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19/01/2021 | FRANCE | N°19MA03831

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 19 janvier 2021, 19MA03831


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... E... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2017 par lequel le maire de Banyuls-sur-Mer a délivré un permis de construire modificatif à la SCV BC.

Par un jugement n° 1705655 du 11 juin 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 11 août 2019 et le 24 avril 2020, M. E..., représenté par la SCP HG et C, demande à la cour :

) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 11 juin 2019 ;

2°) d'annuler l'arr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... E... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2017 par lequel le maire de Banyuls-sur-Mer a délivré un permis de construire modificatif à la SCV BC.

Par un jugement n° 1705655 du 11 juin 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 11 août 2019 et le 24 avril 2020, M. E..., représenté par la SCP HG et C, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 11 juin 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Banyuls-sur-Mer du 13 octobre 2017 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Banyuls-sur-Mer et de la SCV BC la somme de 2 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;

- compte tenu de l'ampleur des modifications, le projet litigieux rendait nécessaire le dépôt d'une nouvelle demande de permis de construire ;

- le permis litigieux a implicitement mais nécessairement retiré les permis initial et modificatif antérieurement délivrés à la société pétitionnaire ;

- la composition du dossier de demande est irrégulière ;

- le projet litigieux méconnaît la règle de hauteur fixée par le règlement du lotissement ;

- le permis contesté a été obtenu par fraude.

Par des mémoires en défense enregistrés le 4 novembre 2019 et le 19 mai 2020, la SCV BC, représentée par Me F..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. E... ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;

- les moyens invoqués par M. E... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 mai 2020, la commune de Banyuls-sur-Mer, représentée par la SCP BDPS, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance de M. E... est irrecevable dès lors qu'il ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;

- les moyens invoqués par M. E... ne sont pas fondés.

Une ordonnance de clôture immédiate de l'instruction a été émise le 2 octobre 2020.

Par une lettre du 12 novembre 2020, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible de mettre en oeuvre la procédure prévue par l'article L. 6005-1 du code de l'urbanisme et invitées à présenter leurs observations sur ce point.

Des observations ont été présentées les 13, 19 et 25 novembre 2020, respectivement pour M. E..., pour la SCV BC et pour la commune de Banyuls-sur-Mer.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant M. E....

Considérant ce qui suit :

1. Le maire de Banyuls-sur-Mer a, par un arrêté du 4 février 2016, délivré à la SCV BC un permis de construire, valant division parcellaire, en vue de l'édification de trois maisons d'habitation sur un terrain situé dans le lotissement " La Salette III " dont la création a été autorisée par un permis d'aménager du 13 août 2012. Par un arrêté du 6 septembre 2016, cette société a obtenu un permis de construire modificatif autorisant la modification de l'implantation et de la volumétrie de la maison n° 1. Un second permis de construire modificatif, relatif à cette même construction, lui a été délivré par un arrêté du 13 octobre 2017 dont M. E... a demandé l'annulation. Ce dernier relève appel du jugement du 11 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 13 octobre 2017.

2. En premier lieu, lorsque les modifications apportées à un projet de construction sont sans influence sur la conception générale du projet initial, elles peuvent légalement faire l'objet d'un permis modificatif, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que celui-ci ait pour objet de régulariser des travaux réalisés en violation des prescriptions du permis initial.

3. Il ressort des pièces du dossier que le permis de construire initial du 4 février 2016 autorise la création de trois constructions à destination d'habitation d'une surface de plancher totale de 543,99 mètres carrés. Le premier permis de construire modificatif délivré le 6 septembre suivant à la SCV BC, autorisant la modification de l'implantation et de la volumétrie de la maison n° 1, a eu pour effet de porter à 657,57 mètres carrés la surface de plancher totale du projet. Le second permis de construire modificatif, seul en litige, porte sur la modification de cette même construction. Il prévoit, en particulier, la création d'une surface de plancher supplémentaire de 70,45 mètres carrés, le déplacement d'un balcon, le prolongement de la toiture sur le volume créé, la création d'une fenêtre ainsi que d'une porte, la surélévation d'une partie de la toiture sur le volume intermédiaire sur une hauteur de 90 centimètres, le remplacement du toit de la verrière par un toit en tuiles et la surélévation de 20 centimètres de ce toit, ainsi que l'agrandissement de la piscine et la modification de son implantation. Compte tenu de leur ampleur limitée au regard de l'importance globale du projet de la SCV BC, les différentes modifications autorisées par l'arrêté du 13 octobre 2017 ne remettent pas en cause la conception générale de ce projet autorisé par le permis initial et le premier permis modificatif, lesquels n'ont pas été contestés. Par ailleurs, il ressort des éléments joints à la seconde demande de permis modificatif de la société pétitionnaire, en particulier du document intitulé " insertion paysagère ", que les transformations de la construction en cause n'aggravent pas substantiellement son impact visuel dans les espaces proches. Par suite, les modifications en cause pouvaient légalement faire l'objet du permis de construire modificatif en litige et ne nécessitaient pas la délivrance d'un nouveau permis de construire.

