Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 6 janvier 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par le jugement n° 1602718 du 22 mars 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 août 2018, M. C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 22 mars 2018 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 janvier 2016 du préfet de l'Hérault ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard dès la notification du présent arrêt, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 la somme de 1 200 euros, qui sera versée à Me A... en contrepartie de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Il soutient que :
- la commission du titre de séjour aurait dû être préalablement consultée en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- ce refus de titre de séjour en litige méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision en litige est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 mars 2019, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 20 juin 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., de nationalité marocaine, est entré en France selon ses dires en 2007 sous couvert d'un titre de séjour délivré par les autorités espagnoles, renouvelé jusqu'au 18 octobre 2018. Il a demandé le 22 décembre 2015 au préfet de l'Hérault un titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par arrêté en litige du 6 janvier 2016, le préfet a refusé de lui délivrer ce titre de séjour et l'a informé qu'en cas de maintien sur le territoire français, il était susceptible d'être remis aux autorités espagnoles. M. C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de ce refus de titre de séjour. Le requérant relève appel du jugement du 22 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...). ". Il appartient par ailleurs au préfet, saisi d'une demande de titre de séjour par un étranger en vue de régulariser sa situation, de vérifier que la décision de refus qu'il envisage de prendre ne comporte pas de conséquences d'une gravité exceptionnelle sur la situation personnelle de l'intéressé et n'est pas ainsi entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
3. Le requérant affirme être entré en France en 2005 ou en 2007 selon ses déclarations successives, muni d'une carte de séjour espagnole ne l'autorisant pas à séjourner durablement en France. Il s'est vu délivrer le 21 octobre 2008 par les autorités espagnoles un titre de séjour valable jusqu'au 18 octobre 2013 renouvelé jusqu'au 18 octobre 2018. Il a fait l'objet en France d'un premier refus de titre de séjour le 17 octobre 2011 et a été réadmis en Espagne le 25 janvier 2012. Il a fait l'objet le 4 juin 2014 d'un second refus de titre de séjour. S'il soutient résider habituellement en France depuis l'année 2005 ou 2007 selon ses affirmations successives, les pièces qu'il produit, et notamment des relevés bancaires, des ordonnances médicales, des factures téléphoniques ou d'achats, des attestations à l'aide médicales d'Etat (AME), un bulletin de paie pour six jours de travail comme ouvrier agricole en avril 2010, une attestation de la MSA du Languedoc accusant réception de la déclaration préalable d'embauche par un employeur non accompagnée du contrat d'embauche allégué du requérant en durée indéterminée et une " attestation employeur " du 20 mai 2015 du mandataire judiciaire mentionnant un versement mensuel de salaires à M. C... pour la seule période du 1er décembre 2012 au 1er novembre 2013, si elles peuvent attester d'une présence ponctuelle en France, sont insuffisantes pour établir sa résidence habituelle depuis cette date, alors qu'au surplus, il ne conteste pas l'exécution de sa réadmission en Espagne en janvier 2012 pendant cette période. Sa femme, qu'il a épousée en 2001 au Maroc, titulaire d'un certificat de résidence espagnole, a fait également l'objet d'un refus de titre de séjour par arrêté du 7 janvier 2013 du préfet et est, elle aussi, en situation irrégulière sur le territoire français. La circonstance qu'à la date de la décision en litige, ses trois enfants, nés au Maroc et en Espagne, seraient scolarisés en France, n'ouvre pas, par elle-même, droit au séjour. Le requérant n'invoque aucune circonstance particulière sérieuse qui ferait obstacle à ce que sa famille se reconstitue en Espagne où il pourrait résider régulièrement avec sa famille et où ses enfants pourraient poursuivre une scolarité normale, ou au Maroc où résident au surplus sa mère et cinq membres de sa fratrie. Les dispositions précitées ne consacrent pas un droit aux étrangers de choisir librement le pays où établir leur vie familiale. Le requérant ne justifie d'aucune intégration sociale en France. Dans ces conditions, M. C... n'établit pas avoir constitué le centre de ses intérêts privés et familiaux en France. Par suite, le préfet, qui ne s'est pas borné à tenir compte du titre de séjour espagnol délivré à M. C... pour estimer que la résidence habituelle du requérant était fixée en Espagne, n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de l'admettre au séjour au titre de sa vie privée et familiale. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché le refus de titre de séjour litigieux d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.
4. En deuxième lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 de ce code : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ". Ainsi qu'il a été dit au point 3, M. C... ne justifie pas par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Hérault était tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
5. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., au ministre de l'intérieur et à Me A....
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 27 octobre 2020, où siégeaient :
- M. Chazan, président de chambre,
- Mme Simon, président assesseur,
- Mme D..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 10 novembre 2020.
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N° 18MA03750