Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... F... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel négatif délivré par le maire de Malaussene le 11 juillet 2016 sur la parcelle cadastrée C 447.
Par un jugement n° 1604928 du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée sous le numéro 18MA05544 le 29 décembre 2018, Mme F... épouse B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 30 octobre 2018 ;
2°) d'annuler le certificat d'urbanisme négatif délivré par le maire de Malaussene le 11 juillet 2016 portant sur la parcelle cadastrée C 447 ;
3°) d'enjoindre au maire de Malaussene de lui délivrer un certificat d'urbanisme opérationnel positif dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et à titre subsidiaire de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Malaussene la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.
Elle soutient que :
- le maire n'avait pas compétence pour prendre la décision en litige en vertu des articles L. 422-6 et L. 422-7 du code de l'urbanisme ;
- le projet ne méconnait pas les dispositions de la loi montagne ;
- le certificat est entaché d'un détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 février 2019, la commune de Malaussene, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme F... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- et les conclusions de Mme Giocanti rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme F... épouse B... relève appel du jugement du 30 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme opérationnel négatif que lui a délivré le maire de Malaussene le 11 juillet 2016 sur son projet de construction d'une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée C 447.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 442-7 du code de l'urbanisme : " Si le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est intéressé au projet faisant l'objet de la demande de permis ou de la déclaration préalable, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ou l'organe délibérant de l'établissement public désigne un autre de ses membres pour prendre la décision ". Si le maire est, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme, compétent pour délivrer une autorisation d'urbanisme, une telle autorisation peut également être compétemment délivrée, réserve faite des délégations accordées dans les conditions prévues par le code général des collectivités territoriales ou de l'application des règles de suppléance, par un membre du conseil municipal légalement désigné par celui-ci en application de l'article L. 422-7 du même code, au motif que le maire peut être légitimement regardé comme intéressé au projet devant faire l'objet de l'autorisation.
3. D'une part, Mme F... épouse B... ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions précitées en soutenant que la commune serait " intéressée " par l'achat de sa parcelle dès lors que les dispositions précitées ne s'appliquent qu'au maire et non à la commune. D'autre part, la seule circonstance que, par un courrier du 5 avril 2016, le maire de Malaussene a informé Mme F... épouse B... de ce que la commune était disposée à étudier une proposition d'achat de la parcelle ne saurait suffire à établir l'intérêt personnel du maire au projet en litige. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut qu'être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 422-6 du code de l'urbanisme : " En cas d'annulation par voie juridictionnelle ou d'abrogation d'une carte communale, d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, ou de constatation de leur illégalité par la juridiction administrative ou l'autorité compétente et lorsque cette décision n'a pas pour effet de remettre en vigueur un document d'urbanisme antérieur, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale recueille l'avis conforme du préfet sur les demandes de permis ou les déclarations préalables postérieures à cette annulation, à cette abrogation ou à cette constatation. ". Il ressort de leurs termes mêmes que ces dispositions sont relatives aux permis de construire et aux déclarations préalables de travaux et non aux certificats d'urbanisme, lesquels ne rentrent pas, par suite, dans leur champ d'application. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté comme étant inopérant.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 172-1 du code de l'urbanisme : " Les directives territoriales d'aménagement approuvées avant le 13 juillet 2010 restent en vigueur. Elles sont soumises aux dispositions des articles L. 172-2 à L. 172-5. ". Aux termes de l'article L. 172-2 du même code : " Les directives territoriales d'aménagement conservent les effets suivants : (...) 2° Les dispositions des directives territoriales d'aménagement qui précisent les modalités d'application des dispositions particulières au littoral et aux zones de montagne prévues aux chapitres Ier et II du titre II du présent livre s'appliquent aux personnes et opérations qui y sont mentionnées. ". Aux termes de l'article L. 122-2 du même code : " Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, défrichements, plantations, aménagements, installations et travaux divers, la création de lotissements, l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes, l'établissement de clôtures, la réalisation de remontées mécaniques et l'aménagement de pistes, l'ouverture des carrières, la recherche et l'exploitation des minerais et les installations classées pour la protection de l'environnement ". Enfin l'article L. 122-5 de ce code prévoit : " L'urbanisation est réalisée en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées. ".
6. D'une part, il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative chargée de se prononcer sur une demande d'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol mentionnée au second alinéa de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de la conformité du projet aux dispositions du code de l'urbanisme particulières à la montagne, le cas échéant au regard des prescriptions d'une directive territoriale d'aménagement demeurée en vigueur qui sont suffisamment précises et compatibles avec les dispositions des articles L. 122-5 et suivants du même code.
7. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme que l'urbanisation en zone de montagne, sans être autorisée en zone d'urbanisation diffuse, peut être réalisée non seulement en continuité avec les bourgs, villages et hameaux existants, mais également en continuité avec les " groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants " et qu'est ainsi possible l'édification de constructions nouvelles en continuité d'un groupe de constructions traditionnelles ou d'un groupe d'habitations qui, ne s'inscrivant pas dans les traditions locales, ne pourrait être regardé comme un hameau. L'existence d'un tel groupe suppose plusieurs constructions qui, eu égard notamment à leurs caractéristiques, à leur implantation les unes par rapport aux autres et à l'existence de voies et de réseaux, peuvent être perçues comme appartenant à un même ensemble.
