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01/12/2020 | FRANCE | N°19MA04475

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre, 01 décembre 2020, 19MA04475


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 27 août 2019 par lequel le préfet du Var l'a assigné à résidence dans le département du Var pour une durée de 45 jours, l'a obligé à se présenter tous les lundis et jeudis aux services de la police aux frontières de Toulon et lui a interdit de sortir du département sans une autorisation spécifique.

Par un jugement n° 1903155 du 9 septembre 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulon a annul

l'arrêté du 27 août 2019, et a suspendu l'exécution de l'arrêté du 12 octobre 2018 par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 27 août 2019 par lequel le préfet du Var l'a assigné à résidence dans le département du Var pour une durée de 45 jours, l'a obligé à se présenter tous les lundis et jeudis aux services de la police aux frontières de Toulon et lui a interdit de sortir du département sans une autorisation spécifique.

Par un jugement n° 1903155 du 9 septembre 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 27 août 2019, et a suspendu l'exécution de l'arrêté du 12 octobre 2018 par lequel le préfet du Var a notamment obligé M. B... à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours, a enjoint au préfet du Var de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus des conclusions de M. B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 octobre 2020, le préfet du Var, demande à la Cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 9 septembre 2019.

Il soutient que c'est à tort que le premier juge a considéré que la signature par M. B... le 27 novembre 2018 d'un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de manoeuvre avec la société Carbone technique, constituait un changement dans les circonstances de fait ayant présidé à la décision du 12 octobre 2018 obligeant l'intéressé à quitter le territoire français.

Par une lettre du 9 juin 2020 M. B... a été mis en demeure de défendre, et n'a produit aucun mémoire.

Une ordonnance du 9 juin 2020 a clos l'instruction au 9 août 2020 à 12 heures.

Les parties ont été prévenues le 27 octobre 2020 que la Cour était susceptible de soulever un moyen d'ordre public tiré de ce que les conclusions présentées par M. B... tendant à contester " toutes mesures d'éloignement prononcées (à son encontre) dans l'attente de la décision des juges d'appel " ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables, au motif que l'arrêté attaqué du 27 août 2019 n'a ni pour objet ni pour effet d'éloigner le requérant du territoire français.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., né le 6 février 1980, ressortissant de nationalité sénégalaise, est entré en France le 12 septembre 2011 sous couvert d'un visa de court séjour. Le 23 mai 2018, il a déposé une demande de titre de séjour en qualité de salarié. Par un arrêté du 12 octobre 2018, le préfet du Var a refusé de faire droit à cette demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. Cette décision a été confirmée par un jugement n° 19000514 du 19 avril 2019 du tribunal administratif de Toulon qui a été frappé d'appel. L'intéressé ayant été interpellé et n'ayant pas été en mesure d'établir qu'il avait exécuté la mesure d'éloignement prévue par l'arrêté du 12 octobre 2018, le préfet du Var a, par un arrêté du 27 août 2019 ordonné son assignation à résidence dans le département du Var pour une durée de 45 jours. Par un jugement n° 1903155 du

9 septembre 2019, dont le préfet du Var demande l'annulation, le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 27 août 2019, a suspendu l'exécution de l'arrêté du 12 octobre 2018 portant éloignement de M. B... dans un délai de 30 jours, a enjoint au préfet du Var de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus des conclusions de M. B....

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Il appartient à l'administration de ne pas mettre à exécution l'obligation de quitter le territoire français si un changement dans les circonstances de droit ou de fait a pour conséquence de faire obstacle à la mesure d'éloignement. Dans pareille hypothèse, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif, sur le fondement du III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile l'annulation de la décision l'assignant à résidence dans les quarante-huit heures suivant sa notification. S'il n'appartient pas à ce juge de connaître de conclusions tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français après que le juge saisi sur le fondement du I de l'article L. 512-1 de ce code a statué ou que le délai pour le saisir a expiré, il lui est loisible, le cas échéant, d'une part, de relever, dans sa décision, que l'intervention de nouvelles circonstances de fait ou de droit fait obstacle à l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français et impose à l'autorité administrative de réexaminer la situation administrative de l'étranger, d'autre part, d'en tirer les conséquences en suspendant les effets de l'obligation de quitter le territoire français devenue, en l'état, inexécutable.

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.- L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) / 5° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) / Les huit derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve que la durée maximale de l'assignation ne puisse excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois pour les cas relevant des 1° et 2° à 7° du présent I (...). .

4. A la date de l'arrêté attaqué, M. B... pouvait être regardé comme faisant l'objet d'une " obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire [était] expiré " au sens et pour l'application des dispositions du 5° du paragraphe I de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet du Var pouvait légalement mettre à exécution l'obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours, prise le 12 octobre 2018, en édictant l'arrêté d'assignation à résidence du 27 août 2019, lequel ne peut être regardé comme constituant ou révélant une nouvelle décision comportant obligation de quitter le territoire français.

5. En second lieu, l'arrêté attaqué du 27 août 2019 n'a ni pour objet ni pour effet d'éloigner le requérant du territoire français. M. B... invoque cependant, pour faire obstacle à l'exécution de la mesure d'éloignement du territoire au titre de l'arrêté du 12 octobre 2018, qui avait été confirmée par le jugement n° 19005514 du 19 avril 2019 cité au point 1.,les circonstances que ce jugement a été frappé d'appel et qu'il entrait dans les prévisions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une part, au regard de sa présence permanente en France depuis 7 années, et d'autre part, puisqu'il avait signé le

27 novembre 2018 un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de manoeuvre avec la société Carbone technique. Ces modifications dans sa situation n'ont pas cependant, contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, pour conséquence de faire obstacle à la mesure d'éloignement dont il fait l'objet. Par suite, le préfet du Var est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué du tribunal administratif de Toulon a annulé l'assignation à résidence de M. B... dans le département du Var pour une durée de 45 jours et a suspendu l'exécution de la mesure d'éloignement.

6. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Var est fondé à demander l'annulation du jugement n° 1903155 du 9 septembre 2019 du tribunal administratif de Toulon.

7. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner la requête présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulon.

Sur les conclusions d'annulation :

8. Premièrement, les conclusions présentées par M. B... tendant à l'annulation de " toutes mesures d'éloignement prononcées (à son encontre) dans l'attente de la décision des juges d'appel " ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables, dès lors que comme il l'a été dit au point 2. l'arrêté attaqué du 27 août 2019 n'a ni pour objet ni pour effet d'éloigner le requérant du territoire français.

9. Deuxièmement, par un arrêt n° 19MA02842, la présente Cour a confirmé le

bien-fondé du jugement n° 19000514 du 19 avril 2019 du tribunal administratif de Toulon qui a rejeté la requête de M. B... contre l'arrêté du 12 octobre 2018 par lequel le préfet du Var a refusé de lui accorder un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. Par suite, les moyens soulevés par voie d'exception contre cet arrêté, à les supposer opérants, ne peuvent qu'être écartés.

10. Par voie de conséquence de ce qui vient d'être dit, les conclusions à fin d'injonction et au titre des frais de justice de M. B... doivent être rejetées.

11. Il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulon doit être rejetée.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1903155 du 9 septembre 2019 du tribunal administratif de Toulon est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulon et sa requête d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., au préfet du Var et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2020, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2020.

2

N° 19MA04475


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA04475
Date de la décision : 01/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Didier URY
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-12-01;19ma04475 ?
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