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03/12/2020 | FRANCE | N°18MA05101

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 03 décembre 2020, 18MA05101


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les consorts A... et E... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite par laquelle la commune de La Motte a refusé le raccordement de leur propriété aux réseaux publics d'eau potable, d'électricité et d'assainissement.

Par un jugement n° 1600362 du 8 novembre 2018, le tribunal administratif de Toulon a fait droit à leur demande et a enjoint au maire de la commune de La Motte d'autoriser le raccordement aux réseaux d'eau, d'électricité et d'assainissement de l

a construction appartenant à M. D... A....

Procédure devant la Cour :

Par une r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les consorts A... et E... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite par laquelle la commune de La Motte a refusé le raccordement de leur propriété aux réseaux publics d'eau potable, d'électricité et d'assainissement.

Par un jugement n° 1600362 du 8 novembre 2018, le tribunal administratif de Toulon a fait droit à leur demande et a enjoint au maire de la commune de La Motte d'autoriser le raccordement aux réseaux d'eau, d'électricité et d'assainissement de la construction appartenant à M. D... A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 décembre 2018, la commune de La Motte, représentée par Me H..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 8 novembre 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Toulon par les consorts A... et E... ;

3°) de mettre à la charge des consorts A... et E... les sommes de 3 000 euros au titre des frais exposés en première instance et en appel en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. A... n'a pas qualité pour déposer la demande ;

- la construction n'a pas d'existence légale, sans qu'y fasse obstacle la qualification retenue par le juge pénal et l'autorité de la chose jugée au pénal ;

- le bâtiment est situé dans une zone de risque d'inondation très fort.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 mars 2019, les consorts A... et E..., représentés par Me I..., concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de La Motte la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Un courrier du 17 décembre 2018 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Par ordonnance du 25 avril 2019, la clôture de l'instruction a été fixée à sa date d'émission en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Le mémoire présenté pour la commune de La Motte le 13 juin 2019, après clôture de l'instruction, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. F... pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,

- et les observations de Me H... représentant la commune de La Motte et de Me I..., représentant les consorts A... et E....

Considérant ce qui suit :

1. La commune de La Motte relève appel du jugement du 8 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé la décision implicite par laquelle le maire de ladite commune a refusé le raccordement de la propriété des consorts A... et E... aux réseaux publics d'eau potable, d'électricité et d'assainissement et a enjoint au maire de la commune de La Motte d'autoriser le raccordement aux réseaux d'eau, d'électricité et d'assainissement de la construction appartenant à M. D... A....

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable au litige : " Les bâtiments, locaux ou installations soumis aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4 ou L. 510-1, ne peuvent, nonobstant toutes clauses contraires des cahiers des charges de concession, d'affermage ou de régie intéressée, être raccordés définitivement aux réseaux d'électricité, d'eau, de gaz ou de téléphone si leur construction ou leur transformation n'a pas été, selon le cas, autorisée ou agréée en vertu des articles précités. ". Il incombe au juge de l'excès de pouvoir d'apprécier, au regard des éléments apportés par le pétitionnaire, et le cas échéant des éléments que lui soumet l'administration, si la construction dont le raccordement aux réseaux est demandé peut être regardée, compte tenu de la date de son édification et des exigences applicables à cette date en matière d'autorisation de construire, comme ayant été régulièrement édifiée.

3. La commune de La Motte a refusé le raccordement aux réseaux d'eau potable et d'électricité de la propriété des consorts A... et E... au motif que seul un garage, et non une habitation, aurait été autorisé par un permis de construire de 1992, et que le " changement de destination " de ce garage en habitation n'aurait jamais été autorisé. Toutefois, si certains plans et l'arrêté de 1992 font état d'un garage, ledit arrêté mentionne la construction d'un logement, tel que l'a relevé, du reste, la cour d'appel d'Aix-en-Provence dans un arrêt du 19 février 2018. En outre, la commune ne pouvait fonder le refus de raccordement sur l'absence " d'autorisation de changement de destination d'un garage en habitation ", dès lors d'une part que le garage, accessoire de l'habitation principale, est réputé avoir la même destination que celle-ci, et que d'autre part, la commune n'établit pas que ce changement d'usage aurait nécessité des travaux eux-mêmes soumis à autorisation.

4. Enfin, le refus de raccordement au réseau d'assainissement ne pouvait pas plus être fondé sur les dispositions précitées de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme qui ne sont applicables qu'aux demandes de raccordement aux réseaux d'eau potable et d'électricité. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Toulon a censuré l'unique motif du refus de raccordement.

5. En deuxième lieu, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

6. D'une part, la commune de La Motte soutient qu'elle pouvait s'opposer au raccordement demandé par les pétitionnaires au motif que M. C... A..., qui a seul déposé la demande de raccordement introduite par le formulaire Cerfa du 22 octobre 2014, n'avait pas qualité pour présenter une demande au nom de M. D... A... et de Mme G... E.... Toutefois, le présent litige concerne une demande de raccordement effectuée le 12 octobre 2015 par MM. Gérard et Anthony A... et Mme G... E..., par l'intermédiaire de leur avocat. Dans ces conditions, la demande de substitution de motif fondée sur la circonstance que M. C... A... n'aurait pas eu qualité pour déposer une demande de raccordement ne peut qu'être écartée.

7. D'autre part, la commune de La Motte soutient encore qu'elle pouvait s'opposer au raccordement dès lors que le terrain est situé dans une zone de risque fort d'inondation au plan de prévention des risques inondations. Toutefois, et alors que la demande de raccordement n'a pour objet ou pour effet de créer des logements supplémentaires, la commune n'apporte aucune précision en fait ou en droit de nature à apprécier le bien-fondé de sa demande de substitution de motif qui ne peut, par suite, qu'être écartée.

8. Il résulte de ce qui précède que la commune de La Motte n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement en litige, le tribunal administratif de Toulon a annulé la décision par laquelle son maire a refusé le raccordement de la propriété des consorts A... et E... aux réseaux publics d'eau potable, d'électricité et d'assainissement.

Sur les frais exposés dans l'instance :

9. Les consorts A... et E... n'étant pas parties perdantes à la présente instance, il y a lieu de rejeter la demande de la commune de La Motte fondée sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande des consorts A... et E... présentée sur le fondement des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1 : La requête de la commune de La Motte est rejetée.

Article 2 : Les conclusions des consorts A... et E... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de La Motte, à M. C... A..., à M. D... A... et à Mme G... E....

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2020 où siégeaient :

- M. F..., président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Gougot, premier conseiller,

- Mme B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 décembre 2020.

2

N° 18MA05101

hw


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18MA05101
Date de la décision : 03/12/2020
Type d'affaire : Administrative

Analyses

68 Urbanisme et aménagement du territoire.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: Mme Elisabeth BAIZET
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : CABINET HAWADIER-RUGGIRELLO

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-12-03;18ma05101 ?
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