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04/02/2021 | FRANCE | N°19MA05780

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 04 février 2021, 19MA05780


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... F... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 27 août 2019 du préfet de l'Hérault lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il peut être reconduit d'office et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement n° 1904747 du 13 novembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure

devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2019, M. F..., représenté par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... F... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 27 août 2019 du préfet de l'Hérault lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il peut être reconduit d'office et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement n° 1904747 du 13 novembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2019, M. F..., représenté par M. D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 13 novembre 2019 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 août 2019 du préfet de l'Hérault ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de réexaminer sa situation dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

5°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros à verser à Me D..., en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- sa demande de première instance n'était pas tardive, car il n'a pas été informé de la possibilité de former un recours devant le chef de l'établissement pénitentiaire où il était incarcéré ;

- la procédure qui aurait dû lui être appliquée était celle de l'article L. 512-1 I bis ;

- l'administration ne lui a pas accordé de délai pour quitter le territoire français alors qu'il dispose de garanties de représentation ;

- l'administration a commis une erreur de droit en prenant à son encontre une interdiction de retour en se fondant uniquement sur la condamnation dont il fait l'objet ;

- l'interdiction de retour n'est pas motivée ;

- il ne représente pas une menace pour l'ordre public ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas donné lieu à un examen circonstancié de la situation de l'intéressé.

Par un mémoire enregistré le 13 mars 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. F..., ressortissant Géorgien, a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 27 août 2019 du préfet de l'Hérault lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il peut être reconduit d'office et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Par un jugement du 13 novembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande, en raison de son irrecevabilité, celle-ci ayant été formée au-delà du délai de recours de 48 heures fixé par l'article L. 512-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le requérant relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. F... a présenté une demande d'aide juridictionnelle. Dès lors, ses conclusions tendant à l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle sont dépourvues d'objet.

Sur la régularité du jugement :

3. Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Aux termes de l'article R. 776-1 du même code : " Sont présentées, instruites et jugées selon les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles du présent code, sous réserve des dispositions du présent chapitre, les requêtes dirigées contre : / 1° Les décisions portant obligation de quitter le territoire français, prévues au I de l'article L. 511-1 et à l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les décisions relatives au séjour notifiées avec les décisions portant obligation de quitter le territoire français ; / 2° Les décisions relatives au délai de départ volontaire prévues au II de l'article L. 511-1 du même code ; / 3° Les interdictions de retour sur le territoire français prévues au III du même article et les interdictions de circulation sur le territoire français prévues à l'article L. 511-3-2 du même code ; / 4° Les décisions fixant le pays de renvoi prévues à l'article L. 513-3 du même code ; / (...) / 6° Les décisions d'assignation à résidence prévues aux articles L. 561-2, L. 744-9-1 et L. 571-4 du même code. / Sont instruites et jugées dans les mêmes conditions les conclusions tendant à l'annulation d'une autre mesure d'éloignement prévue au livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à l'exception des arrêtés d'expulsion, présentées en cas de placement en rétention administrative, en cas de détention ou dans le cadre d'une requête dirigée contre la décision d'assignation à résidence prise au titre de cette mesure. / Sont instruites et jugées dans les mêmes conditions les conclusions présentées dans le cadre des requêtes dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français mentionnées au 1° du présent article, sur le fondement de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, tendant à la suspension de l'exécution de ces mesures d'éloignement ".

4. Par ailleurs, l'article L. 512-2 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Dès notification de l'obligation de quitter le territoire français, l'étranger auquel aucun délai de départ volontaire n'a été accordé est mis en mesure, dans les meilleurs délais, d'avertir un conseil, son consulat ou une personne de son choix. L'étranger est informé qu'il peut recevoir communication des principaux éléments des décisions qui lui sont notifiées en application de l'article L. 511-1. Ces éléments lui sont alors communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend ".

