la situation de M. G... soit réexaminée dans des conditions régulières par la commission de réforme. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées à titre principal par M. G..., tendant à ce que le président du centre communal d'action sociale d'Agde le place en congé pour accident du travail du 20 juillet 2016 au 23 août 2016 et fixe dans sa décision un taux d'incapacité permanente partielle de 2 % avec un taux préexistant de 5 % doivent être rejetées.

10. Il y a seulement lieu d'enjoindre au centre communal d'action sociale d'Agde, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de réexaminer la situation de M. G... en procédant à une nouvelle consultation, pour la période du 20 juillet au 23 août 2016, de la commission de réforme selon des modalités régulières, dans un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une quelconque somme soit mise à la charge de M. G... qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre communal d'action sociale d'Agde la somme de 2 000 euros à verser à M. G... au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 28 décembre 2018 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : La décision du 22 septembre 2016 du président du centre communal d'action sociale d'Agde en tant qu'elle place M. G... en congé de maladie ordinaire du 20 juillet au 23 août 2016 est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au centre communal d'action sociale d'Agde de réexaminer la situation de M. G... pour la période du 20 juillet au 23 août 2016 dans le délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le centre communal d'action sociale d'Agde versera la somme de 2 000 euros à M. G... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions présentées par le CCAS d'Agde sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... G... et au centre communal d'action sociale d'Agde.

Délibéré après l'audience du 2 février 2021, où siégeaient :

- Mme B..., présidente assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222- 26 du code de justice administrative,

- Mme F..., première conseillère,

- M. Mouret, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 16 février 2021.

6

N° 19MA01098


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA01098
Date de la décision : 16/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIMON
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : DHEROT

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-02-16;19ma01098 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award