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19/11/2020 | FRANCE | N°18MA03205

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 19 novembre 2020, 18MA03205


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI JKL a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2015 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a retiré le permis de construire tacite dont elle était bénéficiaire et a refusé de lui accorder un permis de construire pour la modification d'un bâtiment existant par création d'une surface de plancher de 74 m² et changement de destination d'une surface de plancher de 313,24 m² sur un terrain situé 1567 route des Pugets sur le territoire de la commune de Saint-Lauren

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI JKL a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2015 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a retiré le permis de construire tacite dont elle était bénéficiaire et a refusé de lui accorder un permis de construire pour la modification d'un bâtiment existant par création d'une surface de plancher de 74 m² et changement de destination d'une surface de plancher de 313,24 m² sur un terrain situé 1567 route des Pugets sur le territoire de la commune de Saint-Laurent-du-Var et la décision implicite par laquelle son recours gracieux a été rejeté.

Par un jugement n° 1602281 du 31 mai 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juillet 2018, la SCI J.K.L, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 31 mai 2018 du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2015 du préfet des Alpes-Maritimes retirant le permis de construire tacite dont elle était bénéficiaire ;

3°) de juger qu'elle est bénéficiaire d'une autorisation tacite du 6 octobre 2015 ;

4)° subsidiairement, d'enjoindre à l'Etat de procéder à une nouvelle instruction de sa demande de permis de construire en application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le mur de soutènement fait principalement office de soutènement de terre naturelle ;

- l'édification d'un mur de plus grande hauteur a été autorisée par un permis de construire définitif du 13 mars 2007 ;

- l'article 6.2UVd du règlement du plan local d'urbanisme prévoit des dérogations aux règles de distance par rapport aux limites séparatives ;

- le projet réduit la hauteur du mur et le rend en tout état de cause plus conforme aux dispositions du plan local d'urbanisme.

Par un mémoire enregistré le 29 mars 2019, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 13 mars 2007, le maire de la commune de Saint-Laurent-du-Var a délivré à la SCI J.K.L un permis de construire un bâtiment à usage de commerce, bureaux et habitation sur un terrain situé 1567 route des Pugets, sur le territoire de la commune. Le 21 janvier 2009, l'agent verbalisateur a dressé un procès-verbal d'infraction aux dispositions des articles L. 160-1, L 421-1 et L 480-4, et R. 421-1 du code de l'urbanisme du fait du non-respect du permis de construire délivré le 13 mars 2007, en raison notamment de la création d'un mur de plus de 2 mètres de haut pour la réalisation d'un espace jardin accessible depuis le niveau R+1, implanté en limite de la voie d'accès privée et ne respectant pas le recul par rapport à la voie de desserte imposé par le règlement du plan d'occupation des sols alors en vigueur. Le 25 mars 2015, la SCI JKL a déposé une demande de permis de construire portant sur des modifications diverses du bâtiment réalisé. Par un arrêté du 12 novembre 2015, le préfet des Alpes-Maritimes, compétent en application du décret n° 2008-229 du 07 mars 2008 inscrivant les opérations d'aménagement de la plaine du Var parmi les opérations d'intérêt national mentionnées à l'article R 121-4-1 du code de l'urbanisme, a retiré le permis de construire tacite obtenu par la SCI JKL le 6 octobre 2015 en se fondant sur la méconnaissance des articles 6UVd et 11UVd du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Laurent-du-Var. La SCI JKL relève appel du jugement du 31 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. L'article L. 424-5 du code de l'urbanisme dispose : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire. ".

3 Aux termes de l'article 6 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Laurent-du-Var applicable à la zone UVD, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté en litige : " Implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques : (...) 6-2 Dispositions applicables à toutes les constructions : Toute construction doit être implantée pour tous ses niveaux au-dessus du sol avec un retrait minimum de : - 5 m de l'alignement des voies et emprises publiques ou privées, existantes ou projetées (...) ". L'article L. 480-1 du code de l'urbanisme dispose : " Les infractions aux dispositions des titres Ier, II, III, IV et VI du présent livre sont constatées par tous officiers ou agents de police judiciaire ainsi que par tous les fonctionnaires et agents de l'Etat et des collectivités publiques commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre chargé de l'urbanisme suivant l'autorité dont ils relèvent et assermentés. Les procès-verbaux dressés par ces agents font foi jusqu'à preuve du contraire. ".

4. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier de la comparaison entre les dossiers de permis de construire de 2007 et 2015, que le mur et l'espace jardin accessible depuis le niveau R+1 étaient prévus par le permis de construire délivré le 13 mars 2007, qui est devenu définitif, et que le projet ayant donné lieu au permis de construire tacite obtenu le 6 octobre 2015 comporte une implantation de ce mur identique à celle du permis de construire du 13 mars 2007. Si l'implantation de ce mur méconnaît les dispositions de l'article 6 de la zone UVD du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Laurent-du-Var relatives à l'implantation des constructions par rapport aux voies publiques ou privées, la circonstance qu'une construction existante n'est pas conforme à une ou plusieurs dispositions d'un plan d'occupation des sols régulièrement approuvé ne s'oppose pas, en l'absence de dispositions de ce plan spécialement applicables à la modification des immeubles existants, à la délivrance ultérieure d'un permis de construire s'il s'agit de travaux qui, ou bien doivent rendre l'immeuble plus conforme aux dispositions réglementaires méconnues, ou bien sont étrangers à ces dispositions. En l'absence de modification de l'implantation du mur, les travaux en litige sont étrangers à la règle méconnue. La méconnaissance des règles d'implantation des constructions par rapport aux voies publiques et privées n'était pas dès lors de nature à entacher d'illégalité le permis de construire tacite obtenu par la requérante.

5. Aux termes de l'article 11 de la zone UVD du même règlement : " Aspect extérieur des constructions et aménagement de leurs abords : (...) d) dispositions applicables aux murs de soutènement : Un mur de soutènement doit impérativement servir à retenir un volume de terre naturelle dont la profondeur de maintien est inférieure à 3 mètres. (...) ". Pour les mêmes raisons que celles indiquées au point 4, la méconnaissance alléguée de ces dispositions n'était pas non plus de nature à entacher d'illégalité le permis de construire tacite du 6 octobre 2015.

6. En l'absence d'illégalité du permis de construire obtenu par la SCI JKL le 6 octobre 2015, le préfet des Alpes-Maritimes ne pouvait pas légalement procéder à son retrait. La requérante est fondée dès lors à soutenir que l'arrêté attaqué portant retrait de ce permis de construire est entaché d'illégalité.

7. Il résulte de ce qui précède que la SCI JKL est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande et à demander l'annulation de ce jugement et de l'arrêté du 12 novembre 2015.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

9. Du fait de l'annulation de l'arrêté qui a retiré le permis de construire tacite obtenu par la SCI JKL le 6 octobre 2015, ce permis de construire est réputé ne pas avoir été retiré. Les conclusions de la SCI JKL aux fins de voir juger qu'elle est bénéficiaire d'une autorisation tacite du 6 octobre 2015 et subsidiairement qu'il soit enjoint à l'Etat de procéder à une nouvelle instruction de sa demande de permis de construire sont dépourvues d'objet.

D É C I D E :

Article 1er : L'arrêté du 12 novembre 2015 du préfet des Alpes-Maritimes et le jugement du tribunal administratif de Nice du 31 mai 2018 sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à la SCI J.K.L la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI JKL et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes et au maire de la commune de Saint-Laurent-du-Var.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2020, où siégeaient :

- M. Poujade, président,

- M. B..., président assesseur,

- Mme Gougot, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 novembre 2020.

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N° 18MA03205

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18MA03205
Date de la décision : 19/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation locale. POS ou PLU (voir supra : Plans d`aménagement et d`urbanisme).


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : SCP ASTRUC et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 01/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-11-19;18ma03205 ?
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