Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du
4 février 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui accorder un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours.
Par un jugement n° 1902406 du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 24 juillet 2019, M. D... B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 27 juin 2019 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 4 février 2019 du préfet de l'Hérault ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un certificat de résidence algérien mention " étudiant " ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve que son conseil renonce à l'aide juridictionnelle ;
Il soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'il n'a pas sollicité l'annulation de la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé en méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa situation personnelle ;
- la décision implicite de rejet de son recours gracieux méconnaît l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et le titre 3 du protocole franco-algérien du 22 décembre 1985, outre que le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation personnelle.
Une décision du 26 mai 2020 rejette la demande d'aide juridictionnelle de M. B....
Par un mémoire enregistré le 10 décembre 2019, le préfet de l'Hérault conclut au rejet.
Il soutient que les moyens du requérant sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien, né le 13 septembre 1976 en Algérie, est entré le
5 mai 2008 en France en qualité d'étudiant et a bénéficié de ce statut jusqu'au 3 novembre 2018. Il a sollicité le 9 octobre 2018 le renouvellement de son titre de séjour en qualité de " travailleur temporaire ". Il relève appel du jugement du 27 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 février 2019 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé le séjour régulier en France, et l'a obligé à quitter le territoire français.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que M. B..., qui a présenté sa demande devant le tribunal administratif avec l'assistance d'un avocat, a soulevé divers moyens de légalité externe et interne contre la décision de rejet implicite du préfet de l'Hérault de son recours gracieux réceptionné le 28 février 2019. L'intéressé devait être regardé comme ayant expressément contesté la décision résultant du silence du préfet sur son recours gracieux, même s'il n'a pas formellement demandé cette annulation dans ses conclusions mais dans le corps de sa requête. Dans ces conditions, en ne statuant que sur la légalité de l'arrêté n° 2019/340/107 du
4 février 2019 par lequel le préfet a pris à son encontre un refus de séjour et une obligation de quitter le territoire français, les premiers juges ont omis de se prononcer sur des conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet du recours gracieux formé par M. B.... Il y a lieu, dès lors, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il n'a pas statué sur ces conclusions.
4. Il y a lieu d'évoquer dans cette mesure et, par là, de statuer sur les conclusions présentées par M. B... devant le tribunal, dirigées contre la décision de rejet implicite du préfet de l'Hérault de son recours gracieux réceptionné le 28 février 2019.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
S'agissant de l'arrêté du 4 février 2019 :
5. En premier lieu, la décision contestée comporte dans ses visas et motifs toutes les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et qui permettent de vérifier que l'administration préfectorale a procédé à un examen de la situation particulière du requérant au regard des stipulations et dispositions législatives et réglementaires applicables. Plus particulièrement, la décision contestée mentionne la situation familiale et personnelle de l'intéressé, les conditions de son séjour en France, et comporte l'appréciation de l'administration sur celles-ci. Le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que cette décision est insuffisamment motivée.
6. En deuxième lieu, il ressort de l'arrêté attaqué que le préfet a considéré que M. B... ne justifiait pas détenir un contrat de travail répondant aux exigences de l'article R. 5221-1 du code du travail pour obtenir le statut de " travailleur temporaire " ainsi qu'aux stipulations de l'article 7 e) de l'accord franco-algérien. Il a ainsi procédé à un examen réel et sérieux de la situation professionnelle de l'intéressé. Par suite, alors même que le préfet n'a pas mentionné les quatre contrats de travail à durée déterminée produits par M. B... à l'appui de sa demande de délivrance d'un titre de séjour, l'arrêté contesté n'est pas entaché d'un défaut d'examen personnalisé de la situation du requérant au regard de son activité professionnelle. En outre, l'arrêté litigieux indique également que l'intéressé est âgé de 42 ans, célibataire et sans charge de famille, et qu'il ne démontre pas avoir établi de manière stable et durable en France, le centre de ses intérêts privés et familiaux, ou être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 31 ans. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen approfondi de la situation de M. B..., ne peut qu'être écarté.
7. En troisième lieu, si M. B... a aussi soutenu que l'obligation de quitter le territoire français entraîne pour lui des conséquences disproportionnées, il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard, en particulier à sa situation de célibataire sans enfant ayant résidé régulièrement en France sous le statut d'étudiant, que ladite décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 4 février 2019 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé le séjour régulier en France, et l'a obligé à quitter le territoire français.
S'agissant de la décision de rejet implicite du préfet de l'Hérault du recours gracieux réceptionné le 28 février 2019 :
9. Il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de son recours gracieux M. B... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour mention " étudiant " en faisant valoir une inscription académique pour l'année 2018-2019 et le sérieux de ses études, ainsi que des moyens d'existence suffisants pour demeurer en France. L'administration qui n'a pas produit de défense devant les premiers juges, ne fait valoir aucun argument de nature à démontrer que l'intéressé ne remplit pas les conditions pour se voir délivrer un tel titre. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que la décision née du silence du préfet de l'Hérault sur sa demande est entachée d'excès de pouvoir.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".
11. Le présent arrêt qui prononce l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du préfet de l'Hérault de rejet implicite du recours gracieux de M. B... réceptionné le
28 février 2019, implique nécessairement qu'il délivre un titre de séjour de régularisation mention " étudiant " pour l'année universitaire 2018/2019 au bénéfice de ce dernier. Il est enjoint au préfet de l'Hérault de procéder à une telle régularisation dans un délai d'un mois à compter du présent arrêt.
Sur les frais exposés à l'occasion du litige :
12. Une décision du 26 mai 2020 rejette la demande d'aide juridictionnelle de
M. B.... Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... d'une somme de 1 200 euros.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1902406 du tribunal administratif de Montpellier du 27 juin 2019 est annulé en tant qu'il n'a pas statué sur les conclusions présentées par M. B... dirigées contre la décision de rejet implicite du préfet de l'Hérault de son recours gracieux réceptionné le
28 février 2019.
Article 2 : La décision de rejet implicite du préfet de l'Hérault du recours gracieux de M. B... réceptionné le 28 février 2019 est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer, dans un délai d'un mois, un titre de séjour de régularisation mention " étudiant " au bénéfice de M. B... pour l'année universitaire 2018/2019.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
Article 5 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., à Me C..., au préfet de l'Hérault et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 15 décembre 2020, où siégeaient :
- M. Badie, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 janvier 2021.
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N° 19MA03480