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19/11/2020 | FRANCE | N°19MA01321

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 19 novembre 2020, 19MA01321


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) du docteur Kolia Cilirié a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée, à hauteur de 8 666 euros, qu'elle a acquittés pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2013, ou à titre subsidiaire de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle.

Par un jugement n° 1604993 du 23 janvier 2019, le tribunal administratif de Marseill

e a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) du docteur Kolia Cilirié a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée, à hauteur de 8 666 euros, qu'elle a acquittés pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2013, ou à titre subsidiaire de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle.

Par un jugement n° 1604993 du 23 janvier 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 mars 2019, la SELARL du docteur Kolia Cilirié, représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi que la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les premiers juges ont commis une erreur de droit, au regard du régime de preuve de la finalité thérapeutique d'un acte, en niant toute portée à l'inscription des actes en litige à la classification commune des actes médicaux (CCAM) ; cette inscription, rendue sur avis d'une autorité sanitaire, doit être prise en compte dans l'appréciation de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que l'a précisé la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt C-91/12 du 21 mars 2013 ; c'est en ce sens que l'administration a fait évoluer sa propre doctrine le 7 février 2018.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SELARL du docteur Kolia Cilirié ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de Mme Courbon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) du docteur Kolia Cilirié, qui exerce une activité de chirurgie plastique, a, par une réclamation du 22 décembre 2015, demandé sans succès, à hauteur de 8 666 euros, la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a spontanément acquittés au titre de la période du 1er septembre au 31 décembre 2013. Elle fait appel du jugement du 23 janvier 2019 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la restitution des droits de taxe précités.

Sur la régularité du jugement :

2. A supposer que la SELARL du docteur Kolia Cilirié ait entendu contester la régularité du jugement attaqué en raison de l'éventuelle erreur de droit dont il serait entaché, une telle erreur n'entraine pas l'irrégularité du jugement mais justifie seulement, le cas échéant, une censure du motif erroné par la Cour dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Le 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, pris pour la transposition des dispositions du c) du 1° du A de l'article 13 de la directive 77/388/CEE du Conseil des Communautés du 17 mai 1977, repris au c) du paragraphe 1 de l'article 132 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006, prévoit que sont exonérés de taxe sur la valeur ajoutée " les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées (...) ".

4. Il résulte, d'une part, des dispositions des directives mentionnées au point 3, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans son arrêt Skatteverket c. PFC Clinic AB du 21 mars 2013, que seuls les actes de médecine et de chirurgie esthétique dispensés dans le but " de diagnostiquer, de soigner et, dans la mesure du possible, de guérir " des personnes qui, par suite d'une maladie, d'une blessure ou d'un handicap physique congénital, nécessitent une telle intervention, poursuivent une finalité thérapeutique et doivent, dès lors, être regardés comme des " soins dispensés aux personnes " exonérés de taxe sur la valeur ajoutée. Il en va, en revanche, différemment lorsque ces actes n'obéissent en aucun cas à une telle finalité.

5. D'autre part il résulte des dispositions combinées des articles L. 6322-1 et R. 6322-1 du code de la santé publique que les actes de chirurgie esthétique, qui n'entrent pas dans le champ des prestations couvertes par l'assurance maladie au sens de l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale, sont des actes qui tendent à modifier l'apparence corporelle d'une personne, à sa demande, sans visée thérapeutique ou reconstructrice. Les actes de médecine ou de chirurgie esthétique à finalité thérapeutique relèvent des dispositions de l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale, aux termes desquelles la prise en charge par l'assurance maladie est subordonnée à l'inscription sur la liste qu'elles mentionnent. Cette liste prévoit le remboursement des actes de médecine ou de chirurgie esthétique répondant, pour le patient, à une indication thérapeutique, évaluée le cas échéant sur entente préalable de l'assurance maladie.

6. Les dispositions du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, interprétées conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, doivent par suite être regardées comme subordonnant l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée des actes de médecine et de chirurgie esthétique non à la condition que ces actes fassent l'objet d'un remboursement effectif par la sécurité sociale mais à celle qu'ils entrent dans le champ des prestations couvertes par l'assurance maladie, ce qui suppose leur inscription sur la liste prévue par l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale, établie selon des critères objectifs et rationnels. Toutefois, la seule inscription d'un acte sur la liste mentionnée au point 5 ne saurait suffire à le faire entrer dans le champ des prestations couvertes par l'assurance maladie, certains actes pouvant avoir, selon les circonstances, une visée thérapeutique ou une visée non thérapeutique, l'assurance maladie subordonnant, d'ailleurs, le remboursement de certains de ces actes inscrits à un accord préalable délivré au cas par cas.

7. Enfin, aux termes de l'article R*. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable ou d'après le contenu d'un acte présenté par lui à la formalité de l'enregistrement. (...). ". Il résulte de ces dispositions qu'un contribuable ne peut obtenir la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a déclarés et spontanément acquittés conformément à ses déclarations qu'à la condition d'en établir le mal-fondé.

8. Pour maintenir à la charge de la SELARL du docteur Kolia Cilirié les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige, l'administration fiscale a considéré qu'elle n'avait pas produit de justification de leur but thérapeutique. La SELARL du docteur Kolia Cilirié fait valoir que ces actes poursuivaient une finalité thérapeutique compte tenu de leur inscription sur la liste intitulée " classification commune des actes médicaux " (CCAM) prévue par l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale. Toutefois, elle s'est bornée à faire figurer dans ses écritures de première instance un tableau établi par ses soins indiquant, pour chacun des quarante-trois actes pratiqués, leur indication thérapeutique et leur référence dans la classification commune des actes médicaux. Ce document, établi par ses soins et contesté en défense, ne dispose pas d'une valeur probante suffisante et ne peut à lui seul suffire à établir que les actes pratiqués poursuivaient une finalité thérapeutique et entraient ainsi dans le champ de l'exonération prévue au 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la SELARL du docteur Kolia Cilirié n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SELARL du docteur Kolia Cilirié est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL du docteur Kolia Cilirié et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lascar, président,

- Mme B... et Mme A..., premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 19 novembre 2020.

2

N° 19MA01321

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA01321
Date de la décision : 19/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Exemptions et exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: Mme Samira TAHIRI
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : CABINET ARSENE TAXAND

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-11-19;19ma01321 ?
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