5. Enfin, d'une part, aux termes de l'article R. 776-19 du code de justice administrative : " Si, au moment de la notification d'une décision mentionnée à l'article R. 776-1, l'étranger est retenu par l'autorité administrative, sa requête peut valablement être déposée, dans le délai de recours contentieux, auprès de ladite autorité administrative ". D'autre part, il résulte des dispositions combinées des articles R. 776-29 et R. 776-31 du même code, issues du décret du 28 octobre 2016 pris pour l'application du titre II de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France, que les étrangers ayant reçu notification d'une décision mentionnée à l'article R. 776-1 du code de justice administrative alors qu'ils sont en détention, ont la faculté de déposer leur requête, dans le délai de recours contentieux, auprès du chef de l'établissement pénitentiaire.

6. Pour rendre opposable le délai de recours contentieux, l'administration est tenue, en application de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, de faire figurer dans la notification de ses décisions la mention des délais et voies de recours contentieux ainsi que les délais des recours administratifs préalables obligatoires. Elle n'est en principe pas tenue d'ajouter d'autres indications, notamment les délais de distance, la possibilité de former des recours gracieux et hiérarchiques facultatifs ou la possibilité de former une demande d'aide juridictionnelle. Si des indications supplémentaires sont toutefois ajoutées, ces dernières ne doivent pas faire naître d'ambiguïtés de nature à induire en erreur les destinataires des décisions dans des conditions telles qu'ils pourraient se trouver privés du droit à un recours effectif.

7. En cas de rétention ou de détention, lorsque l'étranger entend contester une décision prise sur le fondement du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour laquelle celui-ci a prévu un délai de recours bref, notamment lorsqu'il entend contester une décision portant obligation de quitter le territoire sans délai, la circonstance que sa requête ait été adressée, dans le délai de recours, à l'administration chargée de la rétention ou au chef d'établissement pénitentiaire, fait obstacle à ce qu'elle soit regardée comme tardive, alors même qu'elle ne parviendrait au greffe du tribunal administratif qu'après l'expiration de ce délai de recours.

8. Depuis l'entrée en vigueur des dispositions mentionnées au point 5 notamment, pour les étrangers détenus, des dispositions du décret du 28 octobre 2016 précité, il incombe à l'administration, pour les décisions présentant les caractéristiques mentionnées ci-dessus, de faire figurer, dans leur notification à un étranger retenu ou détenu, la possibilité de déposer sa requête dans le délai de recours contentieux auprès de l'administration chargée de la rétention ou du chef de l'établissement pénitentiaire.

9. Il ressort des pièces du dossier qu'alors que M. F... était incarcéré au centre pénitentiaire de Villeneuve-lès Maguelone à la date de la notification de l'arrêté en litige, soit le 4 septembre 2019, il n'a pas été informé lors de cette notification, de la possibilité de former un recours directement auprès du chef de l'établissement pénitentiaire, en application de l'article R. 776-31 du code de justice administrative. Dans ces conditions, eu égard à la situation particulière de personne détenue de M. F..., la notification réalisée le 4 septembre 2019 faisait obstacle à l'exercice d'un recours effectif et ne pouvait avoir pour effet de faire courir les délais de recours à son égard. C'est donc à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande, enregistrée le 7 septembre 2019, comme irrecevable car tardive. Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens tirés de l'irrégularité de la procédure suivie devant le tribunal, M. F... est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué.

10. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... F... devant le tribunal administratif de Montpellier.

Sur la légalité de l'arrêté du 27 août 2019 :

En ce qui concerne les conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français :

11. En premier lieu, par un arrêté du 26 août 2019, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Hérault n° 109 du même jour, et qui en tout état de cause visait la décision portant nomination de l'intéressée, Mme C... B..., directrice des migrations et de l'intégration, a reçu délégation pour " toute décision ayant trait à une mesure d'éloignement concernant les étrangers séjournant irrégulièrement sur le territoire français et les décisions en matière de rétention administrative ". Par suite, le moyen tiré de l'absence de délégation régulière de la signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté comme manquant en fait.

12. En deuxième lieu, la décision contestée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, et le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit donc être écarté.

13. En troisième lieu, l'article L511-1I. du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants...6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité... ". Lorsque, dans l'hypothèse mentionnée à l'article L. 311-6, un refus de séjour a été opposé à l'étranger, la mesure peut être prise sur le seul fondement du présent 6°.