8. Il est constant que la commune de Malaussene est concernée par la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes approuvée par décret n° 2003-1169 du 2 décembre 2003. Cette directive, accessible tant au juge qu'aux parties sur le site internet de la préfecture des Alpes-Maritimes, précise pour l'application de la loi montagne, pour les communes classées dans le secteur du " haut pays ", en son article II. 234, que " la forme urbaine ou l'inscription dans le site sont des éléments déterminants pour l'identification des bourgs, villages, hameaux et groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants ainsi que pour l'appréciation des possibilités d'extension en continuité ", puis que " la continuité de l'urbanisation implique la proximité visuelle mais non la contiguïté des espaces bâtis. L'urbanisation en continuité peut intégrer des espaces non bâtis de faible dimension à l'échelle de l'unité urbaine considérée ", que " les limites de la continuité sont établies à partir des protections existantes et des critères suivants : critères physiques liés au terrain : reliefs, secteur de forte déclivité, cours d'eau, vallons ; critères résultant de l'analyse du paysage et notamment l'intérêt propre des paysages : protection des socles de villages, des secteurs à fort impact visuel, préservation des vues ; l'impact qu'aurait l'urbanisation sur la structure du paysage et l'équilibre entre les espace bâtis et les espaces naturels ", et que " l'extension en continuité des villages hameaux et groupes de constructions traditionnelle caractéristiques est admise dans le cadre des dispositions énoncées dans le chap. III-232. Afin de sauvegarder leur forme urbaine et architecturale, l'extension en continuité de ces pôles bâtis ne sera possible que dans les espaces peu perçus des axes de vue principaux, révélateurs du bâti ancien, ou bien en respectant la continuité avec le morphologie et l'architecture du bâti ancien " et enfin que " lorsqu'il existe à proximité des bourgs, villages, hameaux et groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations, des espaces partiellement urbanisés, leur urbanisation pourra être renforcée. Ce renforcement pourra permettre de favoriser la continuité avec ces pôles bâtis, si cela est compatible avec le respect des dispositions prévues aux I et II de l'article L. 145-3 et avec la protection contre les risques naturels ". Ces prescriptions sont suffisamment précises et compatibles avec les dispositions relatives à la loi montagne.
9. Il ressort des pièces du dossier que le projet de construction d'une maison individuelle en litige se situe sur la parcelle C 447, implantée au nord de la route départementale, au sud de laquelle se trouve un compartiment urbanisé constituant le bourg. La parcelle, d'une superficie de plus de 2 300 m², est à l'état naturel et s'ouvre à l'est sur un important massif forestier. Eu égard à la coupure d'urbanisation créée par la route départementale et à l'impact qu'aurait l'urbanisation de la parcelle sur la structure du paysage et l'équilibre entre l'espace bâti, au sud de la route, et l'espace naturel, au nord de cette route, la parcelle en litige ne peut être considérée comme étant en continuité du bourg. D'autre part, si la parcelle 453, située au nord de la parcelle C 447, est construite, et s'ouvre elle-même sur plusieurs parcelles faiblement bâties le long de la route départementale, ce compartiment ne peut, eu égard à ses caractéristiques, notamment son urbanisation très diffuse et disparate le long de la route, être regardé comme un groupe d'habitations en continuité duquel la parcelle en litige s'implanterait. Dans ces conditions, Mme F... épouse B... n'est pas fondée à soutenir que son projet ne méconnaitrait pas les dispositions du code de l'urbanisme relatives à la montagne.
10. En quatrième lieu, dès lors que le certificat d'urbanisme était fondé sur un motif d'urbanisme comme il vient d'être dit, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi. Au surplus, la circonstance que la commune de Malaussene ait indiqué à Mme F... épouse B... qu'elle était disposée à étudier une proposition d'achat de sa parcelle, dans l'objectif d'y construire un parking, lequel du reste ne pourrait être autorisé au vu de la situation de la parcelle comme il a été dit au point précédent, et aurait sollicité un certificat d'urbanisme sur cette parcelle à titre informatif, ne saurait suffire à caractériser un détournement de pouvoir. Le moyen ne peut, par suite, qu'être écarté.
11. Il résulte de ce qui précède que Mme F... épouse B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en litige, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme négatif qui lui a été délivré.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
12. Par voie de conséquence du rejet des conclusions aux fins d'annulation, il y a lieu de rejeter les conclusions aux fins d'injonction présentées par Mme F... épouse B....
Sur les frais liés au litige :
13. La commune de Malaussene n'étant pas partie perdante dans la présente instance, il y a lieu de rejeter les conclusions de Mme F... épouse B... présentées sur le fondement des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme F... épouse B... la somme demandée par la commune de Malaussene au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme F... épouse B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Malaussene sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... F... épouse B... et à la commune de Malaussene.
Délibéré après l'audience du 3 décembre 2020 où siégeaient :
- M. Poujade, président
- M. Portail, président-assesseur,
- Mme A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2020.
2
N° 18MA05544
hw