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18/12/2020 | FRANCE | N°20MA02494

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 18 décembre 2020, 20MA02494


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de renouveler son certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé.

Par un jugement n° 1909610 du 27 février 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédu

re devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 juillet 2020, M. C..., représenté par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de renouveler son certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé.

Par un jugement n° 1909610 du 27 février 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 juillet 2020, M. C..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 27 février 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 8 octobre 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à venir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa demande de renouvellement de certificat de résidence et de prendre une nouvelle décision dans un délai de trois mois à compter de cette notification et sous la même astreinte et, en toute hypothèse, de lui délivrer, dans l'attente et dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'arrêt à venir, un récépissé de demande de renouvellement l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges, qui ont dénaturé les pièces du dossier, n'ont pas répondu au moyen tiré de l'impossibilité dans laquelle il se trouve de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

- le rapport médical comporte des indications erronées et n'est pas conforme à l'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 2016 ;

- les médecins ayant émis l'avis relatif à son état de santé n'ont pas été régulièrement désignés par le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- en l'absence d'authentification de la signature des membres du collège de médecins, l'avis de ce collège, qui ne peut être regardé comme ayant été valablement signé, est irrégulier ;

- il n'est pas démontré que cet avis aurait été précédé d'une véritable délibération collégiale, ni que cette éventuelle délibération collégiale aurait respecté les exigences de l'ordonnance du 6 novembre 2014 et du décret du 26 décembre 2014 pris pour son application ;

- à titre subsidiaire, la cour diligentera une mesure d'instruction afin de s'assurer du respect de la garantie que constitue le caractère collégial de la délibération préalable à l'avis ;

- l'avis du collège de médecins est incomplet dès lors qu'il ne comporte pas les éléments de procédure mentionnés à l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 ;

- la décision de refus de renouvellement de certificat de résidence en litige méconnaît le 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation ;

- elle méconnaît le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de renouvellement de certificat de résidence ;

- cette mesure d'éloignement est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'il peut bénéficier de plein droit du renouvellement de son certificat de résidence ;

- elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle ne respecte pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation ;

- elle méconnaît le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision relative au délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord francoalgérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant algérien né en 1976 et entré régulièrement en France le 25 juin 2015, a sollicité le renouvellement du certificat de résidence d'un an dont il était titulaire en raison de son état de santé. Par un arrêté du 8 octobre 2019, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé. M. C... relève appel du jugement du 27 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est entré régulièrement en France en 2015 en compagnie de son épouse, de leur fille née en 2012, ainsi que des deux filles nées en 2001 et 2002 d'une précédente union de Mme C.... L'intéressé, qui a été atteint d'un cancer du colon diagnostiqué en France en 2015 et a subi plusieurs opérations, bénéficie d'une prise en charge médicale ainsi que d'un suivi régulier en raison notamment d'une prédisposition génétique au développement d'autres formes de cancer. Il s'est vu délivrer, en raison de son état de santé, plusieurs autorisations provisoires de séjour puis un certificat de résidence d'un an qui a été renouvelé jusqu'en 2019. Il ressort également des pièces versées au débat que M. C... s'est efforcé, en dépit de ses problèmes de santé, de s'insérer professionnellement en exerçant différents emplois depuis 2017, notamment dans le domaine de la restauration. Il n'est par ailleurs pas contesté que plusieurs membres de la fratrie de l'épouse de l'intéressé, dont certains ont acquis la nationalité française, résident régulièrement en France avec leurs familles respectives. Dans les circonstances très particulières de l'espèce, compte tenu notamment de la durée de la présence régulière en France de M. C..., de ses efforts d'insertion professionnelle ainsi que de la nature des liens dont il dispose sur le territoire français, le préfet des Bouches-du-Rhône a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision de refus de renouvellement de certificat de résidence en litige sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé. Par suite, l'appelant est fondé à demander l'annulation de cette décision ainsi que, par voie de conséquence, celle des décisions, également contenues dans l'arrêté contesté, lui faisant obligation de quitter le territoire français, lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours et fixant le pays de destination.

3. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué et les autres moyens invoqués, M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 8 octobre 2019.

4. Eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement qu'un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " soit délivré à M. C.... Il y a lieu d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer ce certificat de résidence à l'intéressé dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

5. M. C... ayant été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me E..., avocate de M. C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cette avocate de la somme de 1 500 euros.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 27 février 2020 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 8 octobre 2019 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à M. C... un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me E... la somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette avocate renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au ministre de l'intérieur et à Me E....

Copie en sera transmise au préfet des Bouches-du-Rhône et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Marseille.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Chazan, président,

- Mme B..., présidente assesseure,

- M. D..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 décembre 2020.

5

N° 20MA02494


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA02494
Date de la décision : 18/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Autorisation de séjour - Refus de renouvellement.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : VINCENSINI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-12-18;20ma02494 ?
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