14. L'article R. 723-19 du code de justice administrative dispose : " I.- La décision du directeur général de l'office est notifiée à l'intéressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception....III.- La date de notification de la décision de l'office et, le cas échéant, de la Cour nationale du droit d'asile qui figure dans le système d'information de l'office et est communiquée au préfet compétent et au directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au moyen de traitements informatiques fait foi jusqu'à preuve du contraire. ". Il ressort du système d'information TelelOfpra que la décision de rejet de l'OFPRA de sa demande tendant à se voir reconnaître le statut de réfugié a été notifiée le 20 juin 2019 au requérant, qui n'apporte pas la preuve contraire. M. F..., qui provient d'un pays sûr, ne bénéficiait plus du droit à se maintenir à la date de la décision contestée et pouvait légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français.

En ce qui concerne les conclusions dirigées contre la décision de ne pas accorder à M. F... un délai pour quitter le territoire français :

15. L'article 511-1 II f°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français... 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au deuxième alinéa de l'article L. 611-3, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 513-4, L. 513-5, L. 552-4, L. 561-1, L. 561-2 et L. 742-2... . ".

16. Le requérant est dépourvu de passeport, qu'il prétend avoir perdu, et se borne à se déclarer hébergé par sa compagne. S'il était encore incarcéré à la date de l'arrêté contesté, le terme de sa peine était proche. Le préfet de l'Hérault n'a pas méconnu les dispositions précitées en estimant qu'il ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes et en décidant de ne pas lui accorder de délai pour quitter le territoire français.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour :

17. M. F... n'établissant pas l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, ainsi qu'il a été dit précédemment, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision doit être écarté.

18. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français (...) / Lorsque l'étranger ne faisant pas l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative peut prononcer une interdiction de retour pour une durée maximale de deux ans à compter de sa notification. / Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. / Lorsqu'un délai de départ volontaire a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour, prenant effet à l'expiration du délai, pour une durée maximale de deux ans à compter de sa notification. / Lorsque l'étranger faisant l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire ou alors qu'il était obligé de quitter sans délai le territoire français ou, ayant déféré à l'obligation de quitter le territoire français, y est revenu alors que l'interdiction de retour poursuit ses effets, l'autorité administrative peut prolonger cette mesure pour une durée maximale de deux ans. / L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

19. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux.

20. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.

21. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les motifs qu'invoque l'autorité compétente sont de nature à justifier légalement dans son principe et sa durée la décision d'interdiction de retour et si la décision ne porte pas au droit de l'étranger au respect de sa vie privée et familiale, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise.

22. D'une part, l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision portant interdiction de retour, et qui attestent de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi.

23. D'autre part, l'administration ne s'est pas bornée à relever que M. F... avait fait l'objet d'une condamnation à une peine d'emprisonnement ferme de six mois, mais a souligné que cette condamnation avait été prononcée pour des faits de vol en réunion, violence avec usage ou menace d'une arme sans incapacité. Elle ne s'est ainsi pas estimée liée par une condamnation pénale, mais a procédé à un examen complet de la situation de l'intéressé.

24. Enfin, les motifs qu'invoque le préfet de l'Hérault, et en particulier la menace pour l'ordre public que représente le requérant en raison des faits de vol et de violence avec arme dont il s'est rendu coupable, sont de nature à justifier une interdiction de retour pour une durée d'un an.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement :

25. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " et aux termes de l'article L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établir que sa vie ou sa liberté sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

26. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées n'est pas assorti de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

27. Il résulte de ce qui précède que M. A... F... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté attaqué. Par suite ses conclusions accessoires aux fins d'injonctions et fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative et l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 13 novembre 2019 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions présentées par M. F... devant le tribunal administratif de Montpellier et devant la Cour est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. A... F... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2021, où siégeaient :

- M. Poujade, président,

- M. E..., président assesseur,

- Mme Baizet, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe 4 février 2021.

4

N° 20MA05780

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19MA05780
Date de la décision : 04/02/2021
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : MOULIN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-02-04;19ma05780 ?
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