Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel négatif délivré par le maire de Cabriès le 11 janvier 2016 et la décision de rejet de son recours gracieux du 21 avril 2016.
Par un jugement n° 1604784 1604787 du 14 mai 2018, le tribunal administratif de Marseille a fait droit à sa demande.
Procédure devant la Cour :
I°) Par une requête enregistrée sous le numéro 18MA03257 le 13 juillet 2018 la commune de Cabriès, représentée par la SCP Bérenger Blanc Burtez-Doucède et associés, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 14 mai 2018 ;
2°) de mettre à la charge de M. E... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier ;
- le projet méconnait les dispositions de l'article NB 2 du règlement du plan d'occupation des sols ;
- le projet méconnait les dispositions de l'article NB 4 du règlement du plan d'occupation des sols.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 mars 2019, M. E..., représenté par Me A... et Me C..., conclut au rejet de la requête, à l'annulation du certificat d'urbanisme opérationnel négatif délivré par le maire de Cabriès le 11 janvier 2016 et de la décision de rejet de son recours gracieux du 21 avril 2016, et à ce que soit mise à la charge de la commune de Cabriès la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens sont infondés.
II°) Par une requête enregistrée sous le numéro 18MA03262 le 13 juillet 2018 la commune de Cabriès, représentée par la SCP Bérenger Blanc Burtez-Doucède et associés, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 14 mai 2018 ;
2°) de mettre à la charge de M. E... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier ;
- le projet méconnait les dispositions de l'article NB 2 du règlement du plan d'occupation des sols ;
- le projet méconnait les dispositions de l'article NB 4 du règlement du plan d'occupation des sols.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 mars 2019, M. E..., représenté par Me A... et Me C..., conclut au rejet de la requête, à l'annulation du certificat d'urbanisme opérationnel négatif délivré par le maire de Cabriès le 11 janvier 2016 et de la décision de rejet de son recours gracieux du 21 avril 2016, et à ce que soit mise à la charge de la commune de Cabriès la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Baizet, premier conseiller.
- les conclusions de Mme Giocanti rapporteur public,
- les observations de Me D... de la SCP Bérenger Blanc Burtez-Doucède et associés, représentant la commune de Cabriès et Me C... représentant M. E....
Considérant ce qui suit :
1. La commune de Cabriès relève appel du jugement du 14 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé le certificat d'urbanisme opérationnel négatif délivré par le maire de Cabriès à M. E... le 11 janvier 2016 et la décision de rejet du recours gracieux de celui-ci du 21 avril 2016.
Sur la jonction :
2. Les requêtes n° 18MA03257 et 18MA03262 présentées pour la commune de Cabriès présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Par suite, il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt.
Sur la régularité du jugement :
3. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".
4. Il ressort de la minute du jugement produite avec les pièces du dossier de première instance que cette décision a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier. Elle est ainsi conforme aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifié à la commune de Cabriès ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur sa régularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
5. En premier lieu et d'une part, l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme dispose que : " Constitue un lotissement la division en propriété ou en jouissance d'une unité foncière ou de plusieurs unités foncières contiguës ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis ". Une unité foncière est un îlot de propriété d'un seul tenant, composé d'une parcelle ou d'un ensemble de parcelles appartenant à un même propriétaire ou à la même indivision.
6. D'autre part, le chapitre V du plan d'occupation des sols de Cabriès relatif à la zone NB précise que " l'affectation principale est l'urbanisation diffuse à usage d'habitation où les lotissements de plus d'un lot sont interdits. ". L'article NB2 du règlement du POS autorise " les constructions à usage d'habitation à raison d'une construction à cet usage ne comportant qu'un seul logement par terrain d'un seul tenant ".
7. En l'espèce, le maire de Cabriès a délivré un certificat d'urbanisme négatif à M. E... au motif que l'unité foncière constituée par les parcelles cadastrées CA n° 21, 22, 23 et 27 comportait déjà une habitation, et que, par suite, la construction d'une seconde maison individuelle méconnaîtrait les dispositions de l'article NB2 du règlement du POS. Le maire de Cabriès a également précisé, dans sa réponse au recours gracieux du pétitionnaire, que le plan d'occupation des sols interdisait les lotissements de plus d'un lot dans la zone NB. Toutefois, les auteurs du règlement d'un plan d'occupation des sols n'ont pas compétence pour limiter la faculté reconnue aux propriétaires de procéder à la division d'une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments dans les conditions prévues à l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme ou pour en interdire par principe l'exercice. Dans ces conditions, et comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, le maire ne pouvait faire application des dispositions illégales du règlement du plan d'occupation des sols relatives à la limitation du principe du lotissement pour refuser de délivrer à M. E... les certificats d'urbanisme demandés.
