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17/12/2020 | FRANCE | N°20MA00903

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 17 décembre 2020, 20MA00903


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales lui a retiré son certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1906437 du 4 février 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée

le 25 février 2020, et un mémoire en réplique, enregistré le 6 avril 2020, M. C..., représenté pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales lui a retiré son certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1906437 du 4 février 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 février 2020, et un mémoire en réplique, enregistré le 6 avril 2020, M. C..., représenté par la Selarl d'avocats BS2a Bescou et Sabatier, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Orientales, sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence temporaire et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 7611 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne le retrait de son certificat de résidence :

- le préfet a commis une erreur de droit en se fondant sur l'article L. 313-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui n'est pas applicable aux ressortissants algériens ; la décision en litige n'est pas motivée par la fraude et le tribunal a procédé d'office à une substitution de base légale, sans l'en informer préalablement ;

- la fraude n'est pas établie ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du retrait de son titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination, elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du retrait de titre de séjour et de la mesure d'éloignement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mars 2020, le préfet des Pyrénées-Orientales conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant algérien né en 1971, est entré en France en mars 2015 sous couvert d'un visa C portant la mention " famille de français " à la suite de son mariage le 10 juin 2014 avec une ressortissante française. Il a d'abord été mis en possession d'un certificat de résidence algérien d'une durée d'un an avant de se voir délivrer, en qualité de conjoint de Français, un certificat de résidence algérien valable du 7 mai 2015 au 6 mai 2025 sur le fondement des dispositions de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. Par un arrêté du 6 novembre 2019, le préfet des Pyrénées-Orientales lui a retiré son certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. M. C... fait appel du jugement du 4 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. L'arrêté en litige se fonde, pour procéder au retrait du certificat de résidence algérien délivré à M. C..., sur le " caractère frauduleux du mariage contracté avec Mme A... F..., fraude avérée par la décision rendue le 18 janvier 2018 par le tribunal de grande instance de Perpignan " et précise qu'" un acte administratif obtenu par fraude ne crée pas de droits et, par suite, peut être retiré par l'autorité compétente, s'il est établi de façon certaine que le mariage a été contracté dans le but exclusif d'obtenir un titre de séjour ". Dès lors, alors même qu'il mentionne cette disposition dans ses visas, il ne se fonde pas, contrairement à ce que soutient le requérant, sur l'article L. 313-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui se rapporte au retrait de la carte de séjour si l'étranger cesse de remplir l'une des conditions exigées pour sa délivrance, fait obstacle aux contrôles ou ne défère pas aux convocations, lesquelles ne sont effectivement pas applicables aux ressortissants algériens. Par suite, en estimant que le préfet avait fait usage du pouvoir général qu'il détient, même en l'absence de texte, pour retirer une décision individuelle créatrice de droits obtenue par fraude, les premiers juges n'ont pas procédé d'office à une substitution de base légale, irrégulière à défaut d'information préalable des parties prévue par les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

3. En premier lieu et ainsi qu'il a été dit au point précédent, le préfet des Pyrénées-Orientales, qui ne s'est pas fondé sur les dispositions de l'article L. 313-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais sur le pouvoir général qu'il détient pour retirer une décision individuelle créatrice de droits obtenue par fraude, n'a pas entaché sa décision d'erreur de droit.

4. En deuxième lieu, le préfet peut légalement faire usage du pouvoir général qu'il détient, même en l'absence de texte, pour retirer une décision individuelle créatrice de droits obtenue par fraude. En l'absence de stipulations expresses sur ce point prévues par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, l'autorité préfectorale peut procéder au retrait du certificat de résidence délivré à un ressortissant algérien s'il démontre que l'obtention ou le renouvellement de ce certificat a été obtenu par fraude.

5. Il ressort des pièces du dossier que la cour d'appel de Montpellier a confirmé le 23 octobre 2019 la décision du tribunal de grande instance de Perpignan du 18 janvier 2018 annulant le mariage de M. C... avec Mme F... au motif que cette union avait été célébrée sans intention matrimoniale et dans le but exclusif d'obtenir un titre de séjour. Dans ces conditions et alors que M. C... ne verse aucun élément permettant de corroborer sa volonté réelle de s'unir effectivement et durablement avec Mme F..., le préfet apporte la preuve que le renouvellement de son certificat de résidence a été obtenu par fraude. Par suite, c'est sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur manifeste dans l'appréciation de l'existence d'une fraude qu'il a retiré à M. C... son certificat de résidence.

6. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. M. C... a vécu en Algérie jusqu'à son arrivée en France à l'âge de quarante-quatre ans et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident les membres de sa fratrie. L'intéressé ne démontre pas une intégration sociale et professionnelle particulière en France. Par suite, le préfet des Pyrénées-Orientales n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision retirant à M. C... son certificat de résidence doit être écarté.

9. En second lieu, eu égard aux circonstances exposées au point 7, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit également être écarté.

En ce qui concerne le pays de destination :

10. Aucun moyen d'illégalité n'ayant été retenu à l'appui des conclusions tendant à l'annulation du retrait de certificat de résidence algérien et de l'obligation de quitter le territoire français, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité des décisions sur lesquelles elle est fondée.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 novembre 2019. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lascar, président,

- Mme E..., présidente assesseure,

- Mme B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 décembre 2020.

2

N° 20MA00903

mtr


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00903
Date de la décision : 17/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: Mme Samira TAHIRI
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-12-17;20ma00903 ?
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