4. En deuxième lieu, M. E... ne saurait utilement soutenir, compte tenu de ce qui a été dit au point précédent, que le permis de construire modificatif en litige doit être regardé comme un nouveau permis ayant implicitement mais nécessairement retiré tant le permis initial du 4 février 2016 que le permis modificatif du 6 septembre suivant.

5. En troisième lieu, M. E... reprend en appel les différentes branches du moyen tiré de l'irrégularité du dossier de demande de permis de construire modificatif déposé par la SCV BC. Il y a lieu d'écarter ce moyen de légalité interne, en ses différentes branches, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 5 de leur jugement. Par ailleurs, si M. E... se prévaut, pour la première fois en appel, du caractère insuffisant du document graphique produit au regard des exigences du c) de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme, la société pétitionnaire était, en tout état de cause, dispensée de produire un tel document en vertu de l'article R. 431-12 du code de l'urbanisme qui prévoit que, lorsque le projet de construction est, comme en l'espèce, situé dans un périmètre ayant fait l'objet d'un permis d'aménager, " les pièces mentionnées au c et au d de l'article R. 431-10 ne sont pas exigées ".

6. En quatrième lieu, aux termes du second paragraphe de l'article 2-10 du règlement du lotissement " La Salette III " : " La hauteur absolue de toute construction ne peut excéder 8,50 m. / C... construction ne peut dépasser cette hauteur absolue mesurée à partir de tout point de la surface du terrain naturel. Toutefois, une adaptation mineure peut être admise dans certains cas de terrains en pente transversale très importante ou de relief très tourmenté ". Le premier paragraphe du même article, intitulé " Définition de la hauteur ", précise que : " La hauteur des constructions est mesurée à partir du sol naturel existant avant travaux définis par un plan altimétrique détaillé, jusqu'au sommet du bâtiment, ouvrages techniques, cheminées et autres superstructures exclues ". En l'absence de toute précision contraire du règlement de ce lotissement, la notion de " sol naturel existant avant travaux " doit s'entendre du sol tel qu'il existe dans son état antérieur aux travaux entrepris pour la réalisation du projet faisant l'objet d'une demande de permis de construire.

7. M. E... soutient que, compte tenu du niveau réel du sol naturel existant avant les remblais effectués sur le terrain d'assiette postérieurement au dépôt de la demande de permis initial, la construction concernée par le permis modificatif en litige présente, sur sa façade nord, une hauteur au faîtage excédant de plus d'un mètre la hauteur maximale autorisée par les dispositions citées au point précédent. Toutefois, les seuls éléments qu'il produit ne permettent pas d'identifier les parties du terrain d'assiette ayant fait l'objet des remblais en cause, ni de corroborer ses allégations relatives au niveau du sol naturel existant avant travaux au droit de la façade nord de la construction en cause. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le permis de construire modificatif en litige autoriserait le dépassement de hauteur dont se prévaut M. E.... Par suite, le moyen tiré la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

8. En cinquième et dernier lieu, un permis de construire n'a d'autre objet que d'autoriser la construction d'immeubles conformes aux plans et indications fournis par le pétitionnaire. La circonstance que ces plans et indications pourraient ne pas être respectés ou que ces immeubles risqueraient d'être ultérieurement transformés ou affectés à un usage non conforme aux documents et aux règles générales d'urbanisme n'est pas, par elle-même, sauf le cas d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de la délivrance du permis, de nature à affecter la légalité de celui-ci. La caractérisation de la fraude résulte de ce que le pétitionnaire a procédé de manière intentionnelle à des manoeuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet dans le but d'échapper à l'application d'une règle d'urbanisme. Une information erronée ne peut, à elle seule, faire regarder le pétitionnaire comme s'étant livré à l'occasion du dépôt de sa demande à des manoeuvres destinées à tromper l'administration.

9. Il ne ressort pas des pièces du dossier, ainsi que l'a jugé le tribunal, que la SCV BC aurait délibérément fourni au service instructeur, à l'appui de sa deuxième demande de permis de construire modificatif, des indications erronées, en ce qui concerne en particulier la hauteur de la construction concernée par cette demande, afin d'échapper à l'application d'une règle d'urbanisme et, plus particulièrement, d'une règle de hauteur. Dans ces conditions, et compte tenu de ce qui a été dit au point 7, le moyen tiré de ce que le permis de construire modificatif en litige aurait été obtenu par fraude doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande de première instance ni celle de la présente requête, M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

11. Les dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Banyuls-sur-Mer et de la SCV BC, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par

M. E... et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de M. E... le versement d'une somme de 1 000 euros à la commune de BanyulssurMer ainsi que le versement d'une somme de 1 000 euros à la SCV BC au titre des frais exposés par ces dernières et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : M. E... versera une somme de 1 000 euros tant à la commune de BanyulssurMer qu'à la SCV BC au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... E..., à la commune de Banyuls-sur-Mer et à la SCV BC.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Chazan, président,

- Mme B..., présidente assesseure,

- M. D..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 janvier 2021.

4

N° 19MA03831


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA03831
Date de la décision : 19/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-04-04 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Régime d'utilisation du permis. Permis modificatif.


Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP HENRY-CHICHET-PAILLES-GARIDOU

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-01-19;19ma03831 ?
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