8. En deuxième lieu, et d'une part, aux termes de l'article L. 174-3 du code de l'urbanisme, dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée : " Lorsqu'une procédure de révision du plan d'occupation des sols a été engagée avant le 31 décembre 2015, cette procédure peut être menée à terme en application des articles L. 123-1 et suivants, dans leur rédaction issue de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, sous réserve d'être achevée au plus tard le 26 mars 2017. Les dispositions du plan d'occupation des sols restent en vigueur jusqu'à l'approbation du plan local d'urbanisme et au plus tard jusqu'à cette dernière date. " Aux termes de l'article L. 174-4 du même code : " Les plans d'occupation des sols maintenus provisoirement en vigueur en application des dispositions du présent chapitre ont les mêmes effets que les plans locaux d'urbanisme. / Ils sont soumis au régime juridique des plans locaux d'urbanisme défini par le titre V du présent livre. / Les dispositions de l'article L. 123-1 dans leur rédaction antérieure au 15 décembre 2000 leur demeurent applicables. ". Aux termes de l'article R. 123-21 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue du décret n° 99-266 du 1er avril 1999 : " (...) 2° Le règlement peut, en outre : a) Edicter les prescriptions relatives à l'accès, à la desserte, à l'équipement en réseaux divers et, le cas échéant, aux dimensions et à la surface des terrains (...) ".
9. Il résulte de ces dispositions que la commune de Cabriès ayant engagé une procédure de révision de son plan d'occupation des sols et ayant finalement approuvé son plan local d'urbanisme le 23 mars 2017, le plan d'occupation des sols est resté en vigueur jusqu'à cette dernière date, nonobstant la règle de caducité énoncée à l'article L. 174-1 du code de l'urbanisme et que, ainsi que le prévoient les termes mêmes de l'alinéa 3 de l'article L. 174-4 du même code, son règlement était alors soumis, jusqu'au 23 mars 2017, aux dispositions de l'article L. 123-1 dans leur rédaction antérieure au 15 décembre 2000. Dès lors, à la date de la décision attaquée, le règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Cabriès était soumis aux dispositions précitées de l'article R. 123-21 du code de l'urbanisme en vertu duquel ses prescriptions pouvaient réglementer les dimensions et la surface des terrains.
10. D'autre part et toutefois, si le plan d'occupation des sols peut fixer au titre de l'article L. 123-1, dans sa rédaction antérieure à la loi du 13 décembre 2000, des règles relatives à la superficie minimale des terrains, les dispositions de cet article ne permettent pas que de telles règles aient pour objet ou pour effet d'interdire au propriétaire d'édifier, si d'autres prescriptions du règlement du plan d'occupation des sols n'y font pas obstacle, plusieurs constructions sur une même unité foncière. En outre, aux termes de l'article R. 151-21 du code de l'urbanisme alors applicable : " Dans le cas d'un lotissement ou dans celui de la construction, sur une unité foncière ou sur plusieurs unités foncières contiguës, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, l'ensemble du projet est apprécié au regard de la totalité des règles édictées par le plan local d'urbanisme, sauf si le règlement de ce plan s'y oppose ".
11. L'article NB 5 du règlement du plan d'occupation des sols de Cabriès alors en vigueur prévoit : " Pour qu'un terrain soit constructible, sa superficie doit être au moins égale à 4 000 m² ". Ces dispositions, qui ont seulement pour objet de fixer la superficie minimale à compter de laquelle une unité foncière est constructible, ne peuvent, par elles-mêmes, interdire l'édification de plusieurs constructions sur un même terrain. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que le règlement du POS applicable s'opposerait à ce que la règle fixée à l'article 5 de la zone NB soit appliquée, conformément aux dispositions de l'article R. 151-21 précitées du code de l'urbanisme, au regard de l'ensemble du projet et non lot par lot. Dans ces conditions, dès lors que le terrain d'assiette présente une superficie de 4026 m² et respecte ainsi la superficie minimale de 4 000 m², le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article NB 5 précité et le maire ne pouvait s'opposer, pour ce motif, au certificat d'urbanisme sollicité.
12. En troisième lieu, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
13. La commune de Cabriès soutient qu'elle pouvait délivrer un certificat d'urbanisme négatif dès lors que la réalisation de la construction est de nature à compromettre la conservation de l'espace boisé classé situé sur le lot B et doit être regardée comme demandant une substitution de motif. Toutefois, la commune n'apporte aucune pièce ni aucune précision sur l'existence et la localisation d'un tel espace boisé classé. Dans ces conditions, la demande de substitution de motif ne peut qu'être écartée.
14. Il résulte de ce qui précède que la commune de Cabriès n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement en litige, le tribunal administratif de Marseille a annulé le certificat d'urbanisme opérationnel négatif en litige.
Sur les frais liés au litige :
15. M. E... n'étant pas partie perdante dans les présentes instances, il y a lieu de rejeter les conclusions de la commune de Cabriès présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la commune de Cabriès la somme globale de 2 000 euros à verser à M. E... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens dans les deux instances.
D É C I D E :
Article 1er : Les requêtes de la commune de Cabriès sont rejetées.
Article 2 : La commune de Cabriès versera à M. E... la somme globale de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Cabriès et à M. B... E....
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2020 où siégeaient :
- M. Poujade, président
- M. Portail, président assesseur,
- Mme Baizet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 octobre 2020
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N° 18MA03257, 18MA03262
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